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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

La « bassine » de Sainte-Soline : les factieux à la manœuvre

9 Novembre 2022 Publié dans #Activisme, #"Bassines"

La « bassine » de Sainte-Soline : les factieux à la manœuvre

 

(Source)

 

 

Si les réseaux sociaux continuent à bruisser après les « manifestations » des samedi et dimanche 30 et 31 octobre 2022, et si les médias sont largement passés à autre chose, un problème de fond demeure : sommes-nous entrés dans l'ère des factieux ?

 

 

Quelques remarques générales...

 

Sans eau, il n'y a pas d'agriculture – de production alimentaire pour l'Homme et les animaux (qui, en majorité, nous nourrissent à leur tour) ou à d'autres fins.

 

« Evidence nourricière, écrivait Mme Emmanuelle Ducros en août dernier dans l'Opinion, oubliée en France, pays abondamment arrosé, déconnecté de sa ruralité, qui croit souvent que la magie remplit les assiettes. » Le titre de son article était cependant faux : ce n'est pas « une piste, une polémique » pour la gestion de l'eau (et d'autres sujets à composante environnementale), mais « une piste, des oppositions irréductibles ».

 

Il y a, certes, un marronnier qui fleurit tous les étés dans les médias : un producteur de légumes et de semences des Cévennes réalise la prouesse de cultiver sans eau ! C'est évidemment une baliverne. Elle suscite, certes, l'intérêt de deux chercheuses de l'Institut National de Recherche pour l'Agriculture, l'Alimentation et l'Environnement (INRAE) ; mais elle a fait l'objet d'une mise au point cinglante par deux anciens directeurs de recherche de cette institution du temps où elle s'appelait INRA et jouissait d'une belle réputation et d'un professeur de génétique et d'amélioration des plantes d'AgroParisTech, du temps où cet établissement s'appelait Institut National Agronomique.

 

Les trois auteurs (MM. Alain Deshayes, André Gallais et Georges Pelletier) concluaient :

 

«  La conclusion du document [une séquence du journal de 20 heures de France 2 du 7 septembre 2015] aurait donc dû mettre en évidence qu'en fait, différents types d'agricultures peuvent coexister, mais qu'une agriculture suffisamment productive, respectueuse de l'environnement, est nécessaire pour nourrir le monde. »

 

 

Tombe de Sennedjem dans la Vallée des Ouvriers en Haute-Égypte. (Source)

 

 

L'un des défis majeurs de l'agriculture (et de l'élevage) est, dans de nombreuses régions, l'eau. La maîtrise de l'eau à des fins agricoles et pour les usages domestiques est étroitement associée à des civilisations florissantes dont nous admirons aujourd'hui les chefs-d'œuvre, mais aussi à des communautés moins voyantes aux réalisations non moins remarquables – tel le système d'irrigation des bisses valaisans, candidat au patrimoine immatériel de l'UNESCO.

 

 

Le grand bisse de Vex. (Source)

 

 

Le paysage français est aussi constellé d'ouvrages divers, grands comme le Pont du Gard et les vestiges des aqueducs romains, l'aménagement de la Durance ébauché dès le XVIe siècle, ou encore le formidable développement de la côte Ouest de la Méditerranée par la Compagnie Nationale d'Aménagement du Bas-Rhône Languedoc, créée en 1955.

 

 

Le canal du Bas-Rhône (canal Philippe-Lamour) à Vauvert. (Source)

 

 

Et pour les petits, on en arrive aux « bassines » des bassins de la Sèvre Niortaise amont et du Mignon, majoritairement dans les Deux-Sèvres. Elles sont petites, quand bien même leurs opposants les qualifient de « méga-bassines ».

 

 

...et des remarques plus spécifiques

 

Tant de choses, surtout déconnectées des réalités, ont été écrites sur les « bassines » qu'on en a le tournis.

 

Notons cependant les magnifiques fils Twitter de Terre à Terre (liens ici, en attendant de nouveaux).

 

 

(Source)

 

 

Le projet d'aménagement est intégré dans un « projet de territoire bassin de la Sèvre Niortaise – Marais poitevin » et un « Contrat territorial de gestion quantitative (CTGQ) Sèvre Niortaise – Mignon 2018-2022 ». Il prévoit de compléter le réseau de retenues de substitution existant à ce jour (2 millions de m3) et de réduire les prélèvements dans les nappes pendant la période d'étiage estivale.

 

Selon un rapport de juillet 2018 portant conjointement les logos du Ministère de la Transition Écologique et Solidaire et du Ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation (les dénominations de l'époque), 9.600 ha sont irrigués dans la zone précitée dans 230 exploitations agricoles occupant 35.000 hectares au total. L’irrigation actuelle est assurée pour l’essentiel par des pompages estivaux utilisant des forages en nappe.

 

Notons que, contrairement à ce qui a été affirmé dans le Monde, ce rapport ne constitue pas un « rappel à l'ordre » mais a proposé des « éléments de médiation ». Et, sauf erreur, la mission gouvernementale n'a pas conclu à une « surévaluation de ses besoins par la profession ».

 

 

(Source)

 

 

Le projet consistait initialement à réaliser 19 « retenues ». Le terme est quelque peu impropre : dans ce paysage plat, le stockage ne peut se faire que dans des bassins pour partie creusés et pour partie constitués de digues et, compte tenu de la nature des sols, étanchéifiés par des bâches.

 

Il s'agit de retenues « de substitution » : elles sont remplies par pompages, essentiellement dans les nappes, pendant l'hiver, quand celles-ci sont au plus haut (et que le trop-plein part à la mer). L'eau ainsi stockée est évidemment utilisée en cours de saison de végétation, particulièrement en été ; elle se substitue donc à une partie des pompages effectués actuellement l'été dans les nappes, alors en situation d'étiage.

 

Dans un rapport rendu public le 7 juillet 2022, le Bureau de Recherches Géologiques et Minières de Nouvelle-Aquitaine a fait une simulation des impacts du projet tel qu'il se présente actuellement – redimensionné à 16 réserves pour un volume global prélevé de 6,9 millions de m3 (contre 9 millions de m3 initialement).

 

Voici un extrait très parlant :

 

« Comme indiqué précédemment, les débits entrants dans le Marais [Poitevin] par le réseau hydrographique superficiel seraient améliorés en printemps/été (+ 6 %), et dégradés en hiver (- 1 %). Le marais étant très anthropisé, souvent inondé en hiver et ses niveaux très contrôlés, le scénario de la Coopérative [la Société Coopérative Anonyme de l'Eau des Deux-Sèvres] ne devrait pas avoir d'influence négative sur ces milieux.

 

Au contraire, les gains de débits et de niveaux piézométriques en printemps/été sur les zones humides dans le marais mouillé et les fonds de vallées humides du Mignon et de la Courance pourraient améliorer les conditions de développement de la biodiversité. »

 

 

(Source)

 

 

Notons un piège classique : les pourcentages ne se rapportent pas à la même base. Ouest France résume : impact « négligeable » en hiver et « positif » l’été. Et d'ajouter :

 

« De quoi apporter de… l’eau au moulin de la Coop de l’eau. "Ces résultats sont sans appel" réagit son président, Thierry Boudaud. Le sujet est passionnel. La ressource en eau est sous tension. C’est une réalité, et l’un des plus grands enjeux de notre siècle. C’est important de disposer d’une base scientifique solide et d’une connaissance partagée pour faire de la pédagogie et la rendre accessible aux citoyens.»

 

 

« Le sujet est passionnel » !

 

 

(Source)

 

 

Comme tout projet d'aménagement, les « bassines » ont été très contestées, mais elles ont aussi fait l'objet d'une concertation qui a abouti à un accord des parties prenantes moyennant un réaménagement et des engagements pris par les agriculteurs concernés.

 

Il faut en être conscient : le droit de l'environnement est devenu un véritable champ de mines pour les porteurs de projets, petits ou grands (les projets). On en prendra pour preuve absurde la zone industrielle censée compenser l'arrêt des réacteurs nucléaires de Fessenheim, amputée de 79 hectares sur 220 en raison de la présence alléguée d'un crapaud protégé, pas vu et pas pris mais prétendument repéré par son ADN.

 

Qu'il y ait eu accord est donc tout à fait remarquable. Mais cela s'est fait au prix de concessions non négligeables des agriculteurs. Et il y a eu des jusqu'au-boutistes, dont... la Confédération paysanne censée défendre les intérêts des agriculteurs.

 

 

(Source)

 

 

Le rapport produit sous l'égide de deux ministères évoqué ci-dessus mentionne comme « pistes d'évolution » le développement de l'agriculture biologique ou encore le « développement d'une filière "soja non OGM" sans fertilisants azotés ». La première est une lubie « bobo-écolo » qui fait exploser la rationnalité, car elle revient à gaspiller l'eau pour des cultures peu productives. La deuxième serait plus raisonnable, sans le « non OGM » qui, de toute manière, relève de l'incantation dans une Europe qui a tourné le dos à la transgenèse.

 

Mme Delphine Batho s'était félicitée de cet accord en son temps et avait publié les détails des « avancées ». Elle a changé d'avis depuis... on a dû la bassiner à cette fin...

 

 

(Source)

 

 

Et « c'est un bon projet » comme l'a relevé la Première Ministre Élisabeth Borne le 2 novembre 2022 au Sénat, à la suite d'une interpellation de M. Claude Malhuret.

 

« Grâce à ces discussions, le projet a été fortement modifié, je peux en témoigner en tant qu’ancienne préfète de la région Poitou-Charentes. […] Ce projet s’inscrit dans le cadre du projet de territoire pour la gestion de l’eau qui a été approuvé en 2019 à la quasi-unanimité des collectivités bien sûr, mais aussi des associations de protection de l’environnement. [Il] va permettre de réduire les prélèvements dans les milieux naturels, c’est un projet responsable qui lie la réalisation des réserves à des engagements environnementaux pris par les agriculteurs. »

 

 

(Source)

 

 

Cela n'a pas empêché les réfractaires, d'une part, de saisir la justice administrative et, d'autre part, de se constituer en association d'opposition aux bassines et d'organiser des « manifestations ».

 

On a pu lire que les recours ont été purgés. Les opposants ont « perdu devant la justice » dit encore Mme Élisabeth Borne. Tout serait donc bien qui finit – presque – bien. Presque, parce qu'il reste cette opposition irréductible, et violente, et...

 

...M. Dorian Guinard, maître de conférences en droit public à l'Université Grenoble Alpes, a signalé sur Twitter, dans un fil qui vaut lecture, que la bassine de Sainte-Soline se trouve près d'une zone de reproduction d'outardes canepetières et que, en bref, il y a un moyen de faire annuler les arrêtés préfectoraux « si la constatation du risque non négligeable par les juges pour les populations d'outardes est actée ».

 

Le champ de mine... et le rôle de plus en plus important du juge administratif.

 

 

Les arguments de l'écodébilité

 

Il serait fastidieux de passer en revue les arguments des opposants aux « bassines » qui, à l'évidence, doivent être simples, sinon simplistes, et percutants quels que soit leur pertinence et leurs liens avec la réalité.

 

« Paysans, nous sommes résolument contre les mégabassines » proclament dans Reporterre le supplétif de l'altermondialisme – j'ai nommé la Confédération Paysanne – et « 150 associations ». En bref, « [i]ls appellent à transformer nos pratiques agricoles pour préserver la nature et non l’exploiter. » On ne sort pas des incantations !

 

Premier élément dans le gloubi-boulga argumentatif, on aurait « fait croire qu’elles [les bassines] se remplissaient avec de l’eau de pluie, sans pompage dans les nappes phréatiques ! ».

 

En réalité, et Reporterre l'a relevé dans une note en bas de page, l'ancien ministre Julien Denormandie avait déclaré que « le projet de bassines consiste à récupérer les eaux issues des pluies diluviennes de l’hiver pour les dédier à l’irrigation agricole » (c'est nous qui graissons).

 

On a un condensé de la « pensée » anti-bassines avec : « Ces dispositifs privatisent en réalité un bien commun au profit d’une minorité d’agriculteurs inféodés au système agro-industriel ».

 

Mais la pompe individuelle qui prélève l'eau de la nappe en été « privatise » aussi « un bien commun », lequel peut avoir vocation d'être ainsi privatisé – contre redevances – pour répondre à des intérêts économiques, ici dans l'intérêt public, à savoir la production agricole et alimentaire. Rien de neuf non plus pour la « minorité d'agriculteurs », aucun aménagement d'irrigation n'étant en mesure de s'étendre à tous. Et avec l'inféodation « au système agro-industriel » on tombe dans la contestation des éléments fondamentaux de notre société.

 

Ces gens osent même affirmer que « [c]ette privatisation se fait de plus au détriment de notre souveraineté alimentaire. »

 

 

 

 

L'explication tient à un autre épouvantail, le fabuleux, le vraiment fabuleux maïs : « L’eau pompée dans les nappes phréatiques pour les mégabassines est destinée avant tout à l’irrigation du maïs, inadapté à nos régions et cultivé en partie pour être exporté ou vendu aux producteurs d’aliments industriels. » Cela se passe de commentaire. Mais ajoutons qu'ils reprochent aussi au maïs – plus précisément au « tout maïs [qui] est l’incarnation d’un système absurde écologiquement et économiquement », qui est du reste rare en pratique – de produire « des céréales en quantité pharaonique »...

 

 

(Source)

 

 

On peut continuer ainsi ad nauseam.

 

Mais le tribunal de l'opinion dite publique voit aussi défiler des gens plus ou moins connus, en mal de notoriété ou soucieux de leur influence pour dézinguer les retenues de substitution ou simplement susciter le doute, prélude à un «alors, ne faisons rien, arrêtons tout ». Avec parfois des arguments qui laissent pantois.

 

 

Ben oui ! Quand ya pas d'eau, ya pas d'eau. Mais ce n'est pas un argument a priori contre les bassines ou pour mettre leur utilité et efficacité en doute. (Source)

 

 

Le mille-feuille argumentatif comprend aussi, par exemple, les pertes par évaporation, les problèmes de température et de qualité de l'eau, le développement possible d'algues et de cyanobactéries... tous problèmes qui devraient condamner pas seulement les « bassines », mais l'ensemble des retenues d'eau – que l'on pourrait du reste recouvrir par des panneaux photovoltaïques...

 

 

(Source)

 

 

Et, le lendemain, il est reconnu que le problème de l'évaporation est mineur...

 

 

(Source)

 

 

Ainsi, un philosophe, certes engagé dans la mouvance écologiste, déclare à C Politique le dimanche 30 octobre 2022, au mépris de la réalité des faits et d'un savoir millénaire :

 

« On a un problème de déficit d'eau et ça va s’amplifier. Aucun hydrologue ne défend les méga-bassines, car c'est absurde sur le plan hydrologique. »

 

 

(Source et source)

 

 

Une hydrologue a évoqué une « solution court-termiste [qui] se rapproche de l’inconscience » sur la base d'un volume de précipitations pour une retenue de taille non définie. Nous avons fait un calcul simple : les 6,9 millions de m3 de stockage du projet couvrant un territoire de 35.000 hectares prélèvent... 20 millimètres des pluies tombant sur ce territoire – ce qui conduit à l'impact négligeable évoqué par le BRGM. Ajoutons pour les récitants de l'accaparement d'un bien commun que l'article 641, al. 1er du Code Civil prévoit que « tout propriétaire a le droit d'user et de disposer des eaux pluviales qui tombent sur son fonds. » Avant de devenir un bien commun par infiltration en profondeur, l'eau de pluie est un bien disponible.

 

 

(Source)

 

 

Dans une lettre à la France Agricole du 4 novembre 2022, M. Daniel Sauvaitre, entre autres président de l'Association Nationale Pommes Poires (ANPP), écrit :

 

« L'actualité liée à la sécheresse a déclenché cet été une foultitude de tribunes d'acteurs d'horizons divers. Plus les prises de position sont douteuses et plus elles trouvent un écho médiatique. Ici, c'est une chercheuse en hydrogéologie du CNRS qui brandit la situation catastrophique de la mer d'Aral (Asie centrale) pour discréditer le stockage de l'eau. Comme si l'agriculture française avait le moindre point commun avec la monoculture de coton qui a spolié cette eau ! Là, c'est un chercheur en science politique de l'Inrae qui prône une réflexion démocratique sur le partage de l'eau. Comme si les comités de bassin, "parlements de l'eau" à la française, ne remplissaient déjà pas ce rôle. [...] »

 

 

(Source du premier)

 

 

La montée des factieux

 

(Source)

 

Les/des opposants aux « bassines » ont donc organisé des « manifestations » les 30 et 31 octobre 2022 à Sainte-Soline, avec l'objectif à peine voilé de pénétrer dans le chantier et de perpétrer quelques actes de vandalisme. Le succès a été au rendez-vous : un morceau de canalisation a été scié à la disqueuse et porté en triomphe... sauf que c'est un élément du système d'irrigation d'un agriculteur et non un élément de la future alimentation de la « bassine ».

 

Les « manifestations » ont été interdites par la préfète des Deux-Sèvres. Les organisateurs ont décidé de passer outre et ont publié une tribune dans Libération, « Méga-bassine à Sainte-Soline : malgré l’interdiction de manifester, la mobilisation continue », contresignée par « près de 200 personnalités du monde politique, syndical, associatif ».

 

« Un référé liberté va être déposé contre ces arrêtés par la CGT et Solidaires (qui portaient la déclaration de manifestation). […] Par cette tribune nous signifions notre entier soutien aux collectifs et organisations signataires de l’appel à mobilisation et ré-affirmons la primauté de la liberté fondamentale de manifester. »

 

 

(Source)

 

 

La justice a confirmé l'interdiction. Notons que Libération n'a pas jugé bon d'en faire état alors qu'il a fait une couverture extensive des événements. On appelle ça de l'« information de qualité ».

 

On connaît la suite...

 

Une recherche rapide dans la tribune (à laquelle échappent ceux qui n'auront pas précisé leur affiliation) nous donne... 101 députés, 74 NUPES/FI et 27 EÉLV. Il y a aussi 18 avocats, essentiellement de Paris et de la Couronne, pour plaider la primauté du droit de manifester sur l'ordre et la sécurité publiques et la protection des biens et des personnes – mais tout se plaide, n'est-il pas ?

 

Il se sera donc trouvé tout ce beau monde, la grande majorité chargés de voter les lois, pour appeler à violer les lois de la République et, comme c'était à prévoir, à cautionner les troubles à l'ordre public – y compris par le jet de cocktails Molotov, de mortiers, de boules de pétanque et de cailloux ramassés sur place contre les forces de l'ordre.

 

 

(Source)

 

 

Et lors de la manifestation de samedi, on a vu parader des participants ceints d'une écharpe tricolore, voire dans le cas de Mme Lisa Belluco, députée ECO de la Vienne, provoquer les forces de l'ordre, pour ensuite prétendre avoir été bousculée et frappée et porter plainte...

 

 

(Source et source)

 

Il s'ensuivit un feu d'artifice de réactions outrées – contre les autorités et en particulier le Ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin – sur les réseaux sociaux et dans des médias complaisants, plus préoccupés par le buzz que par la qualité de l'information et, surtout, la déontologie journalistique.

 

Ainsi, Franceinfo a tendu un micro à Mme Sandra Regol, députée NUPES-EÉLV du Bas-Rhin, pour un « Manifestation "anti-bassines" : Gérald Darmanin est le "seul responsable" des heurts, selon l'écologiste Sandra Regol » !

 

« Il n'y a qu'un seul responsable, c'est le donneur d'ordre, Gérald Darmanin […] Ce qui est raté, c'est d'avoir déployé une force aussi disproportionnée face aux manifestants qui n'étaient pas là pour porter atteinte ou porter préjudice aux forces de l'ordre. »

 

 

(Source)

 

 

Ce fut aussi un concours d'outrances – qui semble s'être un peu calmé après l'incroyable sortie du député Rassemblement National Grégoire de Fournas.

 

Le monde agricole – mais pas que – a aussi été victime des querelles inter- et intra-partisanes, des coups d'éclat médiatiques et des concours d'égos.

 

Les mots ont un sens, surtout par les temps qui courent : l'« écologie de combat » de Mme Sandrine Rousseau est susceptible de constituer un appel à toutes formes d'actions et d'atteintes graves au vivre ensemble.

 

 

(Source)

 

 

Notons que les défenseurs des réserves de substitution et plus généralement de l'agriculture (la production alimentaire, etc.) ont été notablement absents.

 

 

Le piège des factieux

 

Les déclarations enflammées s'inscrivent en droite ligne dans la stratégie déployée par une partie de la NUPES dans les médias, sur les réseaux sociaux et dans une Assemblée Nationale de plus en plus tumultueuse et guignolesque.

 

 

(Source)

 

 

Revenons un instant sur la procédure de référé introduite par, en quelque sorte, deux syndicats prête-noms, tout de même assistés par l'avocat habituel des opposants aux bassines. La Nouvelle République écrit :

 

« Ce tour de passe-passe n'est pas innocent : il vise par avance à rendre caduc l'argument principal de la préfète, le risque de trouble à l'ordre public. […] jamais les deux syndicats, habitués des manifestations, toujours autorisées, n'ont été mis en cause dans ces possibles délits. »

 

Mais que plaidaient-ils, notamment :

 

« Il [l'avocat] conteste aussi l'argument selon lequel la préfecture serait dans l'incapacité d'assurer le maintien de l'ordre : "La presse nous annonce 1.600 à 1.700 gendarmes déployés sur place, plus huit hélicoptères dans le ciel !»

 

C'est « pile, je gagne ; face, tu perds »...

 

La signature d'une tribune appelant implicitement, sinon plus, à passer outre aux arrêtés préfectoraux était déjà un acte d'insubordination par rapport aux lois de la République. Le port de l'écharpe dans une manifestation interdite ajoute une atteinte grave à l'un des grands symboles de la République.

 

Que peut faire le gouvernement ?

 

Il n'a pas été d'une grande clarté. On a un gros problème quand, le samedi 29 octobre 2022, au matin, l'invité du weekend de France Inter, Christophe Béchu, Ministre de la Transition Écologique, déclare que « la mobilisation se comprend dans la finalité » et que « les manifestants dénoncent "quelque chose de juste" ». Cela oblitère le reste des déclarations. Ouest France rapporte aussi ce propos : « Les bassines ne sont pas un projet de gouvernement, »... Et de poursuivre : « C’est un projet qui a été conçu par une Coopérative d’irrigants qui font majoritairement de la polyculture-élevage contrairement à des slogans entendus autour d’un prétendu agribusiness. » Mais quand on passe à l'intérêt des bassines, on reste sur le mode négatif : le rapport du BRGM « est venu dire à quel point le projet tel qu’il était après expertises n’avait pas de conséquences négatives pour les nappes phréatiques. »

 

 

(Source)

 

 

Et le Ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté Alimentaire Marc Fesneau n'a pas été très loquace en amont de la manifestation. Et pour ses déclarations d'après, les médias ont surtout relevé sa condamnation de la violence.

 

 

(Source et source)

 

 

La Première Ministre Élisabeth Borne s'est aussi fait attendre : il a fallu une interpellation au Sénat, mercredi 2 octobre 2022, comme on l'a vu plus haut. On peut ne pas aimer M. Émmanuel Valls, mais il se serait sans doute exprimé sans attendre.

 

Et, dans le cas des députés, que peuvent faire le Bureau de l'Assemblée Nationale et les partis qui ne sont pas en cause ?

 

Imposer des sanctions serait interprété comme un aveu de faiblesse, une tentative de museler une opposition qui ne manquera pas de prendre la posture du martyr et de redoubler d'outrances contre le Président de la République, le gouvernement et le groupe parlementaire majoritaire ne disposant pas d'une majorité de gouvernement.

 

Ne rien faire, c'est tolérer, implicitement cautionner, une inquiétante dérive, une modulation des valeurs républicaines par des individus et des groupes en fonction de ce qui leur plaît, ou ne plaît pas.

 

 

Quand les bornes sont dépassées, il n'y a plus de limite

 

On peut craindre que le gouvernement choisisse la deuxième option, au risque de l'escalade.

 

Les atermoiements du gouvernement, dont seul M. Gérald Darmanin était en première ligne, et le soutien des NUPES-FI et EÉLV ont déjà produit leurs fruits : le mercredi 2 novembre 2022, écrit par exemple le Monde (c'est nous qui graissons),

 

« Des représentants du collectif Bassines non merci, des Soulèvements de la terre et des "150 composantes" qui soutiennent le mouvement sont revenus aux abords du chantier, mercredi 2 novembre, pour fixer un "ultimatum" à l’Etat : l’arrêt immédiat des travaux à Sainte-Soline, la suspension du projet de création de seize réserves sur les bassins de la Sèvre niortaise et du Mignon (Deux-Sèvres, Charente-Maritime et Vienne) et "la prise d’un moratoire national sur le stockage de l’eau [à usage agricole] en France". »

 

 

(Source)

 

 

Dans une analyse fort pertinente faite à C à Vous le mercredi 3 novembre 2022, Mme Christiane Lambert, présidente de la Fédération Nationale des Syndicats d'Exploitants Agricoles (FNSEA), relevait que dans la « manifestation » de Sainte-Soline, on voulait un mort, un Sivens bis.

 

 

(Source et source)

 

 

(Source)

 

Notons incidemment l'excellent résumé de la situation qu'a produit M. Patrick Cohen. Il y a des journalistes qui font honneur à leur profession.

 

 

(Source)

 

 

Les images diffusées par la Gendarmerie Nationale montrent que ce mort aurait pu se trouver du côté des forces de l'ordre. En d'autres termes, on est au bord de l'insurrection.

 

 

(Source)

 

 

La France est dans de beaux draps.

 

 

 

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H
Excellent... L'autoproclamée experte coqueluche (malheureusement) des médias, Emma Haziza s'est fait correctement recadrée par François Marie Bréon, le climatologue français qu'on ne peut pas vraiment suspecter de climatosepticisme https://twitter.com/fmbreon/status/1549123981785047041
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