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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Glyphosate : ce que les zélotes veulent vraiment

4 Janvier 2018 , Rédigé par Seppi Publié dans #Risk-monger, #Activisme, #Glyphosate (Roundup), #Politique, #Union européenne

Glyphosate : ce que les zélotes veulent vraiment

 

Risk-monger*

 

 

 

 

Aujourd'hui [28 novembre 2017], nous célébrons une victoire vaine. L'Union Européenne a renouvelé son autorisation du glyphosate pour cinq ans. La science était plus claire que claire : la substance herbicide est l'une des plus sûres sur le marché. Tous les organisme de recherche ou de réglementation, sauf un, ont donné une approbation sans équivoque au glyphosate (et cet autre, le CIRC, était dans une grave situation de confusion et de corruption). Depuis 40 ans, les agriculteurs utilisent le glyphosate ([ajout du 21 janvier 2018 aujourd'hui] hors brevets, bon marché et efficace), ce qui leur donne les moyens de développer une agriculture durable sans labour et des cultures de couverture complexes. Le glyphosate est en effet l'herbicide du siècle et l'idée même de l'interdire semble absurde.

 

Alors, pourquoi la Commission Européenne n'a-t-elle pas pu renouveler le glyphosate pour 15 ans comme prévu initialement ? Comme la science était claire, le processus réglementaire d'évaluation des risques aurait dû être simple. Mais il n'a jamais été question de science, de faits ou de données. Il n'a jamais été question des avantages pour les agriculteurs, l'environnement et les consommateurs. Il s'agissait de quelque chose de beaucoup plus grand.

 

Sur ce dossier, la Commission Européenne a été traînée pour de nombreuses raisons dans un enfer de la réglementation pendant 30 mois et elle aurait bien fait de mettre de l'ordre dans ses procédures. Alors que le renouvellement de l'autorisation du glyphosate n'aurait pu être qu'une formalité réglementaire, il est devenu pour les zélotes un moyen de pression pour faire avancer les dossiers politiques à venir. La Commission a réussi à survivre à cet exercice de l'Âge du Stupide, non sans mal, mais les activistes ont une stratégie plus vaste et ce processus les a rapprochés de leur objectif.

 

Que veulent vraiment les zélotes ?

 

 

Détruire le processus réglementaire d'évaluation des risques de l'UE

 

Le processus réglementaire d'évaluation des risques de l'UE est censé être fondé sur des données probantes. Il repose sur la collecte de toutes les données de recherche disponibles et d'avis scientifiques pour permettre une décision claire fondée sur la science (généralement via des comités). Lorsque les données sont insuffisantes, les industriels impliqués dans la substance ou la technologie doivent fournir ou produire de nouvelles données. Supposons, par exemple, qu'une nouvelle technologie de drones soit développée : pour pouvoir mettre le produit sur le marché, les fabricants devront fournir à l'agence de recherche de la Commission Européenne concernée les données requises pour que celle-ci puisse conseiller correctement la Commission sur la manière de gérer les risques. Si les données sont insuffisantes ou si les preuves sont discutables, l'agence d'évaluation des risques peut recommander le rejet de l'autorisation et l'adoption de mesures de précaution.

 

Dans le cas du processus d'évaluation des risques pour les produits chimiques et les pesticides, les producteurs doivent fournir régulièrement des données et des preuves pour maintenir les substances existantes sur le marché ; et des montagnes de recherches (dans de nombreux cas plus de 10 000 pages de données) pour obtenir l'enregistrement d'une substance nouvelle. Le fardeau de la preuve que le produit est sûr incombe aux entreprises. L'industrie suit les BPL – les bonnes pratiques de laboratoire –, une série de normes de qualité qui permettent de s'assurer que toute la recherche est reproductible, cohérente et uniforme. Le rôle du régulateur est de s'assurer que les données fournies sont correctes, cohérentes et sans données manquantes. Le fardeau des coûts de la recherche est mis sur l'industrie – dans la plupart des cas, ils ont les meilleurs scientifiques et la technologie la plus avancée – puisqu'ils bénéficieront de l'introduction sur le marché de leurs innovations.

 

Pour le glyphosate, les activistes affirment que l'on ne peut pas faire confiance à quarante années de données fournies par l'industrie et à 3.300 études, tout simplement parce qu'il y a une entreprise qui est impliquée, Monsanto, laquelle est devenue la source de leur rage irrationnelle. Dans l'Âge du Stupide, cela semblait suffisant pour vouloir démanteler tout le système européen d'évaluation des risques. Je ne peux pas croire que, dans une société fondée sur l'intelligence, j'aie réellement pu écrire ce paragraphe.

 

Partenaires dans le crime, littéralement !

 

Cet argument absolument ridicule a été propagé par des opportunistes anti-industrie comme Martin Pigeon, Marie-Monique Robin et Carey Gillam, qui partagent tous une obsession malsaine contre Monsanto. Ce qui est scandaleux, c'est que le scientifique avec lequel Pigeon et Gillam ont travaillé, Christopher Portier, était secrètement payé par des cabinets d'avocats qui profiteraient bien des poursuites contre Monsanto aux États-Unis si cette gesticulation réussissait à saboter le processus d'évaluation des risques en Europe. Qu'ils fussent au courant de l'intérêt qu'ont les cabinets d'avocats de susciter le doute et le sentiment anti-Monsanto, et qu'ils aient continué à travailler avec ces avocats prédateurs non transparents, en dit long sur leur manque de moralité.

 

S'ils avaient réussi à détruire le processus réglementaire d'évaluation des risques de l'UE, qu'auraient proposé ces zélotes ?

 

 

Institutionnaliser un processus d'évaluation des risques fondé sur la « science citoyenne »

 

Des militants comme Pigeon demandent que le processus actuel d'évaluation des risques soit réformé en excluant toute recherche industrielle. Cela est en accord avec la politique des monographies du CIRC, lequel prétend rejeter la prise en compte des données non publiées ; mais cette méfiance irrationnelle de l'industrie crée des limites sévères sur les données et les preuves. Comment ce manque d'expertise serait-il traité ?

 

J'entends souvent des groupes comme le CEO, le PAN et Les Amis de la Terre parler de l'expansion de la recherche financée par des fonds publics. C'est naïf puisque le contribuable ne devrait pas avoir à payer pour que soit garantie sa sécurité sanitaire. J'entends donc dire que l'industrie devrait payer les organismes de réglementation pour que celles-ci mènent la recherche. Bien sûr, si c'est l'industrie qui doit payer pour les réjouissances, elle devrait avoir son mot à dire sur les scientifiques qui devraient être impliqués dans ces études. Eh bien, nous en sommes là maintenant, et je pense que Saint Martin aurait du mal à accepter cela.

 

Ce que ces groupes éco-intégristes veulent, en fin de compte, c'est un rôle accru pour la « science citoyenne » (une science participative ou communautariste). Bien qu'il n'y ait rien de mal à ce que le public soit impliqué dans le processus scientifique, faire diriger la recherche par des citoyens et des non-experts est quelque peu troublant pour ceux qui veulent des décisions politiques fondées sur des preuves. La science citoyenne, c'est ce en faveur de quoi plaide Jackie McGlade, l'ancienne patronne tombée en disgrâce de l'Agence Européenne de l'Environnement, devenue scientifique principale (!) au PNUE. Mais qu'est-ce que la « science citoyenne » ?

 

La technologie des téléphones intelligents peut permettre aux ornithologues amateurs de mieux enregistrer les observations d'oiseaux, mais de tels cas de science citoyenne sont peu nombreux et anecdotiques... pas vraiment la qualité nécessaire pour produire des règlements de manière responsable compte tenu de la qualité des technologies de recherche d'aujourd'hui. Il n'y a pas de « bonnes pratiques de laboratoire » chez les activistes amateurs qui seraient volontaires pour analyser l'eau ou recueillir des données et des échantillons en approvisionnement par la foule (crowd-sourcing), d'autant moins qu'il s'agit de groupes sujets à des biais et soumis à des campagnes de manipulation de l'opinion.

 

La science citoyenne suppose le rejet de la connaissance supérieure de l'expert. Elle considère que les experts sont biaisés soit par le financement, soit par une dépendance postmoderne à un paradigme qui peut ne pas être certain (et donc non valide). Donc, pour ces militants éclairés du Nouvel Âge, la contribution de l'expert à de tels débats ne vaut pas grand-chose. Lorsque vous entendez des gens se plaindre de la décision prise aujourd'hui de renouveler le glyphosate, beaucoup d'entre eux disent que c'était antidémocratique et que les gens, les citoyens, veulent que l'herbicide soit interdit. Donc, dans une démocratie, les gens en savent plus que les toxicologues, les chimistes, les biologistes et les agronomes sur la sécurité du glyphosate.

 

C'est tout simplement du délire ! Refuseriez-vous le pilote ou le mécanicien d'aviation et feriez-vous confiance à un volontaire choisi au hasard pour piloter votre avion simplement parce qu'il n'a aucune affiliation avec une compagnie aérienne ? Laisseriez-vous un activiste démocratiquement sélectionné opérer votre foie ? Pourtant, les écologistes et les naturopathes exigent que la voix des citoyens ait la préséance pour l'agriculture, la production alimentaire et les décisions en matière de produits pharmaceutiques. Comment ont-ils pu en arriver là ?

 

En effet, même le principal scientifique du « mouvement populaire » anti-glyphosate, Christopher Portier, un statisticien, a admis qu'il ne connaissait rien au sujet du glyphosate avant de participer au panel d'experts du CIRC qui a déclenché toute cette sordide affaire. Qui a encore besoin d'experts aujourd'hui quand tout le monde a des doctorats de Google University ? Chris a pu trouver comment faire un lien entre le glyphosate et le cancer pendant cette semaine de réunions à Lyon, et passer les deux années suivantes en tant que chouchou des activistes dans la campagne pour vandaliser Monsanto, la science, les agriculteurs et les consommateurs. Et puis, Chris, l'argent, c'était bon à prendre !

 

Ainsi, dans le monde parallèle des zélotes, la science citoyenne, en tant que fondement d'un nouveau processus réglementaire européen d'évaluation des risques, verra des activistes présider des groupes consultatifs de l'UE comprenant des agriculteurs bio triés sur le volet qui compteront au hasard les abeilles ou les vers de terre ; les toxicologues et les biologistes des plantes universitaires seront écartés. C'est de la pure folie. L'objectif des activistes est d'interdire toute technologie agricole ; alors, ils ne se soucient vraiment pas des conséquences. On ne peut voir cela qu'à l'Âge du Stupide.

 

Avec le glyphosate, malgré les preuves évidentes des experts, malgré les avantages environnementaux, malgré la valeur écrasante pour les agriculteurs par rapport aux alternatives, ces zélotes activistes sont arrivés à un cheveu de leur objectif de discréditer la recherche et saper le processus européen d'évaluation des risques. Ils ont alimenté sans relâche des campagnes de peur sur les réseaux sociaux, agité l'épouvantail des victimes, lancé des attaques personnelles d'intimidation contre des scientifiques et des communicateurs scientifiques, fait usage de faux manifestes, utilisé des insinuations et se sont livrés à la tromperie. Et ces petits menteurs le feront encore et encore jusqu'à ce qu'ils atteignent leur objectif.

 

 

Un maelström d'intérêts

 

Clairement, les activistes ont eu la tempête parfaite avec le glyphosate. Tant d'autres intérêts s'y sont mêlés ces deux dernières années ; de nouveaux partenariats transatlantiques se sont instaurés entre vils opportunistes pataugeant dans la fange et se transformant en armées d'intolérance, avec notamment :

 

  • Les « carpetbaggers » américains anti-OGM qui salivent à la perspective de faire supprimer le principal motif qu'ont les agriculteurs de profiter du maïs et du soja Roundup-Ready aux États-Unis, en actionnant le handicap de la précaution en Europe.

     

  • Les avocats spécialisés dans les actions collectives américaines qui cherchent à exploiter l'approche réglementaire de l'UE fondée sur le danger pour créer une confusion sur la sécurité de l'exposition au glyphosate et la santé publique afin de tirer profit des poursuites contre l'industrie.

     

  • Des groupes militants anti-industrie des deux côtés de l'Atlantique qui ont uni leurs actions grâce à des fonds du florissant du biobusiness qui cherche à paralyser l'agriculture conventionnelle et à créer des conditions favorables pour leurs processus de production agricole non durables sur le marché.

     

  • Une ignorance scientifique alarmante au cœur de la Commission Européenne. Beaucoup de groupes activistes impliqués dans la promotion d'un programme de rejet des preuves scientifiques ont été impliqués dans la suppression du poste de conseiller scientifique en chef de l'UE il y a trois ans.

     

  • Les « agroécologistes » qui se sont efforcés de ramener l'Europe à un paradis préindustriel malthusien, l'interdiction de l'utilisation de l'agro-technologie étant leur première étape importante. Mettre leurs dingues en charge du processus européen d'évaluation des risques aurait été la cerise sur le gâteau ! Pas encore.

 

Ces zélotes se battront à nouveau, plus forts, enhardis et convaincus de leur bon droit. La Commission Européenne actuelle sera incapable de résister à leur prochaine vague de manipulations fondées sur l'émotion et la tromperie délibérée.

 

Cette semaine, je serai en Allemagne pour parler lors d'une conférence sur les produits chimiques perturbateurs endocriniens. Il y aura des zélotes dans la salle. Je ne prévois pas de retenir les coups.

 

La bataille continue.

 

______________

 

* David pense que la faim, le SIDA et des maladies comme le paludisme sont les vraies menaces pour l'humanité – et non les matières plastiques, les OGM et les pesticides. Vous pouvez le suivre à plus petites doses (moins de poison) sur la page Facebook de Risk-Monger.

 

Source  : https://risk-monger.com/2017/11/28/glyphosate-what-the-zealots-really-wanted/

 

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P
"Depuis 40 ans, les agriculteurs utilisent le glyphosate (hors brevets, bon marché et efficace), ce qui leur donne les moyens de développer une agriculture durable sans labour et des cultures de couverture complexes. Le glyphosate est en effet l'herbicide du siècle et l'idée même de l'interdire semble absurde."<br /> <br /> Ceci est évidement un super mensonge puisque le glyphosate est tombé dans dans le domaine public en 2000 !!!<br /> toujours pas trop regardant pour enrichir l'intox ce bougre de lobbyiste hors normes.
Répondre
S
Bonjour,<br /> <br /> Merci pour le commentaire (si, si).<br /> <br /> Vous comprendrez certainement qu'au vu de la puissance de votre argumentation, je ne tente pas de produire une réponse argumentée.<br /> <br /> Mais je vais corriger le texte en ajoutant « aujourd'hui » à la bonne place.