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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Glyphosate : y en a marre de la désinformation !

18 Octobre 2023 Publié dans #Glyphosate (Roundup), #critique de l'information, #Activisme

Glyphosate : y en a marre de la désinformation !

 

 

 

 

Y en a marre de la désinformation !

 

Bon, ça tombe sur Europe 1 et la chronique de Mme Margaux Fodéré du vendredi 13 octobre 2023, « Pourquoi le glyphosate pourrait être autorisé pour dix années supplémentaires en UE ? ».

 

Comment peut-on aligner autant de bêtises en une minute 19 secondes ?

 

 

On pourrait écrire quasiment la même chose sur la plupart des articles et séquences qui traitent du glyphosate dans la presse ou dans l'audiovisuel.

 

 

Y en a marre du « produit phytosanitaire très controversé » !

 

Il n'est controversé – ici « très – que parce que les médias ont acquis un réflexe pavlovien.

 

Les uns ont inscrit une routine dans leur logiciel qui fait précéder « herbicide » de « controversé ».

 

Les autres prennent pour argent comptant les arguments et élucubrations d'une clique hétéroclite de personnes et d'entités aux motivations diverses et variées ; cela va d'un égo zeppelinesque à satisfaire en contribuant à la manipulation des opinions aux fonds de commerce assurant l'aisance matérielle de leurs tenanciers, en passant par les droits d'auteur, la publication dans une revue scientifique ou encore la promotion du biobusiness par le dénigrement de l'agriculture qui nous nourrit.

 

Il est plus que temps que les médias actent – à la fois – les bénéfices qu'apportent le glyphosate du point de vue de la production alimentaire ainsi que de la santé humaine, animale et environnementale (n'en déplaise...), et les conclusions de l'étude la plus vaste jamais réalisée de la molécule.

 

 

 

 

Certes, l'auteure a écrit : « En juillet, une étude de l’autorité européenne de sécurité alimentaire n’identifiait pas de "domaine de préoccupation critique" ». Il fallait bien citer le fondement de la proposition de la Commission Européenne.

 

Mais l'auteure s'est bien gardée de préciser la signification de l'expression mise entre guillemets... pas conforme à l'idéologie et aux préjugés.

 

Il est plus que temps, tout simplement, de prendre acte du fait que cet herbicide est maintenant utilisé depuis plus de cinquante ans, à vaste échelle, et que ses prétendus méfaits ne se sont pas matérialisés.

 

Il est plus que temps que les acteurs du monde médiatique s'interrogent.

 

Comment se fait-il, par exemple, que les méfaits – allégués – du glyphosate et des OGM qui le tolèrent ne se soient matérialisés chez nous que chez un éleveur danois, maintenant disparu des radars médiatiques ? Un éleveur qui prétend les documenter par des porcelets malformés qu'il a conservés au congélateur et qu'il exhibait à tout producteur naïf ou militant de « documenteurs » ?

 

 

Y en a marre du « produit phytosanitaire ... potentiel cancérigène » et du « classé en 2015 comme "cancérogène probable" pour les humains par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) ».

 

Déjà, ce n'est pas l'OMS, mais le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC).

 

Il est plus que temps que ce classement – systématiquement présenté comme infâmant et devant sonner le glas de la substance – soit mis en perspective. C'est le même niveau de preuve de cancérogénicité que, par exemple, la viande rouge (la charcuterie étant cancérogène certain), les boissons chaudes, le métier de coiffeur ou le travail posté.

 

Il est plus que temps de prendre acte du fait que le CIRC a été désavoué en pratique par l'OMS, ainsi que par toutes les agences d'évaluation qui ont soit évalué le glyphosate dans le cadre d'une procédure habituelle, soit pris position sur le classement du CIRC (voir ici pour l'EFSA, sachant que par EFSA, il faut aussi entendre les experts des États membres).

 

 

 

 

Les acteurs du monde médiatique ayant une culture qui dépasse le littéraire et les « sciences politiques » pourront aussi se plonger utilement dans la méthodologie du CIRC.

 

Il produit un classement fondamentalement infâmant, en termes de danger et non de risque, dès lors qu'il trouve un nombre limité d'études en sa faveur, quelle que soit la prépondérance de la preuve allant en sens inverse.

 

C'est une partie de l'explication de la différence avec l'Agence Européenne des Produits Chimiques (EChA), l'autre étant que l'EChA (et les experts des États membres) n'a pas été convaincue par la conclusion du CIRC (en langage policé : « les preuves scientifiques disponibles ne répondaient pas aux critères permettant de classer le glyphosate pour la toxicité pour certains organes cibles, ou comme substance cancérogène, mutagène ou reprotoxique en vertu du règlement CLP de l'UE ».

 

Et il est plus que temps que le monde médiatique prenne acte des conditions très particulières – pour ne pas employer une terminologie relevant du droit pénal – dans lesquelles ce classement a été acquis.

 

Ajoutons ici que les « Monsanto papers » ont été exploités dans un sens unique – à charge contre le glyphosate et Monsanto – en occultant toutes les preuves, indiscutables, des agissements au niveau du CIRC et d'une partie de la communauté scientifique états-unienne (voir par exemple ici).

 

 

Y en a marre aussi – mais cela nous a été épargné ici – des références à l'INSERM.

 

Capital écrit ainsi dans « Glyphosate : où en est la bataille autour de la réautorisation de cet herbicide en Europe ? » :

 

« L’institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), dans une expertise collective rendue publique en juin 2021, confirme cette analyse [du CIRC] et alerte sur des risques de lymphomes, de cancers du sang provoqués par le produit. »

 

Outre que l'INSERM a procédé, comme le CIRC, à un chalutage dans essentiellement le même vivier bibliographique – et ne pouvait donc qu'aboutir à un résultat comparable – c'est faux (voir notre analyse ici).

 

Selon son communiqué de presse, « l’expertise a conclu à l’existence d’un risque accru de LNH avec une présomption moyenne de lien. D’autres sur-risques sont évoqués pour le myélome multiple et les leucémies, mais les résultats sont moins solides (présomption faible). »

 

Une présomption de lien est moyenne « s’il existe au moins une étude de bonne qualité qui montre une association statistiquement significative ». Pour la présomption forte, il faut « une méta-analyse de bonne qualité qui montre une association statistiquement significative, ou plusieurs études de bonne qualité et d’équipes différentes qui montrent des associations statistiquement significatives ».

 

Il est plus que temps que le monde médiatique – et activiste – comprenne que l'expertise collective – qui du reste ne nous impressionne pas outre mesure – démontre de manière éclatante l'extraordinaire faiblesse de la littérature scientifique dite « indépendante ».

 

Le glyphosate est un sujet d'étude de choix dans le monde de la recherche académique, avec des centaines de publications... et l'INSERM n'a trouvé qu'une étude de bonne qualité, ou peut-être plus, mais sans atteindre l'exigence des « plusieurs » pour le classement en « présomption forte ».

 

Pour l'INSERM aussi, les méta-analyses existantes – dont celles réalisées par des membres du personnel du CIRC – ne sont pas de bonne qualité ou ne montrent pas d'association statistiquement significative.

 

 

Y en a (un peu, beaucoup) marre du « S’il est possible que le glyphosate soit encore autorisé pour dix ans, c’est parce qu’il n’existe pas tellement d’alternatives aussi abordables ».

 

Il y a là une sorte de reconnaissance (bienvenue) de l'intérêt du glyphosate. Mais on n'accorde pas de sursis au glyphosate faute de mieux. Dans nombre de configurations, il n'y a pas mieux sur le plan technique et économique. Il est aussi quasiment indispensable, par exemple, en agriculture de conservation des sols (« no till » ou sans labour).

 

 

Y en a marre – sautons une partie du texte de base – de cette présentation incessante du glyphosate comme une substance en sursis, à qui on a découpé le col de chemise et on offre une dernière cigarette avant l'échafaud.

 

 

Y en a marre de l'hystérie franco-française. « Le sursis de dix ans proposé par la Commission européenne ».

 

La Commission a pris acte du rapport d'évaluation (dit) de l'EFSA (dit, car c'est la conclusion des experts de tous les États membres) et proposé un renouvellement de l'autorisation. Dans un esprit de compromis et d'apaisement, elle a proposé dix ans au lieu des quinze d'usage dans de telles circonstances.

 

Le glyphosate n'est pas un « candidat à la substitution » selon la terminologie européenne... contrairement au cuivre qui n'a dû sa survie qu'à un lobbying conjoint des agrochimistes et du... biobusiness.

 

 

(Source)

 

 

Y en a marre de l'inculture crasse en matière agricole.

 

« Certains agriculteurs désherbent avec des machines, d’autres placent des bâches pour éviter la pousse de mauvaises herbes » ? Où sont les hectares de blés bâchés ? La production maraîchère ne doit pas servir d'étalon dans les discussions sur l'agriculture, c'est-à-dire la production d'une partie importante de notre alimentation sur des terres arables.

 

 

Y en a marre des arguments d'autorité déployés à l'encontre du glyphosate par des gens de l'INRAE, et l'INRAE lui-même.

 

Ici, M. Xavier Reboud, directeur de recherche à Dijon, nous explique en bref, que les surcoûts de l'abandon du glyphosate sont, somme toute, supportables. Par exemple, « entre 10 et 80 euros par parcelle et par an » (c'est sans doute par hectare). Le chiffrage est ce qu'il est, à la louche à dire d'experts, et il suffit de constater qu'un surcoût se répercutera nécessairement sur les revenus des agriculteurs,et/ou le porte-monnaie des consommateurs (si d'aventure il est répercuté).

 

Cela occulte aussi d'autres facteurs comme le surcoût en temps, les difficultés de mise en œuvre des « alternatives », les incidences sur les rendements, les conséquences sur la santé humaine, animale et environnementale, notamment la santé des sols.

 

 

 

 

L'INRAE en tant qu'institution et certains de ses agents suscitent en fait de très sérieux questionnements. Les postures militantes des seconds ont peut-être contribué à définir les prises de position du premier, à moins que la politique générale du premier – très anti-glyphosate (et anti-pesticides en général) – n'ait donné lieu à des dérives et des vocations militantes.

 

Ce n'est pas un fait anodin : M. Xavier Reboud a participé à une « conférence » du Pesticide Action Network Europe (PAN Europe) au Parlement Européen, « Is glyphosate safe for health and the environment? » (le glyphosate est-il sûr pour la santé et l'environnement) – les hôtes ayant été Mme Jutta Paulus (Verts), et M. Christophe Clergeau (S&D – successeur de M. Éric Andrieu) – voir ici pour un compte rendu de David Zaruk.

 

Au moins, sa présentation – équilibrée pour qui sait la lire correctement – n'était-elle pas aussi lunaire que les déclarations de Mme Laurence Huc au Huffington Post dans « Glyphosate : pourquoi la question des dangers de cet herbicide fait l’objet de controverses scientifiques ».

 

Ce n'est pas un fait anodin (bis) : M. Xavier Reboud a aussi été interrogé par Vakita, le « média » de M. Hugo Clément, le 11 octobre 2023 pour une séquence « Glyphosate : des scientifiques appellent à sortir du déni ». Que dit-il ?

 

« Les derniers qui soutiennent le glyphosate sont souvent ceux qui sont impliqués dans le processus de commercialisation. »

 

 

(Source)

 

 

C'est du reste suivi par Mme Florence Huc...

 

« Je crois qu'on est, on va dire, dans une situation de paroxysme du déni de la connaissance scientifique... »

 

L'INRAE adhère-t-il à ce déni de la connaissance scientifique issue de la science réglementaire ?

 

 

Y en a marre de toujours lier le glyphosate – et les pesticides en général – à une agriculture intensive ou « industrielle ».

 

Ici, un certain Xavier Hollandts, professeur de stratégies agricoles à Kedge Business School, fait un lien hasardeux entre usage important de pesticides et productivité de l'agriculture néerlandaise. Erreur classique qui ignore un facteur de confusion : les Pays-Bas sont un gros producteur de cultures spécialisées qui sont exigentes en matière de protection phytosanitaire et qui produise un résultat économique élevé.

 

« Quand on veut des rendements élevés, on va vers les solutions les plus chimiques », dit-il ?

 

Quand on veut des rendements élevés on optimise les facteurs de production, et la protection phytosanitaire n'entre en jeu qu'en tant que de besoin.

 

S'agissant du glyphosate – qui est par exemple utilisé sur les terres arables en une seule application en pré-semis – ce propos du professeur est en outre fondamentalement malhonnête.

 

 

Y en a marre, enfin, qu'on nous prenne pour des c...

 

Notre auteure – qu'on ne saurait guère blâmer ici compte tenu de sa contrainte de temps – écrit encore : « En France, un crédit d’impôt permet déjà de soutenir financièrement les agriculteurs qui veulent se passer du glyphosate. »

 

Mais bon sang, c'est bien sûr ! Yaka faire payer le contribuable !

 

Ce qu'on peut reprocher ici, c'est au moins la mésinformation qui consiste à laisser entendre qu'il suffit de quelques « ficelles » – ici un crédit d'impôt – pour résoudre les problèmes.

 

Rappelons que l'INRA(E) avait été mandatée d'étudier les « alternatives au glyphosate ». Dans sa communication, il avait laissé entendre qu'il était possible de s'en passer dans la majorité des cas. Mais son premier rapport était loin d'être aussi affirmatif. On avait un graphique récapitulatif qui indiquait exactement le contraire (voir ici).

 

 

 

Les implications, les difficultés – occultées dans (ce qui a été retenu de) l'interview accordée par M. Xavier Reboud à Europe 1 – étaient pourtant aussi évoquées, certes après un formidable cocorico, dans le communiqué de presse annonçant la fin du glyphosate sur les domaines de l'INRAE (oups ! d'INRAE) – voir ici.

 

« Zéro glyphosate dans les unités INRAE : objectif atteint en 2021 », tonitruait l'INRAE... Pourtant...

 

« Finalement le bilan est assez simplement posé : les alternatives coûtent du temps (quelques dizaines d’heures quand l’application du glyphosate demande 20 minutes), des investissements (machines, innovations techniques) et le résultat n’est pas aussi total qu’avec le glyphosate (il reste des plantes indésirables dont les stocks peuvent augmenter à long terme). »

 

Ne vous inquiétez pas... C'est le contribuable qui paie !

 

 

Post scriptum

 

Il est clair que je considère que le glyphosate est un excellent élément de la boîte à outils des agriculteurs qui pratiquent toutes les formes d'agriculture, à l'exception de celles qui se privent des engrais et produits phytosanitaires de synthèse (avec quelques exceptions...), ainsi que d'autres acteurs économiques

 

Je n'ai aucun intérêt personnel, pécuniaire ou autre, dans l'agrochimie.

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M
bravo, enfin des analyses et pas des préjugés
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L
Dans le Point, G. Woessner fait une excellente "saga d'une manipulation". Elle est bien seule dans les médias.
Répondre
M
Elle se fait lyncher...