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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Élever des poulets à croissance lente : est-ce une bonne idée ?

31 Janvier 2017 , Rédigé par Seppi Publié dans #Steve Savage

Élever des poulets à croissance lente : est-ce une bonne idée ?

 

Steve Savage*

 

 

L'un des défis pour un consommateur d'aliments modernes est de savoir ce qu'il faut croire ou ne pas croire en termes de récits sur la production alimentaire. Une nouvelle campagne prétend que revenir à des races de poulets plus anciennes, à croissance plus lente, est la bonne chose à faire. Il y a de bonnes raisons de rejeter cette idée.

 

La plupart des Américains aiment manger du poulet. En moyenne, chacun d'entre nous en consomme environ 45 kilos par an, soit un triplement par rapport à la consommation par habitant en 1960 [ma note : en France : 16,7 kg en 2014]. Les producteurs de poulet ont répondu à cette demande croissante, alors même que notre population a augmenté dans le même temps. Ce qui était autrefois un aliment de luxe est devenu une option très abordable. Le poulet reste un choix intéressant sur le plan économique pour les consommateurs, en grande partie en raison de l'augmentation de l'efficacité de la production des poulets modernes. En particulier au cours du siècle dernier, les éleveurs de poulets ont constamment accouplé leurs meilleurs coqs à leurs meilleures poules et ont fait évoluer ainsi la génétique de leur cheptel vers une efficacité accrue. Aujourd'hui, les poulets sont les plus efficaces de nos animaux producteurs de viande en termes de quantité de grain qu'il faut pour produire un kilogramme de produit final. Cela signifie également plus d'efficacité en termes d'utilisation de l'eau et des sols. Globalement, cette histoire est un bon exemple de durabilité croissante.

 

 

Bien que ces progrès aient été positifs pour les consommateurs et l'environnement, certains militants disent que nous devrions retourner à l'utilisation de races de poulets plus anciennes, à croissance lente. Ils affirment que la croissance rapide compromet le bien-être des volailles et que les poulets à croissance lente constituent un choix plus éthique. L'argument de la croissance lente est que le gain de poids du poulet a dépassé son développement osseux de sorte que le poulet devient physiquement handicapé, du moins dans le cas des oiseaux gardés pour une longue durée comme reproducteurs. Dans un récent article de Dan Charles pour National Public Radio (NPR), cette préoccupation semblait être soutenue par William Muir, un expert indépendant en zootechnie de l'Université de Purdue. J'ai écrit au Dr Muir et il m'a répondu que ses propos avaient été déformés. Lui et d'autres experts de l'industrie disent que la sélection a été axée simultanément, chez le poulet, sur le gain de poids et la solidité osseuse.

 

Selon plusieurs mesures objectives, les poulets modernes semblent être mieux lotis. Les taux de mortalité ont considérablement baissé. L'ambiance des poulaillers est mieux maîtrisée et les bandes sont protégées contre les maladies par la vaccination. Les antibiotiques étaient utilisés par le passé pour améliorer la santé intestinale, mais cette pratique a été progressivement éliminée. À partir de 2017, il n'y a plus d'administration d'antibiotiques à double usage, animaux/humains, pour améliorer la croissance chez le poulet. Ce site propose une vidéo utile sur l'élevage du poulet.

 

Whole Foods, le distributeur haut de gamme, demande à ses fournisseurs de revenir aux races à croissance lente. Certains groupes de défense des droits des animaux exercent une pression similaire sur les entreprises qui fournissent du poulet aux restaurants. Y a-t-il vraiment un conflit entre la durabilité et le bien-être des animaux quand il s'agit de notre viande la plus populaire ?

 

 

En tant que consommateurs, nous ferions bien d'être sceptiques quant à l'affirmation selon laquelle la croissance rapide est mauvaise pour les volailles. Tout ce que vous entendez sur les poulets n'est pas vrai. Par exemple, de nombreux consommateurs ont été convaincus qu'ils devraient acheter du poulet étiqueté comme n'ayant pas reçu d'hormones, alors même qu'aucun poulet ne reçoit d'hormones, et qu'ils n'en ont pas reçu depuis les années 1950.

 

La semaine dernière, le National Chicken Council (NCC) a publié un rapport détaillé sur ce que signifiait un retour aux poulets à croissance lente en termes d'utilisation des ressources et de coûts de production. J'ai extrait quelques-unes des statistiques qui m'ont paru les plus convaincantes en tant que chercheur dans le domaine du végétal. Dans le cas hypothétique où un tiers de l'industrie du poulet retournerait aux volailles à croissance lente, cela réduirait considérablement l'offre globale de poulet pour, en contrepartie, un allongement limité, de 14 jours, du cycle de croissance des oiseaux. La baisse de l'efficacité de l'utilisation des aliments se traduirait par une augmentation de 15,2 millions de tonnes d'aliments nécessaires à la production de poulets, ce qui représente 670.000 bennes agricoles de céréales. Actuellement, chaque hectare de grain (maïs/soja) peut nourrir 850 oiseaux. La même quantité ne nourrira que 550 poulets à croissance lente. Cela se traduirait par 3 millions d'hectares de terres agricoles nécessaires pour soutenir une conversion de 1/3 [ma note : ces 3 millions d'hectares représentent environ un dixième de la surface agricole utile de la France]. Il y a aussi des ramifications pour l'utilisation de l'eau, la quantité de fientes produite (13 millions de tonnes) et, bien sûr, le coût (9 milliards de dollars au niveau du producteur et bien plus au niveau du consommateur).

 

Le NCC encourage les industries de la restauration et du commerce de détail à tenir pleinement compte de toutes les ramifications économiques et environnementales d'un changement potentiel dans la génétique du poulet. Il soutient également la recherche afin d'évaluer objectivement les questions concernant le bien-être et la santé des animaux en fonction du taux de croissance.

 

Il est probable que certains acteurs de l'industrie alimentaire pourraient profiter de la création d'une autre catégorie de vente de viande à prix élevé. Toutefois, il convient de se demander si c'est effectivement une démarche responsable. Les consommateurs ont de bonnes raisons de réfléchir à la question avant de suivre cette campagne de marketing.

 

_______________

 

* Steve Savage est un scientifique agricole (phytopathologie) qui a travaillé pour la Colorado State University, DuPont (développement de fongicides), Mycogen (développement de solutions de biocontrôle), et a exercé ces 13 dernières années l'activité de consultant indépendant. Son site blogging est Applied Mythology. Vous pouvez le suivre sur Twitter @grapedoc.

 

Et si beaucoup de ce que vous pensez savoir sur l'agriculture et l'alimentation n'était pas vrai ? Que faire s'il y a des « mythes » qui ont été répandus intentionnellement, et surtout sans le vouloir, sur ces questions ? Que faire si la vérité sur ces questions importe pour l'avenir de l'humanité ? Voilà l'objet de ce blog.

 

Source : https://www.geneticliteracyproject.org/2017/01/26/breeding-slower-growing-chickens-good-idea/

 

qui l'a repris de :

 

http://appliedmythology.blogspot.co.ke/2017/01/whole-foods-wants-to-sell-you-slower.html?m=1

 

 

 

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