Tendances alimentaires et obésité aux États-Unis d'Amérique : un article « scientifique »
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L'article de Mme Catherine Regnault-Roger, « La peur des OGM en Europe a été fabriquée de toutes pièces », publié dans l'Opinion le 19 février 2020 a donné lieu à bien des commentaires sur Twitter. En résumé, au moins pour une partie :
(Source)
Un gazouilleur dont nous tairons le nom par charité et précaution – son compte Twitter est encombré de choses disons... désagréables – a gazouillé :
« Mme Catherine Regnault-Roger ignore manifestement les études récentes: corrélation entre consommation de maïs OGM et obésité aux Etats-Unis: https://ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3133759/figure/F4/… Ainsi la consommation de produits dérivés du maïs OGM est peut-être indirectement responsable de milliers de morts »
Un autre de ses gazouillis apporte un élément d'information.
Ne souhaitant pas me voir opposer un cinglant « Merci de bien vouloir cesser d'étaler votre ignorance » – ben oui, les réseaux sociaux selon Umberto Eco... –, je suis allé voir « Survey of American food trends and the growing obesity epidemic » (enquête sur les tendances alimentaires américaines et l'épidémie croissante d'obésité) de Qin Shao and Khew-Voon Chin.
En voici le résumé (nous découpons) :
« L'augmentation rapide de l'incidence de l'obésité est devenue l'un des problèmes de santé publique mondiaux les plus urgents ces dernières années. Les causes étiologiques sous-jacentes de l'obésité, qu'elles soient comportementales, environnementales, génétiques ou une combinaison de plusieurs d'entre elles, n'ont pas été complètement élucidées. L'épidémie d'obésité a été attribuée à la disponibilité, l'abondance et la surconsommation des aliments à haute teneur énergétique.
Nous avons déterminé ici par la corrélation de Pearson la relation entre la consommation de divers types d'aliments et l'obésité croissante en utilisant les données de disponibilité des aliments ajustées en fonction des pertes des Services de Recherche Économique (ERS) du Département de l'Agriculture des États-Unis (USDA) ainsi que les données de prévalence de l'obésité du Système de Surveillance des Facteurs de Risques Comportementaux (BRFSS) et de l'Enquête Nationale sur l'Examen de la Santé et de la Nutrition (NHANES) dans les Centres de Contrôle et de Prévention des Maladies (CDC).
Notre analyse a montré que l'apport calorique total et la consommation de sirop de maïs à haute teneur en fructose (HFCS) n'étaient pas en corrélation avec les tendances à la hausse de l'obésité. La consommation d'autres principaux types d'aliments, notamment le poulet, les matières grasses laitières, les huiles d'assaisonnement et de cuisson et le fromage, n'était pas non plus en corrélation avec les tendances de l'obésité.
Cependant, nos résultats ont révélé de manière surprenante que la consommation de produits à base de maïs était corrélée à l'augmentation de l'obésité et était indépendante du sexe et de la race/origine ethnique dans la dynamique de la population aux États-Unis. Par conséquent, nous avons pu démontrer un nouveau lien entre la consommation de produits à base de maïs et les tendances à la hausse de l'obésité qui n'a pas été précédemment attribué à l'épidémie d'obésité.
Cette corrélation coïncide avec l'introduction de maïs génétiquement modifiés dans la chaîne alimentaire humaine, soulevant ainsi une nouvelle hypothèse qui devrait être testée dans des modèles moléculaires et animaux d'obésité. »
Il y a une réponse simple à ce genre de chose : « correlation is not causation », une corrélation n'est pas un lien de cause à effet.
On peut poursuivre : de quels quels produits du maïs s'agit-il ? Portent-ils une caractéristique GM, c'est-à-dire sont-ils différents des produits conventionnels ?
Allons un peu plus loin : l'hypothèse suggérée est que la consommation de produits issus du maïs est facteur d'obésité, et pire – ou youpie, j'ai trouvé un truc qui me conforte dans mes préjugés – c'est les HOGÉHÈM ! Et si on inversait ? Et si les gens, consommant plus et trop – ce que reflète la prévalence de l'obésité –, se sont tournés vers davantage de produits issus du maïs pour satisfaire leur appétit ?
Si vous voulez en savoir plus sur ce qu'ont fait les deux auteurs, voici un extrait de leur article :
« Nous avons également observé une corrélation positive entre l'apport total de fromage et l'obésité (Fig. 3D). Cependant, une analyse plus approfondie a révélé que, à l'exception du cheddar et de la mozzarella, la plupart des autres fromages, tels que le provolone, le parmesan, le fromage suisse, le fromage bleu et autres, ont montré peu ou pas de changements dans les tendances de consommation entre 1995 et 2008, et l'analyse de Pearson du cheddar (Fig. 3E) ou de la mozzarella (Fig. 3F) n'a pas montré de corrélation avec l'augmentation de l'obésité. »
Le ridicule ne tue pas, même en sciences ! Ou, plutôt ici, en « sciences ».
Et vous savez quoi ? Selon cette étude, les données de disponibilité des aliments ajustées en fonction des pertes ne devraient pas être utilisées comme fondements pour définir des politiques publiques.
Mais pour dénigrer les OGM...