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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Glyphosate : pourquoi Greenpeace, PAN et le membre du Parlement européen sont des suppôts de Monsanto

21 Avril 2016 , Rédigé par Seppi Publié dans #Risk-monger, #Glyphosate (Roundup), #Union européenne, #Activisme

Glyphosate  : pourquoi Greenpeace, PAN et le membre du Parlement européen Pavel Poc sont des suppôts de Monsanto

 

Risk-monger*

 

 

Un article précédent de Risk-monger a été dépublié par son hébergeur, Euractiv, à la suite de démarches du Monde. Nous en avons dépublié la traduction. Puis Euractiv – dont nous avons déploré le tournant « environnementaliste » en raison de son manque de sens critique et d'objectivité – a fermé le blog, pour le rouvrir quelques jours plus tard, apparemment sous la pression de lecteurs, mais sans l'article qui a déplu au Monde et, sans nul doute, à son journaliste... Une démarche peut-être fructueuse puisqu'on peut trouver un effet Barbra Streisand dans la presse anglo-saxonne, notamment ce formidable article de Reuters et une opinion sur le Times de Matt Ridley, « Stop misusing science to scare the world »... Comme quoi le Monde participe aussi à la diffusion d'une bonne information...

 

M. David Zaruk a décidé d'ouvrir un nouveau site, https://risk-monger.com, et y transfère progressivement ses anciens articles. Nous continuerons à traduire...

 

 

Glyphosate  : pourquoi Greenpeace, PAN et le membre du Parlement européen sont des suppôts de Monsanto

 

Accuser quelqu'un d'être un « shill » [un qualificatif souvent péjoratif – toujours quand il est associé à certaines entreprises – fréquemment traduit par « porte-parole »] de Monsanto est une allégation grave qui suscite une forte répulsion émotionnelle. Je sais, le Risk-monger est ainsi qualifié quasi quotidiennement. Parfois, cependant, des personnes qui peuvent penser au fond de leur cœur qu'ils font de bonnes actions (elles œuvrent pour Gaïa !) sont en fait tellement déconnectées de la réalité qu'elles s'investissent en fait pour atteindre exactement le contraire. Tel est le cas de la présente campagne contre le glyphosate dans laquelle Greenpeace, Pesticide Action Network (PAN) et le membre du Parlement européen Pavel Poc sont en train de faire interdire l'herbicide. Ils rendront en fait un grand service à Monsanto (et à d'autres sociétés de produits chimiques), et nuiront à l'environnement, aux agriculteurs et à la santé publique (sans parler de l'alimentation qui sera plus chère). Selon ma définition, ils s'en font les complices !

 

 

« M. Monger, s'il vous plaît, soyez sérieux, ces gens, en particulier Pavel Poc, haïssent Monsanto ; ils se réveillent tous les matins avec une pensée implacable : "Comment puis-je faire du mal à cette société aujourd'hui ?" Comment peuvent-ils se faire les complices, les barons, de Big M ? »

 

 

Je comprends que le sens commun est une denrée rare auprès des individus et des organisations souffrant d'obsessions et menant des campagnes monomaniaques (et suffisamment Don Quichotte pour s'attaquer à des moulins) ; mais essayons de construire un panorama avec un peu de réalité (et moins d'émotion... essayez, à chaque fois que j'utilise le mot « glyphosate », de ne pas monter sur vos grands chevaux !).

 

Voici (rétrospectivement) quelques réflexions contre-intuitives :

 

 

  • L'année dernière, le glyphosate a fêté ses 40 ans de présence sur le marché. C'est une technologie ancienne qui est hors brevet (ce qui signifie que les 12 entreprises qui le vendent ne se font pas beaucoup de beurre). Les agriculteurs économisent beaucoup d'argent et il a permis à l'agriculture d'accroître ses rendements tout en réduisant les coûts de main-d'œuvre.

 

  • Le glyphosate a été appelé l'herbicide du siècle – il a gardé son efficacité au cours de quatre décennies, avec une toxicité remarquablement faible et un profil environnemental favorable (donnant même naissance à un mouvement très avancé sur le plus écologique, le sans-labour).

 

  • Toute entreprise qui investit dans la recherche et le développement (que ce soit dans la pharmacie ou la protection des cultures, ou encore l'informatique) aura probablement développé une innovation pouvant remplacer un produit sur le marché en l'espace de 5 à 7 ans (un objectif étant de maintenir le cycle de l'innovation, un autre de ne pas se faire piéger par l'expiration des brevets).

 

  • Après quatre décennies, il est certain que des sociétés comme Monsanto ont développé de nouvelles substances pour remplacer le glyphosate. Alors, pourquoi ne les ont-elles pas commercialisées ? Eh bien, nous ne pouvons que supposer que, outre le coût important du processus d'homologation, leur profil est d'une manière ou d'une autre moins avantageux par rapport à ce qui est sur le marché (à savoir... le glyphosate). Peut-être que les agriculteurs sont heureux avec ce qu'ils ont. Les régulateurs européens favoriseront toujours le meilleur profil chimique pour l'environnement et la santé, quel que soit le coût pour le consommateur ou la société, de sorte que nous ne pouvons que supposer que le glyphosate bénéficie encore de leur faveur.

 

  • Tout nouvel herbicide qui arrive sur le marché sera lié à des innovations dans les technologies de semences. La satisfaction des agriculteurs avec l'efficacité des variétés résistantes au glyphosate [mon addition : en dehors de l'Europe...] est probablement un frein à la mise en œuvre des nouvelles techniques d'amélioration des plantes (NPBT).

 

  • Que dire de ces super-mauvaises herbes, annoncées à grand fracas, que le glyphosate était censé produire ? Je sais que d'éternels inquiets comme Michael Pollan et Greenpeace proclament depuis plus d'une décennie que l'Apocalypse des mauvaises herbes, c'est pour la prochaine récolte... mais elle ne s'est jamais produite. Et c'est une mauvaise nouvelle pour les industriels de la protection des plantes parce qu'ils sont assis sur ces alternatives plus coûteuses (et moins attractives) qui permettraient de contrôler les plus « super » des mauvaises herbes ; elles sont toutes prêtes pour un dépôt de brevet... mais le glyphosate ne semble pas prêt à céder la place. Il est fidèle au poste !

 

 

  • Quelqu'un a-t-il remarqué qu'il n'y a pas eu de lobbying sérieux de l'industrie pour le maintien de l'autorisation du glyphosate ? Quelques « tss-tss » et « l'industrie n'est pas d'accord » mis à part, elle s'est contentée de regarder le spectacle. Elle ne s'est pas mal conduite, notez bien... elle a tout simplement décidé de ne pas agir. L'EFSA et l'institut chargé de l'évaluation des risques de l'UE (le BfR) s'étant opposés avec tant de vigueur à l'abus de science des ONG et du CIRC, défendre le glyphosate aurait dû être un jeu d'enfant. Même le Risk-monger, qui a exposé un conflit d'intérêt évident et un comportement non professionnel au sein du CIRC, aurait dû avoir plus d'écho. Personne ne s'en est soucié !

 

 

!

 Qu'en pense (pensait avant le rétropédalage de l'ensemble du groupe) M. Pavel Poc au nom du groupe Socialistes et Démocrates au Parlement européen ?

 

« Il est absolument inacceptable de renouveler pour une nouvelle période de 15 ans l'autorisation du glyphosate, comme le propose la Commission, alors qu’en fait nous devrions débattre de l’interdiction de cette substance dangereuse. Nous devons établir la vérité avant de prendre une décision finale. La santé des citoyens est en jeu. »

 

L’eurodéputée et viceprésidente S&D Kathleen Van Brempt a ajouté ceci :

 

« Nous ne pouvons pas céder à la pression de l’industrie quand la santé publique est en jeu. Le glyphosate est abondamment utilisé dans l’agriculture, les parcs publics et les terrains de jeu. De grandes multinationales comme Monsanto le commercialisent sous d’autres noms, comme la marque Roundup. La santé publique n’est pas négociable et ne peut être compromise au nom d’un quelconque intérêt commercial. Attendons jusqu’à ce que le PE ait fini son travail. »

 

La pression de l'industrie... quelle blague !

 

Nous attendons d'eux qu'ils interdisent les saucisses, classées par le CIRC un cran au-dessus dans l'échelle de cancérogénicité.

 

 

En d'autres termes, il est dans l'intérêt de l'industrie que le glyphosate, en tant qu'herbicide principal, soit mis à la retraite et permette à de nouveaux produits (brevetés) d'arriver sur le marché. Mais à cause de leurs codes de déontologie, les entreprises ne peuvent pas s'activer pour faire retirer un produit du marché. Heureusement, les ONG et le lobby du bio n'ont pas de tels codes de déontologie.

 

Le glyphosate est comme cet oncle qui vous rend visite pour Noël : tout le monde est heureux de le voir... mais c'est qu'une fois chez vous il n'a aucune intention de repartir !

 

Les agriculteurs sont quant à eux ravis de voir l'oncle Glypho et les cadeaux qu'il apporte. Chaque année, le glyphosate se porte comme un charme, il effectue son travail, il a un profil environnemental et sanitaire caractérisé par une faible toxicité, il n'est vraiment pas cher et il fonctionne sur une large gamme de plantes. La communauté scientifique, à l'exception de l'infatigable Christopher Portier et de Stephanie Seneff, la si mignonne experte en informatique, soutient la montagne de données accumulées pour défendre le profil de risque de cet herbicide du siècle. Alors, comment Monsanto peut-il faire partir cet oncle si charmant ?

 

Vint l'occasion parfaite : Christopher Portier, l'activiste de l'Environmental Defense Fund, a recommandé au CIRC de faire une monographie sur le glyphosate, puis il a fait fonction de conseiller technique du groupe de travail (et il n'est même pas un toxicologue !). Personne n'a protesté dans la salle et seul le Risk-monger a pensé que ce conflit d'intérêts et la non-transparence du CIRC, ainsi que son comportement scientifique inadéquat, méritaient d'être rendus publics. L'écho a été faible.

 

 

Donnez le signal aux jobards !

 

Les ONG environnementales comme Greenpeace, HEAL et PAN ont mordu à l'hameçon du CIRC et ont lancé des campagnes sans faille en utilisant les « outils » habituels du Parlement européen et les budgets financés par les contribuables, avec des députés européens comme Pavel Poc qui a tenu des « auditions » sans discontinuer sur le glyphosate – faisant venir des scientifiques activistes de partout dans le monde [mon addition : il y a des extraits emblématiques de cet événement ici. L'ordre du jour, reproduit, est édifiant]. Quiconque était en désaccord (les scientifiques crédibles) a été traité de shill, de complice de Monsanto, et toute organisation scientifique qui a répondu par de la science a été accusée d'employer secrètement des complices de Monsanto, ou de la science Monsanto.

 

C'était un plan de jeu parfait... parfaitement exécuté : Oncle Glypho a été accusé de pédophilie et ostracisé ; il est devenu un personnage auquel on ne pouvait plus jamais faire confiance.

 

L'ironie est que les gens comme Pavel Poc (photo) et les ONG comme PAN, Greenpeace et HEAL ont mené des campagnes dont personne (sauf les agriculteurs et certains scientifiques) ne se souciait. Ils ont œuvré dans le sens des intérêts de l'industrie. Donc, avec toutes ses initiatives politiques, Pavel Poc a, en fait, travaillé comme un agent de Monsanto !

 

Les gens de St Louis doivent pisser de rire.

 

Au moment du vote symbolique sur une résolution non contraignante au Parlement européen aujourd'hui [13 avril 2016], après que tous les députés ont fait analyser leur urine pour des traces de cet épouvantable pesticide (je souhaite vraiment que j'invente ici !), aucun membre respectable du Parlement européen (même pas ceux qui ont un peu de connaissances sur la chimie) n'osera voter pour permettre aux agriculteurs de continuer à profiter des avantages de ce produit. [mon addition : cette prédiction ne s'est pas réalisée.]

 

Donc tout le monde est heureux ; nous nous sommes réunis, nous nous sommes exprimés d'une voix commune, et nous avons fait que cette « vilaine chose » s'en aille. Eh bien... pas tout à fait.

 

 

Qu'en est-il des agriculteurs ?

 

Les agriculteurs ne cesseront pas d'utiliser des herbicides à moins qu'ils n'envisagent de faire faillite de leur plein gré – ils trouveront des solutions de rechange (pires) pour protéger leurs rendements et gérer leurs sols, ou demanderont des dérogations annuelles pour le glyphosate. Il y aura une incitation forte à trouver une meilleure solution ; une crise des mauvaises herbes contribuera peut-être à faire activer l'autorisation d'autres herbicides que les entreprises vont soudainement présenter.

 

 

Qu'en est-il des scientifiques ?

 

En dehors de quelques célébrités « scientifiques » comme Portier ou Seneff, dont les honoraires de conférencier vont augmenter, la plupart des scientifiques auront devant eux une période d'environ 10 ans pour obtenir suffisamment de données sur la sécurité des solutions de rechange au glyphosate. Ils devront se lancer dans d'autres domaines pour avoir des financements pour leurs recherches (puis-je leur suggérer la perturbation du système endocrinien... les ONG sont bourrées de fric pour cette bataille !).

 

 

Qu'en est-il des consommateurs ?

 

Eh bien, ils n'ont jamais été exposés à un risque. Mais ils auront probablement à payer plus pour leur alimentation (également via les impôts pour compenser les agriculteurs). Les organismes de réglementation seront en mesure d'affirmer que, en interdisant le glyphosate, ils ont résolu le problème de l'autisme, du cancer et de ce maudit syndrome de l'intestin perméable ; nous pourrons donc réduire les dépenses de santé et les mesures préventives.

 

 

Qu'en est-il du Risk-monger ?

 

Je vais enfin avoir le temps de me tourner vers d'autres questions, par exemple finir ma série « Comment gérer le stupide » – je donne déjà des cours de formation sur ce sujet – avec un exemple concret de plus de stupide. Souvent, les gens me demandent pourquoi je suis le seul à me tracasser. J'ai d'abord pensé aux agriculteurs et à la contribution d'herbicides précieux à l'agriculture et à la société au cours des 50 dernières années. Je ai aussi perçu cela comme une campagne de conditionnement des esprits parfaitement exécutée, ourdie contre un produit chimique bénin qui avait eu le malheur d'être lié à des choses que les militants haïssent (les OGM, les pesticides, l'agriculture conventionnelle), malgré un consensus scientifique positif clair sur le profil toxicologique et écotoxicologique favorable du glyphosate. Si les ONG et le lobby du bio vont avoir la peau du glyphosate, tout leur sera permis. L'étude de cas que j'ai développée pour les étudiants en politique, espérons-le, aidera la prochaine génération d'acteurs politiques à tirer les leçons de la stupidité d'aujourd'hui.

 

Perdu dans la nuit, Oncle Glypho erre dans les rues sombres de Strasbourg… seul, mal-aimé, et sans abri. Je lui offrirais bien un peu de bière ou de vin, mais il y en a qui disent que c’est bourré de substances toxiques.

 

_______________

 

* David pense que la faim, le SIDA et des maladies comme le paludisme sont les vraies menaces pour l'humanité – et non les matières plastiques, les OGM et les pesticides. Vous pouvez le suivre à plus petites doses (moins de poison) sur la page Facebook de Risk-Monger  : www.facebook.com/riskmonger.

 

Source : https://risk-monger.com/2016/04/13/glyphosate-why-greenpeace-pan-and-mep-pavel-poc-are-monsanto-shills/?blogsub=confirming#subscribe-blog

 

 

Forumphyto a évoqué cet article ici. Il conclut :

 

« Nous ne voudrions pas terminer par une vue aussi pessimiste. Nous dirons donc que le soldat Glypho mérite d’être sauvé et qu’il est encore temps. Mais il demande que la profession et les scientifiques soient plus que jamais mobilisés. »

 

Nous ne pouvons qu'être d'accord. Et, pour remonter le moral de Risk-monger, nous le citerons aussi dans la langue originale :

 

« Nous défendrons notre île, quel qu'en soit le prix. Nous nous battrons sur les plages. Nous nous battrons sur les terrains de débarquement. Nous nous battrons dans les champs, et dans les rues, nous nous battrons dans les montagnes. Nous ne nous rendrons jamais ! »

 

Winston Churchill

 

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