Le point de vue d'une agricultrice du Réseau Mondial sur les possibilités offertes par les nouvelles technologies de sélection végétale

Le point de vue d'une agricultrice du Réseau Mondial sur les possibilités offertes par les nouvelles technologies de sélection végétale

Diana Lenzi, Réseau Mondial d'Agriculteurs*

Image : Robs

Près de trois douzaines de lauréats du prix Nobel se sont joints à plus d'un millier de scientifiques pour exhorter les membres du Parlement Européen à adopter la technologie d'édition de gènes fondée sur la science.

Les nouvelles techniques génomiques, écrivent-ils dans une pétition, « sont extrêmement prometteuses pour l'agriculture durable, le renforcement de la sécurité alimentaire et les solutions médicales innovantes ».

En tant qu'agriculteurs préoccupés par l'avenir de la production alimentaire à l'ère du changement climatique, nous nous joignons à ce groupe distingué pour demander aux décideurs politiques de l'UE d'ouvrir leur esprit au potentiel étonnant de cette technologie.

À première vue, nous n'avons pas grand-chose en commun : l'une d'entre nous produit du maïs au Nigeria, tandis que l'autre exploite un vignoble et une oliveraie biologiques en Italie. Nous vivons dans des endroits différents, nous servons des clients différents et nous sommes confrontées à des défis différents.

Pourtant, nous sommes toutes deux convaincues que les NGT représentent une formidable opportunité pour les agriculteurs d'Afrique, d'Europe et d'ailleurs, dans la mesure où nous nous efforçons de produire plus de nourriture de manière plus durable.

La proposition de règlement de l'UE sur les NGT, bien qu'elle constitue une avancée bienvenue dans la compréhension et l'acceptation des avantages considérables que l'agriculture et la société civile pourraient tirer de l'introduction de la technologie des NGT dans la sélection végétale, est un fouillis confus avec des zones d'ombre qui pourraient nuire à l'efficacité de la nouvelle réglementation. Alors que de nombreux agriculteurs européens, parties prenantes et ONG sont attirés par cette innovation importante et reconnaissent ses énormes avantages, d'autres restent sceptiques.

Les enjeux sont énormes. Dans un marché mondial, l'échec de l'introduction des NGT en Europe nuirait non seulement aux agriculteurs européens qui s'efforcent de faire plus avec moins et d'améliorer leur engagement en faveur de la durabilité, mais aurait également un impact involontaire sur les agriculteurs africains qui dépendent des échanges commerciaux avec l'Europe.

Dans leur pétition, les scientifiques ne mâchent pas leurs mots et implorent les Européens de s'« engager auprès de l'écrasante majorité des agriculteurs et des véritables experts, et non auprès des lobbyistes antiscience actifs dans la bulle bruxelloise ».

Ce que nous ne pouvons absolument pas nous permettre, c'est de répéter le rejet désastreux par l'Europe des OGM, une technologie sûre qui a transformé l'agriculture en Amérique et dans une grande partie de l'Asie, où elle a permis aux agriculteurs de produire davantage d'aliments de base, de lutter contre les ravageurs et les maladies et d'intégrer la résistance au climat dans leurs cultures.

Les NGT offrent toutefois une opportunité scientifique remarquable de dépasser ce vieux différend.

Grâce aux NGT, les phytotechniciens peuvent accélérer le lent processus de sélection traditionnelle auquel les agriculteurs ont recours depuis la naissance de l'agriculture dans un passé lointain. Ils obtiennent rapidement des résultats en orientant les gènes existants dans des directions utiles, ce qui permet d'éviter les expériences désuètes d'essais et d'erreurs qui peuvent prendre des générations.

Les NGT peuvent aider les agriculteurs à lutter contre le changement climatique en équipant les cultures pour qu'elles résistent aux extrêmes de chaleur et de froid ainsi qu'aux sécheresses, aux inondations et aux maladies. Elles peuvent nous aider à réduire notre dépendance aux herbicides et aux pesticides. Elles peuvent également nous aider à améliorer nos rendements et à nourrir une planète en pleine croissance.

Cette technologie peut également concerner tout le monde, des grands producteurs de matières premières aux agriculteurs comme nous.

En Italie, les NGT pourraient aider les agriculteurs à surmonter les effets dévastateurs du changement climatique et la propagation de parasites et de champignons incontrôlables que les méthodes traditionnelles de contrôle et de lutte ne peuvent plus vaincre. Elles peuvent également permettre aux agriculteurs biologiques de produire plus facilement des aliments abordables et d'être compétitifs sur le marché tout en restant fidèles à leurs principes fondamentaux.

En Afrique, où la productivité agricole est à la traîne par rapport au reste du monde, les NGT peuvent aider les agriculteurs à produire de meilleures cultures qui permettent de produire plus de nourriture, de nourrir nos voisins et de nous faire progresser vers l'autosuffisance économique. Les NGT conduiront également à une nouvelle série de percées médicales étonnantes.

Rien de tout cela ne se produira sans le leadership politique et scientifique de l'Europe.

Ces derniers mois, divers organes de la bureaucratie politique de l'UE se sont penchés sur les promesses des NGT, mais leurs délibérations ont surtout été marquées par l'incertitude. En 2024, ils devront s'efforcer d'adopter une approche cohérente et fondée sur des données probantes pour commencer à trancher la question en faveur de cette excellente technologie. Mais il est également temps pour les gouvernements nationaux de montrer leur soutien à ce règlement. La proposition est maintenant entre les mains du Conseil et c'est là que les dirigeants européens la soutiendront ou la rejetteront, car c'est eux qui détermineront si nous voulons que la science soit le fil conducteur de la transition de l'Europe vers des systèmes alimentaires plus durables.

Les politiques de l'UE déterminent les règles qui régissent ses pays membres, bien sûr, mais leur influence s'étend bien au-delà de leurs frontières. Lorsque l'UE s'est opposée aux OGM au début du siècle, une grande partie du monde en développement a suivi son exemple, puis a regardé avec envie les agriculteurs des États-Unis, du Canada, de l'Argentine et du Brésil adopter la biotechnologie et progresser avec les rendements les plus élevés que l'agriculture ait jamais connus.

Les NGT nous donnent l'occasion d'appuyer sur le bouton « reset » et d'adopter une technologie qui peut rendre l'agriculture plus respectueuse du climat, plus durable et plus fructueuse.

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* Diana Lenzi

Depuis 2008, Diana Lenzi dirige l'exploitation viticole de sa famille, la Fattoria di Petroio, près de Sienne, en Toscane, en Italie. Elle possède et exploite 15 hectares de vignobles biologiques pour produire des vins Chianti Classico. L'exploitation produit de l'huile d'olive extra vierge à partir de 5 hectares d'oliveraie biologique. Elle dispose d'un marché international pour ses produits, mais compte également sur les ventes directes à la ferme. La ferme accueille des touristes, des visites guidées et des événements viticoles organisés par sa famille. En plus de sa carrière culinaire, Diana a de l'expérience dans les organisations de jeunes agriculteurs.