Point de vue : capturé par les idéologues de l'agro-écologie, The Conversation est fan de la propagande d'un groupe militant contestant la sécurité du glyphosate
Jon Entine et Kevin Folta, Genetic Literacy Project*
Il est frustrant de lire en ligne des informations scientifiques manifestement fausses, mais c'est un fait de notre époque. Depuis des années, nous avons au moins des remparts, comme le site en ligne « The Conversation », qui se présente comme « une plate-forme indépendante à but non lucratif pour des commentaires et des analyses éclairés rédigés par des professeurs et des chercheurs universitaires ». [Ma note : le sous-titre, en tout petit, est : « L’expertise universitaire, l’exigence journalistique ».]
Indépendante, certes, mais informée ? Malheureusement, ses normes sont en train de se dégrader. Il y a de plus en plus d'exemples de militants qui détournent le site pour promouvoir des perspectives idéologiques qui vont à l'encontre du consensus scientifique.
Dernière déformation scientifique en date : un nouvel article affirmant que l'herbicide le plus utilisé au monde, le glyphosate, présente un risque de cancer, affectant la santé humaine et l'environnement.
Cette question peut faire l'objet d'une controverse dans les médias, et des milliards de dollars ont été dépensés en procès pour faire valoir cette affirmation, mais la communauté scientifique dominante est depuis longtemps parvenue à un consensus : comme l'a déclaré Santé Canada dans son évaluation du glyphosate :
Aucun organisme de réglementation des pesticides dans le monde ne considère actuellement que le glyphosate présente un risque de cancer pour les humains [...]
Mais une telle unanimité parmi les organismes indépendants de réglementation et de surveillance n'a pas dissuadé les militants écologistes de déformer les données scientifiques ; c'est ce qu'ils font. Ce qui est déconcertant, en revanche, c'est lorsque les gardiens de la science – que The Conversation prétend être – abusent de la confiance du public en alimentant la bouillie de désinformation.
Le 10 juillet, The Conversation a diffusé la dernière et la plus flagrante erreur d'information sur la science du glyphosate : « L'interdiction prévue du glyphosate au Mexique a permis de montrer comment l'agro-écologie peut montrer la voie à suivre ».
Il convient de noter d'emblée que les trois coauteurs sont des sociologues, l'un d'entre eux ayant une expertise en économie agricole. Aucun d'eux n'a reçu de formation en sciences fondamentales, et encore moins en toxicologie. Gardez cela à l'esprit, car nombre de leurs hypothèses et proclamations, bien qu'elles soient des mèmes dans la communauté des militants, sont totalement rejetées par l'écrasante majorité des experts dans l'étude de la toxicité des produits chimiques.
Décortiquons l'article de The Conversation point par point.
Le titre lui-même est trompeur, car l'article n'a pas grand-chose à voir avec le sujet amorphe de l'agro-écologie. Il s'agit plutôt d'une attaque en règle contre la piñata bien connue du glyphosate. L'article affirme que l'herbicide, utilisé avec certaines cultures génétiquement modifiées, peut provoquer des cancers et présenter de graves risques pour l'environnement. Aucune de ces affirmations n'est exacte, si l'on en croit le consensus scientifique ou les résultats d'évaluations réglementaires rigoureuses qui ne cessent de montrer qu'il n'y a pas de risque particulier en cas d'exposition professionnelle ou alimentaire.
Le sous-titre est tout aussi flagrant : « Les désherbants comme le glyphosate sont hautement toxiques pour les humains et nos écosystèmes ». Aucune donnée ne vient étayer cette affirmation, pas plus que les auteurs ne citent ou ne renvoient à une recherche consensuelle étayant ces allégations de toxicité. Le glyphosate est toxique pour les plantes, oui. Il est conçu pour tuer les mauvaises herbes. Il tue les plantes en inhibant une enzyme nécessaire à un métabolisme que les animaux ne possèdent pas. Sa toxicité pour l'homme est limitée, ce qui contraste fortement avec les affirmations des auteurs. Mais dans le cas du glyphosate, la toxicité n'est pas synonyme de santé humaine ou de danger écologique. Voici un tableau qui illustre la toxicité comparée du glyphosate avec plus d'une douzaine d'autres substances. Il est moins toxique que le café et à peu près aussi toxique que le sulfate de cuivre, un fongicide largement utilisé sans restriction par les adeptes de l'agro-écologie.
Les auteurs fondent leur affirmation (présentée faussement comme une science reconnue) sur le rapport d'une seule agence, qu'ils dénaturent. En 2015, une sous-agence des Nations Unies – le Centre International de Recherche sur le Cancer – a publié une monographie classant le glyphosate comme « cancérogène probable ». La conclusion du CIRC, qui va à l'encontre des conclusions de toutes les autres agences indépendantes chargées des risques chimiques dans le monde, est devenue la citation de référence pour tous les groupes de plaidoyer qui soutiennent que le glyphosate présente de graves risques pour la santé humaine. [Ma note : les auteurs de l'article de The Conversation attribuent cette monographie à l'Organisation Mondiale de la Santé !]
La méthodologie et les résultats de l'évaluation du glyphosate par le CIRC sont contestés par tous les organismes de réglementation de tous les pays industrialisés. Mais pour les besoins de l'illustration, prenons-les au pied de la lettre. Le CIRC a établi différentes catégories de danger.
Quel est le degré de dangerosité du glyphosate ? Le CIRC classe l'herbicide dans la même catégorie de danger que le travail de nuit ou la consommation d'aliments cuits à haute température. Il est considéré comme aussi « dangereux » que de manger un hamburger. Qu'est-ce que le CIRC considère comme beaucoup plus dangereux et potentiellement cancérigène que le glyphosate ? Boire du vin ou de la bière. Manger du bacon ou du poisson salé. Prendre des pilules contraceptives.
Ainsi, même si nous prenons les conclusions du CIRC au pied de la lettre – encore une fois, aucune agence de surveillance des produits chimiques dans le monde n'est d'accord avec son évaluation – pourquoi ces universitaires activistes ne font-ils pas campagne pour la fermeture de tous les McDonald's du Mexique et l'interdiction de la Corona et de la tequila ?
Plongeons plus profondément dans le débat sur la sécurité du glyphosate. La plupart des milliers d'études à décharge [ma note : c'est ce que dit l'original. À mon sens c'est plutôt « à charge »] sur le glyphosate n'impliquent que des recherches en laboratoire. Que révèlent les données réelles ?
Il existe une analyse de pointe que le CIRC a ostensiblement et de manière controversée ignorée : l'étude longitudinale sur la santé agricole (Agricultural Health Study) menée pendant 25 ans par le gouvernement américain, qui a suivi l'utilisation du glyphosate et l'incidence du cancer chez 54.000 agriculteurs et applicateurs américains.
L'AHS a réexaminé ses données en 2018 dans le sillage du rapport du CIRC, évaluant et rejetant les conclusions de l'agence malhonnête[ma note : les résultats étaient déjà disponibles au moment où le groupe de travail du CIRC a siégé, et connus de plusieurs membres de ce groupe de travail, dont le président, Aaron Blair]. « Aucune association n'était apparente entre le glyphosate et les tumeurs solides ou les tumeurs malignes lymphoïdes. »
L'étude AHS qui contredit les affirmations des activistes selon lesquelles le glyphosate provoque le cancer est conforme aux 24 évaluations du glyphosate qui ont été publiées au cours des deux dernières décennies. Aucune n'a conclu que le glyphosate présentait un risque de cancer en cas d'exposition professionnelle ou alimentaire.
Cliquez ici pour télécharger une version .pdf de cette infographie.
Une étude indépendante comparant les résultats du CIRC avec le consensus mondial, publiée en 2018, a conclu ce qui suit :
La classification du glyphosate comme cancérogène probable par le CIRC était le résultat d'une évaluation défectueuse et incomplète des études sur le cancer chez les rongeurs sur lesquelles le CIRC s'est appuyé. Bien que le groupe de travail ait conclu qu'il existait des preuves suffisantes que le glyphosate était un agent cancérogène pour les animaux, un résumé approprié des études sur les rongeurs sur lesquelles le CIRC s'est appuyé ne soutiendrait même pas la conclusion selon laquelle il existe des preuves limitées que le glyphosate est un agent cancérogène pour les animaux.
Il convient d'insister sur un point essentiel : la monographie du CIRC sur le glyphosate, largement critiquée, ne s'est concentrée que sur des études sur des boîtes de Petri et sur des animaux ; elle n'a même pas abordé l'exposition professionnelle, bien que la monographie ait été largement déformée pour prétendre cela. Pour parvenir à sa conclusion, le CIRC a examiné plus de 300 études in vitro ; seul un minuscule sous-ensemble a montré des signes de cytotoxicité. Dans tous les cas, dans toutes les études citées par le CIRC, les niveaux d'exposition étaient des doses extrêmement élevées qui dépassent de loin l'exposition dans la vie réelle.
À aucun moment, la monographie défectueuse du CIRC n'approuve l'affirmation de ces trois chercheurs en sciences sociales malhonnêtes (affirmations répétées à l'infini par de « faux journalistes » financés par des avocats spécialisés dans la responsabilité civile dont le modèle économique consiste à poursuivre Bayer), affirmation selon laquelle le produit présente un risque alimentaire pour l'homme aux niveaux extrêmement faibles auxquels il se trouve dans les aliments. En résumé, aucune agence au monde, y compris le CIRC, ne conclut que les micro-traces de résidus de glyphosate (en parties par milliard/billion) présentes dans certains produits alimentaires présentent des dangers pour la santé.
Quelles autres preuves les auteurs invoquent-ils pour étayer leur ciblage du glyphosate ? Ils remontent huit ans en arrière, à un article d'opinion publié par une série d'auteurs dans Environmental Sciences Europe. Cette revue a publié des dizaines d'articles peu crédibles qui s'alignent sur la politique européenne de précaution qui restreint les cultures génétiquement modifiées. ESE est surtout connue pour avoir republié, sans examen par les pairs, l'article rétracté de 2012 du scientifique activiste français Gilles-Éric Séralini, qui affirmait, à tort, que la consommation de maïs GM provoquait de nombreuses tumeurs massives chez les rats.
Les auteurs affirment avec désinvolture que le glyphosate présente de graves dangers pour l'environnement. Les « preuves » qu'ils citent sont à la fois sélectives et mal formulées.
L'herbicide, également vendu sous la marque Roundup, a souvent été qualifié d'« herbicide miracle » ou de « désherbant du siècle » [« once in a life time »] en raison de son efficacité et de son caractère ciblé, sans qu'il y ait beaucoup de preuves d'un impact délétère sur l'environnement. Le glyphosate est un herbicide systémique, ce qui signifie qu'il est absorbé par la plante et transloqué dans tous ses tissus, entraînant la mort de la plante entière, y compris ses racines. Il est donc très efficace pour lutter contre les mauvaises herbes coriaces et résistantes.
Le glyphosate se lie étroitement aux particules du sol et est mal absorbé par les racines, ce qui signifie qu'il est moins susceptible d'affecter les cultures suivantes, ce qui le rend plus sûr pour la rotation des cultures et d'autres pratiques agricoles. Selon l'Agence Américaine de Protection de l'Environnement et l'Université de Cambridge, le glyphosate se décompose relativement rapidement dans l'environnement, principalement par dégradation microbienne. Sa demi-vie dans le sol est relativement courte, de l'ordre de 30 jours en moyenne dans les climats tempérés. Cette dégradation rapide réduit la probabilité d'une accumulation à long terme dans l'environnement et minimise les dommages potentiels pour les organismes non ciblés et les écosystèmes.
L'EPA a procédé à une évaluation complète des risques environnementaux, y compris des effets du glyphosate sur les organismes terrestres et aquatiques, et a conclu que lorsqu'il est utilisé conformément aux instructions figurant sur l'étiquette, l'herbicide ne présente aucun risque significatif pour les espèces non ciblées, y compris les espèces menacées ou en voie de disparition. En décembre dernier, la Commission Européenne a renouvelé l'approbation du glyphosate, ne citant aucun domaine critique en matière de santé ou d'environnement qui empêcherait la poursuite de son utilisation.
En résumé, des études ont montré que les cultures résistantes au glyphosate sont plus durables que d'autres systèmes de désherbage, y compris ceux préconisés par les agro-écologistes, car leur utilisation contribue à réduire l'érosion et à améliorer la santé des sols en facilitant les pratiques agricoles sans labour et à faible travail du sol, qui sont bénéfiques pour l'environnement.
Les auteurs mexicains affirment également à tort que le glyphosate « menace les populations d'abeilles ». Il convient de préciser que le glyphosate n'est pas un insecticide mais un herbicide. Il cible la voie du shikimate, une voie biochimique cruciale pour la synthèse de certains acides aminés chez les plantes et certains micro-organismes. Les animaux, y compris les abeilles, ne possèdent pas cette voie, de sorte que le glyphosate ne les affecte pas directement de la même manière qu'il affecte les plantes.
Dans des conditions typiques de terrain, les abeilles mellifères ne sont pas susceptibles de rencontrer des niveaux nocifs de glyphosate. L'herbicide est généralement appliqué sur les cultures et les mauvaises herbes plutôt que directement sur les plantes à fleurs que les abeilles butinent. En outre, le glyphosate a tendance à se dégrader relativement rapidement dans l'environnement, ce qui réduit encore le risque d'exposition à des niveaux nocifs.
L'affirmation erronée des auteurs repose entièrement sur deux études de laboratoire et de terrain à forte dose (par exemple Farina et al., 2019, Abraham et al., 2018) qui ont été largement critiquées par la communauté entomologique. Les études n'ont pas reproduit les conditions du monde réel ; au contraire, les scientifiques ont nourri les abeilles avec du glyphosate dans de l'eau sucrée et/ou en utilisant des doses qui ne pourraient jamais être trouvées dans des contextes réalistes.
Les études ont constamment réaffirmé la faible toxicité aiguë du glyphosate. Les organismes de réglementation tels que l'EPA, l'Autorité Européenne de Sécurité des Aliments (EFSA) et Santé Canada concluent que lorsqu'il est utilisé correctement, le glyphosate ne constitue pas une menace pour la santé des abeilles. L'examen de l'EFSA a spécifiquement pris en compte le potentiel d'exposition et a conclu que le risque pour les abeilles mellifères était faible.
Les auteurs mentionnent que le glyphosate détruit les fleurs sauvages, qui sont certainement une source de nourriture pour les abeilles, mais il en va de même pour les autres herbicides ou les charrues utilisées par de nombreux agriculteurs adeptes de l'agro-écologie. En résumé, si nous voulons cultiver, nous devons lutter contre les mauvaises herbes, et le glyphosate est moins nocif pour l'écosystème agricole que d'autres solutions.
La qualité aadémique de l'article atteint son point bas lorsqu'il affirme que le glyphosate « tue les oiseaux et les micro-organismes du sol ». Sa source ? Un lien vers un article sur le site de The Ecology Center, avec des liens vieux de trente ans.
Les trois auteurs affirment que « certains gouvernements ont restreint ou même interdit l'application du glyphosate ». Sa source ? Un lien vers un article de l'Agence France-Presse qui contredit directement leur affirmation. L'article de l'AFP de 2023 indique que l'UE venait de réautoriser l'utilisation du glyphosate pour une décennie, que le Brésil a conclu à l'absence de risque pour la santé humaine et que la Colombie et le Salvador sont revenus sur leurs interdictions et autorisent désormais l'utilisation du glyphosate. Le Vietnam est le seul pays d'Asie à en interdire actuellement l'utilisation. Le Sri Lanka est revenu sur son interdiction [ma note : des produits de synthèse en général] de 2021, laquelle a contribué à l'effondrement désastreux de son économie agricole. La proposition d'interdiction du Mexique a été annulée.
Cet article est du gaz-lighting [détournement cognitif au Québec] académique et représente une faute grave en déformant une citation. La plupart des organismes de réglementation ne sont pas favorables à l'interdiction ou à la restriction du glyphosate. Quelques pays de l'UE ont imposé des restrictions sur son utilisation à la suite de l'hystérie provoquée par l'article de Séralini, qui a été retiré depuis, cédant ainsi à la pression des groupes d'activistes environnementaux, mais aucun ne l'interdit formellement.
Les auteurs concluent en écrivant que « l'interdiction du glyphosate est une étape essentielle dans la protection de la santé des humains et de nos écosystèmes », une opinion qui contraste avec le synopsis du lien qu'ils ont fourni.
Les auteurs ont clairement deux intentions : discréditer le glyphosate, qu'ils utilisent comme homme de paille de l'agriculture conventionnelle, et promouvoir l'agro-écologie, le nouveau nom de l'agriculture biologique.
Alors que le reste du monde se précipite pour adopter l'édition de gènes pour l'agriculture et l'utilisation de la chimie de pointe dans le cadre d'une approche durable et intégrée de la gestion des mauvaises herbes, les auteurs présentent une vision romantique d'une exploitation d'agrumes dans la région de Veracruz, au Mexique, qui rejette la technologie.
Les auteurs affirment qu'un groupe d'agriculteurs abandonne le glyphosate et le remplace par des cultures de couverture et des désherbeurs. Le Conseil National de la Recherche du Mexique a apparemment subventionné des milliers de désherbeurs (massivement polluants) et 38 techniciens en agro-écologie. Des agents parrainés par le gouvernement ont visité plus de 10.000 exploitations agricoles, « partageant des informations sur les dangers potentiels du glyphosate et la viabilité des alternatives agro-écologiques ».
L'article inclut une photo d'une exploitation d'agrumes qui a mis en œuvre ces pratiques. Elle est loin d'être exempte de mauvaises herbes. Si les cultures de couverture ont fière allure au milieu des rangs, les arbres sont envahis par les mauvaises herbes. Les désherbeurs ne suffisent pas.
The Conversation illustrant la lutte contre les mauvaises herbes dans une exploitation d'agrumes.
Ce récit, s'il est vrai, est aussi scandaleux qu'il est un désaveu de la science. Les subventions publiques sont utilisées pour empoisonner le puits, effrayer les agriculteurs en les détournant des techniques agricoles scientifiquement avancées et en supplantant ces méthodes par des schémas de production alternatifs qui n'ont aucun antécédent de réussite. Il s'agit là d'un pari très risqué sur les moyens de subsistance des populations, fondé sur des preuves limitées.
Les chercheurs en sciences sociales notent qu'un récent décret présidentiel soutient des investissements d'une ampleur atypique dans la recherche agro-écologique, qui vise à étendre l'adoption à l'échelle nationale. C'est une bonne chose. Si ces subventions apportent la preuve que des pratiques révisées peuvent rendre l'agriculture plus rentable, ou tout aussi rentable avec moins d'impact sur l'environnement, ce serait une belle victoire pour les agriculteurs mexicains.
C'est ainsi que la science devrait fonctionner. Si les preuves sont solides, les agriculteurs adoptent le changement. Les agriculteurs savent ce qui fonctionne dans leurs champs. Les grands changements de pratiques n'interviennent qu'après plusieurs saisons d'évaluation de l'impact sur la productivité et les coûts. Rien n'est plus ennuyeux pour un agriculteur que de voir un universitaire débarquer sur son sol pour lui dire qu'il fait fausse route. En revanche, un partenariat qui améliore les résultats d'un agriculteur sur la base de données probantes est une excellente utilisation des ressources gouvernementales et universitaires.
The Conversation est considéré comme crédible en raison de son pool d'auteurs – des universitaires supposés indépendants. Cela confère à ses articles une patine particulière de légitimité, car il y a une attente implicite de rigueur académique, d'objectivité, de citations appropriées et de respect des preuves.
Publier du journalisme de mauvaise qualité sous couvert de rigueur académique compromet son intégrité et dénigre tous les universitaires qui écrivent sous sa bannière. Cette polémique est entachée d'un manque de rigueur académique et d'un biais de citation. Elle présente ses arguments sans fournir de preuves, mais en déformant le consensus scientifique sur la sécurité d'un herbicide largement utilisé et bien étudié. Il présente des platitudes et des anecdotes selon lesquelles les méthodes agro-écologiques sont supérieures, sans aucune preuve. Il déçoit les agriculteurs et les consommateurs en ignorant avec désinvolture le fait que les agriculteurs accueillent favorablement les changements de mode de production fondés sur des preuves, et leur effet sur les coûts par rapport aux bénéfices.
La déformation par cet article de faits fondamentaux concernant la science du désherbage et l'impact des herbicides sur la santé humaine et l'environnement n'est pas une anomalie. Contrairement à son engagement déclaré en faveur de la « rigueur académique », The Conversation a publié au moins trois autres articles reprenant des affirmations factuellement fausses, ressassées par des groupes de pression et des avocats spécialisés dans la responsabilité civile, au sujet du glyphosate, l'herbicide le plus utilisé au monde et l'un des plus sûrs (ici, ici, ici),
La présentation d'une étude bâclée porte un préjudice irréparable à une ressource publique précieuse. Les répercussions de cet article et d'autres diatribes similaires sous couvert d'encourager le « débat public » vont bien au-delà de cette seule source d'information. Elles amènent le public à remettre en question la valeur des prétendus experts. Et cela nuit à la communication scientifique et à la confiance dans l'expertise.
Comment The Conversation a-t-il pu autoriser la publication d'un tel article ? N'y a-t-il pas de vérificateurs de faits ? Quelle sera la prochaine étape ? Les vaccins sont mortels et la Covid-19 est un canular ?
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* Kevin M. Folta est professeur, conférencier et animateur de podcasts. Suivez le professeur Folta sur X à l'adresse @kevinfolta.
Jon Entine, fondateur et directeur exécutif du Genetic Literacy Project, est un producteur de télévision d'investigation lauréat d'un Emmy et auteur de sept livres, dont trois sur la génétique. Suivez-le sur X à l'adresse @JonEntine