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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Changement de crise ? L'apocalypse ne guette vraisemblablement pas les abeilles... mais qu'en est-il des apiculteurs ?

28 Septembre 2015 , Rédigé par Seppi Publié dans #Jon Entine, #Abeilles

Changement de crise ? L'apocalypse ne guette vraisemblablement pas les abeilles... mais qu'en est-il des apiculteurs ?

 

Jon Entine*

Changement de crise ? L'apocalypse ne guette vraisemblablement pas les abeilles... mais qu'en est-il des apiculteurs ?

Les scientifiques sont maintenant d'accord sur le fait que nous ne sommes pas confrontés à une abeillecalypse telle qu'elle a été prédite par beaucoup d'activistes environementaux et de journalistes dans les médias. Les populations d'abeilles ne sont pas en déclin ; elles sont en hausse. Selon les statistiques tenues par le Département américain de l'Agriculture et par l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), les populations d'abeilles domestiques ont été stables ou en croissance ces deux dernières décennies aux États-Unis [1], au Canada [2] et en Europe [3].

Mais les dernières statistiques n'ont pas enrayé la marée de terribles avertissements. L'accent a été déplacé des pollinisateurs et mis sur apiculteurs. Tim Tucker, président de la American Beekeeping Federation (Fédération américaine d'apiculture) a récemment déclaré : « Ce ne sont pas les abeilles qui sont en danger. [...] Je crois que nous aurons toujours des abeilles. [...] [Mais] à moins que les choses ne changent, ce qui est en danger, c'est l'apiculture commerciale. »

 

Le chercheur de l'Université du Maryland Dennis van Engelsdorp fait écho [4] : « Nous ne sommes pas préoccupés par des abeilles qui seraient en voie d'extinction. [...] Nous sommes préoccupés par les apiculteurs en voie d'extinction. »

 

 

L'apiculture est difficile

 

« Les apiculteurs, en effet, "travaillent presque deux fois plus avant" », a dit Tucker [5]. Les apiculteurs rapportent qu'ils doivent diviser leurs ruches plus souvent pour compenser les pertes, ce qui entraîne plus de travail que dans les décennies précédentes. Et pour les apiculteurs professionnels qui maintiennent des milliers de ruches, tout ce travail supplémentaire signifie plus d'employés, plus de salaires et plus de dépenses.

 

Le principal responsable de ces défis est la propagation quasi mondiale de parasites comme le Varroa et des dizaines d'autres maladies qui affectent les abeilles, ce qui exige beaucoup plus de travail et de dépenses de la part des apiculteurs tant professionnels qu'amateurs. Les comptages de Varroa doivent être suivis avec soin, et les préparations de lutte contre les acariens doivent être administrées au bon moment. Sinon, les infestations par l'acarien peuvent échapper au contrôle des apiculteurs, se propager et dévaster les ruches.

 

Mais la dureté et la complexité croissantes du travail de l'apiculteur ne se traduisent pas nécessairement par une catastrophe économique – en particulier pour les apiculteurs de pointe qui ont modernisé leurs opérations et se sont adaptés aux nouvelles conditions.

 

Comme le souligne l'apiculteur et chercheur indépendant Randy Oliver, qui dirige le blog Scientific Beekeeping, fort réputé, « dans l'apiculture d'aujourd'hui, de nombreux apiculteurs progressistes trouvent l'apiculture plus rentable que jamais. »

 

Les statistiques économiques du Département américain de l'agriculture le confirment. La demande pour le miel a presque doublé au cours du dernier quart de siècle, s'établissant à 212,6 millions de kilogrammes en 2013. La consommation de miel par habitant est en hausse aux États-Unis de près de 50 pour cent sur la même période.

 

Lorsque la demande est forte, les prix montent. Le prix de détail du miel a augmenté de plus de 50 pour cent dans la dernière décennie (à peu près autant que la cire d'abeille), le revenu total de la production de miel ayant atteint 2,835 milliards de dollars en 2012.

Prix du miel en sortie de ferme et au détail ($/livre) et valeur totale, 2006-13

 

Prix perçu pour la cire ($/livre).  Source: USDA-NASS QuickStats

 

Les apiculteurs professionnels ont également prospéré grâce au boom parallèle du marché des amandes, qui dépend de manière critique des abeilles pour la pollinisation. En fait, près de 75 pour cent de toutes les ruches commerciales américaines sont engagées dans la pollinisation des amandiers ; les abeilles sont transportées par camion vers la Californie dans le premier trimestre de chaque année pour polliniser 350.000 hectares de plantations d'amandiers (une surface qui a plus que doublé [7] depuis la mi-1980).

 

Avec la hausse de la demande de services de pollinisation, les prix de location des ruches pour la pollinisation des amandiers ont grimpé à des niveaux records [8], avec une hausse spectaculaire de 428% (soit environ 150 $ de plus par colonie) depuis les années 1990.

 

Loyer moyen d'une ruche pour la pollinisation des amandiers

Source: California State Beekeepers Association Annual Pollination Surveys

 

Si on ajoute les autres cultures pollinisées, notamment le tournesol, le canola, les vignes, les pommiers, les cerisiers, les pastèques et les myrtilles, les revenus tirés des services de pollinisation se sont montés à 655,6 millions $ en 2012, l'année des données les plus récentes disponibles.

 

 

Problèmes de stress

 

Alors que les déplacements transcontinentaux effectués par les apiculteurs pour la pollinisation sont très rentables, l'énorme stress subi par les abeilles contribue à expliquer la santé suboptimale de nombreuses colonies.

 

Transhumance des abeilles pollinisatrices et surfaces pollinisées en acres (1ac = env. 0,4 ha)

 

Un des résultats en est que, bien que nous ayons aujourd'hui plus de colonies [9] qu'il y a 20 ans, le volume de la production américaine de miel et le rendement par colonie – par opposition au prix par kilo de miel – sont en déclin général [10]. La production de miel des États-Unis est inférieure d'environ 35 pour cent en 2013 par rapport à 1989.

 

Bien qu'un certain nombre de facteurs contribuent à cette tendance, l'USDA note [11] : « Avec proportionnellement plus de colonies affectées à la pollinisation des vergers d'amandiers – par rapport aux cultures qui sont plus intéressantes pour la production de miel – on peut s'attendre à un volume moyen de miel utilisable par colonie inférieur. »

 

La tendance à la baisse de la production de miel américaine fait que les apiculteurs américains répondent désormais à moins de 1/3 de la demande totale de miel américaine. La différence est constituée par des importations en provenance d'autres pays – principalement d'Argentine, du Vietnam, de l'Inde, du Brésil, du Canada, de l'Uruguay, du Mexique, de l'Ukraine, de laTurquie et de Taiwan.

 

Malgré toute cette concurrence étrangère, la forte demande américaine a continué à tirer vers le haut le prix du miel américains, qui a plus que doublé à 2,12 $ la livre depuis la crise du Syndrome d'effondrement des colonies de 2006.

 

Tout cela, c'est de l'économie, pas une catastrophe. Les consommateurs peuvent ne pas aimer les prix plus élevés pour le miel, mais des prix plus élevés sont certainement une bonne nouvelle pour les apiculteurs. Comme l'a dit l'apiculteur et chercheur Randy Oliver [12], « le marché du miel offre des perspectives pour ceux qui ne participent pas à la pollinisation. Et le secteur de la vente d'abeilles est actif. »

 

Oliver résume les perspectives économiques de l'apiculture comme suit : « Le marché a résolu le problème des difficultés et du coût croissants de l'apiculture par une meilleure rémunération des apiculteurs. La loi de l'offre et de la demande fonctionne très bien. »

 

__________________

 

* * Jon Entine est le directeur exécutif du Genetic Literacy Project et senior fellow au World Food Center Institute for Food and Agricultural Literacy, de l'Université de Californie-Davis. Vous pouvez suivre Jon sur Twitter @JonEntine .

 

Source : http://www.geneticliteracyproject.org/2015/09/24/crisis-shift-bees-may-not-facing-apocalypse-beekeepers/

 

 

[1] http://usda.mannlib.cornell.edu/MannUsda/viewDocumentInfo.do?documentID=1191

 

[2] http://www5.statcan.gc.ca/cansim/a26?lang=eng&retrLang=eng&id=0010007&paSer=&pattern=&stByVal=1&1&p2=31&tabMode=dataTable&csid

 

[3] http://faostat3.fao.org/download/Q/QA/E

 

[4] http://www.wsj.com/articles/more-beekeepers-sour-on-profession-as-winter-die-offs-continue-1422057396

 

[5] http://www.mnn.com/your-home/organic-farming-gardening/stories/are-honeybees-trouble-or-not

 

[6] http://community.lsoft.com/scripts/wa-LSOFTDONATIONS.exe?A2=ind1507&L=BEE-L&F=&S=&P=154290

 

[7] http://www.almonds.com/sites/default/files/content/attachments/2015_ca_almond_subjective_forecast_presentation.pdf

 

[8] http://www.californiastatebeekeepers.com/resources/2013-Pollination-Survey%20.pdf

 

[9] http://usda.mannlib.cornell.edu/MannUsda/viewDocumentInfo.do?documentID=1%20191

 

[10] http://www.ers.usda.gov/media/1688526/sss_m_314.pdf

 

[11] http://usda.mannlib.cornell.edu/MannUsda/viewDocumentInfo.do?documentID=1%20191

 

[12] http://community.lsoft.com/scripts/wa-LSOFTDONATIONS.exe?A2=ind1507&L=BEE-L&F=&S=&P=154290

 

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