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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Qu'est-ce qui motive la campagne de peur et de dénigrement du génie génétique ? (Divulgâcheur : en partie, c'est la Russie et ses « idiots utiles » américains)

14 Septembre 2023

Qu'est-ce qui motive la campagne de peur et de dénigrement du génie génétique ? (Divulgâcheur : en partie, c'est la Russie et ses « idiots utiles » américains)

 

Henry I. Miller, ACSH*

 

 

La technologie a permis de doubler la production alimentaire au cours des 50 dernières années. Nous disposons de la nourriture la moins chère, la plus sûre et la plus abondante de l'histoire, mais les ennemis du progrès, qu'ils soient étrangers ou nationaux, continuent de s'attaquer aux technologies qui ont rendu cela possible.

 

 

Étant donné que la majorité de la société est maintenant éloignée de l'agriculture depuis deux à six générations, pour beaucoup de gens, ce sujet est une terra incognita, au sens propre comme au sens figuré. Ce manque de connaissances rend le public très sensible à la désinformation et au marketing alimentaire basé sur la peur.

 

On l'a déjà dit, mais cela vaut la peine de le répéter : l'homme modifie l'ADN de ses aliments depuis des milliers d'années. C'est ce qu'on appelle... l'agriculture. Les premiers agriculteurs (il y a plus de 10.000 ans) ont eu recours à la sélection pour modifier l'ADN des plantes cultivées afin qu'elles répondent mieux à leurs besoins. Il y a une centaine d'années, les sélectionneurs de plantes ont commencé à utiliser des produits chimiques agressifs et/ou des radiations pour créer des mutations aléatoires dans l'ADN des plantes cultivées afin, par exemple, de transformer des pamplemousses amers en une variété sucrée. Ces agents mutagènes provoquaient d'innombrables modifications de l'ADN, dont aucune n'était caractérisée ou examinée du point de vue de la sécurité. Les problèmes étaient rares, à l'instar de ce que l'on observe dans la sélection conventionnelle, avant la mutagenèse. Aujourd'hui, plus de la moitié des cultures vivrières sont issues en partie de la sélection par mutagenèse.

 

En raison de l'utilisation de diverses techniques de modification génétique, notamment la sélection, la mutagenèse, l'exploitation de la variation somaclonale et les croisements entre espèces apparentées mais distantes, les espèces ancestrales ne ressemblent guère aux cultures domestiquées que nous consommons aujourd'hui. De nombreux exemples illustrés sont présentés ici.

 

 

Crédit : James Kennedy

 

 

Il y a plusieurs décennies, les agronomes et les sélectionneurs de plantes ont commencé à utiliser la technologie de l'ADN recombinant (« épissage de gènes ») pour apporter des modifications beaucoup plus précises et prévisibles à l'ADN de nos cultures. Ce génie génétique moléculaire permet aux sélectionneurs de plantes de prendre, par exemple, un gène bactérien ayant une fonction connue (par exemple, la toxicité pour certains insectes prédateurs) et de transférer ce trait dans une plante cultivée. Dans ce cas, cela permet à la plante génétiquement modifiée de se protéger naturellement contre les insectes nuisibles. Ce seul trait a permis aux agriculteurs du monde entier de réduire les pulvérisations d'insecticides à large spectre de plusieurs milliards de kilos tout en augmentant les rendements.

 

Plus récemment, de nouvelles techniques d'édition du génome sont apparues, rendant la modification génétique encore plus précise, prévisible et polyvalente. CRISPR-Cas9 en est le prototype.

 

On pourrait penser que les organisations non gouvernementales de défense de l'environnement (ONGE) applaudiraient une telle innovation. Malheureusement, ce n'est pas le cas ; aucune bonne action ne reste impunie. Des militants (dont beaucoup tirent un profit financier de leur action) se sont associés à des entreprises qui vendent des produits alimentaires biologiques et « naturels » pour vilipender les « OGM » (organismes génétiquement modifiés), c'est-à-dire les cultures élaborées à l'aide de techniques moléculaires.

 

Cette industrie anti-génie génétique et ses lobbyistes sont les principaux responsables de l'appréhension du public à l'égard de cette technologie. Ils ont très bien réussi à susciter la peur des « OGM » dans le public. Ils utilisent ensuite cette peur pour vendre à un public peu méfiant des produits alimentaires et des compléments alimentaires biologiques ou « sans OGM » douteux et hors de prix.

 

Pire encore, les ONG environnementales tentent d'empêcher la création et la distribution de nouvelles cultures salvatrices. Selon l'Organisation Mondiale de la Santé, « la carence en vitamine A est associée à une morbidité et une mortalité importantes dues à des infections infantiles courantes et constitue la principale cause évitable de cécité infantile dans le monde ». Il y a une solution génétiquement modifiée à ce problème, mais Greenpeace, l'une des ONG environnementales les plus connues au monde, a convaincu un tribunal philippin d'empêcher la distribution aux pauvres de Riz Doré, qui contient le précurseur de la vitamine A. Il en résultera une augmentation de la malnutrition, de la cécité et de la mortalité infantile. Les actions de Greenpeace devraient susciter l'indignation du monde entier.

 

 

Riz Doré. Crédit : IRRI/Flickr (CC BY-NC-SA 2.0)

 

 

Cette même industrie mondiale anti-technologie fait pression pour que les cultures et les animaux génétiquement modifiés soient soumis à des barrières réglementaires inutiles et coûteuses. Elle a remporté des succès en Europe, en Afrique et, plus récemment, au Mexique. L'une de leurs affirmations spécieuses est que des barrières réglementaires élevées – bien qu'inutiles – favorisent la confiance des consommateurs. C'est cynique et faux.

 

Trente années de réglementation excessive du génie génétique n'ont pas permis de réduire l'inquiétude du public ni de calmer les critiques. Au contraire, ces réglementations ont attisé les inquiétudes du public à l'égard de ces technologies sûres et supérieures. Comme l'a déclaré Mme Barbara Keating-Edh, représentant le groupe de consommateurs Consumer Alert, devant le National Biotechnology Policy Board des États-Unis en 1991 :

 

« Pour des raisons évidentes, le consommateur considère que les technologies les plus réglementées sont les moins sûres. Une forte implication du gouvernement, aussi bien intentionnée soit-elle, envoie inévitablement de mauvais signaux. Plutôt que d'assurer la confiance, elle suscite la suspicion et le doute » [souligné dans l'original]. (Keating-Edh, B. Statement before the National Biotechnology Policy Board (20 septembre 1991), cité dans Biotechnology Law Report, mars-avril 1993, 12 (2) ; 127-182.)

 

Nous avons plus d'un quart de siècle d'expérience avec les cultures génétiquement modifiées commercialisées ; des milliers d'évaluations réalisées par des gouvernements et des organisations scientifiques ont montré que les cultures génétiquement modifiées sont aussi sûres, voire plus sûres, que les cultures produites à l'aide de méthodes de sélection conventionnelles. En d'autres termes, rien ne prouve que l'utilisation des techniques de génie génétique moléculaire confère des risques uniques ou supplémentaires.

 

Il semble que les consommateurs soient avides de technologie et de progrès technologiques dans tous les aspects de leur vie, sauf dans la production alimentaire. Ils ont accueilli favorablement l'avènement des moteurs hybrides et des ceintures de sécurité dans les voitures et ont adopté avec enthousiasme des téléphones plus intelligents et plus polyvalents, ils aiment leurs pastèques sans pépins et leurs variétés de pommes presque infinies, mais beaucoup se méfient de la modification génétique au moyen des techniques les plus récentes et les plus performantes.

 

Comment cela se fait-il ? En grande partie à cause d'une campagne de peur et de dénigrement menée depuis des décennies par la machine anti-génie génétique contre les cultures et les aliments issus du génie génétique, une campagne multinationale de plusieurs milliards de dollars. Largement financée par les industries des produits biologiques et naturels et par les avocats spécialisés dans la responsabilité civile qui tirent profit des recours collectifs intentés contre des entreprises qui consentent à des arrangements dans le seul but d'éviter qu'elles ne soient inscrites au rôle des tribunaux, cette campagne s'attaque non seulement aux entreprises capables de réaliser des percées, mais aussi aux universitaires et aux citoyens ordinaires qui soutiennent le type de politique publique axée sur la science qui favorisera les progrès à venir. Pour accroître leur influence, des organisations réfractaires comme Environmental Working Group et US Right to Know ont fait cause commune avec le mouvement anti-vaccin.

 

La cabale n'est pas seulement locale. L'appareil russe de désinformation/propagande est depuis longtemps impliqué dans le dénigrement du génie génétique, en partie pour faire obstacle au progrès technologique dans les pays occidentaux. Qui s'étonnerait que des « influenceurs » nationaux rémunérés sur l'internet soient également impliqués ?

 

La technologie a permis de doubler la production alimentaire au cours des 50 dernières années. Nous disposons de la nourriture la moins chère, la plus sûre et la plus abondante de l'histoire, mais les ennemis du progrès continuent de s'attaquer aux technologies qui ont rendu cela possible.

 

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Cet article a été publié pour la première fois par le Genetic Literacy Project.

 

* Henry I. Miller, MS, MD

 

Henry I. Miller, MS, MD, est le Glenn Swogger Distinguished Fellow de l'American Council on Science and Health. Ses recherches portent sur les politiques publiques en matière de science, de technologie et de médecine, et couvrent un certain nombre de domaines, notamment le développement pharmaceutique, le génie génétique, les modèles de réforme réglementaire, la médecine de précision et l'émergence de nouvelles maladies virales. Le Dr Miller a travaillé pendant quinze ans à la Food and Drug Administration (FDA) des États-Unis, où il a occupé plusieurs postes, notamment celui de directeur fondateur de l'Office of Biotechnology.

 

Source : What's Driving the Fear-and-Smear Campaign Against Genetic Engineering? (Spoiler Alert: In Part, It's Russia and Its American 'Useful Idiots'.) | American Council on Science and Health (acsh.org)

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J
Manque de sources pour l'inflence russe.. domage...
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M
Encore un formidable article qu'on ne risque pas de revoir dans la presse mainstream...
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