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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Comment les « polluants éternels » ont dévasté des familles d'éleveurs du Texas

2 Avril 2025 Publié dans #PFAS (per- et polyfluoroalkylées - "polluants éternels")

Comment les « polluants éternels » ont dévasté des familles d'éleveurs du Texas

 

Chris Clayton, DTN Ag Policy Editor, dans AGDAILY*

 

 

Image : Warren Price Photography, Shutterstock

 

 

Ma note : C'est un modèle de littérature qui manipule les appels à la commisération à coup de demi- et contre-vérités, sur fond tout de même de données factuelles, a priori exactes, étonnantes.

 

 

GRANDVIEW, Texas – M. Tony Coleman a parcouru une petite partie du pâturage de 325 acres [130 hectares] de sa famille, derrière sa maison rurale, en appelant « Tank ». Un taureau Black Baldy s'est finalement approché et M. Tony Coleman a commencé à lui frotter la face.

 

« Il veut juste que je l'aime », a déclaré M. Coleman à propos du taureau.

 

« C'est le petit garçon de papa. »

 

Tony et sa femme, Karen, ont nourri Tank au biberon dans leur garage après que la mère du taureau est morte à la naissance. Parlant de leur terre empoisonnée, qui a entraîné la mort d'au moins 47 vaches et veaux à cause de problèmes tels que des maladies du foie, les Coleman sont émus par leur crainte pour la santé de Tank.

 

« Nous sommes devenus son père et sa mère, et donc pour nous, vous savez, j'ai grandi à la ferme, et les gens ont toujours dit : "Comment pouvez-vous manger ce que vous élevez ?" Pour moi, cela fait partie de la vie », a déclaré Mme Karen Coleman. « Il y a une différence entre traiter une vache pour ses besoins nutritionnels et devoir euthanasier tout ce pour quoi on a travaillé. Mais si nous devons euthanasier ce taureau, cela laissera un vide qui ne pourra jamais être remplacé ».

 

Les Coleman sont au centre de l'un des procès environnementaux les plus suivis du pays contre l'Agence Américaine de Protection de l'Environnement (EPA) et l'entreprise qui propose des engrais biosolides [des boues d'épuration] à l'extérieur de Fort Worth, au Texas.

 

 

Karen et Jim Coleman élèvent du bétail sur 325 acres appartenant à la mère de Karen, Mme Patsy Schultz, près de Grandview, au Texas. Les Coleman ont perdu 47 vaches et veaux au cours des trois dernières années en raison des niveaux élevés de produits chimiques provenant du ruissellement des biosolides sur la propriété [ma note : La relation de cause à effet est bien sûr prouvée (ironie)]. (Photo : Chris Clayton, DTN)

 

 

Les Coleman, la mère de Karen, Mme Patsy Schultz, et leurs voisins – M. James Farmer et M. Robin Alessi – ont partagé leur histoire avec DTN, décrivant ce à quoi ils ont été confrontés depuis qu'ils ont appris l'existence du terme « polluants éternels ».

 

La contamination dans le comté de Johnson, au Texas, a atteint un point tel que la cour des commissaires du comté a voté mardi pour demander au gouverneur Greg Abbott de déclarer le comté zone sinistrée, ce qui pourrait conduire à une aide fédérale pour les agriculteurs touchés par les applications à long terme de biosolides.

 

 

L'EPA est poursuivie devant un tribunal fédéral

 

Les agriculteurs du comté de Johnson, ainsi que le gouvernement de leur comté, l'association des agriculteurs et jardiniers biologiques du Maine et Potomac Riverkeeper Inc. ont collectivement poursuivi l'EPA devant un tribunal fédéral pour ne pas avoir réglementé les substances per- et polyfluoroalkyles (PFAS) présentes dans les biosolides, également connus sous le nom de boues d'épuration.

 

Les PFAS constituent un groupe de milliers de produits chimiques de synthèse particulièrement résistants à la chaleur et à l'eau, ce qui leur vaut d'être typiquement surnommés « polluants éternels ». Les PFAS et les produits chimiques associés – y compris le PFOS et le PFOA – s'accumulent au fil du temps dans la terre, l'eau, les plantes, les poissons, les animaux et les êtres humains. L'EPA les a classés comme probablement cancérigènes et on sait qu'ils se concentrent dans des organes tels que le foie, les reins et la vésicule biliaire [ma note : Cette affirmation à propos de la cancérogénicité est sans doute fausse. Voir ici et ici].

 

Au cours des sept dernières années, des niveaux élevés de contamination ont entraîné la fermeture d'une exploitation laitière au Nouveau-Mexique, d'au moins une exploitation bovine dans le Michigan et de plusieurs fermes dans le Maine, le seul État qui, jusqu'à présent, a carrément interdit l'utilisation de biosolides en tant qu'engrais. Le Michigan exige désormais que les biosolides soient testés avant d'être épandus.

 

Sur la base des données de 2022 provenant des plus grandes installations au niveau national, l'EPA estime qu'environ 1,2 million de tonnes [1,1 million de tonnes métriques si l'original est en tonnes US] de biosolides sont épandues sur les terres agricoles au niveau national, et que 906.000 tonnes [822.000 tonnes métriques] supplémentaires sont utilisées pour les jardins potagers, l'aménagement paysager, les terrains de golf et d'autres usages.

 

Le fait qu'une station d'épuration produise des boues pour les biosolides ne signifie pas nécessairement qu'il s'agit d'une dose élevée de polluants éternels, mais les villes où les volumes de fabrication liés aux produits chimiques sont importants sont plus susceptibles d'être touchées.

 

 

Projet d'évaluation des risques publié par l'EPA

 

Dans l'une des dernières actions de l'EPA sous l'administration Biden, l'agence a publié le 15 janvier un projet d'évaluation des risques concernant les substances chimiques PFAS présentes dans les biosolides [ma note : C'est ici, mais le lien n'a pas été mis dans le texte original...]. L'EPA a averti que les risques peuvent dépasser les niveaux de sécurité de l'agence « parfois de plusieurs ordres de grandeur » [1]. La fiche d'information de l'EPA [c'est ici] destinée aux agriculteurs leur recommande « d'envisager une autre source d'engrais que les biosolides à l'avenir, en particulier si votre exploitation pourrait être vulnérable aux impacts des PFAS ». L'EPA a cité les vaches laitières et les bovins qui paissent dans des pâturages où des boues d'épuration ont été épandues, ainsi que les poules élevées sur parcours comme étant à risque, ainsi que les exploitations maraîchères.

 

« Ce qu'ils disent, c'est qu'il ne faut pas utiliser de biosolides parce que c'est risqué, ce qui est très surprenant de la part de l'EPA après tout ce temps », a déclaré Mme Mary Whittle, une avocate texane spécialisée dans les questions environnementales qui représente les Coleman, les Farmer et d'autres personnes. « Je veux dire qu'ils ont eu la tête dans le sable, et dès qu'ils y jettent ne serait-ce qu'un petit coup d'œil, ils se rendent compte que nos inquiétudes sont fondées ». [Ma note : Tout se plaide... et ça peut marcher sur un malentendu ou devant un jury acquis à la cause.]

 

 

Poursuite devant le tribunal de l'État

 

Devant le tribunal de l'État, les Coleman, les Farmer et d'autres voisins poursuivent également les entreprises qui ont épandu les boues d'épuration de la station d'épuration de Fort Worth dans les comtés environnants – Synagro Technologies et une entreprise régionale plus petite, Renda Environmental Inc. Synagro conclut des contrats à l'échelle nationale pour l'élimination des boues d'épuration, généralement en les appliquant comme engrais biosolide dans les exploitations agricoles. L'action en justice ne se limite pas aux PFAS, mais cite également d'autres produits chimiques que l'on trouve généralement dans les biosolides.

 

Dans son rapport annuel 2023 sur le développement durable, Synagro a reconnu que l'un des défis de l'industrie est d'essayer de traiter les « substances indésirables » telles que les PFAS [ma note : C'est ici. Le mot « reconnu » est trompeur : l'existence de ce « défi » est un fait bien établi]. Synagro a cité une nouvelle technologie de traitement des eaux usées appelée « SynaPure » qui, selon l'entreprise, peut éliminer les PFAS, les métaux lourds et d'autres agents pathogènes.

 

Synagro a également suggéré que les biosolides pourraient être utilisés pour des projets d'énergie renouvelable tels que le carburant d'aviation durable.

 

Synagro n'a pas répondu aux demandes de commentaires [ma note : Ça aussi, c'est un classique : il suffit de poser les questions de manière «  astucieuse » pour obtenir une absence de réponse].

 

 

Mme Patsy Shultz et les Coleman

 

Mme Patsy Schultz, la mère de Karen, et Jim, le mari de Patsy, ont acheté le terrain en 2006 et construit leur maison quatre ans plus tard. M. Jim Schultz était mécanicien et a travaillé dans une usine d'hélicoptères, puis dans une compagnie d'électricité pendant 24 ans. Ce garçon qui a grandi sur une ferme, originaire du Kansas, voulait un peu de terrain dans une zone rurale et quelques vaches.

 

Il a trouvé l'endroit idéal à l'extérieur de Grandview.

 

« Lorsque vous êtes dans un endroit comme celui-ci, vous ne voulez plus retourner en ville », a déclaré Mme Patsy Schultz, en regardant les vaches paître par la fenêtre arrière.

 

M. Jim Schultz est décédé d'une maladie du foie en 2018.

 

Alors qu'ils sont au cœur d'un procès très technique et potentiellement révolutionnaire, les Coleman et les Farmer voient tout ce pour quoi ils ont travaillé toute leur vie être détruit sous leurs yeux.

 

« Nous n'avons jamais su ce qu'étaient les PFAS avant le printemps 2023 », a déclaré M. Tony Coleman. Il a ajouté : « C'est un sujet très compliqué que d'essayer de comprendre ce que sont les PFAS et les PFOS ».

 

Les Coleman et les Farmer n'ont pas non plus épandu de biosolides sur leurs terres. La contamination est venue d'un agriculteur dont la propriété est située en amont de la leur et qui a reçu des biosolides de Synagro mais qui, à une occasion au moins, les a laissés empilés pendant des semaines jusqu'à ce qu'il puisse les épandre [ma note : C'est bien sûr prouvé, et tous les PFAS du tas se sont retrouvés chez les Coleman, répandus sur toute la surface du terrain (ironie)].

 

Les fortes pluies et le ruissellement entraînaient l'érosion sur les terres des Coleman et des Farmer et dans la nappe phréatique peu profonde juste à côté du grand ruisseau qui passe à proximité.

 

 

Les niveaux de PFA testés

 

Après qu'un tas de biosolides provenant de Synagro a été déposé sur le champ de la ferme voisine en novembre 2022, elle est restée là pendant des semaines et a brûlé [ma note : le feu aurait pu provoquer la dispersion des PFAS, mais cela pose la question des concentrations mesurées ; le lien est invraisemblable]. Les familles voisines se sont plaintes de l'odeur nauséabonde. Les Coleman et les Farmer décrivent le type d'odeur qui se dégageait des tas comme le genre d'odeur qui « ferait tomber une buse d'un wagon d'intestins ». M. James Farmer a déclaré que l'odeur ressemblait à celle de carcasses en décomposition.

 

« On sortait et on avait envie de vomir », a-t-il déclaré.

 

Suite aux plaintes et aux inquiétudes, l'enquêteur environnemental du comté a prélevé des échantillons de sol, ainsi que des échantillons provenant d'étangs et de puits.

 

Le sol a été testé avec un taux de 6.291 parties par billion (ppt) de substances chimiques PFAS [ma note : = 6,... ppb ou 6,... µg/kg [2]]. L'eau du puits de Mme Patsy Schultz contenait 268 parties par billion [0,268 µg/L]. Les enquêteurs sont revenus et ont testé des poissons morts dans l'étang des Farmer qui ont montré 74.460 ppt [= 74,... µg/kg], et l'un des veaux mort-nés des Coleman a été testé à 620.228 ppt de PFAS [= 620,... µg/kg].

 

Pour remettre les choses dans leur contexte, si une personne mangeait 8 onces [230 g] de poisson de l'étang des Farmer et Alessi, le risque dépasserait de 30.000 fois les niveaux d'exposition quotidiens recommandés par l'EPA. Si une personne avait mangé le foie du veau, le risque aurait été 250.000 fois supérieur aux niveaux de sécurité recommandés par l'EPA.

 

L'enquêteur du comté a ensuite testé l'engrais de Synagro et a trouvé 27 substances chimiques PFAS différentes, l'échantillon atteignant 35.610 ppt [35,... µg/kg [3]]. Des concentrations élevées d'au moins huit substances chimiques PFAS différentes ont été relevées dans les propriétés des Schultz/Coleman et Farmer.

 

Au cours de cette période, les Coleman ont également commencé à perdre du bétail. Ils ont perdu 47 veaux et vaches au cours des deux dernières années.

 

Les veaux naissent mort-nés ou peuvent mourir peu après la naissance. Les bovins présentent souvent des symptômes très spécifiques, explique Mme Karen Coleman. « À la fin, elles commencent à avoir une porte très toxique, et cela se voit tout de suite. » [sic] Les vaches deviennent également plus agressives, même si elles boitent et ne peuvent pas se lever. « C'est déchirant de savoir qu'il n'y a rien à faire. C'est l'impuissance. »

 

Les vaches mortes sont maintenant envoyées à l'université A&M du Texas pour y être autopsiées.

 

« Toutes les vaches ont été testées positives à une maladie du foie », a déclaré M. Tony Coleman.

 

 

M. James Farmer et Mme Robin Alessi

 

À quelques pas de là se trouvent M. James Farmer et sa femme Robin Alessi. Comme les Schultz et les Coleman, M. James Farmer explique qu'il a travaillé toute sa vie pour s'offrir une petite maison à la campagne où il pourrait élever quelques animaux pendant son temps libre.

 

« Je voulais y installer un verger de pêchers et quelques autres choses, mais ce rêve s'est envolé », a déclaré M. Farmer. « Je voulais faire quelque chose qui me permette de tirer un petit profit de ma terre. Maintenant, je rentre à la maison et je me demande pourquoi je veux encore perdre du temps à essayer de m'en occuper. »

 

Les Farmer et Alessi possèdent un terrain plus petit, d'environ 17 acres [7 hectares], mais ils ont normalement une dizaine de vaches sur leur terre, ainsi qu'une poignée de chevaux, de poulets, de dindes et de paons. Leurs vaches se mêlent fréquemment au bétail des Coleman et ils ont été confrontés aux mêmes difficultés. Ils ont eu des veaux mort-nés et des vaches qui ont tout simplement perdu leur capacité à se tenir debout.

 

« Elles tombent sur le dos et ne peuvent plus se relever », explique M. James Farmer.

 

 

M. James Farmer se tient à côté d'un enclos de dindes sur sa propriété à l'extérieur de Grandview, au Texas. Lui et sa femme ont perdu des chevaux et du bétail à cause de la contamination par des polluants éternels. (Photo : Chris Clayton, DTN)

 

 

Mme Robin Alessi adore les chevaux et les a ramenés d'Alaska lorsqu'elle s'est installée au Texas. Ils ont perdu quatre d'entre eux en raison de problèmes neurologiques inexpliqués. Deux d'entre eux se sont couchés et sont morts, tandis que deux autres ont été euthanasiés.

 

« J'ai eu quelques-uns des meilleurs quarter horses que l'on puisse demander, tous très bien élevés », a déclaré M. James Farmer. « Maintenant, j'ai peur de sortir et de monter en selle avec eux. J'ai peur que l'un d'eux ne tombe raide mort lorsque je suis en selle et qu'il ne m'immobilise ».

 

M. Farmer et Mme Alessi ont également apporté des chevaux morts à l'Université Texas A&M pour qu'ils soient testés.

 

 

Le comté de Johnson demande une déclaration de catastrophe

 

Le vote de la Commission du comté de Johnson, mardi, est l'aboutissement d'années de tests et d'avertissements de la part des fonctionnaires du comté qui déconseillent aux agriculteurs d'utiliser des biosolides.

 

« Le seul moyen d'obtenir une aide fédérale est d'obtenir une déclaration de catastrophe du gouverneur », a déclaré M. Larry Woolley, un commissaire du comté de Johnson. « Jusqu'à récemment, nous ne savions pas si nous étions sur une base solide pour faire cette demande. »

 

M. Woolley a ajouté : « Tout cela a pour but d'aider les Coleman, les Farmer et tous les autres à obtenir une aide fédérale pour euthanasier leurs troupeaux, éliminer les carcasses et, espérons-le, trouver des solutions pour atténuer les effets de la catastrophe sur leurs terres ».

 

Le tournant pour les responsables du comté de Johnson s'est produit en décembre, lorsque le procureur général du Texas, Ken Paxton, a intenté une action en justice devant le tribunal du comté contre 3M et les anciennes sociétés DowDuPont, deux des plus grands producteurs de produits chimiques à base de PFAS du pays. Le mois dernier, la plainte de M. Paxton a été transférée au tribunal fédéral du Texas. [Ma note : les plaintes sont – évidemment – dirigées contre les entreprises aux poches les plus profondes...]

 

Selon M. Woolley, les commissaires du comté ont rencontré le commissaire à l'agriculture du Texas, Sid Miller, au début du mois de janvier, au sujet de la demande d'aide en cas de catastrophe, et M. Miller a exprimé son soutien à l'idée.

 

« Le moment est en quelque sorte parfait puisque deux projets de loi ont été déposés au cours de la session législative actuelle pour tester tous les biosolides destinés à l'épandage sur le sol », a déclaré M. Woolley.

 

La résolution du comté demande à M. Abbott de soutenir les projets de loi au sein de la législature.

 

L'utilisation de biosolides comme engrais est une pratique de longue date dans le comté, a déclaré M. Woolley. Il a été professeur d'agriculture et a également travaillé avec des banques pour déterminer l'inventaire des garanties pour les prêts agricoles. Il se souvient également de « l'odeur épouvantable » associée aux champs où les biosolides ont été épandus.

 

« C'est énorme. Il s'agit de milliers d'hectares qui ont été épandus. »

 

Les tests sur les PFAS ne sont pas non plus bon marché. Au cours des dernières années, le comté de Johnson a dépensé environ 35.000 dollars pour tester les substances chimiques.

 

Le comté n'a pas été autorisé à accéder à la propriété proche des Coleman et des Farmer où les PFAS ont été appliqués. Mais l'enquêteur du comté a prélevé des échantillons de sol sur la route du comté, près de la clôture, et c'est là qu'il a enregistré certaines des concentrations les plus élevées dans le sol.

 

« Ce n'est qu'un site isolé où nous avons enregistré des pertes significatives, qu'il s'agisse de bétail ou de poissons », a déclaré M. Woolley.

 

Un autre problème auquel le comté de Johnson est confronté est l'augmentation du nombre de personnes qui s'y installent. La population a augmenté de 20 % depuis le recensement de 2020. Les gens vendent des parcelles de terrain à des promoteurs qui veulent construire dans l'une des rares zones d'espace ouvert restantes, juste à l'extérieur de Fort Worth. Beaucoup de ces nouvelles maisons utiliseront de l'eau de puits. « C'est une préoccupation majeure », a déclaré M. Woolley.

 

M. Woolley a également fait remarquer qu'avant que les Schultz n'achètent leur terrain, il avait lui aussi des vues sur celui-ci.

 

« Chaque fois que je passais devant, je me disais que c'était un beau terrain, mais qu'il était trop grand pour que je puisse l'acquérir. »

 

 

Une loi d'État pour tester les biosolides

 

Le comté de Johnson s'est doté en novembre d'une nouvelle représentante de l'État, la républicaine Helen Kerwin, qui a présenté un projet de loi visant à tester les biosolides. Elle a présenté un projet de loi visant à tester les biosolides sur au moins 17 substances chimiques différents avant qu'ils ne soient épandus. Un projet de loi similaire a également été déposé au Sénat de l'État du Texas.

 

« J'ai dit d'emblée que je ne voulais pas réglementer qui que ce soit, mais nous devons certainement à nos agriculteurs et à nos éleveurs de faire face à cette situation », a déclaré Mme Kerwin lors d'une interview. Elle a ajouté : « Les agriculteurs et les éleveurs ne se doutent de rien, comme tant d'autres personnes, en ce qui concerne ces produits chimiques éternels. Je pense que l'agriculture jouera un rôle important lorsqu'il s'agira d'intégrer les PFAS dans les futures normes. » [Ma note : Bon sang, mais c'est bien sûr ! Les agriculteurs et les éleveurs ne savent pas qu'il faut être prudent avec l'utilisation de boues d'épuration...]

 

Mme Kerwin a également de nouvelles relations au niveau fédéral. Sa fille est Mme Brooke Rollins, qui attend un vote du Sénat américain pour devenir le nouveau secrétaire à l'Agriculture de l'administration Trump [C'est fait !]. Mme Kerwin a déclaré qu'elle avait été surprise, lors de sa visite au Capitole pour l'audition de confirmation de Mme Rollins, de voir que les sénateurs, y compris le sénateur Cory Booker, D-N.J., voulaient lui parler de la contamination par les PFAS.

 

« C'est lui qui était le plus passionné par le sujet », a-t-elle déclaré.

 

 

Un avenir incertain pour les Coleman et les agriculteurs

 

Après avoir reçu les résultats des tests il y a près de deux ans, les familles Coleman et Farmer ont réalisé qu'elles ne pouvaient plus vendre de produits alimentaires provenant de leurs fermes. Elles ne devaient pas non plus manger les poissons de leurs étangs, et elles ont dû installer des systèmes de filtrage de pointe pour leur eau, même si elles ne l'utilisent plus comme eau potable.

 

« Aucune loi ne nous interdit de vendre notre bétail, mais c'est une question de conscience humaine », a déclaré M. Tony Coleman. « Pourquoi voudrais-je faire du mal à votre famille en lui faisant manger quelque chose que j'ai vendu ? Nous ne vaudrions pas mieux que les gens qui produisent cette saleté et qui viennent la répandre dans la ferme de quelqu'un d'autre. »

 

Il ajoute : « C'est un véritable cauchemar. Vous faites tout ce que vous pouvez pour essayer d'élever le meilleur bœuf possible parce que vous voulez en obtenir le meilleur prix. Qui a bien pu penser que répandre les déchets d'une ville sur des terres agricoles pour y cultiver de la nourriture était une bonne idée ? »

 

 

M. Tony Coleman se frotte à son taureau Black Baldy « Tank » dans le pâturage familial à l'extérieur de Grandview, au Texas. Au cours des trois dernières années, l'exploitation de vaches allaitantes a subi de nombreuses pertes de vaches et de veaux. La famille a cessé de vendre son bétail et son foin après avoir appris que son sol, son eau et son bétail contenaient des doses extrêmement élevées de polluants éternels. (Photo : Chris Clayton, DTN)

 

 

Mme Karen Coleman est atteinte d'un cancer de la thyroïde et a dû subir l'ablation d'une masse dans le dos. Mme Robin Alessi vient également de sortir de l'hôpital. Elle a perdu temporairement l'usage de ses jambes et a eu besoin de plusieurs semaines de kinésithérapie pour retrouver cet usage. M. James Farmer a déclaré qu'ils avaient tous des problèmes de santé. Et leur situation a des conséquences sur le plan mental.

 

« Cela m'effraie au plus haut point », a déclaré M. James Farmer. « Je ne suis plus une poule mouillée. Elle non plus. Vous sortez et essayez de faire quelque chose que vous aimez et de travailler pour vous-même et vous ne pouvez pas. On ne peut pas survivre avec quelque chose dont on ne peut rien faire ».

 

M. James Farmer est ému lorsqu'il évoque les visites de sa famille. Il a construit un pavillon près de l'étang, à l'ombre des arbres, pour créer un endroit idéal pour la pêche et les barbecues.

 

« J'ai des neveux et des membres de ma famille qui adorent pêcher et qui veulent venir ici pour faire une friture de poisson, et je dois leur dire que nous ne pouvons pas manger le poisson », a déclaré M. James Farmer.

 

Mme Robin Alessi a ajouté : « C'est vraiment difficile d'expliquer cela à un enfant. Alors, nous les rejetons [les poissons]. Nous sommes obligés de le faire. »

 

Le jour où le DTN a rendu visite aux Coleman, fin janvier, les bœufs de 300 à 400 livres se vendaient 4,50 dollars la livre.

 

« C'est énorme, et ces deux dernières années, nous n'avons rien pu vendre. Pendant ce temps, les prix du bétail ont grimpé en flèche », a déclaré M. Tony Coleman. « Parce que quelqu'un d'autre a fait quelque chose, cela vous coûte tout ce pour quoi vous avez travaillé. Cela me semble un peu injuste. »

 

______________

 

Cet article a été rédigé par Chris Clayton, rédacteur en chef pour la politique agricole chez DTN, qui publie le magazine Progressive Farmer. Il a été distribué via AP Storyshare dans le cadre du Mississippi River Basin Ag & Water Desk, un réseau de reportage indépendant basé à l'Université du Missouri en partenariat avec Report for America, avec un financement majeur de la Walton Family Foundation.

 

[1] Voici l'extrait pertinent :

 

« Les conclusions préliminaires du projet d'évaluation des risques indiquent qu'il peut y avoir des risques pour la santé humaine dépassant les seuils acceptables de l'EPA, parfois de plusieurs ordres de grandeur, pour certains scénarios dans lesquels l'agriculteur a appliqué des biosolides contenant 1 partie par milliard (ppb) de PFOA ou de PFOS (ce qui est proche de la limite de détection actuelle pour ces PFAS dans les biosolides). Ces scénarios modélisés incluent des exploitations agricoles avec un épandage de biosolides à un taux de 10 tonnes métriques de matière sèche par hectare et 40 années consécutives d'épandage de biosolides à ce même taux. La modélisation effectuée dans le cadre de cette évaluation révèle également que les risques pour la santé humaine dépassent les seuils acceptables de l'EPA dans certains scénarios où les biosolides contenant 1 ppb de PFOA ou de PFOS sont placés dans une unité d'élimination de surface non revêtue ou revêtue d'argile. Une fois finalisée, l'EPA utilisera l'évaluation des risques pour aider à informer les futures actions de gestion des risques pour le PFOA et le PFOS dans les boues d'épuration. Pour le scénario de l'incinération, le risque n'est pas quantifié en raison de lacunes importantes dans les données. »

 

Rappel : 1 ppb = 1 microgramme/kilogramme ; le trillion anglais, auquel se réfère « ppt » est le billion français, mille milliards.

 

[2] En Belgique, la Wallonie a procédé à une étude d'envergure des teneurs en PFAS des boues des stations d'épuration. Pour les boues destinées à la valorisation agricole, les autorités ont fixé une norme temporaire de 40 µg/kg MS pour 6 PFAS (les 4 PFAS les plus dangereux, ainsi que 2 fréquemment rencontrés et dont la toxicité est élevée) et de 400 µg/kg MS (somme de 22 PFAS) pour une dose maximale d’épandage de 2 t MS/ha et par an. Seules trois stations d'épuration dépassaient la norme de 40 µg/kg (il y en a 460 en Wallonie).

La teneur annoncée ici pour le sol des Coleman (6,291 µg/kg) – avec une étonnante précision au nanogramme près – est du même ordre de grandeur que ce qu'on trouve dans les boues de beaucoup de stations d'épuration belges (exemple ci-dessous).

 

 

 

 

[3] Trouver 27 substances PFAS n'est pas forcément anormal. La teneur de 35,6 µg/kg serait dans la norme temporaire wallonne.

 

Source : How 'forever chemicals’ devastated Texas family ranchers | AGDAILY

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