« Glyphosate : l'Europe dans l'impasse »... l'AFP et le Monde aussi
Jeudi 9 novembre 2017 : le SCOPAFF (Comité Permanent des Plantes, des Animaux, des Denrées Alimentaires et des Aliments pour Animaux) vote sur la dernière proposition de la Commission Européenne sur le renouvellement de l'autorisation du glyphosate – pour une durée de cinq ans – et ne dégage pas de double majorité (55 % des États membres représentant 65 % de la population), ni pour, ni contre la proposition. Celle-ci sera donc soumise à un comité d'appel qui devrait se réunir d'ici fin novembre. L'autorisation actuelle du glyphosate expire le 15 décembre 2017.
Le jeudi 9 novembre 2017 fut aussi un jour de grande activité pour le Monde Planète. Quatre articles...
« Journée décisive pour le sort du glyphosate », du Monde avec AFP ;
Le nombre de manifestants est impressionnant...
« En direct : pas d’accord européen sur l’avenir du glyphosate LIVE », non signé ;
Ci-dessus, la première illustration de cet article de questions réponses
« L’Union européenne ne trouve pas d’accord sur le renouvellement du glyphosate », du Monde avec AFP ;
Le parti pris du Monde s'exprime aussi par le choix des photos
C'est suivi, le 10 novembre 2017 (date sur la toile) par « Glyphosate : l’Europe dans l’impasse », de Mme Stéphane Horel.
C'est la première illustration, pour la série, à ne pas être outrageusement militante...
On aimerait que notre agence nationale de presse diffuse des informations objectives, et non tronquées. Mais, voici du premier article repris par le Monde :
« Entrant notamment dans la composition du Roundup, du groupe Monsanto, le glyphosate est très critiqué par les défenseurs de l’environnement. Il a été classé en 2015 "cancérogène probable" pour l’homme par le Centre international de recherche sur le cancer, une agence de l’Organisation mondiale de la santé. »
Et de son deuxième :
« Le glyphosate, très utilisé par les agriculteurs, représente 25 % du marché mondial des herbicides. Entrant notamment dans la composition du Roundup, du groupe Monsanto, il est très critiqué par les défenseurs de l’environnement. Il a récemment été classé "cancérogène probable" pour l’homme par le Centre international de recherche sur le cancer, une agence de l’Organisation mondiale de la santé. »
On cherchera désespérément une référence aux classements contradictoires de la bonne douzaine d'autres agences d'évaluation, notamment européennes (EFSA et EchA) et internationales (la FAO et l'OMS, la maison-mère du CIRC).
C'est ce qu'on appelle l'« information ».
« En direct... » nous livre sur une colonne annexe « Les faits » :
« Très utilisé par les agriculteurs, le glyphosate est notamment utilisé dans le Roundup du groupe Monsanto. Il a été classé "cancérogène probable" pour l'homme par le Centre international de recherche sur le cancer en 2015. »
On retrouve cela dans le texte principal, toujours sans le complément indispensable pour la bonne compréhension du sujet. Il y a aussi :
« L’Europe doit décider si elle réautorise le pesticide le plus utilisé au monde, classé par l’OMS « cancérogène probable » pour l’homme. La position française est confuse. »
Mais les « journalistes » ont quand même été obligés de sortir – un peu – de la propagande :
« quels sont les arguments des pour face aux scientifique qui classe ce produit comme "cancérogène probable"?
-Emilie
Les Etats qui votent pour le renouvellement pour cinq ans s'en remettent à l'avis des deux agences d'expertise européennes (Autorité européenne de sécurité des aliments et Agence européenne des produits chimiques), qui jugent le glyphosate non cancérogène, en contradiction avec le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), agence des Nations unies. »
Petite explication de trucs : les sigles sont omis pour les institutions européennes... cela diminue l'importance visuelle qu'elles reçoivent. Et « en contradiction » donne implicitement tort à ces institutions.
Cet échange avec des lecteurs avait été introduit par :
« Après des semaines de débats, la Commission doit soumettre ce jeudi 9 novembre sa proposition sur la durée de renouvellement de cet herbicide jugé "cancérogène probable" pour l'homme en 2015, présent dans le Roundup de Monsanto. La licence d'exploitation du glyphosate dans l'Union européenne expirera le 15 décembre. »
Dans le deuxième texte sans signature, « ...ce qu'il faut retenir », il y a... « L'essentiel » :
« Les Etats membres de l’Union européenne (UE) n’ont pas réussi à trouver d’accord, jeudi 9 novembre, sur la durée de renouvellement du glyphosate, un désherbant classé comme "cancérogène probable" en mars 2015 par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), agence dépendant de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). »
Restons sur le même créneau. Dans la version papier, il y a un intertitre « "Cancérigèn e probable" », ce qui donne dans le texte :
« En mars 2015, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), une agence spécialisée des Nations unies (ONU), avait classé le glyphosate "cancérigène probable" pour l'homme. »
Silence sur tout le reste... Les évaluations des autres institutions ; les scandales qui polluent le travail du CIRC ; les « Portier Papers » ; la toute dernière étude scientifique sur les liens entre glyphosate et cancers dans le cadre de l'Agricultural Health Study, que Mme Horel ne pouvait ignorer au moment où elle a écrit son texte.
La description des résultats du vote est tout aussi ahurissante :
« Soutenue par des pays ne représentant que 37 % de la population de l'UE, la proposition souffre d'un manque d'adhésion évident, malgré une révision à la baisse. »
Et :
« Une opposition déterminée [de la France] qui a entraîné d'autres pays dans son sillage. »
Rappelons les résultats du 9 novembres 2017 :
Pour : Danemark, Espagne, Estonie, Finlande, Hongrie, Irlande, Lettonie, Lituanie, Pays-Bas, République Tchèque, Royaume-Uni, Slovaquie, Slovénie, Suède (14).
Contre : Autriche, Belgique, Chypre, Croatie, France, Grèce, Italie, Luxembourg, Malte (9)
Abstention : Allemagne, Bulgarie, Pologne, Portugal, Roumanie (5).
« Soutenue par des pays ne représentant que 37 % de la population de l'UE... » ? L'opposition est non seulement minoritaire en termes de pays pays, mais aussi de population (32 %).
On se moque vraiment du monde dans le Monde !
Quant au grand succès français, les tours de table successifs du 25 octobre 2017 montrent que la situation est plus complexe et qu'il n'y a pas de quoi pavoiser.
Le succès est sans nul doute indéniable par rapport au vote du 24 juin 2016, où la France avait rejoint Malte pour voter contre la proposition, alors de quinze ans (elle avait recueilli 19 votes favorables). Il est en revanche très relatif par rapport aux sondages du 25 octobre 2017. Mais ne gâchons pas le plaisir de M. Nicolas Hulot.