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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

« Eau importée », Oxfam et Franceinfo : avec le changement climatique, même le poisson d'avril est plus précoce !

31 Mars 2024 Publié dans #critique de l'information, #Activisme

« Eau importée », Oxfam et Franceinfo : avec le changement climatique, même le poisson d'avril est plus précoce !

 

 

(Source)

 

 

On peut être abasourdi devant tant de légèreté de Franceinfo à l'occasion de la Journée Mondiale de l'Eau, célébrée le vendredi 22 mars 2023. Le 12/13 Info de Franceinfo, de M. Nathanael de Rincquesen, a donné la parole pour près de 10 minutes à M. Quentin Ghesquière, co-auteur d'un « rapport » d'Oxfam, « La soif du profit », et M. Simon Porcher, professeur de sciences de gestion à Paris Panthéon-Assas.

 

C'est gravé dans le marbre (enfin...) d'Internet par « Environnement : "La moitié de l'eau qui est consommée par les Français est importée", pointe Quentin Ghesquière, chargé de plaidoyer climat à Oxfam ».

 

Il suffit de lire ce titre pour tomber à la renverse !

 

Ce fut dans cet entretien un joyeux mélange d'« eau consommée » et d' « empreinte eau » sur fond d'anticapitalisme et de haine – osons le mot – des multinationales.

 

Cette association n'est pas surprenante pour ceux qui sont familiers avec les activités que déploie Oxfam – une multinationale de la contestation – grâce à l'argent de donateurs qui s'imaginent contribuer au développement dans les régions du monde moins favorisées.

 

Nous avons été servi !

 

Nous nous ferons les censeurs des choix éditoriaux de Franceinfo : il est permis de s'interroger sur les motifs de ce micro complaisamment tendu à deux propagandistes.

 

Le cycle – ou les cycles – de l'eau sont un mystère pour beaucoup de monde.

 

De manière classique, on distingue l'eau prélevée – qui est restituée au milieu aquatique – et l'eau consommée – qui ne l'est pas. Selon le ministère de la Transition Écologique :

 

« L’eau consommée correspond à la partie de l’eau prélevée non restituée aux milieux aquatiques. Cette part est très variable selon les utilisations. En moyenne, entre 2010 et 2018, le volume annuel d’eau consommée est estimé à 4,1 milliards de m3 en France métropolitaine (soit environ 15 % des 27,8 milliards de m3 d’eau prélevée, hors alimentation des canaux), ce qui représente 64 m3/habitant. L’agriculture est la première activité consommatrice d’eau avec 57 % du total, devant l’eau potable (26 %), le refroidissement des centrales électriques (12 %), et les usages industriels (5 %). Cette répartition est variable selon les bassins : l’eau consommée est attribuée majoritairement à l’agriculture dans les bassins Adour-Garonne (80 % du total d’eau consommée), Loire-Bretagne (59 %) et Rhône-Méditerranée (56 %), à l’eau potable en Artois-Picardie (59 %) et en Seine-Normandie (53 %), et à la production d’électricité en Rhin-Meuse (36 %). »

 

 

(Source)

 

 

La comptabilité est cependant piégeuse. Un même volume d'eau peut être prélevé plusieurs fois. Le graphique ci-dessous suggère qu'il faut d'énormes quantités d'eau pour le refroidissement des centrales électriques. La même eau peut servir plusieurs fois le long d'un fleuve...

 

Trois prélèvements d'un mètre cube sont donc comptabilisés comme trois mètres cubes prélevés. Mais ce mètre cube (ou ces trois mètres cubes) se retrouve en fin de parcours dans la mer. Et le public non averti se laisse embobiner par les prêcheurs de l'apocalypse de la pénurie d'eau, actuelle ou à venir.

 

 

 

 

De même, le mètre cube d'eau pompée dans une nappe pour l'alimentation en eau potable est sans doute comptabilisé comme consommé. Mais si le réseau d'adduction d'eau fuit, les pertes retournent à la nappe. La consommation est dès lors surévaluée. Er, du point de vue technique, la réparation des fuites ne produit pas d'économie d'eau prélevée, mais de coût de traitement et de distribution.

 

On a inventé deux autres notions qui se recoupent en partie : l'eau virtuelle et l'empreinte eau.

 

L'eau virtuelle est la quantité d'eau nécessaire à la production d'un produit.

 

Selon le site Youmatter :

 

« L’empreinte eau est une mesure de la quantité totale d’eau nécessaire pour produire des biens et des services ou pour faire fonctionner des organisations, ainsi que pour absorber la pollution des eaux générée par ces activités. Cela comprend l’eau utilisée de manière directe et indirecte, à la fois pour produire les matières premières, l’énergie, fabriquer les produits ou services et les distribuer, ainsi que pour traiter les éventuels déchets. »

 

L’empreinte eau est un outil important pour évaluer l’impact de nos modes de consommation sur les ressources en eau et pour encourager des pratiques de production et de consommation plus durables. À condition, cependant, que cette empreinte soit correctement évaluée et interprétée.

 

Et, bien sûr, que cet outil ne soit pas utilisé pour culpabiliser le citoyen-consommateur, ou l'inciter à réorienter sa consommation de manière fallacieuse.

 

Le kilo de bœuf est un exemple emblématique. On lit généralement qu'il faut de l'ordre de 15.000 litres d'eau pour le produire. C'est vrai et faux à la fois : la très, très grande majorité (l'« eau verte ») est constituée par l'eau de pluie captée dans les sols, valorisée par les plantes fourragères... et réinjectée dans le cycle de l'eau par l'évapotranspiration des plantes.

 

Vous lamentez-vous sur ce « gaspillage » ? L'eau qui tombe sur un hectare de prairie (ou de champ de soja en Amérique Latine) et est absorbée par le sol est en partie évapotranspirée par les plantes (une autre partie pouvant rejoindre la nappe ou partir à la rivière). Mettez un bovin dessus et l'eau est valorisée... et devient une composante de l'empreinte eau ; ne valorisez pas la production végétale... et il n'y a pas d'empreinte eau !

 

De même, une grande partie de l'« eau bleue », utilisée pour l'abreuvement des bêtes, est recyclée sous forme d'urine. Du reste, savez-vous qu'aujourd'hui, en dernière analyse, nous buvons l'urine des dinosaures ?

 

En bref, ces histoires d'empreinte eau sont très contestables et fortement contestées.

 

 

 

 

 

 

 

(Source)                                                                                                                                      (Source)

 

 

Cela vaut aussi, par exemple, pour un autre article emblématique, le T-shirt. Pour l'eau qui a servi à produire le coton et pour l'eau utilisée lors des différentes étapes de la fabrication – et, si vous faites une analyse de cycle de vie, l'eau utilisée pour le laver.

 

 

 

 

Cela nous amène à ces quelque 10 minutes de propagande.

 

« […] Quentin Ghesquière, chargé de plaidoyer climat et co-auteur du rapport d'Oxfam "La soif du profit", explique que, comme l'empreinte carbone, "il y a aussi une empreinte eau". "La moitié de l'eau qui est consommée par les Français est importée", pointe-t-il, avec une empreinte de "4 900 litres par jour" pour un Français. »

 

Et pour M. Simon Porcher, professeur de sciences de gestion à Paris Panthéon-Assas,

 

« Après, comme tous les habitants de pays industrialisés, (...) il faut un peu modifier notre régime alimentaire et nos habitudes de consommation. »

 

Non, l'eau virtuelle ou l'eau correspondant à une empreinte n'est pas « consommée » par les Français. Elle n'est pas non plus « importée ».

 

L'eau qui est intervenue dans la production d'un roti de bœuf qui serait importé d'Argentine est sans doute restée en Argentine.

 

Les impacts économiques et environnementaux diffèrent évidemment selon les situations. Mais la réduction du propos à un appel à la sobriété dans la consommation est fondamentalement intolérable – s'agissant de la question de l'eau, et sachant que le propos repose en grande partie sur une notion de « pénurie d'eau » ou de « surexploitation des ressources ».

 

Il est certes opportun de s'interroger quand une production agricole mène à l'épuisement des nappes phréatiques, à l'assèchement des cours d'eau ou à des pollutions. Mais où est le problème lorsque l'eau est abondante ou gérée judicieusement ?

 

Les roses du Kenya sont-elles « gourmandes en eau » ? Entraînent-elles des pollutions ? Elles font vivre des milliers de familles, beaucoup de femmes en situation de monoparentalité, et permettent d'envoyer les enfants à l'école. Si problème il y a, il faut résoudre le problème, pas appeler à la sobriété en France... sur fond de détestation des « multinationales ».

 

« […] Et pour pouvoir nous aider à réduire cette consommation, en fait, il y a une chose, c'est qu'il faut réguler les multinationales qui exportent cette eau vers notre pays […] mais aussi en régulant ces multinationales. »

 

Voilà tout compte fait l'alpha et l'oméga du fond de commerce d'Oxfam.

 

Et voici, en guise de dessert – outre la comparaison foireuse entre les « consommations » d'eau d'un Français et d'un Congolais :

 

« Il faut savoir que pour un litre de diesel que vous mettez dans votre réservoir d'essence, en fait il y a 225 litres d'eau qui ont été utilisés en Amérique Latine. »

 

Tout ça relèverait du poisson d'avril.

 

 

Post scriptum

 

Le 21 mars 2024, Franceinfo s'est fait le zélé porte-voix – ou le porteur d'eau – d'Oxfam ici pour son « rapport ».

 

 

(Source)

 

 

En titre : « Eau : Oxfam dénonce un "accaparement par les multinationales" en France et dans le monde ». En chapô :

 

« Dans un rapport, l'ONG déplore une "augmentation insoutenable de la consommation mondiale d'eau" malgré le changement climatique et les sécheresses à répétition. Elle estime que la France "gère encore sa ressource comme si elle était abondante". »

 

Ben oui... elle est abondante !

 

Extrait :

 

« Oxfam explique ainsi que l'Ethiopie "a exporté pour 4,1 milliards de dollars de marchandises", notamment du café, de la viande et des fleurs, alors que le pays subit une sécheresse historique et durable. »

 

Qu'Oxfam s'offusque des exportations éthiopiennes et refuse implicitement à ce pays et à sa population le droit au développement, quoi de plus normal si l'on considère sont idéologie.

 

Qu'un scribouillard de Franceinfo trouve ce propos stupide et fondamentalement abject digne d'être relevé témoigne d'un très gros problème dans notre paysage médiatique.

 

 

(Source)

 

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F
Oxfam est connue pour ses inepties pseudo scientifiques qui parviennent toujours à la même conclusion: il faut détruire le capitalisme (même si c’est au détriment des plus pauvres). C’est tellement flagrant qu’on se demande pourquoi les médias payés par nos impôts comme France Infox relaient leur propagande.
Répondre
M
Ces notions d'empreintes carbone, d'eaux vertes, jaunes, violettes, de forçage radiatif, de rendement "du puits à la roue"... sont dénuées de toute dimension scientifique.<br /> Ce ne sont que des pseudo outils d'expertise utilisés à des fins de manipulation et de propagande.<br /> Le simple fait de les contester publiquement est déjà une victoire.<br /> <br /> Comme disait un certain défenseur de la cause gastronomique nationale, malheureusement décédé, "C'est de la m...... !!!! De la m....... !!"