Pesticides et santé des agriculteurs : autopsie d'une...

Pesticides et santé des agriculteurs : autopsie d'une...

(Source)

« #pesticides #santé je ne donnerai qu’une réponse parmi ceux qui mettent encore en doute les risques sanitaires des pesticides.

Voici les chiffres MSA des agriculteurs et salariés agricoles dont la maladie professionnelle a été reconnue comme liée aux pesticides 1/3 »

Autopsie d'une bêtise ou d'une entourloupe, pour ne pas utiliser un terme à connotation juridique ? Ou peut-être les deux.

L'auteure n'est pas une utilisatrice ordinaire d'X (ex-Twitter). Elle indique qu'elle a été membre du Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE) de 2010 à 2020 et est co-présidente de FNE49 (France Nature Environnement (FNE Anjou)).

Le graphique qu'elle a ainsi diffusé avec un texte anxiogène provient de « Focus Environnement & Santé » publié dans la Documentation Française sous l'égide du Ministère de la Transition Écologique et Solidaire (dénomination de l'époque) et de Santé Publique France en juin 2019.

Il avait illustré la section « Des impacts sanitaires avérés liés aux expositions chroniques ». Le paragraphe introductif :

« Chez les agriculteurs, la maladie de Parkinson et le lymphome non hodgkinien (cancer LNH) sont officiellement reconnus en tant que maladies professionnelles et complètent, respectivement depuis 2012 et 2015, la dizaine de tableaux de maladies provoquées par les pesticides. Depuis cette reconnaissance, une cinquantaine de cas de maladie de Parkinson liés aux pesticides est officiellement reconnue chaque année. »

C'est un peu léger, voire franchement cavalier.

Déjà le titre de la section : les agriculteurs sont-ils soumis à des « expositions chroniques », lorsqu'ils procèdent à quelques traitements par an ?

Ensuite, ce graphique est trompeur, même précédé d'une explication. Alors, quand il se retrouve « tout nu » dans un tweet... suivi par d'autres qui tentent de nous convaincre de l'existence d'un problème majeur et de scandales, notamment par référence au chlordécone et à « l’ampleur de la contamination des eaux souterraines par de véritables cocktails de pesticides ».

Le lecteur peu averti gagne l'impression que les cas d'hémopathies et de maladies de Parkinson sont en augmentation, alors qu'il s'agit de données cumulées. C'est certes précisé en légende, mais qui lit en détail la légende de ce graphique ?

Du reste, si le texte introductif évoque la maladie de Parkinson, il « oublie » de préciser que les cas d'hémopathies déclarées semblent en diminution (+100 peut-on estimer entre 2014 et 2016 et +50 entre 2016 et 2018). Nous n'en tirerons aucune conclusion.

Ensuite, il s'agit des cas déclarés à la Mutuelle Sociale Agricole et reconnus en maladies professionnelles. Cela ne dit rien sur l'incidence de ces maladies dans les milieux agricoles, ni des incidences comparées par rapport à la population générale.

Selon la légende, il s'agit de « cas de reconnaissance de maladies professionnelles liées aux pesticides ». C'est la reprise de l'intitulé des tableaux RA [régime agricole] 58 et 59.

Le fait qu'un cas soit reconnu en maladie professionnelle signifie que les conditions de la prise en charge sont réunies. Il ne signifie pas que l'on a reconnu que ce cas a été « provoqué[...] par les pesticides », un lien de cause à effet étant impossible à établir dans un cas particulier, sauf exception comme les mésothéliomes liés à l'amiante.

C'est même difficile pour le lien général entre « pesticides » et atteintes à la santé, comme le montre la grande cohorte AGRICAN – qui trouve même que l'incidence de certaines affections est plus faible chez les utilisateurs de pesticides que chez les non-utilisateurs !

Enfin, il y a la définition des « pesticides » :

« Le terme "pesticides" se rapporte aux produits à usages agricoles et aux produits destinés à l'entretien des espaces verts (produits phytosanitaires ou produits phytopharmaceutiques) ainsi qu'aux biocides et aux antiparasitaires vétérinaires, qu'ils soient autorisés ou non au moment de la demande. »

Bon nombre de réponses sur X ont souligné les problèmes que soulevait le tweet reproduit ci-dessus et sa suite. Ils sont toujours en ligne, prêts à alimenter la chaîne de désinformation...