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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Quand la Commission européenne se penche sur les systèmes privés de certification de la sécurité des aliments par tierce partie au travers de l’exemple dans quatre pays…

7 Novembre 2018 , Rédigé par Seppi Publié dans #Albert Amgar, #Alimentation, #Santé publique

Quand la Commission européenne se penche sur les systèmes privés de certification de la sécurité des aliments par tierce partie dans quatre pays pris pour exemples…

 

Albert Amgar*

 

 

« L'agence européenne se penche sur les contrôles officiels et industriels en Belgique », selon Food Safety News du 7 novembre 2018.

 

Il s’agit plus précisément de la DG Santé et sécurité alimentaire « afin de recueillir des informations concernant les synergies entre les contrôles officiels, les autocontrôles des exploitants du secteur alimentaire et les dispositifs de certification par des tiers ».

 

Il y a eu la publication de quatre rapports sur les synergies entre les contrôles officiels et les protocoles internes des opérateurs alimentaires.

 

Des audits ont couvert après le Royaume-Uni, rapport publié le 2 février 2018, l’Allemagne, rapport publié le 11 juin 2018 et la Belgique, rapport publié le 10 octobre 2018 ; celui des Pays-Bas vient d’être publié le 5 novembre 2018.

 

Ne pas se poser la question de pourquoi la France ne figure pas parmi cette liste de quatre pays ; la réponse est sans doute à rechercher dans ce propos : « Notre pays a un bon niveau de maîtrise de la sécurité sanitaire des aliments », selon Marc Mortureux, directeur général de l'Anses, en avril 2015.

 

Qu’en est-il aujourd’hui ? On lira quelques éléments ici et ici

 

L’objectif de la mission était de recueillir des informations sur la façon dont, et la mesure dans laquelle, l’autorité compétente tient compte des résultats des systèmes d’autocontrôle et des dispositifs d’assurance par des tiers* pour organiser des contrôles officiels des denrées alimentaires d’origine animale et non animale.

 

* appelés aussi dispositifs d’assurance qualité certifiés par une tierce partie

 

Pourquoi ai-je choisi le cas de la Belgique ? Tout simplement par facilité, car le rapport d’audit est en français.

 

L'Agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire (AFSCA) en Belgique considère les guides nationaux élaborés par l’industrie et les acteurs belges, et qu’elle a évalués sur le plan scientifique et technique, comme les normes de référence qui, une fois appliquées par les exploitants du secteur alimentaire, offriront le plus haut niveau de garantie de la sécurité des denrées alimentaires produites. L’Agence fournit des incitations aux exploitants du secteur alimentaire sous forme d’une réduction de la fréquence des contrôles officiels et de la contribution due, pour les encourager à élaborer et à mettre en œuvre des systèmes de gestion de la sécurité alimentaire validés sur la base des guides nationaux.

 

Jusqu’à présent et dans la mesure où les exercices de corrélation comparant les guides nationaux avec certaines normes privées de sécurité alimentaire ont permis de conclure que les exigences des dispositifs privés et des guides ne correspondaient pas parfaitement, l’autorité compétente a décidé de se fonder sur l’évaluation des risques destinée à la planification des contrôles officiels et leur mise en œuvre sur le niveau de conformité des systèmes de gestion (ou de management -aa) de la sécurité des aliments avec les seuls guides nationaux.

 

L’agence belge se fonde sur l’évaluation des risques pour la planification et la mise en œuvre des contrôles officiels, sur le degré de conformité des systèmes de management de la sécurité des denrées alimentaires avec les guides nationaux.

 

Cela signifie que le niveau de synergie des contrôles officiels avec ceux effectués par le secteur privé est limité à certains échantillonnages ou activités pour lesquels il n'existe aucun guide national approuvé. Les comparaisons des guides nationaux avec certaines normes privées de sécurité des aliments ont conclu que les exigences ne correspondaient pas.

 

En effet, « L’AFSCA ne peut émettre des conclusions quant aux performances des exploitants du secteur alimentaire certifiés selon un ou des dispositifs de certification par des tiers par rapport aux exploitants du secteur alimentaire non certifiés, car, à ce jour, elle ne tient pas compte de cette certification dans son évaluation des risques pour établir la fréquence d’inspection, et n’exploite donc pas des données pertinentes. »

 

L’AFSCA recherche des moyens afin de mieux intégrer certains systèmes privés de normes de sécurité des aliments dans le système national de contrôle fondé sur les risques. Selon les responsables, l'intégration permettrait de prendre en compte les résultats pour réduire la fréquence des inspections ou réduire la profondeur ou la portée des inspections officielles.

 

L'AFSCA a dit qu'elle souhaitait éviter de donner l'impression aux exploitants du secteur alimentaire qu'il était nécessaire de participer à un système privé ou de donner un avantage commercial à certains systèmes en les « reconnaissant ». L'agence a ajouté qu'il n'y avait aucune assurance qu'elles évolueraient de la même manière que les exigences légales et que des problèmes de confidentialité pourraient entraver l'accès aux résultats d'audit des exploitants du secteur alimentaire certifiés par un système privé.

 

Selon l’AFSCA, « les limitations susceptibles d’être rencontrées dans un système de synergie entre les contrôles officiels et les résultats des contrôles effectués dans le cadre d’une certification selon un dispositif de certification par des tiers sont les suivantes:

 

  • la fiabilité du dispositif de certification par des tiers: le fait que le dispositif de certification par des tiers ne porte pas nécessairement sur toutes les activités des exploitants du secteur alimentaire et que certaines exigences légales ne soient pas explicitement incluses dans le dispositif de certification par des tiers augmente le risque que les auditeurs effectuent une vérification inadéquate, ou n’effectuent aucune vérification, de ces activités et de leur conformité légale;

     

  • l’autorité compétente n’a aucune influence sur l’évolution du contenu du dispositif de certification par des tiers et il n’existe aucune assurance que les dispositifs de certification par des tiers évolueront dans le même sens que les exigences légales;

     

  • des problèmes de confidentialité peuvent freiner l’accès aux résultats d’audit des exploitants du secteur alimentaire certifiés selon un dispositif de certification par des tiers;

     

  • la méconnaissance ou la mauvaise interprétation de ces synergies par les exploitants du secteur alimentaire: l’autorité compétente veut éviter de donner l’impression aux exploitants du secteur alimentaire qu’elle requiert leur participation à un dispositif de certification par des tiers ou qu’elle donne un avantage commercial à certains dispositifs de certification par des tiers en les « acceptant » ou en les « reconnaissant ».

 

L’équipe de la mission d’audit a visité un producteur primaire de denrées alimentaires d’origine non animale, une chaîne de supermarchés et deux sites de production alimentaire,  un pour les denrées alimentaires d’origine animale et l’autre pour les denrées alimentaires d’origine non animale, deux entreprises avec une certification privée et une entreprise non certifiée.

 

 

Systèmes privés de certification

 

L'idée sous-jacente des systèmes privés de normes de sécurité des alimentaire, qui sont volontaires, est que si les exploitants du secteur alimentaire doivent respecter les exigences de ces normes, ils doivent fournir l'assurance qu'ils produisent des aliments avec des niveaux relativement élevés et stables de qualité et de sécurité sanitaire.

 

Les producteurs primaires participants et les autres exploitants du secteur alimentaire certifiés dans le cadre d'un système d'assurance par tierce partie sont soumis à des audits et à des inspections par des organismes de certification.

 

Selon l’AFSCA, « il existe onze dispositifs de certification par des tiers fixant des normes privées de sécurité alimentaire tout au long de la chaîne alimentaire: cinq dans le secteur de la production primaire et six dans le secteur de la transformation. Certains de ces dispositifs de certification par des tiers sont reconnus par l’Initiative mondiale de la sécurité alimentaire (GFSI). »

 

L'AFSCA a reconnu qu'un programme du secteur privé belge couvrant le secteur de la production primaire de produits alimentaires d'origine non animale était équivalent au guide sectoriel national approuvé. La certification donne aux exploitants du secteur alimentaire un certificat attestant qu’ils disposent d’un système d’autocontrôle validé.

 

Déléguer la tâche aux organismes de certification chargés de l’audit et de la validation des systèmes d’autocontrôle des exploitants du secteur alimentaire constitue le principal domaine d’interaction entre les contrôles officiels et ceux effectués par le secteur privé.

 

L'AFSCA considère que les derniers programmes du secteur privé ne peuvent pas être reconnus comme étant totalement équivalents aux guides sectoriels nationaux approuvés. L'équivalence doit être démontrée par les propriétaires des systèmes de certification privée.

 

 

Distributeur

 

Des normes individuelles en matière de sécurité des aliments mises en place par la chaîne de supermarchés visitée concernaient principalement des produits commercialisés sous la marque propre à la chaîne.

 

Des organismes de certification privés sont désignés par le détaillant pour effectuer des audits et un échantillonnage chez les fournisseurs de ces produits afin de s’assurer qu’ils respectent les spécifications relatives aux produits du distributeur. Ce dernier a procédé annuellement à plusieurs milliers d’analyses de produits commercialisés sous sa marque distributeur. En 2016, par exemple, le distributeur rencontré a réalisé, entre autres, 2 600 analyses microbiologiques, 233 essais chimiques et 182 tests ADN aux fins d’une caractérisation des espèces.

 

Cela impose également des exigences aux fournisseurs afin d'être autorisés à fournir leurs produits. Les grands exploitants du secteur alimentaire doivent être certifiés dans le cadre de régimes tels que le BRC, l’IFS ou FSSC 22000.

 

Les fournisseurs de taille moyenne certifiés selon Comeos, fédération des petites et moyennes entreprises et les petits producteurs artisanaux doivent uniquement être enregistrés ou approuvés par l'AFSCA.

 

Le distributeur a insisté sur le fait que le système d’autocontrôle validé était insuffisant pour les fournisseurs, car il s’agissait d’un système national, contrairement à d’autres normes internationalement reconnues. Cependant, la combinaison du système d’autocontrôle et ISO 22000 a « très bien » fonctionné.

 

Au moment de la mission, l'AFSCA avait approuvé 34 guides sur les produits agroalimentaires, l'agriculture, la transformation, la vente au détail et le transport. Quatorze organismes de certification ont été agréés pour la validation des systèmes d’autocontrôle des exploitants du secteur alimentaire.

 

 

Réduction des contrôles et des coûts

 

L'AFSCA encourage les exploitants du secteur alimentaire à réduire la fréquence des contrôles officiels et la redevance perçue, afin de les encourager à développer et à mettre en œuvre des systèmes de management de la sécurité des aliments validés sur la base des guides nationaux.

 

Selon les données de fin 2016, « 22 753 exploitants du secteurs alimentaires possédaient un système d’autocontrôle pleinement validé, un statut qui leur donne droit à une réduction de 75 % de la contribution annuelle due à l’AFSCA et à une réduction maximale de 50 % de la fréquence des inspections de l’AFSCA, en fonction des activités menées par les exploitants du secteurs alimentaires concernés. »

 

Le niveau de contribution dépend de l'activité du secteur et de la taille de l'exploitant. Le montant économisé par les exploitants du secteur alimentaire dont le système d’autocontrôle est pleinement validé est compris entre quelques euros et plus de 10 000 euros.

 

En ce qui concerne l’échantillonnage officiel, la coopération entre l’AFSCA et Belgapom liée à l’échantillonnage sectoriel des pommes de terre fournit à l’autorité compétente des résultats de laboratoire supplémentaires pour ce secteur, ce qui permet une meilleure analyse des risques aux fins de la planification et d’une meilleure orientation des ressources et des efforts d’échantillonnage officiel.

 

A noter enfin, « L’AFSCA a instauré et applique des mesures visant à garantir la fiabilité des résultats obtenus par les organismes de contrôle, auxquels a été déléguée la tâche de valider les systèmes de gestion de la sécurité alimentaire des exploitants du secteur alimentaire. Néanmoins, l’Agence n’exploite pas tout le potentiel des données produites par les organismes de contrôle, dans le cadre de leur tâche déléguée. »

 

La mission d’audit au Royaume-Uni a constaté que des synergies entre les systèmes de certification par tierce partie et les contrôles officiels existaient depuis de nombreuses années.

 

La Food Standards Agency reconnaît l'adhésion et la certification de certains systèmes afin de réduire la fréquence des contrôles officiels.

 

L'agence travaille également sur le programme « Regulating Our Future » afin de repenser la manière dont les contrôles officiels sont exécutés.

 

L’Allemagne a un taux élevé d’adhésion aux systèmes privés de normes de sécurité des aliments, mais il n’existe aucune synergie entre ces contrôles privés et les contrôles officiels. Les inspecteurs ont émis des réserves quant à la non-impartialité des contrôles effectués par le secteur privé et à la possibilité de créer des synergies avec les contrôles officiels.

 

« En particulier, le fait qu'il existe une relation financière entre les opérateurs alimentaires et les organismes de certification et que les audits des programmes sont principalement annoncés, avec un préavis, peut nuire à la fiabilité des informations et annuler l'effet d'autres mesures qui ont été mises en place pour assurer la fiabilité », selon le rapport.

 

Concernant les Pays-Bas, « Les systèmes de certification par tierce partie du secteur de l’horeca ou de la transformation des aliments sont soumis à un processus d'évaluation rigoureux et approfondi par les autorités compétentes avant d'être acceptés d’être pris en compte afin de réduire l'étendue et la fréquence des contrôles officiels. Les critères par rapport auxquels les systèmes du secteur de la transformation sont évalués et référencés ont été définis par la ‘Food Confidence Taskforce'. L'une des exigences auxquelles l'autorité compétente accorde une attention particulière concerne les mesures visant à éliminer la prévisibilité des contrôles effectués par des systèmes de certification par tierce partie ; l'autorité compétente s'attend à ce qu'un certain nombre d'audits dans le cadre d'un programme soient effectués sans annonce préalable.

 

D'après l'expérience acquise et l'analyse des données collectées jusqu'à présent, les opérateurs du secteur alimentaire certifiés pour l'un des systèmes acceptés sont considérés par l'autorité compétente comme plus performants et plus respectueux des exigences légales. En ce qui concerne les systèmes acceptés dans le secteur de la transformation, l’autorité compétente a noté que les différences entre les trois systèmes acceptés (FSSC 22000, IFS Food Standard, BRC Global Standard for Food Safety -aa) étaient relativement faibles.

 

Les principales chaînes de distribution alimentaire ont mis en place leurs propres normes pour leurs fournisseurs de produits à marque distributeur, qui sont soumis à de fréquentes analyses de laboratoire pour la sécurité des aliments et à une vérification par le biais d'audits complémentaires de leurs fournisseurs.

 

Les synergies existantes dans le secteur de l’horeca ont eu un impact négligeable pour l'autorité compétente en termes d'économie de ressources, en raison du très faible nombre d'exploitants du secteur alimentaire actuellement certifiés. Cependant, sur la base des résultats préliminaires d'un projet pilote mis en œuvre en 2017, près de 30% du temps consacré aux inspections officielles a permis d'exploiter des synergies avec les systèmes du secteur de la transformation. Compte tenu du temps consacré par l'autorité compétente aux évaluations, la surveillance et la vérification de leurs performances, l’économie nette effective est probablement plus faible. Cependant, l'introduction par l'autorité compétente en 2018 d'un logiciel de technologie de l'information augmentera les avantages à tirer des synergies et entraînera une économie accrue de ressources. »

 

Et en France me direz-vous ?

 

Selon ce document du ministère de l’agriculture sur la sécurité sanitaire des aliments, on apprend :

 

Depuis 2010, la DGAL encourage les entreprises à s’engager dans cette démarche de certification ISO 22000, qui leur permet de développer un système de management de la qualité tout en respectant les exigences réglementaires en termes de sécurité sanitaire des aliments, qui présente le grand intérêt de mettre la sécurité sanitaire au cœur du management de l’entreprise et qui facilite la démonstration de la conformité des pratiques de l’entreprise aux autorités administratives de contrôle.

 

Depuis 2014, la DGAL travaille sur la possibilité de mettre en place un dispositif d’allègement du contenu de l’inspection pour les entreprises certifiées ISO 22000.

 

On ne va donc pas déranger nos autorités qui travaillent sur le sujet depuis 2014…

 

______________

 

* Albert Amgar a été pendant 21 ans le dirigeant d'une entreprise de services aux entreprises alimentaires ; il n'exerce plus aujourd'hui, car retraité. Au travers de son blog il nous a livré des informations dans le domaine de l’hygiène et de la sécurité des aliments. Désormais, je l'accueille avec plaisir.

 

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