Pourquoi cela continue-t-il toujours ainsi ?
Willi l'agriculteur*
Allemagne, tes paysans the quittent en silence
Il y a des jours où je suis frustré et où j'ai envie de jeter l'éponge. Aujourd'hui, c'est encore un de ces jours. Nous sommes samedi soir et je n'ai toujours pas d'article pour dimanche. Non pas parce que je suis à court de sujets (j'ai encore plus de 130 articles en mémoire), mais parce que je me demande à quoi ça sert. En dehors de la bulle agricole, est-ce que quelqu'un s'intéresse à la situation des agriculteurs ? Et je ne parle pas tant de la situation financière que des sentiments, des réflexions sur l'avenir que nous avons chaque jour.
Je ne parle pas seulement de la politique du ministère allemand de l'Agriculture, représenté à l'extérieur par Cem Özdemir. La politique est menée par d'autres et il n'y a plus de place pour les agriculteurs conventionnels. Le bio est mis en avant, tout ce qui « a un rapport avec la chimie » est le diable. Avec le BUND, la NABU et le WWF, « on » est d'accord pour dire que CRISPR/Cas (un nouveau système d'amélioration des plantes) ne doit pas exister. Et ce, bien qu'Urs Niggli, ancien directeur du FIBL (Institut de Recherche de l'Agriculture Biologique), estime que l'utilisation des ciseaux génétiques est raisonnable, même en agriculture biologique.
J'ai de plus en plus l'impression que la politique agricole se fait contre les agriculteurs (conventionnels). Cela touche particulièrement les éleveurs, qui sont découragés par tous les moyens disponibles. Il y a quelques jours à peine, j'ai eu une conversation téléphonique au cours de laquelle un père m'a annoncé que son fils avait décidé d'abandonner définitivement l'élevage de porcs. Pourtant, les porcheries ne sont pas encore vieilles et n'ont pas encore été payées. Mais si on exige maintenant 0,5 mètre carré de plus par truie que ce qu'offre le bâtiment actuel, l'argent manquera tout simplement pour d'autres investissements. Bien pire encore : il manque la conviction que chaque nouveau règlement s'appliquera également à la période d'amortissement. L'exploitation vient d'en faire l'expérience et le « défenseur des agriculteurs », comme Cem Özdemir s'est un jour appelé lui-même, a beau flûter, personne ne le croit plus parmi les agriculteurs.
Mais au niveau européen aussi, la stratégie « Farm to Fork » propose une évolution qui coûterait la vie à de nombreuses exploitations. Si personne n'arrête ce projet.
Depuis des semaines, je n'ai plus de nouvelles du DBV (Deutscher Bauernverband – Union des Agriculteurs Allemands). Stop, ce n'est pas vrai : il a récemment fait réaliser une étude sur les effets du SUR (un système de réduction des produits phytosanitaires). Avec pour résultat que les choses iront très mal si les réglementations sont appliquées telles quelles.
Monsieur Paetow, président de la DLG (Deutsche Landwirtschafts-Gesellschaft – Société d'Agriculture Allemande), préférerait à une « taxe sur les pesticides » un quota, c'est-à-dire une quantité déterminée de produits phytosanitaires attribuée à chaque exploitation. Donc le principe de la RDA 2.0. Qu'est-ce qui lui a pris pour faire de telles propositions ? Ou bien a-t-il été assis trop longtemps à côté de Cem Özdemir ?
Les femmes rurales, les jeunes ruraux ? J'aime beaucoup Mme Bentkämper et Theresa Schmidt sur le plan humain, mais je n'entends pas de véritable opposition. Il suffirait pourtant de dire « non » à la bonne occasion.
Que conseilleriez-vous à votre enfant s'il était sur le point de prendre la décision de reprendre l'exploitation de ses parents ? Je fais le tour de l'espace germanophone avec mes conférences, et j'entends trois déclarations.
-
Il/elle aime tellement l'agriculture et nous le/la soutenons. Tout ira bien et on mangera toujours.
-
Je déconseille à mes enfants de reprendre l'exploitation.
-
Nous préparons actuellement la sortie, nous arrêtons et nous louons. Les enfants ne veulent pas s'exposer à la pression croissante de la société.
Il y a de bonnes raisons pour chacune de ces trois affirmations et c'est pourquoi le choix de la voie à suivre par la famille est une décision individuelle. Mais il s'agit d'influences très lourdes et, outre la considération purement économique, également émotionnelles, car c'est souvent l'œuvre de générations qui est mise en jeu. Chaque agriculteur le confirmera, les non-agriculteurs ne peuvent souvent pas le comprendre.
Je ne suis pas le seul à me poser cette question, mais probablement aussi beaucoup d'autres qui n'ont aucune compréhension pour la politique actuelle. Cela continue parce qu'aucun des décideurs n'a le courage de changer quoi que ce soit. J'entends par là tous les partis politiques, en particulier les anciens grands partis populaires.
Je ne comprends pas que nos grandes représentations professionnelles ne s'opposent pas au courant dominant. Ce serait si simple. Il suffirait que les personnes investies d'une fonction disent « non ». Est-ce vraiment si difficile ?
_______________
/image%2F1635744%2F20230523%2Fob_ebf3c7_capture-bauer-willi.jpg)