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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

L'élevage d'animaux de rente – bon pour tous ?!!

14 Août 2022 Publié dans #Elevage

L'élevage d'animaux de rente – bon pour tous ?!!

 

Arnold Krämer chez Willi l'agriculteur*

 

 

 

 

M. Arnold Krämer a participé à une conférence de l'Académie Évangélique de Hofgeismar sur le thème de l'élevage d'animaux de rente.

 

 

Les gens aiment généralement rester dans un environnement d'opinion familier. Ils y communiquent quasiment dans une bulle qui est rarement perturbée par l'extérieur. C'est dans une telle bulle, plutôt étrangère pour moi, que je me suis rendu : à la conférence de l'Académie Évangélique de Hofgeismar sur le thème « L'élevage agricole d'animaux de rente – un bien pour tous ». Mais un programme prometteur, du 22 au 24 juillet, m'a interpellé, même si ces organisations, entre autres, étaient citées comme co-organisatrices :

 

  1. Bund gegen Missbrauch der Tiere e.V. (Association contre les abus envers les animaux)

  2. Tierärzte für verantwortbare Landwirtschaft e.V. (Vétérinaires pour une agriculture responsable)

  3. Déléguée à la protection des animaux du Land de Bade-Wurtemberg

  4. Deutsche Juristische Gesellschaft für Tierschutzrecht e.V. (Société juridique allemande pour le droit de la protection des animaux e.V.).

 

Outre les participants issus de différents groupes sociaux et professionnels, l'apport technique de la manifestation a été fourni par les praticiens de la chaîne de création de valeur, de l'agriculteur à la grande distribution, dans le cadre de trois groupes de travail et de plusieurs tables rondes, ainsi que par les personnes suivantes :

 

 

1. Mme Dr Heincke, intervenante de l'Église évangélique de Hesse-Nassau et agricultrice de formation.

 

Elle a présenté les résultats d'une étude de l'Église évangélique, élaborée entre autres avec l'Association Allemande des Agriculteurs (Deutscher Bauernverband – DBV) mais sans les groupes de défense des droits des animaux (ce qui a été vivement critiqué par certains militants lors de la réunion) et qui a déjà été publiée en 2019.

 

Cet ouvrage complet, qualifié de document d'impulsion, peut être téléchargé en tant que texte EKD 133 sous le titre « Nutztier und Mitgeschöpf! Tierwohl, Ernährungsethik und Nachhaltigkeit aus evangelischer Sicht » (Animaux de ferme et semblables ! Bien-être animal, éthique alimentaire et durabilité d'un point de vue protestant) peut être consulté dans son intégralité ici.

 

Un résumé du texte par l'intervenante est disponible ici.

 

Le point positif est, à mon avis, l'approche large et fondamentale ainsi que l'éclairage du sujet. La faiblesse réside – comme souvent dans des publications comparables – dans la répétition (pourquoi d'ailleurs ?) de reproches globaux et indifférenciés. Exemples :

 

  • L'élevage d'animaux de rente cause des dommages environnementaux de 20 milliards d'euros par an en Allemagne.

     

  • 20 à 30 % de la viande produite finit à la poubelle.

     

  • De nombreuses souffrances animales continuent d'être causées par le surmenage massif, le manque de connaissances ou la brutalité des éleveurs.

 

La conférencière a conclu qu'en Allemagne, nous avons affaire à un problème de luxe en matière de bien-être animal et que, « quand rien ne va plus », le principe suivant s'applique : « Nécessité fait loi ».

 

 

2. M. Hans-Peter Vierhaus, a fait un exposé sur le thème « Le bon droit – entre l'ordonnance sur la protection des animaux et l'ordonnance sur l'élevage des animaux de rente. L'avenir a besoin d'une orientation vers la loi sur la protection des animaux ! »

 

L'avocat spécialisé en droit administratif de Berlin représente le Land de Berlin dans sa demande de contrôle des normes concernant l'élevage de porcs en Allemagne auprès de la Cour Constitutionnelle Fédérale.

 

On estime que les dispositions du décret sur l'élevage des animaux de rente pour les porcs, par exemple en ce qui concerne l'élevage en cases, l'espace disponible, la nature du sol (caillebotis), le type d'alimentation, les possibilités d'occupation insuffisantes, ainsi que les températures et les valeurs limites de gaz nocifs dans l'étable, ne satisfont pas aux exigences de la loi sur la protection des animaux (articles 2, 2a**).

 

L'orateur a expliqué la situation juridique complexe découlant du droit européen et fédéral ainsi que les différentes pondérations des lois, décrets et arrêtés.

 

Le point de départ pour faire statuer la Cour Constitutionnelle Fédérale sur les dispositions très concrètes relatives à l'élevage des porcs n'est pas l'article 20a de la Loi Fondamentale, qui énonce de manière lapidaire : « L'État protège également, de manière responsable pour les générations futures, les bases naturelles de la vie et les animaux... », mais les articles 2 et 2a de la loi sur la protection des animaux, qui fournissent la « nourriture » juridique :

 

Le Ministère Fédéral de l'Agriculture a fait usage pour la première fois en 2001 de l'autorisation qui y est donnée de fixer concrètement des règles d'élevage et a pris des dispositions étendues, notamment pour les porcs, dans le décret sur la protection des animaux dans l'élevage des animaux de rente.

 

Ce n'est qu'en concrétisant la législation sur la protection des animaux dans un décret qu'il était juridiquement possible de déposer une demande de contrôle des normes auprès de la Cour Constitutionnelle Fédérale. C'est aussi pour cette raison que les défenseurs actifs des animaux et les militants de la cause animale exigent des ordonnances concrètes sur la protection des animaux – élevage d'animaux de rente – pour les espèces animales ou les procédés de production qui n'étaient pas « réglementés » jusqu'à présent. La procédure engagée en 2019 prend beaucoup de temps et il ne faut probablement pas s'attendre à une décision avant plusieurs années.

 

Le reproche sévère du juriste à l'égard de la politique est le suivant : « Même le prescripteur actuel (Cem Özdemir), qui omet, contrairement à ses obligations, d'adapter le règlement aux dispositions contraignantes de la Constitution et de la loi (§§ 2, 2a TierSchG) et de le mettre en conformité avec la loi, enfreint le droit en vigueur. »

 

Ma conclusion : le pauvre Land de Berlin dépense beaucoup d'argent des contribuables pour clarifier auprès de la plus haute instance judiciaire des dispositions avec lesquelles, d'une part, les éleveurs agricoles s'accommodent parfois plus mal que bien et que, d'autre part, les défenseurs des droits des animaux considèrent comme totalement insuffisantes. Reste à savoir si la Cour Constitutionnelle Fédérale parviendra à rendre un jugement intelligent, aux conséquences importantes pour l'élaboration future du droit, qui contribuera à la pacification et rendra possible à l'avenir un élevage rentable en Allemagne.

 

 

3. Le publiciste, animateur de réseau et modérateur Hendrik Haase (qui a également discuté avec Bauer Willi) a accompagné la manifestation. Il a commenté et fait part de ses conclusions à la fin.

 

Je vais essayer de reproduire ici quelques-unes de ses déclarations aussi correctement que possible :

 

  • Il considère l'éloignement du citoyen des processus de production de viande et de lait, déploré de toutes parts, comme une chance de parler plus librement de ces sujets.

     

  • Les animaux domestiques sont également des animaux de rente (ils créent des avantages pour l'Homme) et ont besoin d'espace. L'équivalent de la totalité de la production agricole de l'Autriche est utilisée pour les nourrir.

 

  • Pour soulager la souffrance (des animaux), il faut la reconnaître.

 

  • Entre l'être et le devoir-être dans l'élevage, il y a un grand fossé. C'est là que se trouvent les vétérinaires (souvent frustrés, chargés du contrôle, officiels).

 

  • La spécialisation dans les chaînes de valeur favorise l'irresponsabilité.

 

  • On ne peut pas pousser une chaîne. L'effet ne se déploie qu'en tirant.

 

  • Quand un agriculteur s'arrête, il ne recommence pas.

 

 

Les partis politiques ont pris la parole à des moments différents.

 

 

Dès le premier jour, Mme Maria Noichl, membre du SPD au Parlement Européen, a pu exposer les vues de son parti. Dans une rhétorique engagée, elle a abordé tous les problèmes du monde agricole, de l'obligation de réduire les coûts unitaires des exploitations individuelles aux problèmes du commerce mondial des produits agricoles. De son point de vue, les solutions souhaitées se heurtent toujours à l'absence de majorité parlementaire. Elle a par exemple mentionné les avis parfois extrêmement divergents au sein de son groupe socialiste sur des questions concrètes comme l'élevage des lapins en cage (non négligeable dans les pays du sud de l'UE).

 

Le deuxième jour, le nouveau ministre de l'agriculture CDU du Schleswig-Holstein, Werner Schwarz, était invité. Il avait certainement été invité il y a quelques mois en tant qu'acteur éminent de la Commission sur l'Avenir de l'Agriculture (Zukunftskommission Landwirtschaft – ZKL) et représentant de l'Association des Agriculteurs. Il n'a sans doute pas voulu annuler sa participation en dernière minute et, à l'issue de l'événement, il a pu constater que la base des militants des droits des animaux est assez radicale, y compris verbalement. Ses déclarations sur le thème de la transformation de l'élevage étaient décevantes. Il n'y a « pas de vie ». L'argent manque et les plans élaborés à l'époque par la Commission Borchert ne sont plus soutenus par l'Association Allemande de Protection des Animaux et la Fédération Allemande de l'Économie Alimentaire Écologique.

 

Le dernier jour, l'ancienne militante des droits des animaux, Ophelia Nick (Verts), a pris la parole. Membre du Bundestag depuis l'automne dernier seulement, mais déjà Secrétaire d'État Parlementaire au Ministère Fédéral de l'Alimentation et de l'Agriculture (BMEL), elle devait présenter les possibilités politiques de transformation de l'élevage. Elle n'a été concrète qu'en ce qui concerne l'obligation d'étiquetage pour les cinq niveaux d'élevage prévus pour la production porcine. Les attentes de la part des militants des droits des animaux et des défenseurs des animaux présents ont été déçues. Le parti des Verts a manifestement atterri durement dans la réalité juridique et économique au sein de la coalition Ampel (feux tricolores).

 

Les objectifs élevés du parti et les attentes de son électorat se heurtent aux limites du réalisable. De nombreuses dispositions dans différents domaines juridiques et le droit européen supérieur doivent être respectés. Et les Verts le savent désormais : ceux qui font de mauvaises lois doivent constamment les améliorer et sont politiquement, juridiquement et électoralement vulnérables.

 

 

Ma conclusion : Avec tout ce que les éthiciens, les défenseurs des droits des animaux et les protecteurs des animaux exigent des éleveurs d'animaux de rente ainsi que de la politique, laquelle doit y parvenir d'une part par la réglementation et d'autre part par des aides financières, la grande majorité des agriculteurs (et pas seulement les conventionnels) se retrouvent économiquement perdants. La masse des consommateurs n'a que peu la volonté et la capacité de supporter les coûts nettement plus élevés d'un élevage dépassant largement les normes actuelles. En cas de pénurie de l'offre nationale et d'ouverture des frontières, le commerce de détail tentera de répondre à la demande par des offres étrangères.

 

____________

 

 

 

 

* Source : Landwirtschaftliche Nutztierhaltung – Gut für Alle??!! - Bauer Willi

 

** Article 2 de la loi sur la protection des animaux :

 

« Quiconque détient un animal, s'en occupe ou doit s'en occuper,

 

1. doit nourrir et soigner l'animal de manière appropriée, en fonction de son espèce et de ses besoins, et le loger conformément à son comportement ;

 

2. ne doit pas restreindre la possibilité de l'animal de se mouvoir conformément à son espèce de manière à lui causer des douleurs, des souffrances ou des dommages évitables ;

 

3. doit posséder les connaissances et les compétences nécessaires pour nourrir et soigner l'animal de manière appropriée et lui fournir un hébergement adapté à son comportement. »

 

Article 2a (extrait) :

 

« (1) Le Ministère Fédéral de l'Alimentation et de l'Agriculture (ministère fédéral) est habilité à préciser, par voie de règlement et avec l'accord du Bundesrat, dans la mesure où cela est nécessaire pour la protection des animaux, les exigences relatives à l'élevage des animaux visées à l'article 2, et notamment à édicter des dispositions relatives aux exigences suivantes :

 

1. concernant les possibilités de mouvement ou les besoins communautaires des animaux ;

 

2. concernant les locaux, cages, autres lieux et autres installations destinés à l'hébergement des animaux, ainsi que les caractéristiques des dispositifs d'attache, d'alimentation et d'abreuvement ;

 

3. concernant les conditions d'éclairage et de climat intérieur dans lesquelles les animaux sont hébergés :

 

4. concernant les soins, y compris la surveillance des animaux ; à cet égard, le ministère fédéral peut également prescrire que les résultats de la surveillance soient enregistrés, conservés et présentés à l'autorité compétente sur demande ;

 

5. concernant les connaissances et les aptitudes des personnes qui détiennent des animaux, qui s'en occupent ou qui doivent s'en occuper, ainsi que la preuve de ces connaissances et aptitudes ;

 

6. concernant les mesures de sécurité à prendre en cas d'incident technique ou d'incendie. »

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