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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Produire de l'humus : le « sans labour » n'est pas toujours synonyme de protection du climat

28 Janvier 2024 Publié dans #Agronomie, #Climat, #critique de l'information, #Article scientifique

Produire de l'humus : le « sans labour » n'est pas toujours synonyme de protection du climat

 

Karl Bockholt, AGRARHEUTE*

 

 

© agrarfoto

Échantillon de bêche pour l'augmentation du taux d'humus : pour protéger le climat, il ne suffit pas de conserver les stocks d'humus existants en tant que réservoirs de carbone. Une analyse de 100 publications récentes sur le stockage de carbone (C) dans les sols montre que la grande majorité utilise les termes de manière erronée ou ambiguë. Pour pouvoir évaluer la formation d'humus, les différences entre puits de carbone, émissions négatives, protection du climat et formation d'humus doivent être claires.

 

 

Dans le débat sur la protection du climat, les termes techniques ne sont pas toujours utilisés correctement. Il ne s'agit pas ici de jouer sur les mots. Des expressions imprécises peuvent conduire à des attentes exagérées, par exemple en ce qui concerne le travail du sol sans labour (pfluglose Bodenbearbeitung). AGRARHEUTE apporte des éclaircissements.

 

 

Stockage de carbone, puits de carbone – est-ce la même chose ? La fixation du carbone dans le sol par la formation d'humus conduit-elle automatiquement à une meilleure protection du climat ? Dans le débat sur la protection du climat, beaucoup de choses se confondent. Même les publications scientifiques n'utilisent pas toujours correctement les termes techniques. C'est ce que montre une étude récente pour laquelle 100 publications internationales ont été analysées.

 

 

Qu'entend-on par puits de carbone (C) ?

 

L'étude sur le système des sols s'est concentrée sur les termes suivants :

 

  • séquestration du carbone (C) ;

     

  • émission négative.

 

Qu'entend-on par là ? Le carbone qui s'échappe des sols sous forme de dioxyde de carbone (CO2), un gaz à effet de serre, et qui est donc émis dans l'atmosphère, peut être capturé à nouveau et fixé dans le sol sous forme d'humus, sans nuire au climat. Si, dans un bilan, la quantité de C de l'atmosphère fixée dans le sol est supérieure à celle émise, on parle d'émissions négatives ou de séquestration de C. Il faut donc stocker du carbone supplémentaire dans le sol sous forme d'humus (puits de carbone). Pour cela, il ne suffit pas de conserver les stocks d'humus existants comme réservoirs de C.

 

 

Pourquoi de nombreux sols perdent-ils du carbone (C) ?

 

Les termes doivent être utilisés correctement. « De nombreux champs en Europe perdent actuellement de l'humus et donc du carbone du sol en raison du changement climatique ou d'une exploitation peu durable », explique le professeur Axel Don de l'Institut Thünen pour la Protection du Climat Agricole, à Braunschweig. De nombreuses possibilités de reconstitution de l'humus ne feront donc dans un premier temps que réduire ou stopper la perte de C sur les surfaces. Cela ne conduit pas à une séquestration de C, mais « seulement » à une réduction de la perte de C. Il n'y aura donc pas d'émissions négatives à cet endroit, car les émissions de gaz à effet de serre seront toujours supérieures à la séquestration du CO2 par la reconstitution de l'humus.

 

 

En quoi le travail réduit du sol est-il vraiment utile à la protection du climat ?

 

Il est néanmoins bon pour le climat que les émissions diminuent par rapport à avant. Mais seulement si cela n'entraîne pas d'émissions supplémentaires ailleurs. C'est une condition pour pouvoir évaluer si la constitution d'humus contribue réellement à la protection du climat. Un travail du sol réduit peut en même temps augmenter les émissions de protoxyde d'azote du sol. Comme le protoxyde d'azote est presque 300 fois plus nocif pour le climat que le CO2, de petites quantités supplémentaires peuvent détruire l'effet de protection climatique de la formation d'humus. Ou même conduire à une augmentation globale des gaz à effet de serre.

 

 

Comment toutes les émissions de gaz à effet de serre sont-elles prises en compte ?

 

Si l'on veut évaluer l'effet climatique de la formation d'humus, il faut donc tenir compte de toutes les émissions de gaz à effet de serre. Sinon, on risque de tirer des conclusions totalement erronées. Si tous les effets sont additionnés et qu'il y a toujours plus de gaz à effet de serre séquestrés que d'émissions, alors le terme d'émissions négatives est correct.

 

 

Que montre l'analyse des publications sur la formation d'humus ?

 

L'analyse de 100 publications récentes sur la séquestration du C dans les sols montre que la grande majorité utilise les termes de manière incorrecte ou ambiguë.

 

Une nouvelle publication de Thünen clarifie les définitions et les différences entre :

 

  • séquestration de C :

     

  • émissions négatives ;

     

  • protection du climat et

     

  • formation d'humus.

 

Ce faisant, les chercheurs abordent les pièges liés à ces termes. Cela devrait améliorer la communication entre la science, la politique, l'économie et la société, afin de mieux évaluer la contribution de la formation d'humus à la protection du climat. Vous trouverez l'étude complète ici.

 

Avec du matériel de l'Institut Thünen.

 

_________________

 

Karl Bockholt est rédacteur cross-média chez AGRARHEUTE, responsable des grandes cultures et des prairies. Il travaille depuis plus de 30 ans au Deutscher Landwirtschaftsverlag (dlv), après avoir travaillé pour Feld & Wald (Girardet) et agrar-praxis (Konradin). Agriculteur et ingénieur diplômé, il gère sa ferme dans le Münsterland en tant qu'activité secondaire. Il est cavalier, chasseur et amoureux de la nature.

 

Source : Humus aufbauen: Pfluglos Ackern ist nicht immer gleich Klimaschutz | agrarheute.com

 

Ma note : L'étude, « Carbon sequestration in soils and climate change mitigation—Definitions and pitfalls » (séquestration du carbone dans les sols et atténuation du changement climatique – définitions et pièges) est internationale et inclut des chercheurs français. Les auteurs en sont : Axel Don, Felix Seidel, Jens Leifeld, Thomas Kätterer, Manuel Martin, Sylvain Pellerin, David Emde, Daria Seitz, Claire Chenu.

 

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