L’extinction de 75% des insectes : comment se perpétue une légende scientifique
Nous avons signalé l'excellent article de M. Philippe Stoop, « L’extinction de 75% des insectes : Comment naît une légende scientifique » paru dans European Scientist.
M. Philippe Stoop a peut-être inventé le concept de « presse scientifique d'opinion ». Partant de deux études sur la « disparition des insectes », il a démontré avec brio le hiatus entre les données brutes et les modélisations dans deux articles.
Il s'agissait de « More than 75 percent decline over 27 years in total flying insect biomass in protected areas » (un déclin de plus de 75 pour cent en 27 ans de la biomasse totale d'insectes volants dans des zones protégées) de Caspar A. Hallmann et al. et de « Arthropod decline in grasslands and forests is associated with landscape-level drivers » (le déclin des arthropodes dans les prairies et les forêts est associé à des facteurs liés au paysage) de Sebastian Seibold et al.
Dans une réponse à un commentateur, M. Philippe Stoop a précisé :
« En fait, l’objet de mon article est double :
– montrer comment la pratique courante, de ne montrer les données que superposées à une régression ou un modèle de tendance choisi par les auteurs, oriente le regard du lecteur et détourne la réflexion nécessaire sur la crédibilité des données
– donner un bel exemple des absurdités auxquelles peut conduire l’utilisation abusive de modèles mixtes linéaires, très commodes pour trouver des tendances significatives dans n’importe quel nuage de points informe, mais totalement inopérants en termes prédictifs, ou pour la recherche de liens de causalité. »
Il ne faut pas être grand clerc pour repérer ces absurdités. De simple graphiques suffisent. M. Philippe Stoop en a fourni un éloquent pour le deuxième article.
S'agissant du premier, un commentateur sur PlosONE a fondamentalement fait la même chose :
M. Philippe Stoop avait présenté la chose un peu différemment sur le plan optique.
Résumé : ces articles, pris pour exemples, sont mauvais et certains « aspects » (soyons charitables...) ont été dénoncés.
Qu'en pense-t-on sur Twitter ? Nous serons bien sûr doublement sélectifs : sur le contenu des commentaires et leurs auteurs.
(Source)
L'auteure se dit « PhD Écologie + MScEng. Agronomie = Écologue des champs ».
La critique est cinglante... entièrement à côté de la plaque... et complètement stupide...
Dans le même fil, d'un auteur doctorant en intelligence artificielle et se disant écologiste rationnel, avec des réponses cinglantes de Jiembé :
La toxicologue réglementaire Annette Lexa a posé un commentaire plus philosophique :
(Source)
Parmi les réponses, celles d'un « PhD, Chercheur indépendant, écologue, herpétologue, naturaliste » :
M. Alexandre Carré a aussi gazouillé au sujet de l'article de M. Philippe Stoop. S'est ensuivit un échange dont voici le début et dans lequel nous retrouvons un personnage vu précédemment.
Bon, il y en a encore sous le capot... Ces gazouillis ont un gros mérite : celui de montrer l'aveuglement qui imprègne même les milieux des sciences de l'écologie.
Des articles « scientifiques » ont fait naître une légende de la disparition de 75 % des insectes... l'aveuglement – parfois haineux – perpétue la légende.
On ne peut que souscrire aux réflexions de Mme Annette Lexa. M. Alexandre Carré en a ajouté une autre :
Le "bon" chercheur est indépendant des "méchants" industriels et ses articles montrent toujours que les méchants sont des méchants
— Alexandre Carré (@alexcarre49) July 10, 2020
Mais si le bon chercheur montre que les méchants ne sont pas si méchants, alors il devient aussi un méchant chercheur, acheté par les lobbies !
...🤪 pic.twitter.com/NP8MmEIcyN