« Bordeaux: Ce viticulteur abandonne la culture en bio car le cuivre... » sur 20 Minutes
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C'est effectivement terriswalkeris terraereginae (voir les commentaire)
On aurait pu penser que 20 Minutes serait un peu moins seul à diffuser l'information. En effet, ces temps-ci, on parle beaucoup du cuivre – notamment de l'emblématique bouillie bordelaise – pour cause de discussions au niveau de l'Union Européenne sur son éventuelle ré-autorisation. Il fait l'objet d'un intense lobbying du biobusiness pour le maintien de cette substance dangereuse pour la santé et l'environnement (bien plus que le glyphosate !) dans le circuit de la protection des plantes.
Mais c'est une information qui heurte les convenances bobo-écolo-bios et les intérêts du biobusiness, ainsi que son argumentaire de marketing : « Bordeaux: Ce viticulteur abandonne la culture en bio car le cuivre est trop polluant pour les sols » en est le titre.
L'information n'a percé que dans certains journaux spécialisés tels Vitisphère ou La Revue du Vin de France... et aux États-Unis d'Amérique dans Genetic Literacy Project ou encore American Council on Science and Health.
Il y a un résumé en trois points :
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Le cuivre est un pesticide d’origine naturelle, et c’est le seul autorisé en viticulture bio [notons que c'est faux : il y a d'autres pesticides autorisés].
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Pour Basile Tesseron, ce produit « pose trop de problèmes » à cause de sa « stagnation dans les sols ».
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Il préfère donc abandonner la viticulture bio pour explorer de nouvelles pistes.
L'article, très détaillé, commence mal... enfin pour les idéologues et thuriféraires du bio : M. Bernard Farges, vice-président du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB) a annoncé le 15 octobre 2018 qu’il y aurait des « déconversions en bio en 2019, et pas qu’à Bordeaux ». Les viticulteurs « ne vont pas supporter de prendre une troisième fois une récolte déficitaire, et ils ne vont prendre aucun risque » en 2019.
Décryptons : le bio, c'est le risque. Quoi de plus normal : son cahier des charges interdit les pesticides « de synthèse » qui apportent des solutions pour la sécurité (relative tout de même mais bien meilleure) sur le plan tant agronomique (y compris environnemental) qu'économique.
Passons au domaine Lafon-Rochet à Saint-Estèphe :
« Mais quel est le problème de ce jeune viticulteur avec le bio ? Il se résume essentiellement en un mot : le cuivre, seul pesticide autorisé en bio. "La grande majorité des traitements bio se fait à base de cuivre" rappelle-t-il, et, dans le Bordelais, "cela fait 140 ans qu’on utilise ce 'produit miracle' contre le mildiou [ la fameuse bouillie bordelaise]." Que l’on soit en bio ou pas, d’ailleurs. "Mais les doses utilisées dans la viticulture conventionnelle sont tout de même moins importantes que dans le bio."
Or, le cuivre "pose quand même pas mal de problèmes, à commencer par la stagnation dans le sol" s’inquiète Basile Tesseron. "C’est un produit qui fait partie de la catégorie des métaux lourds, donc il ne s’évapore pas, au contraire il s’accumule dans le sol. Ce qui m'inquiète, ce sont les résidus, et pour moi ce n’est plus une solution pérenne." D'autant plus que pour une grande quantité de produits, le rendement est souvent moindre... »
Il y a eu un autre article le 8 novembre 2018, « Bordeaux: Le ras-le-bol de la filière viticole bio », mais il a été retiré. Il faudra donc se contenter des déclarations de Mme Sylvie Dulong, viticultrice bio à Saint-Émilion et présidente de la Fédération Régionale d'Agriculture bio en Nouvelle-Aquitaine, rapportées dans l'article commenté dans ce billet. Elle
« ...déplore que sa filière soit attaquée "en permanence" et que "l'on cherche systématiquement à nous opposer aux viticulteurs conventionnels ; ce n’est pas notre vision des choses." »
Vraiment ? Peut-être que sa fédération peut se vanter d'une bonne conduite, mais la promotion du bio ne se fait-elle pas – par les acteurs de la filière, par ses promoteurs, par ses mercenaires, par des médias maintenant conquis et même par le législateur – par le dénigrement des filières conventionnelles ?
Nous avons en particulier le souvenir d'une manœuvre d'une indigence éthique rare de deux « associations » – Alerte aux Toxiques ! Et Collectif Infos Médoc Pesticides – dont nous pensons qu'elles sont de facto des filiales d'une autre, généreusement financée par le biobusiness. Pour dénigrer l'engagement pris par la profession viticole bordelaise de réduire l'usage des pesticides et annoncé par M. Bernard Frages en avril 2016, elles n'avaient pas hésité à faire analyser une bouteille de ce même M. Farges de... 2014.
20 Minutes ajoute :
Elle assure "qu’aux doses auxquelles il est employé, le cuivre ne pose aucun problème" et même si elle ne nie pas les résidus dans le sol, elle estime que "cela n’a rien à voir avec les conséquences néfastes des produits chimiques de synthèse." Elle rappelle au passage que les viticulteurs conventionnels utilisent eux aussi le cuivre, "et au vu des surfaces, dans des proportions bien plus importantes que les bio." »
On admire la rhétorique ! N'oppose-t-elle pas les vertus alléguées du bio aux vices allégués du conventionnel ?
Toujours est-il que, pour M. Basile Tesseron,
« ... il n’y a pas de solution satisfaisante pour traiter la vigne, qui est une plante très particulière. Ce qui m’intéresse maintenant, c’est de trouver des idées pour financer la recherche et le développement pour des produits alternatifs. »
Nous lui suggérons vivement d'inciter la profession viticole à entamer une réflexion sur les techniques génétiques modernes, à même de conférer aux cépages existants des résistances à des maladies fongiques et bactériennes. Un Merlot, par exemple, résistant au mildiou, ça vous dit ?
Ajout du 13 novembre 2018
En sens contraire, "Château Latour, quand un roi du bordeaux passe au bio".
L'information sur le château Lafon-Rochet y est noyée dans l'apologie du bio et de la biodynamie :
« L’année 2018 a en effet été particulièrement ardue pour les viticulteurs bordelais. La chaleur et la pluie ont engendré une attaque de mildiou d’une intensité rare, difficile à traiter en bio comme avec la chimie. A une différence près : les produits de synthèse restent actifs même avec la pluie, quand il faut repasser après chaque ondée avec les produits autorisés en agriculture biologique et, donc, redoubler de vigilance. A Saint-Estèphe, le Château Lafon-Rochet a déclaré forfait après dix ans sans chimie. Trop de passages des tracteurs dans les vignes, trop de cuivre sur le sol selon son directeur, qui estimait dans La Revue du vin de France très récemment que, pour lui, le bio n’était pas la solution pour préserver l’environnement. »