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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Selon des chercheurs, la majeure partie du glyphosate présent dans les rivières européennes pourrait ne pas provenir de l'agriculture

30 Juillet 2024 Publié dans #Glyphosate (Roundup), #Article scientifique

Selon des chercheurs, la majeure partie du glyphosate présent dans les rivières européennes pourrait ne pas provenir de l'agriculture

 

Universität Tübingen*

 

 

Analyse des boues d'épuration pour la formation de glyphosate dans le laboratoire du professeur Carolin Huhn à l'Université de Tübingen. Photographe : Friedhelm Albrecht. Crédit : Université de Tübingen

 

 

Une équipe de chercheurs de l'Université de Tübingen a découvert que la majeure partie du glyphosate qui se retrouve dans les rivières européennes ne provient probablement pas d'herbicides, comme on le supposait auparavant, mais plutôt d'additifs utilisés dans les détergents.

 

Pour cette étude, le professeur Carolin Huhn, de l'Institut de Chimie Physique et Théorique, et ses collègues du Centre Géo-environnemental ont réalisé une vaste méta-analyse des données fournies par les autorités européennes et américaines chargées de la protection de l'eau. L'étude a été publiée dans la revue Water Research.

 

Jusqu'à présent, l'utilisation du glyphosate comme herbicide dans l'agriculture était considérée comme la principale raison de sa présence dans les masses d'eau du monde entier. Toutefois, les mesures européennes de réduction n'ont pas entraîné de diminution notable dans l'environnement.

 

L'étude du professeur Huhn suggère qu'une autre source a été négligée pendant des décennies. L'hypothèse est que certains aminopolyphosphonates utilisés, par exemple, dans les détergents à lessive, sont transformés en glyphosate dans les boues d'épuration des stations de traitement des eaux usées.

 

 

Une mine de données de mesure

 

Afin de retracer le cheminement du glyphosate dans les rivières, le groupe de travail de l'Institut de Chimie Physique et Théorique et ses collègues du Département des Géosciences ont analysé une longue série de concentrations de glyphosate dans les rivières, recueillies principalement auprès des autorités responsables de la protection de l'eau en Allemagne, en France, en Italie, en Suède, au Luxembourg, au Royaume-Uni, aux Pays-Bas et aux États-Unis.

 

Certains ensembles de données remontent à 1997. Les chercheurs ont inclus dans leur étude des données provenant d'une centaine de sites.

 

Le point de départ de l'étude a été l'observation que les concentrations de glyphosate dans les rivières européennes présentent une forte saisonnalité, avec des concentrations élevées en été et faibles en hiver.

 

Or, l'agriculture étant la source dominante, on peut s'attendre à des concentrations accrues pendant les principales phases d'application au printemps et à l'automne, ainsi qu'à des concentrations accrues après des événements pluvieux. Le glyphosate est utilisé pour prévenir la croissance indésirable des plantes dans l'agriculture, ainsi que dans les zones résidentielles et sur les voies ferrées [ma note : ce n'est plus le cas pour les zones résidentielles. Et la SNCF, bonne fille, a mis fin à l'utilisation du glyphosate pour complaire à son actionnaire unique... pour le remplacer par des substances moins vertueuses].

 

« Dans le sol et l'eau, le glyphosate est partiellement transformé en acide aminométhylphosphonique (AMPA). Ces deux substances peuvent être mobilisées par les précipitations et se retrouver dans les rivières », explique Mme Huhn, qui est également le porte-parole de la Plate-forme des Systèmes Environnementaux, qui fait partie de la Stratégie d'Excellence de l'Université de Tübingen.

 

Ce profil saisonnier est connu pour les substances qui pénètrent dans les eaux de surface à partir des stations d'épuration, telles que les produits pharmaceutiques et les produits chimiques ménagers. En calculant la quantité de glyphosate transportée dans une rivière par jour, on obtient un apport relativement constant à partir des données.

 

Les pics de concentration attendus des sources agricoles n'ont été observés qu'à un très petit nombre de points de mesure, exclusivement agricoles, en Europe. En outre, le schéma d'apport d'autres herbicides est presque opposé à celui du glyphosate.

 

Ainsi, l'étude de MM. Marc Schwientek et Hermann Rügner, du professeur Stefan Haderlein et des doctorantes en chimie Sarah Bieger et Lisa Engelbart, a montré que la principale source de glyphosate et d'AMPA dans les rivières doit provenir des eaux usées des stations d'épuration.

 

« Une étude des données bibliographiques montre que le glyphosate est présent dans toutes les stations d'épuration examinées en Europe et que sa concentration est remarquablement constante tout au long de l'année », explique Mme Huhn.

 

 

Une source domestique ?

 

« L'analyse détaillée des millions de valeurs individuelles nous montre que les eaux usées municipales jouent un rôle. Certains résultats de l'étude nous montrent également que nous devons localiser une source de glyphosate à proximité des ménages », explique Mme Huhn. Les chercheurs estiment qu'il doit y avoir un apport dominant distinct de l'utilisation d'herbicides ; les schémas de concentration ne peuvent être expliqués autrement.

 

« Cependant, tout ce que nous ne pouvons pas expliquer à propos des données disparaît si nous supposons que nous n'avons pas vraiment affaire à du glyphosate qui a été utilisé auparavant comme herbicide, mais plutôt à du glyphosate qui s'est formé à partir d'une substance plus importante », explique la chimiste analytique Huhn.

 

Les chercheurs ont dressé une liste de critères à partir de leurs données et ont identifié une substance chimiquement apparentée au glyphosate, qui résoudrait toutes les questions soulevées par la méta-analyse. Leur hypothèse est que le glyphosate est un produit de transformation des aminopolyphosphonates, largement utilisés en Europe, notamment dans les détergents à lessive.

 

Les premiers tests en laboratoire sont maintenant terminés et confirment l'hypothèse de la formation de glyphosate dans les stations d'épuration des eaux usées à partir de cet additif de lavage. Mais il y a aussi une bonne nouvelle : « Nous ne constatons pas de formation de glyphosate lorsque nous simulons les conditions directement dans la machine à laver ».

 

Ces résultats pourraient expliquer pourquoi il n'a pas été et ne sera pas possible de réduire la pollution des rivières par le glyphosate en Europe grâce à des stratégies de réduction des herbicides, résume Mme Huhn. La nouvelle source de glyphosate doit être vérifiée par des études indépendantes.

 

Les autorités doivent discuter de la manière de poursuivre la surveillance des eaux de surface et de réglementer éventuellement les aminopolyphosphonates ou d'améliorer les taux d'élimination dans le traitement des eaux usées. « Nous sommes conscients que nos résultats peuvent avoir des implications considérables, notamment pour l'industrie et les décideurs politiques, mais aussi pour la manière dont la surveillance des eaux de surface peut être améliorée. »

 

La situation aux États-Unis est différente de celle de l'UE ; les profils de concentration de glyphosate dans les eaux fluviales américaines suivent de près ceux d'autres herbicides, ce qui indique un apport agricole dominant. Contrairement à l'Europe, les aminopolyphosphonates sont à peine utilisés aux États-Unis dans les détergents à lessive.

 

Pour plus d'informations : M. Schwientek et al., Glyphosate contamination in European rivers not from herbicide application, Water Research (2024). DOI: 10.1016/j.watres.2024.122140

 

______________

 

* Source : Most of the glyphosate in European rivers may not come from farming, researchers suggest (phys.org)

 

Ma note : « Mais il y a aussi une bonne nouvelle : "Nous ne constatons pas de formation de glyphosate lorsque nous simulons les conditions directement dans la machine à laver" » ? Quel commentaire indigent ! C'est succomber à l'hystérie ambiante... voire l'alimenter.

 

« Les autorités doivent discuter de la manière de poursuivre la surveillance des eaux de surface et de réglementer éventuellement les aminopolyphosphonates ou d'améliorer les taux d'élimination dans le traitement des eaux usées » ? C'est du même tonneau. Les concentrations en glyphosate et AMPA des eaux de surface et souterraines sont très inférieures aux limites sanitaires et environnementales. Il serait plus que temps d'admettre qu'il y a des meilleurs façons de dépenser du temps, de l'argent et de la salive.

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