Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Le Kenya approuve les OGM après 10 ans d'interdiction

8 Octobre 2022 Publié dans #OGM, #Afrique

Le Kenya approuve les OGM après 10 ans d'interdiction

 

Joseph Maina*

 

 

 

 

Le Kenya a approuvé les organismes génétiquement modifiés (OGM) et s'est libéré d'une interdiction vieille de dix ans sur cette technologie, une décision qui pourrait déclencher un changement majeur par les dirigeants du continent vers des solutions de production agricole fondées sur des preuves. Le décor est désormais planté pour que les agriculteurs du pays profitent pleinement des avantages d'une technologie qui, selon les experts, devrait considérablement stimuler la production agricole et améliorer les moyens de subsistance de milliers de personnes à travers les chaînes de valeur.

 

Le lundi 3 octobre 2022, le président nouvellement élu, le Dr William Ruto, a présidé une réunion spéciale de son cabinet ministériel fraîchement nommé, au cours de laquelle une série de résolutions ont été adoptées, ouvrant la voie à la culture et à l'importation d'OGM dans le pays d'Afrique de l'Est.

 

« Le Cabinet a annulé sa décision antérieure du 8 novembre 2012 interdisant la culture en plein air de plantes génétiquement modifiées et l'importation de produits vivriers et d'aliments pour animaux produits par des innovations biotechnologiques, levant ainsi l'interdiction des cultures génétiquement modifiées », peut-on lire dans la dépêche de la réunion du Cabinet convoquée pour évaluer les progrès accomplis dans la réponse à la sécheresse qui sévit actuellement dans le pays.

 

Cette décision a été prise conformément à la recommandation d'un groupe de travail chargé d'examiner les questions relatives aux aliments génétiquement modifiés et à la sécurité alimentaire. Le cabinet a également autorisé l'importation de produits vivriers et d'aliments pour animaux produits grâce à des innovations biotechnologiques. Cette décision marque un changement de politique phénoménal dans le secteur agricole du pays et souligne la détermination du nouveau régime à proposer des solutions scientifiques pour relever les nouveaux défis de la production agricole.

 

La production alimentaire du Kenya a été ralentie par une grave sécheresse qui a ravagé 23 des 47 comtés du pays. Il s'agit de la pire sécheresse depuis 40 ans dans la Corne de l'Afrique, qui a touché au moins 3,1 millions de Kenyans.

 

La production de maïs au Kenya a encore été entravée par la légionnaire d'automne (Fall Army Worm – FAW), un parasite signalé pour la première fois en mars 2017 dans l'ouest du Kenya, qui a fait des ravages en particulier dans les principales régions céréalières considérées comme le grenier du pays.

 

L'approbation des OGM devrait permettre d'accélérer la mise à disposition de maïs GM résistant à des parasites, une fois que leur commercialisation aura été approuvée, et de mettre un terme aux pertes catastrophiques causées en permanence par ce parasite. Les scientifiques ont également recommandé le maïs Bt comme solution à la menace de la légionnaire d'automne au Kenya.

 

Le gouvernement a reconsidéré l'adoption de la biotechnologie pour soutenir sa production agricole après avoir examiné divers rapports d'experts et rapports techniques d'organismes faisant autorité, notamment l'Autorité Nationale de Biosécurité (NBA), l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), l'Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture (FAO), la Food and Drug Administration (FDA) des États-Unis et l'Autorité Européenne de Sécurité des Aliments (EFSA).

 

En effet, cette décision autorise la culture et l'importation de maïs GM blanc, à un moment où le pays connaît une pénurie aiguë de ce produit, alors que les prix de la farine de maïs, aliment de base du pays, montent en flèche.

 

La décision du Kenya fait également suite à une décision du cabinet de décembre 2019 qui a approuvé la commercialisation du cotonnier BT (de Bacillus thuringiensis, la bactérie qui a fourni les gènes de résistance) dans le pays, un type de cotonnier génétiquement améliorée qui résiste au ver de la capsule africain dévastateur. L'approbation de la culture du cotonnier Bt devrait relancer la production des industries textiles, de l'habillement, de l'alimentation animale et de l'huile, autrefois florissantes, dans le but de renforcer le programme d'industrialisation du pays.

 

Le gouvernement kenyan a également identifié des cultures résistantes à la sécheresse comme l'une des mesures permettant au pays de s'adapter au changement climatique, indique la dépêche du cabinet.

 

Avec cette annonce, le président Ruto rejoint une liste croissante de chefs d'État africains qui ont expressément approuvé la biotechnologie moderne et les OGM en particulier comme une solution éprouvée à certains des besoins urgents du continent en matière de sécurité alimentaire. C'est le cas de la Nation ouest-africaine du Sénégal, où le président réélu Macky Sall a signé une nouvelle loi sur la biosécurité le 14 juin 2022 qui a effectivement abrogé la loi de 2009 sur la biosécurité, permettant au Sénégal de tirer le maximum de bénéfices de la biotechnologie moderne.

 

Macky Sall a toujours défendu la science et la technologie comme des outils importants pour améliorer le bien-être du peuple sénégalais et il a reconnu que les OGM peuvent aider à relever les défis actuels qui touchent son pays et le monde entier. Plus récemment, le Forum Ouvert sur la Biotechnologie Agricole (Open Forum on Agricultural Biotechnology – OFAB) a fait de Jakaya Kikwete, président de la Tanzanie à la retraite, l'un des nombreux héros africains de la biotechnologie. M. Kikwete a été récompensé pour son rôle dans la défense des droits des agriculteurs à accéder aux technologies et aux innovations agricoles modernes.

 

La levée de cette interdiction, qui dure depuis dix ans, équivaut au dernier clou du cercueil de la croisade anti-OGM qui a réclamé avec frénésie un Kenya sans OGM. L'interdiction des importations d'OGM décrétée par le Kenya en 2012 reposait sur les conclusions publiées dans une revue par le scientifique français Gilles-Éric Séralini, selon lesquelles le maïs génétiquement modifié provoque des tumeurs chez les rats. Depuis, diverses études européennes ont totalement discrédité les travaux de Séralini.

 

Au milieu d'une faible opposition de la part des sceptiques anti-OGM, un ensemble de parties prenantes, y compris des scientifiques, des leaders agricoles et le grand public, ont salué ce nouveau développement, considéré comme une intervention opportune dans la production agricole défaillante du Kenya, en le citant comme un signe que le président va utiliser les preuves générées par les scientifiques locaux. L'Alliance pour la Science travaille avec d'autres partenaires de plaidoyer dans le pays, l'OFAB et la Fondation Africaine pour la Technologie Agricole (African Agricultural Technology FoundationAATF pour contrer toute désinformation qui pourrait être déclenchée par cette annonce.

 

___________

 

* Source : Kenya approves GMOs after 10-year ban - Alliance for Science (cornell.edu)

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article