Les agriculteurs veulent la technologie d'édition de gènes
Cherilyn Jolly Nagel, Réseau Mondial d'Agriculteurs*
Le Canada est prêt pour la prochaine révolution génétique.
Les agriculteurs comme moi félicitent l'Agence Canadienne d'Inspection des Aliments (ACIA) d'avoir laissé la science guider la politique agricole et d'avoir levé les incertitudes et les ambiguïtés qui entouraient jusqu'à présent la nouvelle technologie la plus prometteuse en matière de production végétale.
Le 3 mai, l'ACIA a confirmé que les cultures génétiquement éditées étaient sans danger pour le bétail, suivant en cela l'exemple de Santé Canada qui a déterminé leur innocuité pour l'alimentation.
Cette décision signifie que les agriculteurs du Canada disposeront d'un nouvel outil pour lutter contre la sécheresse, vaincre les parasites et maladies et améliorer la durabilité. Pour les consommateurs, cela signifie des aliments abordables, abondants et nutritifs. Pour le monde, cela signifie une meilleure sécurité alimentaire.
Tout commence à la ferme et je me réjouis de ce que l'édition génétique va m'aider à accomplir ici, dans les plaines de la Saskatchewan, où nous semons actuellement notre nouvelle récolte de canola pour l'huile de cuisson, de lentilles pour les ragoûts et les soupes, et de blé dur pour les pâtes.
Nous luttons également contre une sécheresse qui dure depuis sept ans. Notre région est généralement assez sèche et les cultures que nous produisons sont adaptées à ces conditions difficiles, mais ces dernières années, nous avons reçu beaucoup moins d'eau que ce dont nous avions besoin, ce qui a imposé un stress supplémentaire à nos plantes qui tentent de prospérer.
L'édition de gènes offre une solution. Elle permet aux chercheurs et aux scientifiques d'accélérer le processus de sélection conventionnelle, par ailleurs très lent. Ils peuvent développer et affiner des caractéristiques à partir du code génétique qui se trouve déjà à l'intérieur de chaque plante – et, par exemple, mettre au point des cultures qui utilisent l'eau de manière plus efficace.
Les cultures génétiquement éditées peuvent s'appuyer sur de nouvelles technologies, mais à tous égards importants, elles ne se distinguent pas des cultures produites de manière conventionnelle.
Cela diffère de la technologie de modification génétique des cultures GM, qui consiste à prélever des gènes d'une espèce et à les transplanter dans une autre. J'ai toujours été une fervente partisane de la technologie des OGM – le canola de ma ferme est un canola génétiquement modifié – mais il est important que les gens sachent que l'édition de gènes est une approche plus raffinée de l'amélioration des cultures. L'édition de gènes permet d'apporter des modifications précises au génome d'une plante sans introduire de gènes étrangers, ce qui en fait une méthode plus précise et plus ciblée pour améliorer les caractéristiques des cultures.
L'amélioration traditionnelle des cultures peut nécessiter dix ans ou plus de recherche et de développement pour qu'un trait de culture passe du concept à la commercialisation.
Je suis loin d'être assez patiente pour attendre aussi longtemps de nouvelles caractéristiques dont nous avons tant besoin. Aujourd'hui, je n'ai plus à l'être. L'édition de gènes nous permet d'accélérer le rythme. J'attends avec impatience un avenir dans lequel les agriculteurs verront de nouvelles caractéristiques chaque année, alors que nous construisons des cultures qui résistent à la sécheresse, au gel et aux parasites et maladies. Cette nouvelle génération de cultures dotées de caractéristiques spécifiques devrait également nous permettre d'utiliser nos ressources plus efficacement et d'améliorer la valeur nutritionnelle de nos aliments.
Et ce n'est pas tout. L'édition de gènes étant rapide et efficace, les équipes de R&D pourront concentrer leur temps et leur énergie sur les cultures spécialisées et les variétés régionales. Il sera enfin rentable de développer des plantes adaptées à l'environnement local de ma région, la région de Mossbank en Saskatchewan.
La décision de l'ACIA nous permet de tirer pleinement parti des possibilités offertes par l'édition de gènes.
Elle aide également le Canada à maintenir sa position de leader mondial en matière de technologie agricole. Comme nous exportons une grande partie de ce que nous produisons, nous avons à la fois l'obligation et l'occasion de raconter l'histoire de l'édition génétique au reste du monde.
C'est pourquoi je me suis rendue à Bruxelles l'année dernière pour parler des avantages de l'édition de gènes avec un groupe d'agriculteurs internationaux : Gilbert Bor du Kenya, Guillermo Breton du Mexique, David Danio des Philippines et Diana Lenzi d'Italie. J'ai ensuite emmené toute ma famille au Japon pour partager l'expérience de notre ferme et notre soutien à la technologie des semences avec Shuichi Tokumoto, un agriculteur de Tottorishi, au Japon. Nous sommes tous affiliés au Réseau Mondial d'Agriculteurs (Global Farmer Network) et nous venons d'endroits très différents. Notre objectif était de montrer notre soutien unanime à l'édition de gènes.
Nous pensons que les cultures génétiquement éditées feront de nous de meilleurs agriculteurs, ce qui signifie que nous produirons de meilleurs aliments pour les personnes qui comptent sur nous.
C'est un point essentiel : les agriculteurs veulent cette technologie. Et maintenant, le Canada va entrer dans le jeu pour que ma ferme familiale puisse continuer à produire des aliments sûrs, sains et abordables.
______________
* Cherilyn Jolly-Nagel, agricultrice, Canada
Élevée dans les prairies de la Saskatchewan, Cherilyn Jolly-Nagel et son mari David poursuivent leur amour de la terre en cultivant des céréales, des légumes secs et des oléagineux, avec leurs deux filles à Mossbank. Élue première femme présidente de l'Association des Producteurs de Blé de l'Ouest Canadien, Cherilyn a contesté les politiques gouvernementales qui affectent l'agriculture et est un chef de file dans les questions qui touchent les agriculteurs en matière de transport des céréales, de gouvernance, de commerce et de confiance du public. En tant que membre du conseil d'administration du Réseau Mondial d'Agriculteurs (Global Farmer Network), Cherilyn milite en faveur de relations commerciales mondiales solides et de l'utilisation des progrès technologiques par les agriculteurs. En 2021, Cherilyn a été reconnue comme l'une des 50 personnes les plus influentes dans le domaine de l'agriculture au Canada. Cherilyn a été interviewée dans le documentaire « License to Farm », dans lequel elle a encouragé d'autres agriculteurs à partager leurs histoires avec le public, a figuré avec le chef canadien Michael Smith dans une vidéo pour promouvoir les lentilles et a participé à un épisode de Canadian Better Living sur le thème de l'utilisation des pesticides et la promotion de la biotechnologie végétale. Invitée par la société de jouets Mattel, Cherilyn a été un mentor dans le programme de mentorat « Barbie: You Can Be Anything » pour les jeunes filles qui rêvent de devenir agricultrices.
Source : Farmers Want Gene-editing Technology – Global Farmer Network