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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

L'agro-écologie, un choix, pas une contrainte

2 Mai 2021 , Rédigé par Seppi Publié dans #Agro-écologie

L'agro-écologie, un choix, pas une contrainte

 

Ted Sheely*

 

 

 

 

Voici le nouveau mot à la mode dans le monde de l'agriculture : « agro-écologie ».

 

J'essaierais bien de le définir, mais « agro-écologie » est l'un de ces termes glissants dont la signification change selon le temps, le lieu et l'agenda. Il relie les mots « agriculture » et « écologie » d'une manière censée être fraîche et innovante, mais il est bien trop souvent utilisé pour persuader les populations du monde en développement de rejeter les outils de l'agriculture moderne.

 

Méfiez-vous donc de ce mot à la mode : il peut fonctionner comme une scie circulaire qui réduit le bon sens en sciure.

 

Vous pourriez penser que je suis un fervent défenseur de l'« agro-écologie ». Après tout, je produis du coton créole [Gossypium barbadense] biologique sur 17 % de la superficie de ma ferme californienne, en respectant des règles strictes qui contrôlent la façon dont nous pouvons planter des graines, enrichir le sol et lutter contre les mauvaises herbes.

 

C'est mon choix, et je le fais parce qu'il y a un marché pour ce produit. Le coton biologique de ma ferme soutient une industrie de l'habillement haut de gamme s'adressant à des consommateurs prêts à payer plus cher pour des articles qu'ils estiment meilleurs que ceux fabriqués avec des fibres conventionnelles.

 

Je ne suis pas sûr qu'ils aient raison sur ce point, sauf que je ne me fais pas un devoir de remettre en question les priorités des consommateurs. Si vous voulez du coton biologique, et que vous êtes prêt à payer pour cela, alors je le ferai pousser pour vous.

 

Personnellement, je ne préfère pas le coton biologique aux autres types de coton, y compris le coton conventionnel. Je cultive également ce type de coton standard, qui utilise la technologie GM pour protéger le cotonnier et la capsule contre les mauvaises herbes et les parasites. Il est sans danger de le cultiver dans ma ferme et il est sans danger de porter des vêtements fabriqués avec ce coton.

 

La grande majorité des agriculteurs qui produisent du coton utilisent ces outils. Aux États-Unis, 88 % du coton que nous plantons et récoltons bénéficie de la technologie GM, selon le Département de l'Agriculture. Les agriculteurs d'autres pays ont adopté la culture du coton amélioré GM à des taux similaires.

 

La raison en est simple : il s'agit d'une excellente culture qui produit des quantités abondantes de coton. Vous pouvez dépenser beaucoup d'argent pour des vêtements à la mode, mais grâce au coton génétiquement modifié, les vêtements sont plus abordables pour tout le monde, y compris pour les pauvres des pays en développement et des pays développés.

 

Grâce à la technologie GM, aux outils de protection des plantes et à bien d'autres choses encore, les agriculteurs produisent plus de nourriture et de coton sur moins de terres que jamais auparavant. Il s'agit d'une incroyable aubaine pour l'humanité et l'environnement. Jamais auparavant dans l'histoire, il n'a été aussi facile pour nous de répondre aux besoins fondamentaux des gens partout dans le monde. En continuant à tirer parti de la science et à développer de nouvelles technologies, nous allons améliorer ce qui est déjà une bonne situation.

 

Malheureusement, de nombreux défenseurs de l'« agro-écologie » menacent cette opportunité. Ils cherchent à persuader les agriculteurs et les régulateurs du monde en développement de rejeter les technologies du XXIe siècle qui sont essentielles à la sécurité alimentaire et à la résilience économique.

 

L'agriculture biologique peut avoir ses vertus et mériter de s'épanouir dans l'étonnante diversité de l'agriculture moderne, mais elle ne peut pas nourrir et habiller le monde. Elle n'est tout simplement pas durable.

 

L'agriculteur rwandais Pacifique Nshimiyimana a observé « le mouvement agro-écologique poussé par les ONG occidentales opérant en Afrique » et son hostilité aux « semences améliorées et à des technologies modernes de lutte contre les parasites et maladies, y compris les outils d'édition génétique ». Il comprend comment le succès de ce mouvement dévasterait les agriculteurs et nuirait aux consommateurs : « Il est erroné de laisser les Africains à la merci de l'agriculture biologique, ce qui est presque impossible dans un climat tropical où les criquets, les légionnaires d'automne, la mineuse sud-américaine de la tomate (Tuta absoluta) et d'autres parasites ravagent les cultures. »

 

Rappelons l'une des cruelles ironies de l'agro-écologie : ses plus grands partisans viennent du monde développé, où les gens n'ont généralement pas à s'inquiéter de savoir comment ils vont nourrir et habiller leur famille. Ils ne seront pas les victimes de leurs propres mauvais conseils. Au contraire, les habitants des pays en développement paieront le prix de la baisse de la production agricole.

 

M. Nassib Mugwanya, un chercheur ougandais qui prépare son doctorat à l'Université de Caroline du Nord, a qualifié l'agro-écologie d'« impasse » pour l'Afrique et prévient qu'elle va « enfermer les agriculteurs dans la pauvreté issue de leurs pratiques agricoles improductives actuelles ».

 

Je suis un défenseur du choix, pas de la contrainte. Si les agriculteurs veulent adopter l'agro-écologie, pour quelque raison que ce soit, alors ils devraient jouir de cette liberté. Si les consommateurs veulent acheter des aliments ou des vêtements fabriqués selon des méthodes biologiques ou agro-écologiques rigoureuses, même si cela coûte plus cher, alors le marché peut et va répondre à leur demande.

 

L'agro-écologie peut être une bonne option pour ceux qui le souhaitent, mais nous ne pouvons pas nous permettre d'en faire un mode de vie avec une définition aussi étroite.

 

_____________

 

Ted Sheely, agriculteur, vallée de San Joaquin, Californie, USA

 

Ted produit des laitues, du coton, des tomates, des oignons, des pistaches, des raisins de cuve et de l'ail dans une ferme familiale. Président de Horizon Growers (pistaches). Intérêt et investissement de longue date dans la disponibilité et la qualité de l'eau. A reçu le prix Innovative Water Conservation Award.

 

Source : Agroecology as a Choice, Not Coercion – Global Farmer Network

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