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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Des scientifiques désactivent un gène protecteur chez les moustiques

3 Mai 2023 Publié dans #Santé publique, #Biotechnologies

Des scientifiques désactivent un gène protecteur chez les moustiques

 

Adam Russell, Texas A&M AgriLife Communications*

 

 

M. Kevin Myles, professeur au département d'entomologie, avec des cages contenant des moustiques utilisés dans ses recherches. La dernière étude de M. Myles a révélé des voies immunitaires qui pourraient être désactivées, rendant les moustiques plus sensibles aux maladies qu'ils transportent et transmettent à l'homme.

Michael Miller/Texas A&M AgriLife Communications

 

 

Un chercheur de Texas A&M explique l'étude sur la manipulation des gènes des moustiques et la façon dont elle pourrait contribuer à protéger les humains et les animaux.

 

 

Les voies immunitaires qui protègent les moustiques contre les agents pathogènes humains, notamment les virus du Nil occidental, du Zika et de la dengue, ont été désactivées par des scientifiques de Texas A&M AgriLife Research.

 

L'étude intitulée « RNA interference is essential to modulating the pathogenesis of mosquito-borne viruses in the yellow fever mosquito Aedes aegypti » (l'interférence ARN est essentielle pour moduler la pathogenèse des virus transmis par les moustiques chez le moustique de la fièvre jaune Aedes aegypti), publiée dans les Proceedings of the National Academy of Sciences, a montré que l'espèce de moustique vecteur Aedes aegypti devient très sensible à la maladie lorsque la voie immunitaire protectrice est désactivée.

 

Cette découverte permet de mieux comprendre les interactions écologiques et évolutives entre les moustiques et les agents pathogènes qu'ils transmettent à l'homme et aux animaux.

 

M. Kevin Myles, professeur au département d'entomologie du College of Agriculture and Life Sciences de l'Université A&M du Texas, a déclaré que ces résultats pourraient être utilisés pour contrôler la transmission de nombreuses maladies vectorielles à l'homme et à l'animal. M. Myles a participé à des recherches connexes avec M. Zach Adelman, professeur au département, afin de mettre au point des méthodes d'ingénierie génétique des populations de moustiques. M. Adelman a également participé à cette étude.

 

M. Myles explique sa recherche, la motivation de son travail et les impacts positifs potentiels qu'elle pourrait avoir sur la santé humaine et animale ici et dans le monde entier.

 

 

Quel impact cette étude pourrait-elle avoir sur le citoyen lambda, la communauté ou le monde ?

 

Le moustique est l'animal le plus mortel de la planète.

 

Un historien, Timothy Winegard, a estimé que les moustiques ont été responsables de la mort de près de la moitié de l'humanité au cours de notre existence sur cette planète. La raison en est que les moustiques transmettent des agents pathogènes qui, collectivement, pèsent lourdement sur la santé mondiale en raison de leur prévalence généralisée et de la morbidité et de la mortalité graves qu'ils provoquent chez les humains et les animaux.

 

S'attaquer à un problème d'une telle ampleur, qui n'a pas été résolu depuis si longtemps, exige une approche fondée sur la recherche à très long terme, qui est généralement du ressort des grandes universités. Nous espérons que les informations que nous avons acquises dans le cadre de cette étude pourront être utilisées pour élaborer de nouvelles stratégies de lutte contre les maladies transmises par les moustiques.

 

 

Pourquoi cette recherche est-elle importante ?

 

Maintenant que nous connaissons l'importance de la réponse immunitaire du moustique dans la transmission des pathogènes viraux, pouvons-nous exploiter ces informations pour lutter contre les maladies chez l'homme et l'animal ? Par exemple, dans le cadre d'autres travaux menés en laboratoire, nous collaborons avec le laboratoire de M. George Dimopoulos de l'Université Johns Hopkins pour voir si nous pouvons augmenter ou renforcer la réponse immunitaire du moustique afin de produire des insectes résistants à l'infection par ces agents pathogènes.

 

Nous collaborons également avec le laboratoire de M. Omar Akbari de l'Université de Californie à San Diego pour voir si nous pouvons interférer avec la réponse immunitaire des moustiques de sorte qu'ils développent une maladie lorsqu'ils sont infectés par ces pathogènes.

 

Enfin, nous collaborons avec le laboratoire de M. Adelman, au sein du département, afin de développer de nouvelles stratégies de forçage génétique pour modifier génétiquement les populations de moustiques.

 

 

M. Myles décrit le moustique comme « l'animal le plus mortel de la planète ».

Getty Images

 

 

En quoi cela permettra-t-il de mieux comprendre les moustiques et les maladies à transmission vectorielle ?

 

Bien que nous sachions que les moustiques transmettent des maladies humaines mortelles depuis plus d'un siècle, nous ne comprenions pas pourquoi les moustiques eux-mêmes ne développaient aucune maladie manifeste lorsqu'ils étaient infectés par ces mêmes agents pathogènes.

 

Cette recherche démontre que c'est la réponse immunitaire des moustiques qui les protège de toute atteinte grave lorsqu'ils sont infectés par des virus associés à des maladies humaines.

 

Cela soulève maintenant plusieurs autres questions intéressantes. Pourquoi la réponse immunitaire du moustique est-elle plus efficace que la nôtre pour prévenir les maladies ? Si la réponse immunitaire du moustique est capable de prévenir la maladie, pourquoi n'empêche-t-elle pas toujours la transmission de ces virus à l'homme et à l'animal ?

 

 

Comment la technologie aide-t-elle à comprendre la biologie des moustiques ?

 

Dans cette étude, nous avons utilisé la technologie CRISPR/Cas9, pour laquelle Mmes Jennifer Doudna et Emmanuelle Charpentier ont reçu le prix Nobel de chimie en 2020, pour supprimer un gène clé impliqué dans la réponse immunitaire antivirale d'Aedes aegypti.

 

Avant le développement de méthodes d'édition de gènes telles que celles-ci, il n'aurait pas été possible de réaliser cette étude. La même technologie a permis des avancées rapides dans la conception et le développement de forçages de gènes.

 

Bien qu'il reste encore un certain nombre d'obstacles technologiques à franchir, des forçages de gènes sont actuellement développés en tant qu'outils susceptibles de faciliter les projets de génie génétique à grande échelle visant à contrôler ou à modifier les populations de moustiques. Ces outils pourraient nous aider à traduire nos découvertes en nouvelles méthodes de lutte contre les maladies, par exemple en modifiant la réponse immunitaire des populations d'Aedes aegypti.

 

 

Dans quelle mesure sommes-nous sur le point de résoudre les problèmes liés aux maladies à transmission vectorielle ?

 

Aujourd'hui, la majeure partie du monde tropical continue d'être en proie à des problèmes chroniques causés par le paludisme, la dengue et toute une série d'autres maladies transmises par les moustiques. Parallèlement, des foyers et des épidémies d'autres maladies transmises par les moustiques, telles que le chikungunya, le Zika et la fièvre jaune, continuent d'apparaître dans le monde entier.

 

Cela illustre la lutte constante que nous menons contre les maladies transmises par les moustiques. Malgré tous nos efforts, nous n'avons réussi à combattre le moustique et les agents pathogènes qui lui sont associés que sous la forme d'un statu quo.

 

C'est pourquoi nous devons désespérément continuer à essayer de mettre au point de nouvelles stratégies et approches pour lutter contre les maladies transmises par les moustiques. Cela ne peut se faire qu'en comblant les lacunes de nos connaissances sur les moustiques et les agents pathogènes qu'ils transmettent.

 

 

Qu'est-ce qui vous a incité à vous lancer dans ce domaine de recherche ?

 

Lorsque j'étais étudiant en microbiologie et que je suivais des cours de virologie, je me suis rendu compte que, tout au long de l'histoire, un grand nombre des virus ayant l'impact le plus important sur la santé humaine étaient transmis par des insectes vecteurs. C'est toujours le cas aujourd'hui. Ainsi, en tant que personne intéressée par une carrière en microbiologie, j'ai été particulièrement inspiré par l'idée d'étudier ces types d'agents pathogènes.

 

 

Comment se déroule ce processus de découverte ?

 

Dans la démarche scientifique, personne n'accomplit quoi que ce soit d'important tout seul. Chaque nouvelle découverte ou avancée est le fruit d'un travail d'équipe et s'appuie sur les travaux de nombreuses autres personnes qui l'ont précédée.

 

C'est pourquoi je pense qu'il est important de reconnaître les contributions significatives de mes coauteurs et collaborateurs à cet article, ainsi que celles d'autres scientifiques et membres de mon laboratoire qui y ont contribué indirectement.

 

_____________

 

* Source : Scientists Disable Protective Gene In Mosquitoes - Texas A&M Today (tamu.edu)

 

Cet article d'Adam Russell a été initialement publié sur AgriLife Today.

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