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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

L'impact des élections en Indonésie (et ailleurs)

13 Mars 2024 Publié dans #Commerce

L'impact des élections en Indonésie (et ailleurs)

 

William El Bulo, Réseau Mondial d'Agriculteurs*

 

 

Image : Enkhsaihan2005

 

 

Si les hommes politiques disent ce qu'ils pensent être nécessaire pour se faire élire, alors beaucoup d'entre nous dans le monde entier vont entendre leurs hommes politiques faire de nombreuses promesses en 2024.

 

En effet, il s'agit de la plus grande année électorale de l'histoire, avec des élections nationales dans plus de 70 pays. Près de la moitié de l'humanité, soit plus de 4 milliards de personnes, vit dans l'un de ces pays.

 

Le scrutin dans mon pays est le prochain : le 14 février, des Indonésiens comme moi participeront à la plus grande élection d'un jour de la planète. Ces élections ont toujours une influence sur l'agriculture. Les agriculteurs et les éleveurs doivent essayer d'influencer les résultats en s'exprimant et en racontant leur histoire, afin d'avoir une voix forte dans les politiques publiques qui régissent le commerce et la technologie.

 

La course à la présidence qui se déroulera en novembre aux États-Unis suscite bien entendu l'attention du monde entier, comme c'est toujours le cas. Les élections générales en Inde concerneront des centaines de millions d'électeurs qui se rendront aux urnes en mars et avril. Elles battront probablement des records de participation massive. La deuxième élection la plus importante de l'année, en termes de nombre d'électeurs, aura lieu en juin pour le Parlement Européen. D'autres élections majeures auront lieu au Mexique, en Afrique du Sud et, peut-être, au Royaume-Uni, qui doit organiser des élections d'ici à janvier 2025.

 

Dans l'ensemble, il s'agit d'une bonne nouvelle pour l'idée de démocratie. Pourtant, les enjeux sont considérables. Les électeurs devront choisir entre l'engagement économique dans le monde et l'autosuffisance. Ils choisiront entre des candidats qui adoptent des technologies prometteuses et d'autres qui rejettent les preuves scientifiques.

 

Leurs choix nous concerneront tous, quel que soit notre lieu de résidence. Dans un marché mondial, ce qui se passe dans une Nation influence toujours ce qui se passe ailleurs. Les résultats peuvent surprendre. Si l'invasion de l'Ukraine par la Russie peut entraîner une hausse du prix des ignames au Nigeria, une élection au Sri Lanka ou ailleurs peut avoir des répercussions sur votre portefeuille ou menacer la sécurité alimentaire.

 

Une chose est sûre : le commerce international permet de maintenir une alimentation abondante et abordable. Nous avons besoin d'élus qui comprennent la valeur de réseaux commerciaux solides.

 

Je gère deux parcs d'engraissement de bovins sur l'île de Sumatra et mon activité dépend de la capacité à faire circuler les biens et les services à travers les frontières.

 

L'Indonésie compte environ 280 millions d'habitants, ce qui en fait le quatrième pays le plus peuplé du monde. Nous pouvons produire une grande partie de notre nourriture et nous exportons beaucoup d'huile de palme, de café, de noix de coco, de bananes, etc. Nous produisons également beaucoup de riz, mais nous avons dû récemment importer cette culture de base en raison d'El Niño, un phénomène météorologique cyclique.

 

Notre climat tropical crée des déficits en produits de base comme le bœuf, le blé et le soja, de sorte qu'il est nécessaire d'importer des denrées alimentaires et des intrants agricoles. Je vois cette réalité tous les jours dans mes parcs d'engraissement. Nous recevons des bovins comme matière première d'Australie et des aliments pour animaux d'autres pays. Notre travail consiste à engraisser le bétail. Nous les vendons ensuite sur notre marché intérieur, où la demande de viande bovine est énorme.

 

Pourtant, nous ne parvenons pas à la satisfaire. Politiquement, l'Indonésie est toujours déficitaire en viande bovine, nous avons besoin de plus que ce que nous pouvons produire. La dernière fois que l'Indonésie a exporté du bétail, c'était dans les années 1980.

 

Le problème est en grande partie d'ordre réglementaire. On m'empêche d'acquérir autant de bovins que le marché en a besoin. Mes parcs d'engraissement ont une capacité maximale de 35.000 têtes, mais nous n'en nourrissons actuellement que 15.000. Le problème est d'ordre administratif. Le port australien de Darwin a expédié plus de 55.000 bovins vers l'Indonésie en décembre, mais aucun en janvier – tout cela à cause de retards dans l'obtention des permis d'importation, selon ABC.

 

En outre, nous avons besoin d'un accès plus facile aux céréales nécessaires pour nourrir le bétail et les autres animaux. La chaîne d'approvisionnement des parcs d'engraissement peut avoir un impact sur la vie de plus de 12.000 personnes, du port à l'assiette, de la plantation à la banque d'alimentation.

 

Il s'agit là de questions politiques. Elles exigent des solutions de la part d'élus qui comprennent l'importance du commerce.

 

L'Indonésie compte trois candidats majeurs à la présidence, qui ont fait toute une série de promesses et de propositions sur le commerce, qui ne sont pas toutes favorables ou utiles. Pourtant, même les hommes politiques qui succombent à la tentation du protectionnisme ont tendance à l'abandonner lorsqu'ils arrivent au pouvoir. Lorsqu'ils font campagne, ils peuvent parler d'autosuffisance, de protection des industries locales et de limitation des importations, mais lorsqu'ils sont au pouvoir, ils se heurtent à la dure réalité : la prospérité de l'Indonésie dépend de son engagement économique avec le reste du monde.

 

Si davantage d'électeurs en prenaient conscience, les candidats seraient moins enclins à les séduire en promouvant l'économie d'autosuffisance – et leurs performances en tant que représentants du gouvernement s'amélioreraient.

 

Les agriculteurs, les éleveurs et toutes les personnes impliquées dans l'agriculture doivent jouer un rôle. Cela commence par le vote, mais nous devons faire plus : nous devons nous exprimer en faveur de la sécurité alimentaire et du commerce international qui la rend possible.

 

En racontant notre histoire, nous pourrions constater que les électeurs et les personnes qu'ils élisent nous récompensent en nous offrant le personnel politique dont nous avons besoin.

 

_________________

 

William El Bulo

 

L'entreprise peut importer et engraisser jusqu'à 114.000 bovins par an. Elle produit également du compost et dispose de 160 hectares de terres marginales où elle expérimente l'utilisation du compost pour différents types de cultures.

 

Source : An Election Impact Story from Indonesia – Global Farmer Network

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