Survivre en cultivant de très petites surfaces ? Peu probable !
Jack DeWitt, AGDAILY*
Image : Joshua Resnick, Shutterstock
Produire suffisamment d'aliments pour nourrir une famille de quatre personnes pendant un an sur 1/20e d'acre ?
C'est ce qu'affirme un article récent sur lequel je suis tombé. Cela ne représente que 2.178 pieds carrés, soit la taille d'une maison de trois chambres [200 mètres carrés ou, pour être plus exact, car à ce niveau, la surface précise compte (ironie), 202,3428 mètres carrés]. Je ne veux certainement pas décourager qui que ce soit d'avoir un jardin, mais cela me semblait irréaliste. J'ai donc commencé à rassembler des données nutritionnelles pour vérifier.
Il s'avère que c'est impossible.
Il faut environ 2,9 millions de Calories pour nourrir une famille de quatre personnes pendant un an, à raison de 8.000 calories par jour. (Note : j'ai utilisé le « C » majuscule pour Calorie parce qu'il désigne les kilocalories, ce qui est la façon dont les calories (petit « c ») sont représentées pour les aliments. Une [petite] calorie est définie comme l'énergie nécessaire pour élever la température d'un gramme d'eau d'un degré Celsius. Une grande Calorie, avec un grand « C », équivaut à 1.000 petites « c » calories.)
Si vous plantez des pommes de terre sur un 1/20e d'acre – la façon la plus intense de produire des Calories par acre – et que vous obtenez le même rendement qu'un champ commercial (60.000 livres/acre [67 tonnes/hectare], soit 24 millions de calories [60 millions/hectare]), vous obtiendrez 3.000 livres [1.361 kilogrammes] et 1,2 million de calories, soit environ 1,7 million de moins que l'approvisionnement d'une année.
Et, bien sûr, il serait ennuyeux de ne manger que des pommes de terre... mais ce serait nourrissant. Les pommes de terre sont considérées comme un aliment complet en ce sens que leur teneur en protéines est élevée et qu'elles contiennent tous les acides aminés essentiels (essentiels signifie ceux que l'organisme ne peut pas fabriquer). Les pommes de terre contiennent également les graisses et les hydrates de carbone dont l'organisme a besoin, ainsi qu'un ensemble complet de vitamines et de minéraux, à l'exception de la vitamine B12. Aucune plante ne produit suffisamment de B12. Une personne doit manger de la viande ou des produits laitiers ou prendre une pilule pour obtenir sa B12.
Au début des années 1800, les Irlandais se nourrissaient presque exclusivement de pommes de terre. Au milieu des années 1840, un fléau a frappé, noircissant les champs en quelques jours, infectant les tubercules et les ratatinant. Il en résulta une terrible famine. En 1850, un million de personnes étaient mortes de faim et deux millions avaient émigré vers d'autres pays. Le coupable, un champignon appelé Phytophthora infestans [le mildiou], infecte encore les champs aujourd'hui, mais il est contrôlé par des variétés résistantes et des fongicides.
Une personne peut sans aucun doute cultiver tous les légumes dont elle a besoin en saison sur deux ares, et en garder pour les mettre en conserve ou les congeler. Lorsque j'étais un jeune garçon dans les années 1940, ma famille avait un grand jardin, d'une superficie d'environ un acre, 40 ares. Nous cultivions des radis, des pois, des haricots verts, des carottes, des panais, des betteraves, des pommes de terre, des navets, des tomates, du maïs doux, des choux, de la laitue, des poivrons, des oignons, des courges, des melons et des fraises. Dans notre petit verger, il y avait des pommes, des prunes, des abricots, des mûres, des framboises et des groseilles pour la gelée. Papa cultivait les haricots secs en alternance avec le blé, de sorte que nous avions toujours suffisamment de haricots. Tout le monde arrachait les mauvaises herbes, mais maman passait son été à cueillir et à mettre en conserve.
À l'automne, nous déterrions les pommes de terre et les mettions à la cave. Le reste des racines était laissé dans le sol avec de la terre entassée sur les rangs pour les empêcher de geler. Nous les déterrions au fur et à mesure des besoins tout au long de l'hiver. Les choux étaient arrachés et tournés à l'envers à côté du hangar à bois, à l'abri des vents hivernaux. Ils étaient bientôt recouverts de neige et restaient frais jusqu'au printemps. Les courges étaient stockées dans la maison, en haut des escaliers, où la température restait entre 5 et 10 degrés Celsius tout au long de l'hiver. Nous mangions bien toute l'année.
Si une personne divise son jardin de 2 ares en 10 parties (20 mètres carrés chacune) et plante quelque chose de différent dans chacune d'elles, le rendement en Calories en millions pourrait ressembler à ce qui suit : pommes de terre, 0,12 ; laitue, 0,014 ; chou, 0,05 ; tomates, 0,016 ; betteraves, 0,02 ; carottes, 0,022 ; maïs doux, 0,002 ; haricots verts, 0,006 ; haricots secs, 0,023 ; quinoa, 0,009. Cela représente 0,282 million, bien loin des 2,9 millions nécessaires pour nourrir une famille de quatre personnes pendant un an.
J'ai ajouté le quinoa pour illustrer quelques points. Le quinoa est la (fausse) céréale la plus riche en Calories par livre (1.700 – ou 3.750 par kg), mais son rendement est si faible (11 quintaux/hectare par an contre plus de 67 quintaux/hectare pour le blé) que le nombre de Calories par hectare est huit à neuf fois moins élevé. C'est un problème pour les experts qui veulent remplacer le blé par des céréales plus exotiques : comment nourrir une population en expansion ? Il est peu probable que les rendements du quinoa se rapprochent un jour de ceux du blé, du maïs ou du riz, même si l'on a recours au génie génétique. Et nous n'avons pas encore atteint les limites des rendements du blé, du maïs et du riz.
L'autre raison pour laquelle j'ai inclus le quinoa est que son profil nutritionnel est le meilleur de tous les grains. Comme les pommes de terre, il présente un profil complet d'acides aminés, de vitamines et de minéraux, et il est bien équilibré en protéines, en graisses et en hydrates de carbone. Pour quelqu'un qui veut cultiver une céréale de jardin, c'est un bon choix, non seulement en raison de ses nutriments équilibrés, mais aussi parce qu'elle est chère à l'achat dans les magasins d'alimentation.
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* Jack DeWitt est un agriculteur-agronome dont l'expérience agricole s'étend sur plusieurs décennies, depuis la fin de l'élevage de chevaux jusqu'à l'âge du GPS et de l'agriculture de précision. Dans son livre « World Food Unlimited », il raconte tout et prédit comment nous pouvons avoir un monde futur avec une nourriture abondante. Une version de cet article a été republiée à partir d'Agri-Times Northwest.
Source : Surviving on very small-acreage crops? Not very likely | AGDAILY