M. Joachim Rukwied, président de l'Union Allemande des Agriculteurs, demande un changement d'époque dans la politique agricole

27 Juillet 2023

M. Joachim Rukwied, président de l'Union Allemande des Agriculteurs, demande un changement d'époque dans la politique agricole

Simon Michel-Berger, rédacteur en chef d'AGRARHEUTE*

M. Joachim Rukwied, président de l'Union Allemande des Agriculteurs (Deutscher Bauernverband – DBV), le 28 juin 2023 lors de la Journée des Agriculteurs Allemands (deutscher Bauerntag) à Münster

Lors de la Journée des Agriculteurs Allemands 2023 à Münster, le président des agriculteurs Joachim Rukwied a déclaré : « Nous avons besoin d'un changement d'époque également dans la politique agricole, afin qu'elle ait un avenir pour nous ». Il a vivement critiqué le gouvernement fédéral qui a commencé selon lui comme une coalition de progrès, mais qui n'a pas encore présenté de solutions aux problèmes.

M. Joachim Rukwied a averti que la sécurité de l'approvisionnement en denrées alimentaires n'était toujours pas assurée en Europe. En plus des conséquences directes de l'attaque russe contre l'Ukraine et de l'inflation des prix de l'énergie, ainsi que des distorsions de la chaîne d'approvisionnement qui ne sont toujours pas totalement résolues, un nouveau problème est venu s'ajouter récemment : l'avancée des troupes de Wagner sur Moscou, annoncée puis annulée la semaine dernière, a même remis en question la disponibilité de la récolte de céréales russe – tout de même quatre fois plus importante que celle de l'Allemagne.

L'agriculture de moins en moins planifiable

Pour les agriculteurs, il est actuellement plus difficile que jamais de prendre des décisions économiques. Ce qui s'appliquait autrefois à l'achat d'engrais et à la vente de céréales ne s'applique plus en ces temps de grande volatilité. Il a déclaré textuellement : « Nous sommes tous inquiets. Il faut un gouvernement qui donne de la sécurité et qui montre, par une attitude commune, comment résoudre les problèmes ». Il a déploré : « Je ne vois absolument pas cela pour le moment. »

Comment les conditions générales se détériorent pour les agriculteurs

M. Rukwied a rappelé que l'attractivité du site économique allemand a chuté à la 22^e place – derrière la Chine – dans le classement mondial. Alors que les prix de l'énergie flambent, l'Allemagne ferme des centrales de régulation. Il a déploré que, dans une « bulle berlinoise », on s'occupe davantage de genre et de wokeness que de sujets qui concernent vraiment les habitants des zones rurales. Dans le cadre de la tâche d'intérêt commun « Promotion des structures agricoles et de la protection des côtes », il est prévu de supprimer 400 millions d'euros, soit environ la moitié des fonds actuels. Cela aurait pour conséquence de vider les zones rurales de leur substance.

Oui aux objectifs du Green Deal, non à ses mesures

Le président des agriculteurs a souligné qu'il soutenait les objectifs du Green Deal de l'UE. Mais l'évolution de l'agriculture vers plus de protection du climat, de protection de l'environnement et de durabilité ne peut réussir que si les agriculteurs – et surtout les jeunes – ont des perspectives économiques. M. Rukwied rejette toutefois des mesures telles que le projet de loi sur la restauration de la nature (Nature Restoration Law), qui prévoit la création de nouvelles réserves naturelles et un droit de préemption pour les organisations de protection de l'environnement. Il a déclaré : « Les terres agricoles appartiennent aux agriculteurs, ne touchez pas à notre propriété. »

L'élevage en Allemagne a besoin d'une chance

Selon lui, trop peu de choses ont été faites jusqu'à présent pour donner une chance à l'élevage en Allemagne. M. Rukwied s'est demandé si des « parties de la politique » non spécifiées souhaitaient que l'élevage ait une chance en Allemagne. L'étiquetage de l'élevage de M. Cem Özdemir est un premier pas, « très petit ». Il est urgent d'inscrire dans la loi l'élevage de truies et la production de porcelets, ainsi que la restauration, l'étiquetage de la viande et de la charcuterie transformées et l'étiquetage obligatoire de l'origine. De même, les étables de bien-être animal doivent avoir la priorité sur les autres demandes de construction.

Politique agricole commune : de nouvelles propositions vont arriver

M. Rukwied s'est montré insatisfait de l'organisation actuelle de la politique agricole de l'UE (politique agricole commune). Selon lui, 39 % des fonds destinés aux éco-schémas n'ont pas été réclamés. M. Rukwied a expliqué qu'il n'avait lui-même pas demandé d'éco-schémas, car rien ne convenait à son exploitation. Il a indiqué que le vice-président de la Commission Européenne, Frans Timmermans, et le commissaire à l'agriculture, Janusz Wojciechowksi, lui avaient déclaré vouloir faire leurs propres propositions pour le développement de la politique agricole européenne après 2028.

Que dit M. Rukwied sur la politique commerciale, les biocarburants, le salaire minimum et le loup ?

Le président des agriculteurs a souligné qu'il était en principe favorable à un commerce ouvert, mais qu'il rejetait l'accord avec la confédération sud-américaine Mercosur. Un commerce dans lequel une exploitation européenne de 50 hectares est en concurrence avec une fazenda de 50.000 hectares au Brésil n'est pas équitable, a-t-il déclaré. M. Rukwied a demandé au gouvernement fédéral de retirer son « casque idéologique » et d'utiliser des biocarburants qui pourraient remplacer les produits à base de pétrole. Il a également réclamé un salaire minimum européen. Actuellement, l'arboriculture, la culture maraîchère et la viticulture ne peuvent pas survivre parce que les concurrents espagnols n'ont que la moitié des coûts salariaux. En ce qui concerne le loup, M. Rukwied a appelé à reconnaître enfin son bon état de conservation et à introduire des plans d'abattage qui permettent de réguler les populations.

M. Rukwied demande une ouverture technologique

Pour conclure, M. Rukwied a demandé une plus grande ouverture à la technologie de la part du gouvernement fédéral. Il faut par exemple intégrer les nouvelles techniques d'amélioration des plantes afin de créer des variétés qui permettent de lutter contre le changement climatique. Il a également demandé plus de soutien pour la formation et la formation continue. À la fin de son discours, le président des agriculteurs a déclaré : « Nous avons besoin de libertés et de possibilités de développement, en particulier pour la jeune génération – liberté et ouverture au lieu d'interdictions et de restrictions ! »

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