Une étude effrayante sur le plastique devrait probablement être recyclée
Josh Bloom, ACSH*
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Peut-être exagéré. À condition que le Diet Pepsi ne soit pas dans la bouteille.
Selon une nouvelle étude du Lancet, trois cent cinquante mille d'entre vous devraient mourir chaque année d'une maladie cardiaque causée par l'exposition à des matières plastiques. Mais vous pouvez être tranquille : les gros titres ne sont pas à la hauteur de la menace. Il est peu probable que vous vous retrouviez bientôt dans un sac, qu'il soit en plastique ou non. Voici pourquoi.
Dernièrement, la presse s'est régalée d'un nouvel article du Lancet qui conclut qu'environ 350.000 d'entre vous vont mourir chaque année de maladies cardiaques provoquées par l'ingestion à long terme de di-2-éthylhexylphtalate (DEHP), une substance chimique utilisée pour assouplir les plastiques. La bonne nouvelle, c'est que les données de l'étude ne sont guère convaincantes. Pourquoi ? Nous devons examiner le bon et le mauvais côté des choses, c'est-à-dire les chiffres qui sous-tendent l'étude et la manière dont ils ont été utilisés.
Les auteurs affirment qu'en 2018, environ 356.000 personnes âgées de 55 à 64 ans sont mortes d'une maladie cardiaque causée par le DEHP, l'une des nombreuses substances chimiques assouplissant les plastiques qui appartiennent à la classe des produits chimiques organiques appelés phtalates. Ce chiffre représente environ 13,5 % de tous les décès dus à des maladies cardiaques. Si c'est vrai, c'est assez grave. Mais est-ce le cas ? Ne jetez pas encore votre Tupperware par la fenêtre...
Le DEHP (et d'autres analogues de phtalates) sont depuis longtemps les têtes d'affiche [1] des mouvements anti-plastiques/anti-chimiques. D'innombrables études sur les phtalates, dont un grand nombre sont bidons, ont été publiées, soulevant des inquiétudes quant à leur potentiel d'interférence avec les hormones et d'effet sur le métabolisme (alias « perturbateurs endocriniens »). Ces études, réalisées pour la plupart aux États-Unis, ont établi des liens entre l'exposition aux phtalates et des affections telles que l'obésité, le diabète et les maladies cardiaques.
L'idée de cette nouvelle étude était d'estimer si le DEHP pouvait contribuer aux décès d'origine cardiovasculaire dans le monde, et si oui, dans quelle mesure – en particulier à la lumière d'efforts tels que le traité mondial sur les plastiques, qui vise à réduire la pollution plastique et ses effets sur la santé. Gardez à l'esprit le mot « estimer ».
Pour l'étude, les chercheurs ont construit un modèle informatique et utilisé les données disponibles sur les niveaux d'exposition au DEHP – basées sur les métabolites urinaires – provenant d'études de biosurveillance menées aux États-Unis, au Canada, en Europe et dans certaines parties de l'Asie et de l'Afrique, ainsi que de méta-analyses publiées. En l'absence de données, ils ont estimé les niveaux d'exposition en utilisant des moyennes régionales, en recherchant des associations entre les taux moyens de mortalité cardiovasculaire chez les personnes âgées de 55 à 64 ans et les expositions estimées au DEHP dans la population.
Cela dépend si vous considérez qu'un rapport de risque (HR – hazard ratio) de 1,10 est significatif. En anglais [ma note : en français aussi], un HR de 1,10 signifie qu'il n'y a qu'une différence de 10 % entre deux groupes comparés, une différence très faible à tout point de vue. Dans le cas présent, cela signifie qu'il existe un risque accru de 10 % de décès d'origine cardiovasculaire associé à des niveaux plus élevés de DEHP. Mais même ce chiffre peut être surestimé (ou peut-être sous-estimé) en fonction de la manière dont l'étude rétrospective [2] a utilisé des contrôles appropriés pour exclure les facteurs de confusion – des variables non corrigées qui peuvent avoir un impact significatif sur le taux de mortalité cardiovasculaire. Plus d'informations à ce sujet ci-dessous.
Ce chiffre n'a pas été calculé récemment. Il provient d'une étude américaine antérieure portant sur environ 5.300 personnes âgées de 55 à 64 ans figurant dans la base de données NHANES [3], dont les taux de phtalates urinaires ont été mesurés et qui ont fait l'objet d'un suivi de la mortalité dans le temps. L'étude mondiale a ensuite appliqué cette même estimation du risque de 10 % à près d'un milliard de personnes dans le monde appartenant à ce groupe d'âge en 2018, indépendamment du pays, du système de santé, du mode de vie ou des conditions environnementales, et a abouti à ce chiffre.
La force de l'étude réside dans son ampleur. Elle a rassemblé des données sur la mortalité et l'exposition aux produits chimiques provenant d'environ 200 pays, ce qui a permis de mettre en évidence les régions – en particulier l'Asie du Sud et le Moyen-Orient – où l'on estime que l'exposition est disproportionnée. Ce type de modélisation mondiale est utile pour définir les priorités en matière de santé publique, en particulier lorsque les données locales sont rares. Il permet de dégager des tendances, mais n'est pas aussi efficace pour trouver des chiffres précis.
Les points négatifs semblent l'emporter largement sur les points positifs. L'estimation de l'étude est-elle donc dénuée de sens ? Non, elle ne l'est pas, mais elle est loin d'être concluante non plus :
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La conclusion est fondée sur une seule étude américaine de taille modeste (~5.000) avec un HR très faible, et appliquée de manière générale en utilisant des hypothèses qui peuvent ne pas être valables pour des populations diverses.
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Par exemple, le tabagisme est beaucoup plus répandu en Asie qu'aux États-Unis. Cela pourrait entraîner une surestimation de l'impact du DEHP en Asie, car la surmortalité attribuée au DEHP pourrait être due à une plus grande consommation de tabac. Il s'agit probablement du facteur de confusion le plus important et de la plus grande faiblesse de l'étude.
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Il n'y a pas de correction pour les différences de santé publique et d'accès aux soins de santé entre les États-Unis et d'autres parties du monde. L'utilisation beaucoup plus importante de statines aux États-Unis par rapport à d'autres pays pourrait se traduire par un nombre artificiellement élevé de décès dus à des maladies cardiovasculaires, mais l'obésité et d'autres maladies métaboliques pourraient faire pencher les chiffres dans la direction opposée.
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Pour ajouter à l'incertitude, le modèle a inclus un décalage de 10 ans entre l'exposition et le résultat – en comparant les niveaux de DEHP de 2008 aux décès cardiovasculaires de 2018. Ce décalage augmente la marge d'erreur, car de nombreux autres facteurs, tels que l'alimentation, la pollution, le tabagisme et l'accès aux soins, ont également changé pendant cette période et n'ont pas été pris en compte.
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L'exposition au DEHP n'a pas été mesurée directement. Au lieu de cela, les chercheurs ont utilisé quatre métabolites urinaires comme substituts, en introduisant le métabolisme individuel ou collectif comme un autre facteur de confusion possible.
Comme le modèle ne tient pas compte de ces différences entre les pays, il est possible qu'il attribue au DEHP des décès d'origine cardiovasculaire qui sont en fait causés par des risques bien connus comme le tabagisme ou le manque d'accès aux soins de santé.
Pour une étude rétrospective typique, la règle empirique est qu'un HR de 2,0 (doublement du risque) est probablement significatif, mais plus le chiffre est proche de 1,0, moins la conclusion est valable. Bien que l'intervalle de confiance exclue ici 1,0 – ce qui rend le résultat techniquement significatif sur le plan statistique – l'effet reste marginal.
Par ailleurs, le HR est indiqué comme étant de 1,10 (IC à 95 % 1,03-1,19). [Ma note : j'ai modifié la suite de ce paragraphe, qui n'était pas claire dans l'original.] Le fait que l'intervalle de confiance n'englobe pas la valeur 1 signifie que le résultat est statistiquement significatif ; mais il n'est probablement pas cliniquement significatif, la différence avec 1 étant trop faible.
Ne vous méprenez pas. Je pense qu'il y a beaucoup trop de plastique produit et utilisé dans le monde et qu'il s'agit d'un problème grave, ne serait-ce que pour des raisons environnementales, même s'il n'y avait aucun problème de santé. Mais cela ne justifie pas (à mon avis) un article inutilement alarmiste qui ne réussira qu'à effrayer les consommateurs, dont beaucoup sont déjà effrayés par beaucoup trop de choses.
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[1] Le bisphénol-A (BPA) est un inhibiteur endocrinien encore plus « important ». Il est toujours considéré comme un épouvantail malgré une énorme étude de la FDA qui a conclu que cette substance chimique était sans danger tel qu'elle était utilisée.
[2] [Une étude rétrospective remonte dans le temps en utilisant les données existantes pour trouver des liens entre les expositions passées et les effets ultérieurs sur la santé. Elle est plus rapide que les études à long terme, mais plus sujette aux biais et aux informations manquantes.
[3] NHANES (National Health and Nutrition Examination Survey) est un programme de surveillance de la santé publique mené depuis longtemps par le National Center for Health Statistics (NCHS), qui fait partie des CDC. Il recueille des informations détaillées sur la santé de la population américaine depuis le début des années 1960.
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* Josh Bloom, directeur des sciences chimiques et pharmaceutiques, vient du monde de la découverte de médicaments, où il a fait de la recherche pendant plus de 20 ans. Il est titulaire d'un doctorat en chimie.
Source : A Scary Plastic Study Should Probably Be Recycled | American Council on Science and Health