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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Changements climatiques et plantes cultivées

9 Décembre 2015 , Rédigé par Seppi Publié dans #critique de l'information

Changements climatiques et plantes cultivées

 

 

La COP21 est une superbe occasion pour de nombreux médias de « pondre » des articles férocement « tendance » dont la finalité est à la fois de remplir les pages, d'occuper le terrain, de ne pas se laisser distancer par la concurrence, de caresser le lectorat dans le sens des idées reçues...

 

Nous en avons trouvé un qui peut servir d'exemple dans le Huffington Post d'hier, « COP21: le réchauffement climatique pourrait signer la fin des haricots et d'autres aliments, littéralement ».

 

Vous aurez remarqué que nous mettons « changements climatiques » au pluriel dans le titre. C'est en droite ligne de l'intitulé français de cette fameuse conférence : Conférence des Nations Unies – avec la majuscule de rigueur dans le système des Nations... Unies – sur les changements climatiques. Ainsi que de la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC). L'anglais utilise un singulier finalement bien... singulier, mais force est de reconnaître que le changement est – selon les prévisions, les projections ou, si vous êtes plutôt « climatosceptique », élucubrations – pluriel.

 

Quelle que soit l'évolution de l'indicateur synthétique qui retient toutes les attentions, il y a une série de facteurs d'incertitudes qui nous paraissent certains, et des certitudes qui le sont tout autant. Ces facteurs devraient inciter les prêcheurs d'apocalypse à plus de modestie et de retenue ; et les rationalistes à plus de dynamisme.

 

On peut probablement dessiner les grandes tendances avec une marge d'erreur limitée – mais non nulle. Mais bien malin est celui qui peut prédire l'évolution avec la précision qui importe pour l'agriculture. Le climat se réchauffe-t-il ? Mais des gelées tardives peuvent avoir un effet tout aussi important pour l'agriculture.

 

Et, au-delà de l'irrationalité des prédictions sur le climat et les effets sur l'agriculture, il y a cette incroyable et absurde omission dans le prêchi-prêcha du défaitisme : celle de l'imagination, de l'inventivité, de la capacité d'adaptation de l'Homme.

 

La fin des haricots ? Avec, comme souvent, le conditionnel de précaution est de rigueur.

 

Selon l'infographie de l'article du Huff :

 

« Les haricots sont particulièrement sensibles aux grandes chaleurs. Sans une température inférieure à 19°C pendant la nuit, il ne parviennent pas à se développer. D'après le Centre international d'agriculture tropicale (CIAT), les terrains propices à sa culture auront diminué de moitié d'ici 2050.

 

« Le CIAT travaille d'ailleurs à l'identification d'espèces de haricots plus résistantes. Au cas où l'augmentation de la température ne se limite pas à 2°C comme le voudrait la COP21, 30 variétés viennent déjà d'être sélectionnées pour affronter une augmentation de 4°C. »

 

La source est indiquée sans grande précision, et c'est fort dommage.

 

Mais que faut-il tirer de ce texte ? Que le haricot, en tant qu'espèce, est bien plus adaptable qu'on ne le prétend puisqu'on a « sélectionné » – c'est-à-dire, a priori, identifié dans la variabilité génétique existante – des variétés capables de croître et de prospérer sous des climats (plus) chauds. Que l'ingéniosité humaine est capable de répondre au défi, dans le cas présent avec ce que la Nature nous offre et ce que nos ancêtres qui ont cultivé le haricot dans son centre d'origine et ailleurs nous ont légué.

 

Et il suffit de faire preuve d'un peu de bon sens. Qui peut croire que l'Homme laisserait dépérir le haricot face à un réchauffement climatique, parce qu'il aurait oublié qu'il peut le produire plus tôt en saison, avant les grandes chaleurs ? Ou dans des régions plus septentrionales ? Ou en arrosant la nuit pour faire baisser la température ?

 

Et c'est évidemment sans compter sur le génie génétique, lequel est en train de nous fournir ses premières réponses pour la « résistance à la sécheresse » du maïs (nous mettons des guillemets ici car le défi est complexe et n'est pas forcément bien décrit par l'un ou l'autre terme).

 

Sans compter sur le génie français, par exemple de l'entreprise Florimond Desprez – un groupe resté familial après bientôt 200 ans d'existence et devenu un des leaders mondiaux des variétés et des semences – qui met au point des blés tolérant la salinité et le stress hydrique. Il est vrai, toutefois, que pour ce faire, il a dû émigrer en Argentine où il a fondé une co-entreprise Bioceres.

 

Quand les médias comprendront-ils que qu'un problème n'est pas un motif de renoncement et d'accablement, mais un défi ? Et qu'un défi est une opportunité ?

 

On peut et doit aussi poser la question à nos politiques. Renonceront-ils au clientélisme et à la bobo-attitude au profit d'une vision d'avenir sur, par exemple, les aménagements hydrauliques ?

 

Puisque nous avons évoqué la dynastie Desprez, comment ne pas évoquer aussi la formidable épopée de la betterave à sucre à la suite du blocus de l’Empire Français (napoléonien) par la marine britannique, à laquelle elle a contribué ? Ou la formidable conquête des régions septentrionales par le maïs en quelques décennies ?

 

L'ancêtre de notre betterave

 

Plus deux degrés d'ici la fin du siècle ? C'est à la fois beaucoup et peu.

 

Voici deux sites pour ceux qui veulent explorer la question du climat et de l'agriculture vue sous l'angle du CGIAR, le Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale :

 

http://www.scoop.it/t/cgiar-climate-in-the-news

 

http://www.scoop.it/t/climate-change-agriculture-food-security

 

 

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B
Dans mon coin les T min peuvent descendre en dessous de 10 voir 5 degrés C en juin. Pourtant Bonduelle y fait pousser pois et haricots sans problème.
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S
Bonjour,<br /> <br /> Merci pour votre commentaire.<br /> <br /> Selon l'article considéré ici, il faudrait des températures nocturnes inférieures à 19 ° Celsius. Je n'ai pas vérifié, mais ça me semble curieux.<br /> <br /> Qu'elles tombent aussi bas que 10 ou même 5° chez vous ne semble pas être un facteur vraiment limitant.