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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

France 5 nous a fait le coup du lapin, il faut répondre

20 Décembre 2022 Publié dans #Activisme, #"Bassines", #Elevage

France 5 nous a fait le coup du lapin, il faut répondre

 

André Heitz (Haute-Savoie)*

 

 

 

 

Le lundi 14 novembre 2022, France 5 a donné libre cours à une ignoble séquence d'agribashing. C'était dans « Sur le front », sur le thème : « Médicaments : la bombe à retardement ».

 

Voici donc, au début d'une effarante séquence de 2:27 minutes, se rendant chez un éleveur de lapins, compère Hugo Clément et commère Brigitte Gothière. L'un est militant pour le bien-être animal selon Wikipedia, auteur de « Comment j'ai arrêté de manger les animaux » et tenancier de « Sur le front » ; l'autre est porte-parole et directrice de L214, nominalement association de défense des animaux, bénéficiaire d'un don de 1,14 million d'euros de la part de la fondation Open Philanthropy, laquelle investit massivement dans les alternatives végétales ou cellulaires à la viande.

 

L'éleveur, courageusement anonyme, crache sur la profession et profère des énormités. En bref, les lapins étant fragiles, on les traite préventivement avec des antibiotiques : « Comme je mets de l'antibiotique, il est hors de question que je mange ces bêtes [...]. Les consommateurs les mangent, parce qu'ils ne savent pas. C'est bien pour ça qu'on nous demande de fermer les portes à clefs pour que personne ne rentre dans les élevages. » Ah, la petite dose de complotisme en bonus...

 

Franceinfo en rajoute : l'éleveur est « contraint de leur injecter des antifongiques (sic) chaque jour afin de stimuler leur croissance ». La journaliste a bien trouvé un arrêté ministériel d'avril 2022 qui interdit l'importation en France de viande d'animaux dopés aux antibiotiques de croissance, mais « il semblerait que cette pratique, supposée être interdite en Europe depuis 2006, perdure ». Ah, le conditionnel journalistique... Et le « supposée »...

 

Il y a aussi le journalisme de connivence. M. Hugo Clément est l'invité de la matinale de France Inter du 16 novembre 2022. Il y remet le couvert, en insistant sur quelques actions clairement illégales de son « informateur ». Mais c'est bien sûr la faute de la coopérative et des « industriels de l'agro-industrie ». Curieusement, cet éleveur se prétendant fraudeur n'a pas été dénoncé par L214...

 

Les énormités ont bien sûr été analysées et démontées sur Twitter et dans la presse agricole. La réponse en ce qui me concerne ? M. Hugo Clément m'a bloqué, comme bien d'autres, sur Twitter.

 

Dans un impressionnant silence médiatique, l'ANSES a publié le 17 novembre 2022 un rapport (résumé sur Twitter) montrant que l'exposition globale des animaux d'élevage aux antibiotiques a encore diminué en 2021 – excusez du peu : -10,7 % pour les ventes et -3,2 % pour les expositions. Cela démontre le sens des responsabilités des éleveurs et des vétérinaires. C'est une bonne nouvelle. Mais elle est mauvaise pour des médias obnubilés par le buzz.

 

Et, selon les résultats colligés par l'EFSA, en 2020, sur plus de 620.000 échantillons analysés au niveau européen, avec près de 13 millions de mesures, seuls 0,19 % n'étaient pas conformes à la réglementation quant à la présence de résidus de médicaments vétérinaires.

 

Mais M. Hugo Clément insiste le même jour sur Twitter : la plupart des éleveurs en intensif qu'il a/aurait rencontré ont/auraient un élevage parallèle pour leur propre consommation !

 

À la récente assemblée générale de l'AGPM, Mme Céline Imart a expliqué, en se référant aux ONG, que « le monde agricole doit avoir un contre-récit à raconter à la population ». Cela vaut aussi pour les médias. Outre les protestations auprès des chaînes qui versent dans la désinformation, comme France 5 avec ce hallucinant « Sur le front », et de l'Arcom, il est grand temps de le faire.

 

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Une version de cet article a été publiée dans la France Agricole du 15 décembre 2022.

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M
Bonjour, les journalistes sont rémunérés en fonction de la longueur de leurs articles, et ne vont JAMAIS vérifier leurs informations, sous prétexte de ne pas divulguer leurs sources ! Ils font TOUS de l'agribasching.
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H
Le plus curieux dans ces reportages, c'est que jamais les coûts de ces soi disants traitements ne sont évoqués. On dirait que des pochettes cadeaux de médicaments ou traitements sont offerts aux éleveurs par les grandes firmes. <br /> Or en élevage comme dans toute production, tout ce qu'on dépense plombe bien évidement les revenus. <br /> En caprins ou ovins, en cas de blessure ou maladie, on préfère souvent abattre plutôt que de faire appel au véto et traiter, ce qui est trop cher face au prix de la viande. <br /> Raison pour laquelle, on sélectionne les bêtes sur la résistance, et si on essaye d'être pro, on traite bien les bêtes et on veille à une alimentation riche et équilibrée (même au pré qu'on améliore et entretient) pour leur éviter tout stress susceptible de les affaiblir.
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