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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Nutri-Score : la promotion par le mensonge (ici aux USA)

13 Avril 2024 Publié dans #Nutri-score, #Activisme

Nutri-Score : la promotion par le mensonge (ici aux USA)

 

 

Le Nutri-Score, tel que ses concepteurs souhaitent le voir évoluer... sus aux aliments « ultra-transformés » !

 

 

Il m'arrive de butiner – rarement, certes – sur le blog de Mme Marion Nestlé, « Food Politics ».

 

Une de ses récentes livraisons est « An update on Nutri-Score: despite food industry opposition, it’s doing well » (le point sur Nutri-Score : malgré l'opposition de l'industrie alimentaire, il se porte bien).

 

Le titre anglais est quelque peu ambigu « food industry opposition » se réfère-t-il à une opposition en bloc ou provenant de certains secteurs ? Linguistiquement, la balance penche pour la première hypothèse... évidemment fausse.

 

Mme Marion Nestle cite ensuite le Washington Post et Fortune. Et elle traverse l'Atlantique :

 

« Cela me fait penser qu'il est temps de faire le point sur ce qui se passe en Europe avec le Nutri-Score. J'ai déjà écrit sur ce système, plus récemment ici et sur les combats de son fondateur, Serge Hercberg, avec l'industrie alimentaire ici.

 

[…]

 

L'industrie alimentaire le déteste. Par exemple, un article rédigé par des auteurs ayant des liens avec l'industrie affirme qu'il n'existe aucune preuve indépendante de la valeur du Nutri-Score. Cela a incité Hercberg et al. à réfuter ces arguments»

 

Nous avons évoqué ces publications dans « Le Nutri-Score et les biais de publication – lire : "science" orientée ».

 

La première, c'est « Publication bias and Nutri-Score: A complete literature review of the substantiation of the effectiveness of the front-of-pack logo Nutri-Score » (biais de publication et Nutri-Score : une revue complète de la littérature sur la justification de l'efficacité du logo Nutri-Score sur la face avant des emballages) de Stephan Peters et Hans Verhagen.

 

Il est permis de penser que prétendre que cette étude « affirme qu'il n'existe aucune preuve indépendante de la valeur du Nutri-Score » (c'est nous qui graissons) est plutôt audacieux. Parmi les points forts du résumé, il y a : « Il n'existe aucune preuve en vie réelle d'un quelconque effet bénéfique du Nutri-Score sur l'algorithme multi-nutriments FSA-NPS » et « Il n'existe pas de preuves scientifiques suffisantes pour soutenir l'utilisation du Nutri-Score en tant qu'outil de santé publique efficace ».

 

C'est peut-être péché véniel devant ceci :

 

« [...] le soutien au Nutri-Score ne cesse de croître. Des auteurs non liés au Nutri-Score recommandent son adoption par les 27 pays de l'Union Européenne plutôt que d'autres types d'étiquetage. Voir : Establishing an EU-wide front-of-pack nutrition label : Review of options and model-based evaluation. Obesity Reviews, 07 février 2024. https://doi.org/10.1111/obr.13719 »

 

Voici le résumé de cet article (découpé) qui analyse la mise en place d'un étiquetage nutritionnel à l'échelle de l'UE sur le devant des emballages. Il est de Marion Devaux, Alexandra Aldea, Aliénor Lerouge, Sabine Vuik, Michele Cecchini, une équipe de l'OCDE (mais n'écrivant pas pour le compte de cette organisation) :

 

« Cet article examine l'efficacité de quatre types d'étiquettes nutritionnelles sur le devant des emballages (FoPL) pour influencer les achats de calories. Les quatre types d'étiquetage nutritionnel sont prêts à être mis en œuvre de manière unifiée dans les pays européens.

 

En outre, cette étude étend son analyse à l'évaluation de l'impact de l'adoption volontaire de ces étiquettes dans les 27 pays de l'UE.

 

Le Nutri-Score présente un potentiel plus élevé que les autres FoPL en termes de résultats positifs pour la santé et l'économie. Dans l'ensemble des pays de l'UE, le Nutri-Score devrait permettre d'éviter près de deux millions de cas de maladies non transmissibles, au total, entre 2023 et 2050.

 

Keyhole a des effets d'une ampleur similaire, mais sans signification statistique.

 

Le Nutri-Repère a des effets moindres, tandis que le Nutri-Couleurs a des effets non significatifs.

 

Le Nutri-Score devrait réduire de manière significative les dépenses de santé annuelles de 0,05 %, tandis que les autres labels ont des effets négligeables.

 

En réduisant les cas de maladie, les FoPL ont le potentiel d'améliorer l'emploi et la productivité au travail.

 

Le Nutri-Score surpasse les autres labels avec un gain annuel estimé à 10,6 équivalents temps plein pour 100.000 personnes en âge de travailler dans l'ensemble des pays de l'UE.

 

Dans l'ensemble, la mise en œuvre obligatoire de l'un des quatre labels aurait des effets plus importants que ceux obtenus dans le cadre d'une mise en œuvre volontaire, ce qui permet d'étayer la proposition législative relative à un système d'étiquetage nutritionnel à l'échelle de l'Union européenne. »

 

On peut gloser sur ce résumé – sachant par ailleurs que le Nutri-Score fait l'objet d'un véritable forcing. Ainsi, par exemple, une réduction des dépenses annuelles de 0,05 % pour le Nutri-Score est-elle vraiment significative et permet-elle de considérer que l'effet des autres est négligeable ?

 

Cela conforte à notre sens le constat de Peters et Verhagen.

 

Mais il y a plus important dans le cadre de ce billet : où les auteurs ont-ils recommandé l'adoption d'un étiquetage et, plus particulièrement, du Nutri-Score ?

 

Le Nutri-Score est/serait aussi soutenu par le Centre International de Recherche sur le Cancer.

 

 

 

Mais cette sorte d'infomercial s'ouvre sur un pavé citant Mme Mélanie Dechasaux :

 

« Le label Nutri-Score est un outil qui est issu de la recherche et qui traduit de manière simple les données sur la composition nutritionnelle, sur la base des preuves solides actuellement disponibles, pour guider les consommateurs vers des choix alimentaires plus sains. »

 

Mme Mélanie Touvier a aussi droit à son pavé :

 

« Pour maximiser son impact sur la santé publique et contribuer à réduire efficacement les maladies chroniques, le label Nutri-Score, validé scientifiquement, devrait être apposé de manière obligatoire sur tous les aliments en Europe, et ce pour plus de transparence pour les citoyens. »

 

Mélanie Dechasaux ? Mathilde Touvier ? L'équipe du Nutri-Score...

 

D'ailleurs les remerciements à la fin de l'infomercial sont clairs.

 

 

 

 

C'est ainsi que fonctionne, au moins en partie, la promotion du Nutri-Score. Y compris aux États-Unis d'Amérique. Par une sorte de club (pour employer un terme sans connotation péjorative).

 

Un club aussi affligé d'un extraordinaire parti-pris anti-industrie illustré par la conclusion de Mme Marion Nestle (ainsi que par l'évolution du Nutri-Score souhaitée par ses concepteurs) :

 

« L'industrie alimentaire peut se plaindre autant qu'elle veut, je suppose que le Nutri-Score est là pour rester. Il ne prend peut-être pas en compte tous les aliments ultra-transformés, mais il s'en rapproche, et la révision de sa conception devrait contribuer à résoudre ce problème»

 

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