L'agriculture biologique : la supercherie à 52 milliards de dollars (aux USA)
Henry I. Miller et Kathleen Hefferon, ACSH*
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Fumier pour l'agriculture biologique
L'agriculture biologique gaspille la terre et l'eau, et ses produits sont sujets à la contamination microbienne. Elle n'offre aucun avantage, si ce n'est aux escrocs de la chaîne d'approvisionnement.
De nombreux consommateurs s'engagent en faveur des produits biologiques pour des raisons plus émotionnelles que logiques. Ces âmes égarées fondent souvent leurs choix d'achat sur ce qu'elles considèrent comme « sain et naturel », ce qui se traduit souvent par l'absence d'intrants prétendument « de synthèse » tels que les engrais et les pesticides. Pour certains, l'interdiction des cultures « génétiquement modifiées » (quelle que soit leur définition) est une autre considération favorable. Parfois, ils supposent que, d'une manière assez vague, les pratiques agricoles biologiques sont meilleures pour la planète.
En bref, ils veulent que la nourriture qu'ils mangent provienne d'un endroit qui ressemble davantage à la ritournelle gentillette pour enfants du « Old McDonald », avec laquelle beaucoup d'entre nous ont grandi, que d'une vaste « ferme industrielle » très efficace. La réalité est très différente de la mythologie : à tous les égards, le fermier McDonald n'est pas à la hauteur.
Il y a plusieurs années, la FDA a signalé une épidémie d'hépatite A dans plusieurs États, due à des fraises biologiques contaminées importées aux États-Unis depuis la Basse-Californie, un État du nord du Mexique, sous les marques FreshKampo et HEB. En l'espace d'un mois, 18 cas associés à l'épidémie ont été signalés en Californie, au Minnesota et dans le Dakota du Nord, et 13 personnes ont été hospitalisées. (L'Agence de Santé Publique du Canada et l'Agence Canadienne d'Inspection des Aliments ont également signalé des cas provenant de la même source.
Cet événement n'est pas sans rappeler l'épidémie de 2013 provoquée par un mélange de baies biologiques congelées et de graines de grenade vendu par les magasins Costco et Harris Teeter sous la marque Townsend Farms. Plus de 150 personnes ont été infectées dans huit États et 59 ont été hospitalisées. Le séquençage de l'ARN viral a révélé que la souche du virus provenait de graines de grenade provenant d'une exploitation agricole en Turquie. Comme l'hépatite A se transmet le plus souvent par voie fécale-orale, le scénario le plus probable est que l'épidémie a été provoquée par des excréments contaminés par le virus et provenant de plusieurs personnes différentes.
La nouvelle de l'épidémie a dû choquer les consommateurs soucieux de leur santé qui ont acheté un produit à base de baies dont l'emballage représentait une ferme familiale américaine de l'Oregon et se vantait d'être « depuis 1906, du champ à la ferme et à la famille ». Les consommateurs pensaient probablement qu'ils achetaient un produit provenant d'une ferme nationale digne de confiance et proche de la terre, plutôt qu'un produit international dont la source est beaucoup plus incertaine et dont les normes de sécurité sont douteuses.
L'épidémie la plus récente et la plus importante concernant des produits biologiques s'est produite en décembre de l'année dernière. Voici la mise à jour de la FDA du 18 décembre :
« La FDA et les CDC, en collaboration avec des partenaires locaux et des États, ont enquêté sur des cas d'infections à E. coli O121:H19 produisant la shigatoxine, liées à des carottes entières et miniatures biologiques fournies par Grimmway Farms de Bakersfield, en Californie. Selon les CDC, cette épidémie est terminée depuis le 18 décembre 2024. Au total, 48 personnes sont tombées malades dans 19 États et un décès a été signalé. Sur les 47 personnes pour lesquelles des informations sont disponibles, 20 ont été hospitalisées et une a développé un syndrome hémolytique et urémique, une affection grave pouvant entraîner une insuffisance rénale. »
De tels incidents ne sont pas rares. Une étude sur les épidémies d'origine alimentaire aux États-Unis a révélé que le nombre d'épidémies associées aux aliments biologiques est supérieur à celui des aliments produits de manière conventionnelle. Les auteurs ont constaté qu'entre 1992 et 2014, 18 épidémies ont été causées par des aliments biologiques, et huit d'entre elles étaient spécifiquement associées à des fruits et légumes biologiques.
L'une des plus grandes épidémies de contamination alimentaire de l'époque moderne a été provoquée par des graines germées de fenugrec contaminés produites biologiquement dans une ferme du nord de l'Allemagne en 2011. Le coupable était la souche mortelle et toxique 0104:H4 d'E. coli, qui a infecté près de 3.000 personnes, dont environ 800 ont souffert du syndrome hémolytique et urémique, qui peut provoquer des lésions neurologiques et une insuffisance rénale. Des dizaines de personnes ont été hospitalisées et 53 sont décédées. Le fait que l'agriculture biologique utilise du fumier au lieu d'engrais chimiques constitue un signal d'alarme pour une éventuelle contamination par E. coli. Après des semaines d'enquête minutieuse, une petite exploitation biologique employant 15 personnes a été identifiée comme étant à l'origine de l'épidémie.
Les normes biologiques n'abordent pas directement les questions de sécurité alimentaire telles que la contamination microbienne, qui peut être difficile à évaluer, en particulier à l'échelle mondiale. Le tableau d'ensemble est complexe et impressionnant. L'agriculture biologique est aujourd'hui une entreprise mondiale, et même les produits « certifiés biologiques » peuvent inclure des importations, contaminées ou non, en provenance d'autres régions du monde comme la Turquie ou l'Amérique latine.
Un exemple révélateur de la chicanerie qui se produit au bout de la chaîne d'approvisionnement biologique pour les consommateurs est celui de Whole Foods qui importe de grandes quantités de ses produits prétendument « biologiques » de Chine, et de bien d'autres endroits. Ces importations portaient même la marque maison de Whole Foods, « California Blend ». (L'entreprise a insisté sur le fait que la certification « biologique » des importations chinoises était valable et tout aussi stricte et fiable qu'aux États-Unis.)
Ces importations de produits biologiques douteuses constituent un maillon particulièrement faible. Un rapport historique publié en 2017 par l'inspecteur général de l'USDA à l'issue d'une enquête d'un an a révélé l'incapacité systématique des fonctionnaires américains à garantir l'intégrité et la sécurité des importations d'aliments biologiques. Les importations de produits biologiques – en particulier de maïs et de soja – ont connu un énorme pic pour répondre à la demande des consommateurs ; plus de 100 pays expédient désormais des produits prétendument biologiques vers les États-Unis. Le National Organic Program (NOP) de l'USDA est chargé de veiller à ce que ces pays respectent nos normes biologiques rigoureuses, mais ils utilisent un système plein d'échappatoires qui repose essentiellement sur la réciprocité et la bonne foi, plutôt que sur des contrôles stricts, la surveillance et l'application des lois fédérales. En outre, l'USDA se trouve dans la position intenable et sans doute contraire à l'éthique de, à la fois, promouvoir et réglementer les produits biologiques.
L'inspecteur général de l'USDA a constaté des problèmes généralisés dans le cadre du programme national de production biologique, lesquels pourraient avoir pour conséquence de « réduire la confiance des consommateurs américains dans l'intégrité des produits biologiques importés aux États-Unis ». Le rapport cite l'incapacité de l'agence à réconcilier les normes biologiques des différents pays, à vérifier les documents aux points d'entrée aux États-Unis et à effectuer les audits obligatoires des principaux exportateurs. L'inspecteur général a également découvert que non seulement des pesticides interdits sont utilisés sur les cargaisons de produits biologiques, mais que la capacité du gouvernement à les détecter est pratiquement inexistante :
Les produits agricoles importés, qu'ils soient biologiques ou conventionnels, sont parfois fumigés aux ports d'entrée américains afin d'empêcher les parasites interdits d'entrer aux États-Unis. Le Service de Commercialisation Agricole de l'USDA n'a pas établi et mis en œuvre des contrôles dans les ports d'entrée des États-Unis pour identifier, suivre et garantir que les produits biologiques traités ne sont pas vendus, étiquetés ou présentés comme biologiques. Par conséquent, les consommateurs américains de produits biologiques n'ont pas l'assurance que les produits agricoles étrangers conservent leur intégrité biologique de la ferme à la table.
Le rapport conclut que les fonctionnaires du Programme Biologique National ont si mal travaillé que la fraude et la corruption sont monnaie courante tout au long de la chaîne d'approvisionnement dans un secteur alimentaire en plein essor qui prétend être plus sain, plus sûr et plus respectueux de l'environnement que les produits non biologiques. Ainsi, de nombreux consommateurs paient un prix élevé pour acheter des produits biologiques importés qui ne sont pas du tout biologiques.
Les médias grand public ont fini par découvrir le scandale de la filière alimentaire biologique il y a plusieurs années. Le Washington Post a publié trois rapports d'enquête (ici et ici, et celui cité ci-dessous) sur le commerce lucratif mais frauduleux des produits biologiques, dénonçant les producteurs de lait biologique qui ne respectaient pas les réglementations fédérales et retraçant l'importation de millions de livres de céréales biologiques faussement étiquetées en provenance d'Europe de l'Est. Le journaliste du Post Peter Whoriskey a décrit trois cargaisons de maïs et de soja importés, prétendument biologiques, qui étaient « suffisamment importantes pour constituer une part significative de l'offre américaine de ces produits. Ces trois cargaisons ont été présentées comme biologiques, malgré les preuves du contraire. »
Mais voici l'ironie de l'ironie : en ce qui concerne la sécurité alimentaire, les consommateurs qui sont trompés et qui achètent des produits conventionnels présentés comme biologiques pourraient en fait s'en trouver mieux. Les produits biologiques sont connus pour leur contamination. Selon le Dr Bruce Chassy, professeur émérite de sciences alimentaires à l'Université de l'Illinois, « les produits biologiques sont rappelés 4 à 8 fois plus souvent que leurs équivalents conventionnels » (communication personnelle).
Cela n'a rien d'étonnant. Outre la présence de bactéries pathogènes, les céréales biologiques sont particulièrement sensibles aux toxines des champignons. Voici pourquoi... Chaque année, des dizaines de produits alimentaires emballés sont rappelés du marché américain en raison de la présence de contaminants entièrement naturels tels que des parties d'insectes, des moisissures toxiques, des bactéries et des virus. L'agriculture étant pratiquée en plein air et dans la terre, cette contamination est une réalité. Au fil des siècles, les principaux responsables des intoxications alimentaires massives ont souvent été les mycotoxines (toxines provenant de champignons ou de moisissures), telles que l'ergotamine de l'ergot ou la fumonisine des espèces de Fusarium. Ces toxines proviennent de la contamination fongique des cultures non transformées, qui est exacerbée lorsque les insectes attaquent les cultures vivrières, ouvrant des plaies dans la plante qui offrent une possibilité d'invasion par des agents pathogènes. Une fois que les moisissures ont pris pied, les mauvaises conditions de stockage favorisent leur développement sur les céréales après la récolte.
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Pourriture de l'épi causée par les champignons Fusarium. Photo : UIUC via Wikimedia Commons https://commons.wikimedia.org/w/index.php?search=corn+with+fusarium&title=Special:MediaSearch&type=image
La fumonisine et d'autres mycotoxines sont hautement toxiques et provoquent des maladies mortelles chez les animaux d'élevage qui consomment du maïs infecté, ainsi que des cancers de l'œsophage et des anomalies du tube neural chez l'homme. Des organismes de réglementation tels que la FDA américaine et l'Agence Britannique de Sécurité Alimentaire ont établi des niveaux maximaux recommandés de fumonisine dans les produits alimentaires et les aliments pour animaux fabriqués à partir de maïs.
Le maïs non transformé ou légèrement transformé (par exemple, la farine de maïs) peut présenter des niveaux de fumonisine supérieurs aux niveaux recommandés. En 2003, l'Agence Britannique de Sécurité Alimentaire a testé six produits à base de farine de maïs biologique et 20 produits à base de farine de maïs conventionnel (non biologique) pour détecter une éventuelle contamination par les fumonisines. Les six farines de maïs biologique présentaient des teneurs élevées – de neuf à 40 fois supérieures aux teneurs recommandées pour la santé humaine – et ont été volontairement retirées des magasins d'alimentation. En revanche, les 20 produits conventionnels (c'est-à-dire non biologiques) présentaient en moyenne un quart des teneurs maximales recommandées.
Une campagne bien financée et très bien organisée par les industries des produits biologiques et naturels permet aux activistes d'alimenter de fausses craintes en matière de santé, de sécurité et d'environnement à propos des produits agricoles et des techniques de production utilisés pour produire des aliments non biologiques, en particulier ceux produits à l'aide des techniques modernes de génie génétique moléculaire. Ce qui est ironique, c'est que le lobby des produits biologiques présente sa filière comme une alternative verte à l'agriculture conventionnelle, alors qu'elle est en réalité plus nocive pour l'environnement.
Un « mythe vert » très répandu à propos de l'agriculture biologique est qu'elle n'utilise pas de pesticides. En réalité, l'agriculture biologique utilise des insecticides et des fongicides pour prévenir la prédation de ses cultures. Plus de 20 produits chimiques sont couramment utilisés dans la culture et la transformation des produits biologiques et sont acceptables en vertu des règles arbitraires et changeantes du département américain de l'Agriculture. Nombre de ces pesticides biologiques sont plus toxiques que les pesticides de synthèse utilisés dans l'agriculture conventionnelle, non biologique.
Mais le défaut fatal de l'agriculture biologique réside dans ses faibles rendements, qui entraînent un gaspillage de l'eau et des terres agricoles. M. Steven Savage, phytopathologiste à la CropLife Foundation, a analysé les données de l'enquête 2014 de l'USDA sur l'agriculture biologique, qui présentait diverses mesures de la productivité de la plupart des exploitations agricoles certifiées biologiques du pays, et les a comparées à celles des exploitations agricoles conventionnelles. Ses conclusions sont extraordinaires : dans 59 des 68 cultures étudiées, il y avait un écart de rendement, ce qui signifie que, en tenant compte d'autres variables, les exploitations biologiques produisaient moins que les exploitations conventionnelles. La plupart de ces écarts étaient importants : pour les fraises, les exploitations biologiques produisaient 61 % de moins que les exploitations conventionnelles ; pour les mandarines, 58 % de moins ; pour le coton, 45 % de moins ; et pour le riz, 39 % de moins.
Comme l'a fait remarquer M. Savage :
Pour que toutes les cultures américaines fussent biologiques en 2014, il aurait fallu cultiver 109 millions d'hectares de terres supplémentaires. Cela représente une superficie équivalente à l'ensemble des parcs et des zones sauvages des 48 États intérieurs, soit 1,8 fois plus que l'ensemble des zones urbaines du pays.
L'aspect le plus illogique et le moins durable de l'agriculture biologique à long terme sera peut-être l'exclusion absolue des plantes « génétiquement modifiées » qui ont été modifiées à l'aide des techniques moléculaires modernes les plus précises et les plus prévisibles. À l'exception des baies et des champignons sauvages, la quasi-totalité des fruits, des légumes et des céréales que nous consommons ont été génétiquement améliorés par une technique ou une autre, souvent à la suite de l'irradiation des semences ou par le biais de « croisements entre parents distants », qui déplacent les gènes d'une espèce ou d'un genre à l'autre d'une manière qui ne se produit pas dans la nature. (Ces techniques de modification génétique plus primitives sont acceptables dans l'agriculture biologique.) Voici deux exemples des changements radicaux que les modifications génétiques pré-moléculaires ont entraînés au fil des siècles :
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À gauche, le maïs doux moderne. À droite, l'ancêtre du maïs : la téosinte. Crédit : Rosana Prada
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La banane avant la domestication par l'homme. Photo: Wikimedia Commons, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?search=banana+with+seeds&titl...
Au cours des dernières décennies, grâce aux techniques moléculaires modernes, nous avons assisté à des progrès dans le domaine du génie génétique, notamment en ce qui concerne les plantes résistantes aux maladies, aux parasites, à la sécheresse et aux inondations. Il en résulte des rendements plus élevés pour les agriculteurs et des coûts moindres pour les consommateurs. À mesure que les succès du génie génétique se confirment, l'écart entre les méthodes de l'agriculture moderne de haute technologie et celles de l'agriculture biologique va devenir un gouffre, et l'agriculture biologique sera de moins en moins en mesure d'être compétitive.
En définitive, si vous vous souciez du prix, de la qualité, de la sécurité ou des avantages pour l'environnement, il vaut mieux que vous évitiez les produits biologiques, quels qu'ils soient. Et le gouvernement américain devrait cesser de les promouvoir.
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Henry I. Miller, médecin et biologiste moléculaire, est le Glenn Swogger Distinguished Fellow de l'American Council on Science and Health (conseil américain pour la science et la santé). Il a été le directeur fondateur du Bureau des Biotechnologies de la FDA. Suivez Henry sur X @HenryIMiller.
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Kathleen L. Hefferon enseigne la microbiologie à l'Université Cornell. Suivez Kathleen sur X @Khefferon.
Source : 'Organic' Agriculture: The $52 Billion Hoax | American Council on Science and Health