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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Étiquetage des OGM – pas aussi mauvais [aux États-Unis] que je pensais

18 Août 2018 , Rédigé par Seppi Publié dans #OGM, #Alimentation

Étiquetage des OGM – pas aussi mauvais [aux États-Unis] que je pensais

 

Jayson Lusk*

 

 

Science Advances (la version en accès libre de Science Magazine) vient de publier un article que j'ai co-écrit avec Jane Kolodinsky de l'Université du Vermont. Je soupçonne que les résultats de l'article pourraient faire se lever quelques sourcils, car nous constatons que l'opposition aux OGM dans le Vermont a chuté par rapport à celle dans le reste des États-Unis après que l'étiquetage obligatoire a été adopté dans cet État.

 

Un peu de contexte peut être utile ici. Il y a plusieurs années, j'étais fermement dans le camp qui pensait que l'imposition d'un étiquetage obligatoire amènerait les gens à s'inquiéter davantage des OGM parce que cela signalerait que la technologie n'était pas sécuritaire. Des érudits éminents tels que Cass Sunstein ont soutenu la même chose. Il y a quelques années, Marco Costanigro et moi avons mis cette hypothèse à l'épreuve dans un article publié par Food Policy, et nous avons trouvé peu de preuves (dans une série d'expériences basées sur des enquêtes) que l'étiquetage en tant que tel n'a pas augmenté ou diminué l'aversion aux OGM. Donc, je suis devenu moins convaincu que cet argument particulier contre l'étiquetage obligatoire des OGM était valide, mais je n'étais toujours pas sûr.

 

Puis, l'été dernier, lors des réunions annuelles de l'Association de l'Agriculture et de l'Économie Appliquée (AAEA), j'ai vu Jane présenter un article fondé sur des données d'enquête qu'elle avait recueillies au Vermont avant et après la mise en place des étiquettes obligatoires. Ses données suggèrent que l'opposition aux OGM a diminué plus rapidement après la mise en place de l'étiquetage obligatoire. Malgré mes conclusions dans Food Policy, je suis resté incertain, et Jane et moi avons un peu hésité sur la robustesse de ses conclusions.

 

J'avais sufisamment discuté avec Jane pour savoir que nous avions des tendances philosophiques différentes quant à l'opportunité des OGM, mais c'était une question empirique, alors nous avons mis nos différences de côté et décidé de joindre nos données et de mettre l'hypothèse à l'épreuve. Grâce à l'Enquête sur la Demande Alimentaire (FooDS), j'avais recueilli des données nationales sur les préoccupations des consommateurs au sujet des OGM, et j'ai suggéré que nous combinions nos deux séries de données et faisions un véritable test de « différence de différence » : la différence entre le niveau des inquiétudes parmi les consommateurs du Vermont et ce qui a été trouvé pour les États-Unis a-t-elle augmenté ou diminué après l'adoption de l'étiquetage obligatoire dans le Vermont ?

 

Voici le résultat de notre article dans Science Advances :

 

« Cette recherche vise à contribuer à résoudre ce problème en utilisant un ensemble de données contenant plus de 7.800 observations mesurant les niveaux d'opposition dans un groupe témoin national par rapport aux niveaux du Vermont, le seul État américain à avoir mis en place l'étiquetage obligatoire des aliments génétiquement modifiés. Les estimations de la différence dans la différence d'opposition aux aliments GM avant et après l'étiquetage obligatoire montrent que la politique d'étiquetage a permis de réduire de 19 % l'opposition aux aliments transgéniques. Les résultats aident à donner un aperçu de la psychologie de la perception des risques des consommateurs qui peut être utilisé pour communiquer sur les avantages et les risques de la technologie de génie génétique avec le public. »

 

Une mise en garde importante s'impose ici. Notre résultat ne suggère PAS que les gens approuveront soudainement les OGM une fois que l'étiquetage obligatoire sera en place. Au contraire, nos résultats suggèrent que les gens seront un peu moins opposés qu'ils ne l'étaient avant l'étiquetage. Je mentionne cela parce que dans la foulée de mon article avec Marco dans Food Policy, l'interprétation des résultats par les médias (comme celle du comité de rédaction du New York Times) pourrait être interprétée comme suggérant que l'imposition d'un étiquetage obligatoire ne causerait pas de préjudice économique. Cela peut être vrai, ou pas. Mais, cette nouvelle étude suggère que l'étiquetage en tant que tel peut en fait réduire l'opposition.

 

C'était génial de travailler avec Jane sur ce projet, et pour moi c'était une bonne leçon de tester vos croyances, particulièrement quand il y a des raisons théoriques qui pourraient soutenir le point de vue opposé.

 

Je vais terminer avec un graphique clé du document.

 

 

________________

 

* Jayson Lusk est un économiste de l'agriculture et de l'alimentation. Il est actuellement professeur distingué et chef du Département de l'Économie Agricole de l'Université de Purdue.

 

Source : http://jaysonlusk.com/blog/2018/6/25/gmo-labels-not-as-bad-as-i-thought

 

 

Ma note : Article intéressant (c'est bien pour cela que je le publie...), mais quelle est la cause réelle de la baisse des préoccupations au Vermont ? L'étiquetage en tant que tel, ou le simple fait que la pression activiste et médiatique a diminué ?

 

Ou encore le fait qu'ayant obtenu une sorte de jouet, ceux qui le voulaient a priori s'en sont désintéressé ?

 

En France, nous avons un étiquetage « sans OGM » et, surtout « nourri sans OGM » pour les produits animaux, en particulier chez certains distributeurs qui se sont investis dans l'anti-OGMisme (y compris en finançant généreusement une « infameuse » étude sur des rats). Cela a-t-il changé les habitudes d'achat et de consommation ? Et les attitudes vis-a-vis des OGM ?

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