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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Mandieu ! Les pesticides ont un effet sur les organismes vivants (non-cibles)

31 Mars 2025 Publié dans #"Bassines", #Article scientifique, #Pesticides, #Biodiversité

Mandieu ! Les pesticides ont un effet sur les organismes vivants (non-cibles)

 

 

Les lignes horizontales indiquent les intervalles de confiance à 95 % autour des moyennes ; les chiffres entre parenthèses indiquent le nombre d'observations et d'études. Les lignes bleues représentent la croissance des animaux, des plantes ou des micro-organismes, les lignes vertes représentent la reproduction des animaux, des plantes ou des micro-organismes, les lignes rouges représentent les biomarqueurs des animaux, des plantes ou des micro-organismes, et les lignes noires représentent le comportement des animaux, respectivement. Pour les biomarqueurs, les valeurs absolues ont été retenues. Le test Z est utilisé pour les tests des coefficients individuels. Chaque test est bilatéral et la valeur P originale est rapportée sans comparaisons multiples. a Réactions des animaux, des plantes et des micro-organismes aux pesticides. b Réactions des animaux, des plantes et des micro-organismes aux insecticides. c Réactions des animaux, des plantes et des micro-organismes aux fongicides. d Réactions des animaux, des plantes et des micro-organismes aux herbicides. Les données sources sont fournies dans un fichier Source Data.

 

 

Extrait de la figure ci-dessus. Curieusement – ou peut-être non – les auteurs n'ont pas relevé l'effet positif qu'ils on trouvé sur les biomarqueurs.

 

 

C'est sans doute un gigantesque travail de recherche bibliographique et de prestidigitation statistique. Mais quel intérêt ont ces indicateurs synthétiques pour des triplets extrêmement variés pesticide-organisme-effet ? En dehors du militantisme, bien sûr.

 

 

En postant, le 26 mars 2025, un petit renvoi vers un de mes articles de blog, je suis tombé sur un billet renvoyant à un article scientifique – ou plutôt « scientifique » – sur les effets des pesticides sur les organismes non-cibles.

 

 

L'article scientifique

 

« Pesticides have negative effects on non-target organisms » (les pesticides ont des effets négatifs sur les organismes non ciblés) de Nian-Feng Wan, Liwan Fu, Matteo Dainese, Lars Pødenphant Kiær, Yue-Qing Hu, Fengfei Xin, Dave Goulson, Ben A. Woodcock, Adam J. Vanbergen, David J. Spurgeon, Siyuan Shen et Christoph Scherber a été publié le 13 février 2025 dans Nature Communications.

 

En voici le résumé (découpé) :

 

« Les pesticides affectent un large éventail d'espèces non ciblées et peuvent être liés à la perte de biodiversité au niveau mondial. L'ampleur de ce risque n'est que partiellement comprise.

 

Nous présentons une synthèse des impacts des pesticides (insecticides, herbicides et fongicides) sur de multiples organismes non ciblés à travers les niveaux trophiques, fondée sur 20.212 tailles d'effet provenant de 1.705 études.

 

Pour les plantes, les animaux (invertébrés et vertébrés) et les micro-organismes (bactéries et champignons) non ciblés, nous montrons des réponses négatives de la croissance, de la reproduction, du comportement et d'autres biomarqueurs physiologiques dans les systèmes terrestres et aquatiques.

 

Des pesticides formulés pour des taxons spécifiques ont eu des effets négatifs sur des groupes non ciblés, par exemple les néonicotinoïdes insecticides sur les amphibiens.

 

Les effets négatifs étaient plus prononcés dans les régions tempérées que dans les régions tropicales, mais ils étaient cohérents entre les environnements aquatiques et terrestres, même après correction pour des scénarios d'exposition terrestres et environnementaux réalistes.

 

Nos résultats remettent en question la durabilité de l'utilisation actuelle des pesticides et confirment la nécessité d'améliorer l'évaluation des risques afin de réduire les risques pour la biodiversité et les écosystèmes. »

 

À ce stade, on a envie de dire : « Bof ! »

 

Notons cependant que c'est modérément militant.

 

Et que l'un des auteurs est Dave Goulson, contributeur à la propagande de Greenpeace et qui ambitionne de devenir l'héritier de Rachel Carson avec son « Terre Silencieuse ».

 

 

 

 

Sur le blog « Écotoxicologie »

 

C'est un blog « initié en collaboration avec Nathalie Chèvre, maître d’enseignement et de recherche à l’Université de Lausanne. Ce blog vous propose des éclairages de chercheurs sur les pollutions chimiques et leurs conséquences sur l’environnement. »

 

Je connais Mme Nathalie Chèvre par ses contributions occasionnelles – fort appréciées, celles-là – dans la presse régionale sur la pollution du lac Léman. La dernière en date, dans le Messager : « 60 tonnes de substances médicamenteuses dans le Léman, "la pointe de l’iceberg" selon une scientifique ». Notons cependant que, selon cet article de blog dont elle est l'auteur, c'est 60 tonnes de la seule metformine

 

Son « Les pesticides ont un effet sur la biodiversité » a été beaucoup moins apprécié...

 

J'ai donc commenté le billet de M. Vivien Lecomte sur LinkedIn qui y faisait référence.

 

 

Ma réponse

 

Je suis extrêmement déçu par l'article de Mme Nathalie Chèvre, qui révèle ici une approche générale qui n'est pas fondée sur la science et la rationalité, mais sur l'émotion et sur une vision socio-économico-politique teintée d'animosité.

 

Mme Nathalie Chèvre a répondu :
« Être déçu n'est-il pas "émotionnel" ? Pour moi le débat est sain. Merci de partager votre avis. »
Cela avait en fait mis fin au « débat ».

 

« N’en déplaise aux ardents défenseurs d’une agriculture intensive... » ? J'aimerais savoir qui sont les « ardents » défenseurs – sans doute à distinguer des « simples » défenseurs, notamment de ceux qui ont à cœur d'assurer l'alimentation de l'humanité dans les meilleures conditions agronomiques, écologiques, économiques et sociales possibles, ce qui appelle nécessairement un compromis entre un grand nombre de facteurs.

 

 

Mme Nathalie Chèvre avait écrit :
« N’en déplaise aux ardents défenseurs d’une agriculture intensive, les faits sont là. On peut moquer la science, vouloir la faire taire, cela ne changera pas la situation. La biodiversité est en chute libre à travers le monde, et les pesticides participent à cette chute. »

 

Ce billet commence aussi par un appel à l'autorité qui mériterait aussi une analyse critique et sans doute une réfutation.

 

Mme Nathalie Chèvre avait écrit :
« Parue dans Nature communications fin janvier 2025, cette étude est la plus complète à ce jour.
Notons au passage que Nature communications est une revue de qualité. Et que l’étude a mis plus d’un an et demi avant d’être publiée, ce qui veut dire qu’elle a été revue et améliorée au fil des relectures critiques d’autres scientifiques avant d’être acceptée. Cette remarque pour celles et ceux qui pensent que la science n’est ni crédible, ni sérieuse. »

 

Quant à l'étude elle-même, j'ai le plus grand mal à visualiser l'intérêt. Les pesticides ont un effet sur des organismes non-cibles ? Produire des tailles d'effet synthétiques sur la base d'un grand nombre de combinaisons pesticide-organisme et une grande diversité d'effets, quel intérêt ? La belle affaire ! So what !

 

De plus, c'est un exercice fondé sur un biais de publication patent (les résultats « négatifs » n'intéressent généralement pas les chercheurs ni les publieurs), avec sans doute une fraction d'études produites par des chercheurs militants.

 

Beaucoup d'études retenues ont été réalisées en laboratoire. Quelle relation avec la réalité de terrain ?

 

Enfin, la liste des auteurs comprend un certain Dave Goulson...

 

J'ai répondu à un autre commentaire :

 

Cette étude vient avec, dans les informations complémentaires, le dossier de la revue par des pairs.

 

Il vous est donc loisible de vérifier la qualité du travail initial, la qualité des commentaires et des améliorations apportées, la qualité et la pertinence de l'article publié.

 

Et, bien sûr, la pertinence d'une suspicion d'interférence d'intérêts (forcément occultes) qui auraient été affectés.

 

On apprend dans ce dossier que la manuscrit a été soumis à une autre revue qui a fait intervenir des pairs. Manifestement, cette revue a finalement décliné de publier l'article.

 

Au vu du dossier, je constate qu'il y a eu un travail considérable, et c'est à la mesure des problèmes que pose la tentative d'amalgamer en des évaluations synthétiques des effets nombreux et variés de triplets pesticide-organisme-fonction analysée.

 

Et cela met aussi en perspective l'intérêt de cette étude.

 

Je tiens à préciser que ce commentaire ne signifie pas que je nie ou minimise l'effet des produits phytosanitaires sur les organismes non-cibles.

 

Ces effets sont étudiés lors de l'homologation des produits ou du renouvellement de l'homologation. Ne résistent au couperet que ceux dont le profil toxicologique et écotoxicologique est acceptable – en Europe sur la base d'une législation axée davantage sur le danger que sur le risque et d'une application rigoriste, voire hystérique, du principe de précaution – compte tenu des conditions et limitations d'emploi.

 

Ce genre de recherche qui tonitrue que « les pesticides ont des effets négatifs sur les organismes non-cible » n'a pas d'autre intérêt que de susciter et entretenir l'hystérie anti-pesticides.

 

Surtout chez des gens bien nourris qui ne mesurent pas, ou plus, la contribution des produits de protection des plantes à la qualité (organoleptique et surtout sanitaire), la quantité et la variété de leur nourriture, ni la contribution à l'environnement.

 

En définitive la question est : « what is the alternative ? »

 

Land sharing vs land sparing ? Labour et désherbage mécanique vs herbicide ? Travail du sol ou agriculture de conservation des sols faisant appel à des herbicides ? Agriculture dite « biologique » encaissant des pertes importantes comme en 2024 en vigne à cause du mildiou ou agriculture raisonnée faisant appel à des produits de synthèse plutôt que le détestable cuivre...

 

M. Thierry Tetu, Agriculteur-Maître de Conférences en Agroécologie, nutrition végétale et écologie microbienne à l'Université de Picardie Jules Verne avait commenté :

« Oui bonjour, il existe également des dizaines d’autres publications qui montrent des effets identiques du travail du sol sur la biodiversité de celui ci, avec des effets plus forts, comme il y a de nombreuses publications qui mettent en évidence des effets du réchauffement climatique sur la biodiversité avec une échelle de 1 à 20 par rapport à l’intensité des effets des pesticides [ma note : le rapport est sans doute en sens invers]. Pour information, en lisant la publication on s’aperçoit qu’il y a des effets positifs et des effets négatifs. Quand on souhaite être un informateur objectif et non un lobbyiste il faut tout dire… pas seulement ce qui intéresse. »

 

Mme Nathalie Chèvre a répondu :

« Le statut d'informateur objectif est une illusion. On donne toujours son avis basé sur son expertise. Merci d'amener votre expérience pour contribuer au débat. »

 

Et M. Thierry Tetu a répliqué :

« Oui bien entendu mais plus ou moins. L’activité de lobbyiste prend naissance lorsque l’on ne dit pas tout volontairement. Et malheureusement nous sommes entourés d’ONGs dont c’est le métier sur LinkedIn de ne pas tout dire volontairement. [...] »

 

Mme Nathalie Chèvre a conclu : « Il est donc important et urgent de continuer à travailler pour diminuer l’utilisation des pesticides, en partenariat avec le monde agricole, et en gardant en tête que le but est d’en utiliser le moins possible. N’en déplaise à l’industrie. »

 

Oui pour la première partie, encore que, pour l'urgence, il n'y a pas... le feu au lac.

 

Non, le but n'est pas d'en utiliser « le moins possible » mais de nourrir et de préserver, et donc d'en faire l'emploi le plus judicieux.

 

Et enfin, n'en déplaise à Mme Nathalie Chèvre, l'« industrie » est une partie prenante particulièrement active. C'est contre-intuitif pour les adeptes du manichéisme et du mode de pensée binaire, mais c'est comme ça.

 

 

Le commentaire de Mme Catherine Regnault-Roger

 

Mme Catherine Regnault-Roger est professeur émérite de l'Université de Pau et Pays de l'Adour (UPPA-E2S-IPREM CNRS), essayiste scientifique, membre de l'Académie d'Agriculture de France et de l'Académie Nationale de Pharmacie

 

So what ? Quelle découverte !! Les #insecticides tuent les insectes, les #fongicides les champignons et les #herbicides les plantes !! C'est pour cela qu'ils sont utilisés !! Mais en agriculture, on les utilise contre les insectes nuisibles aux cultures, les champignons qui véhiculent des maladies pour les cultures, et les mauvaises herbes qui polluent une culture... Pour produire sain ! Et comme ces produits coûtent chers, les agriculteurs les utilisent avec parcimonie... et d'ailleurs des contrôleurs d'organismes divers sont bien là pour surveiller et faire pleuvoir des amendes si non respect de la réglementation. Mais peut-être que la situation est différente en Suisse, Nathalie Chèvre ?

 

Effectivement, on a bien un outil plus récent qui permettrait de réduire efficacement l'emploi de ces #pesticides naturels ou de synthèse en agriculture, l'édition génomique #NGT et l'amélioration variétale... Où en est la #Suisse à ce sujet ?

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U
" ... sans comparaisons multiples ..."<br /> Parce que quand on en tient compte, il y a beaucoup moins d'effets significatifs.
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