Sortie du glyphosate : l'Opinion et l'AFP font rapport sur un rapport d'étape parlementaire
Glané sur la toile 437
L'Assemblée Nationale a mis en place une mission d'information commune – commune à deux de ses commissions – sur le suivi de la stratégie de sortie du glyphosate. Sa réunion constitutive a eu lieu le 27 septembre 2018 et elle a désigné son bureau (M. Julien Dive, président, et MM. Jean-Luc Fugit et Jean-Baptiste Moreau, co-rapporteurs).
Un rapport intermédiaire a été établi et sera présenté le mardi 12 novembre 2019 à la Commission du Développement Durable. Il sera présenté à la presse le lendemain.
L'Opinion s'est procuré ce rapport et a produit le vendredi 8 novembre 2019, sous la plume de Mme Emmanuelle Ducros, « Sortie du glyphosate: un rapport parlementaire souligne flou et impasses techniques ».
La lecture de ce bref article laisse entrevoir une lecture tout aussi intéressante du rapport d'étape. Mme Emmanuelle Ducros écrit :
« Il [le monde agricole] doit apprendre à se passer d’un produit qui représente 30 % des herbicides vendus en France, et dont les 11 agences sanitaires mondiales – dont l’Efsa en Europe et l’Anses en France – ne demandent pas le retrait, au motif que ses effets sont bien maîtrisés et connus. Le glyphosate, produit-symbole, ne présente pas de danger autre qu’électoral.
Il faut ajouter : un danger électoral créé par le Président Emmanuel Macron lui-même, par son annonce intempestive d'une sortie du glyphosate destinée sans nul doute à maintenir une pax gubernamentalis avec un Nicolas Hulot qui lui a ensuite chié dans les bottes...
Vers la fin, elle écrit aussi :
« Car aussi incroyable que cela paraisse, la décision de se passer du glyphosate a été prise sans connaître tous ces faits. »
On ose espérer que la mission commune aura pu recueillir les faits, les vrais – pas les élucubrations d'un INRA servile et à-plat-ventriste – et réussi à « remettre de la rationalité scientifique et technique dans ce débat passionné » en privilégiant une « approche par la confiance et non la défiance des agriculteurs qui n’ont eu de cesse que de s’adapter aux demandes des consommateurs ».
En attendant de lire le rapport d'étape de la mission, lisons l'Opinion...
L'AFP – voir par exemple « Supprimer le glyphosate aura un coût élevé, estime un rapport parlementaire » d'Orange.fr – s'est appuyée sur l'Émission politique de France Inter, France Télévisions et le Monde qui avait Mme Élisabeth Borne pour invitée le dimanche 10 novembre 2019.
L'AFP apporte aussi quelques biscuits appéritifs comme :
« La mission parlementaire […] juge "inconscient d'attendre le 31 décembre 2020" pour savoir "quelles situations culturales" devront obligatoirement cesser d'utiliser l'herbicide le 1er janvier 2021 et celles qui pourront bénéficier d'un délai. »
Dommage qu'elle n'ait pas eu le courage de dire que le caprice présidentiel est irresponsable et, pour l'agriculture française, scélérat :
« Frais de main d'œuvre (12,7 millions d'euros d'heures supplémentaires), consommation de carburant multipliée par trois ou quatre (87 millions d'euros), investissements en matériels nouveaux et croissance des dépenses dans d'autres produits chimiques: la suppression de cet herbicide bon marché alourdira les charges des exploitations entre 50 et 150 euros l'hectare, selon le rapport.
Les coûts de production du blé augmenteraient de 10 euros la tonne. Les techniques alternatives de désherbage (passages supplémentaires de tracteurs et de machines) émettraient aussi 226.000 tonnes de CO2 supplémentaires, selon l'association générale des producteurs de céréales AGPB citée dans le rapport. »
Ce qui choque aussi, ce sont les propos de Mme Élisabeth Borne :
« […] Elisabeth Borne, a affirmé que le gouvernement "reste résolu à sortir du glyphosate. Je confirme que l'objectif est bien de sortir de l'essentiel des usages au 1er janvier 2021, et de tous les usages au 1er janvier 2023" [...]. »
« ...reste résolu... » ? N'est-ce pas l'admission du fait que c'est une connerie, qu'on en est conscient et que, malgré cela, on a l'intention de la faire ?
Mme Élisabeth Borne est pourtant confrontée à un rapport parlementaire qui lui indique – à elle et au gouvernement – qu'il y a des situations où le glyphosate est indispensable. Par exemple :
« Selon l'institut technique Arvalis, cité dans le rapport, "l'interdiction du glyphosate déstabiliserait [certaines] exploitations concernées au point de menacer leur survie". »
Sont aussi menacées des filières comme les semences, le lin ou :
« celle de légumes frais et de conserve cultivés en plein champ (203.560 hectares) qui ne peut se permettre le moindre datura toxique, une plante qui pousse aux abords des champs et peut contaminer les moissons. »
Ne croyez surtout pas que ces constats sont nouveaux. Ah, si l'INRA avait été honnête (son tableau récapitulatif – ci-dessous – contredisait pourtant clairement les propos lénifiants de son rapport)...
On tombe enfin des nues quand on lit :
« Pour Mme Borne, "ce rapport est intéressant car il pointe que ce n'est pas en claquant des doigts qu'on décide comme cela qu'on arrête le glyphosate".
"Je pense qu'on a des premières filières qui pourront le faire sans doute plus rapidement que d'autres. Le président de la République l'avait dit, on souhaite avoir la première viticulture zéro glyphosate et je pense qu'ils sont en train d'agir pour que ce soit le cas", a-t-elle précisé.
Claquer du doigt (et penser que d'autres agissent), n'est-ce pas ce qu'ils font ? Tout ça pour un caprice ?