Quand l'ennemi de votre ennemi est l'ami de vos cultures
Collaborateurs d'AGDAILY*
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Tenthrède du blé adulte sur une tige de blé. (Photo : Kelsey Dawson)
Parfois, la solution dont vous avez besoin se trouve dans votre propre jardin – ou presque. Les agriculteurs qui cultivent du blé et d'autres céréales luttent depuis au moins les années 1800 pour contrôler la tenthrède de la tige du blé (Cephus cinctus), un insecte qui pénètre dans les tiges des céréales et les fait tomber, réduisant ainsi les rendements.
Diverses approches défensives, allant des pesticides à la rotation des cultures, n'ont eu qu'un succès limité. Aujourd'hui, des scientifiques du Service de Recherche Agricole de l'USDA étudient une solution qui s'appuie sur l'ennemi naturel de la tenthrède (ou mouche à scie) pour réduire de manière significative les dommages qu'elle cause. Si cette solution fonctionne, elle pourrait devenir un élément essentiel de l'approche de lutte intégrée contre les ravageurs que les chercheurs de l'ARS utilisent pour s'attaquer aux insectes ennemis de l'agriculture.
De nombreux ravageurs des cultures sont difficiles à combattre parce qu'ils sont envahissants et n'ont donc que peu (voire pas du tout) d'ennemis naturels dans les zones qu'ils infestent. Le parasitoïde Bracon cephi est une minuscule guêpe de moins d'un centimètre de long qui se nourrit exclusivement de la tenthrède. La guêpe femelle insère un œuf, à travers la tige, sur une larve de tenthrède. La larve de guêpe qui en résulte consomme alors la larve de tenthrède, réduisant ainsi le nombre et l'impact des insectes.
Le fait que cette relation parasitaire existe déjà naturellement dans certaines régions amène les chercheurs à penser qu'elle peut être reproduite dans d'autres régions infestées par la tenthrède.
« Les programmes de biocontrôle habituels nécessitent d'introduire des insectes non indigènes et d'essayer de les implanter dans une nouvelle zone », explique Mme Erika Peirce, spécialiste de la télédétection à la Rangeland Resources & Systems Research Unit de Fort Collins, au Colorado. Mme Peirce est membre d'une équipe de collaboration inter-États composée de parties prenantes et de scientifiques qui travaillent ensemble pour s'attaquer au problème de la tenthrède. « Cet insecte est présent au Colorado depuis que nous avons découvert la tenthrède dans les années 1800 », a-t-elle déclaré, « nous avons donc de bonnes raisons de croire qu'il pourra s'établir ».
Bien que certaines guêpes soient présentes au Colorado, leur cycle de vie n'a pas toujours été aligné sur celui de la tenthrède de manière à les rendre efficaces dans la lutte contre le ravageur. C'est pourquoi les chercheurs s'intéressent aux populations de guêpes des régions voisines, qui se sont développées d'une manière qui les rend plus aptes à s'attaquer à la tenthrède du blé.
Larve de Bracon cephi consommant une larve de tenthrède de la tige du blé dans la tige. (Photo : Erika Peirce, ARS)
L'équipe a conçu un moyen simple mais ingénieux de transporter les guêpes. Elle l'appelle la « presse à balles d'insectes bénéfiques », et c'est exactement ce que son nom suggère : une grande balle (ou plusieurs balles) de paille, prélevée dans des zones où la guêpe est répandue, et remplie de guêpes. Les balles sont déplacées dans des zones infestées par les tenthrèdes, mais qui ne sont pas encore contrôlées par les guêpes. Là, les chercheurs peuvent observer ce qui se passe en situation réelle sur le terrain et voir comment chaque insecte se comporte.
« Il est presque impossible, voire totalement impossible, d'obtenir une population de tenthrèdes en laboratoire, c'est pourquoi nous devons utiliser des spécimens collectés sur le terrain », a expliqué Mme Peirce. « C'est pourquoi la presse à balles d'insectes est passionnante, car nous avons trouvé une très grande population et nous pouvons maintenant la déplacer vers de nouveaux endroits. »
« Il est très intéressant de voir à quel point les agriculteurs sont enthousiastes à l'idée de déplacer les balles », ajoute Mme Tatyana Rand, écologiste à l'Unité de Recherche sur la Lutte contre les Ravageurs de Sidney, dans le Montana, qui travaille également sur le projet. « Lorsque les agriculteurs voient quelque chose qu'ils peuvent faire eux-mêmes, il y a quelque chose d'extrêmement attrayant. J'ai l'impression que c'est ce qui nous a permis de gagner beaucoup de terrain. Tout le monde veut une balle. Ils veulent juste voir si cela fonctionne. Les gens sont très enthousiastes à l'idée d'essayer ce que vous proposez. »
En examinant attentivement la paille de blé, les scientifiques ont pu déterminer qu'ils ne déplaçaient que des parasitoïdes bénéfiques dans leurs balles, une vérification qui devra faire partie de leur vision d'une approche de lutte intégrée contre les tenthrèdes.
L'étape suivante consiste à déterminer comment créer l'environnement le plus favorable aux parasitoïdes, « afin d'avoir des populations plus importantes qui contrôlent réellement nos infestations de tenthrèdes », a déclaré Mme Peirce. L'équipe travaille actuellement sur l'idée de créer des pépinières locales pour les parasitoïdes, afin d'éviter d'épuiser les populations actuellement abondantes au Nebraska qui ont fourni leurs échantillons jusqu'à présent.
Bien qu'il reste encore des questions à explorer, la petite guêpe d'à côté s'avère être un allié important pour l'une des cultures les plus importantes d'Amérique.
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* Source : When the enemy of your enemy is a friend to crops | AGDAILY