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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

La salade conventionnelle à 17 ou 27 euros tout compris de Mme Marine Tondelier

8 Juin 2023 Publié dans #critique de l'information, #Activisme, #EELV

La salade conventionnelle à 17 ou 27 euros tout compris de Mme Marine Tondelier

 

 

(Source)

 

 

Mme Marine Tondelier, secrétaire nationale d'Europe Écologie Les Verts (EELV) a assuré le divertissement – style Schadenfreude – sur Twitter et ailleurs avec une déclaration faite sur LCP, le vendredi 2 juin 2023, dans Politiques à table.

 

Dans un déluge verbal coutumier qui interdit quasiment tout « Halte-là ! », diarrhéique et gesticulatoire, elle affirmait notamment :

 

« ...je prends l'exemple d'une salade – je vous donne des chiffres de 2020 – donc ça a évolué avec l'inflation, mais une salade bio, vous la payez en 2020 en moyenne 1 euro, une salade conventionnelle, pas bio, vous la payez en moyenne 70 centimes... donc vous pouvez dire "c'est vachement mieux, c'est moins cher" sauf que la salade – accrochez-vous bien – à 70 centimes, combien coûte-t-elle à la société, c'est mon quizz maintenant pour vous [rire[] ? Vous savez combien elle coûte à la société ? [en off : "Nan ! Mais j'imagine en termes de sécurité sociale" [???] Une voix masculine : "un euro cinquante"]. Entre 17 et 27 euros. Parce que vous prenez en compte les problèmes de santé, la dépollution de l'eau, qu'on paye tous, comme citoyens, comme cotisations d'usagers pour l'agence de l'eau, le climat, euh, ce que ça implique pour le climat, les déchets et évidemment les coûts pour la santé, pour la sécurité sociale. C't-à dire que quand on nous dit : "Le bio...". [Interruption : "La salade bio, elle coûte combien à la société ?"] – Un euro ! Ya pas, ben oui, puisqu'il n'y a pas d'externalités négatives sur l'air, sur l'eau, etc. [Interruption : "Mais elle coûte beaucoup plus cher au producteur, et termes de main-d'œuvre..."]. Oui, mais ce que je veux vous dire, c'est que ce calcul est complètement artificiel, on est en fait dans une concurrence déloyale... »

 

Arrêtons-nous là. Pitié ! Grâce !

 

Mme Marine Tondelier a insisté sur Twitter, en excipant de l'autorité de la Cour des Comptes.

 

 

(Source)

 

 

Et même lourdement...

 

 

(Source, source et source)

 

 

Cela excita évidemment les appétits...

 

Il y eut une série de contributions pour mettre en doute des chiffres qui auraient de toute façon dû susciter des interrogations tant ils heurtent le sens des ordres de grandeur.

 

Et un twittos signala une interview de M. Damien Carême, EÉLV, citant le « Paysan résistant ! » de M. Benoît Biteau, EÉLV. Bref, l'entre-soi.

 

 

(Source et source)

 

 

Et il advint ce qui devait advenir...

 

 

(Source et source)

 

 

Et il advint ce qui devait advenir encore devant le silence angoissant de la personne d'une exquise politesse qui se refusait à donner la page...

 

Des twittos se chargèrent de trouver « cette démonstration [qui] est développée dans [s]on livre, [et qui] bien sûr [...] est parfaitement sourcée ».

 

Voici donc...

 

 

(Source)

 

 

Il n'est nullement question, pour la source, de la Cour des Comptes invoquée par Mme Marine Tondelier ou du Commissariat Général au Développement Durable évoqué par M. Damien Carême. En fait, il n'y a aucune source...

 

M. Gil Rivière-Wekstein a cependant trouvé des éléments et les a cités dans « Marine Tondelier a-t-elle raison quand elle affirme que le « vrai » prix d’une salade conventionnelle serait de 17 euros contre 1 euro pour une salade bio ? » :

 

« En revanche, il est vrai qu’il existe un surcoût pour la consommation d’eau des ménages en raison des coûts de dépollution. Mais là encore, les chiffres de Benoît Biteau et Marine Tondelier sont loin de la réalité. En 2011, le Commissariat général au développement durable (CGDD) avait publié un rapport concernant justement les coûts des principales pollutions agricoles de l’eau. Il évoquait notamment l’exemple de Munich cher à Biteau, en citant un rapport de la Cour des comptes de février 2010, selon lequel "le coût du programme de la ville de Munich renchérit le prix de l’eau de 0,087 centimes/m3, alors que le coût de dénitrification d’une eau de plus de 50 mg/l y est de l’ordre de 0,23 euros/m3. Le coût du traitement est donc 2,5 fois plus élevé que celui de la prévention." Et non pas 17 ou 27 fois plus élevé. »

 

La source du coût de la dénitrification pour la Cour des Comptes est la Direction des Études Économiques et de l’Évaluation Environnementale, juillet 2005, sans plus de précision.

 

Mais passons à « Paysan résistant ! ».

 

« L'exemple de l'expérience de la ville de Munich en est une probante illustration. En 1991, la qualité de l'eau potable fournie par le point de captage est à la limite de la réglementation sanitaire européenne et impose à la ville d'engager un lourd investissement dans une usine de potabilisation. [...] »

 

Le cas de la ville de Munich est analysé dans un texte érudit, lequel a vraisemblablement servi de source. Mais prenons-le d'une plaquette de l'Institut Technique de l'Agriculture Biologique (ITAB) de 2008, « L’agriculture biologique un choix pour une eau de qualité » :

 

 

(Source)

 

 

On y apprend qu'en 1991, la teneur en nitrates, en fait du captage de la vallée du Mangfall, était de 14 mg/L et celle des pesticides de 0,065 µg/L (le « » est une erreur). On est très loin de la « limite de la réglementation sanitaire européenne » – 50 mg/L et 0,5 µg/L, respectivement !

 

Mais que ne ferait-on pas pour enjoliver un récit...

 

Et quand on connaît les caractéristiques de la zone de captage – pour quasiment la moitié de la surface en forêts et pour l'essentiel de la surface agricole en herbages – on peut conclure que la ville de Munich a fait du zèle écolo. Et il y a un coût caché car la ville s'approvisionne prioritairement auprès des agriculteurs qui ont accepté de passer en bio pour sa restauration collective.

 

Mais il est un fait que les charges en nitrate et pesticides ont diminué.

 

M. Benoît Biteau passe ensuite à la laitue :

 

« Concrètement, faire le choix, au marché, d'une laitue issue de l'agriculture conventionnelle, à 0,70 euro, au lieu de la laitue AB à 1 euro coûte en réalité, quand on agrège les coûts externalisés visant à réparer les dégâts de cette agriculture conventionnelle, entre 17 et 27 euros ! En avons-nous vraiment encore les moyens ? Alors que la laitue bio à 1 euro coûte définitivement 1 euro ! »

 

Comment a-t-il fait pour passer de l'un à l'autre ? Mystère !

 

Mais une chose est sûre : ces gens nous racontent des salades.

 

 

Post scriptum

 

Sur Twitter, Mme Josette Marrant m'a rappelé que M. Benoît Biteau avait même écrit des choses très « sympathiques » sur ma personne dans son livre. Je l'en remercie...

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F
De l'art de prendre un chiffre (n'importe-lequel) pour lui faire dire ce qu'on veut.<br /> Les pseudo-sciences font des ravages.<br /> La pseudo-analyse financière c'est pire.<br /> Les politiciens n'étant compétents ni en sciences ni en finances...
Répondre
J
un petit article sur la "pollution aux nitrates" <br /> <br /> http://laurent-berthod.over-blog.fr/article-31435333.html<br /> <br /> il semblerait qu'une fois encore nos zinzins verts nous coûtent une blinde pour une autre lubie<br /> <br /> mais mais, une norme, une interdiction basée sur de fausses prémices ,on a déjà vu cela non?
Répondre
H
La consommation de légumes riches en nitrates est excellente à la santé cardio-vasculaire et des sportifs en prennent des supplémentations depuis plus de 20 ans maintenant sans effet secondaire connu. Il existe également des médicaments à base de nitrates pour le coeur.<br /> <br /> Pour ce qui est du rôle des nitrates dans la proliférations (supposée) des algues bretonnes, la question est historiquement très complexe. <br /> Les algues ont toujours abondé sur les côtes bretonnes et elles en ont fait une des rares richesses de ces côtes dans les siècles passés. Le ramassage en est même réglementé pour éviter les conflits.<br /> Les algues brunes sont bien connues dans les textes anciens car on en tire des potasses et à partir du 19ème siècle de l'iode pour les industries chimiques du passé (et oui la chimie remonte au néolithique...). On les brûle dans les fours en bord de mer et les archives abondent de procès en raison des fumées qui portent à des km et posent (déjà) des problèmes de santé.<br /> On ramassait aussi massivement les algues comme engrais pour amender des sols, dont beaucoup en Bretagne, sont pauvres.<br /> On sait que les algues vertes existaient également mais on en ignore l'importance. On sait par divers récits qu'elles étaient ramassées au jour le jour par les paysans pauvres de bord de mer qui en nourrissaient leur vache (souvent unique) et parfois en consommaient. Mais on sait peu de choses sur cette économie de survie car cela intéressait peu. Donc il est difficile d'identifier l'importance ancienne de ces dépôts d'algues vertes.<br /> En tout cas, les algues ne deviennent un problème sur les côtes françaises que quand on cesse de les ramasser, en gros dans les années 50-60 et que le bord de mer change de fonction, il devient zone de loisir.