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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

G7 : la sécurité alimentaire mondiale est entre de bonnes mains (pas vraiment...)

29 Juin 2022 Publié dans #Alimentation, #Politique

G7 : la sécurité alimentaire mondiale est entre de bonnes mains (pas vraiment...)

 

 

 

 

Le G7 s'est réuni du 26 au 28 juin 2022 pour son sommet annuel au château d'Elmau dans les Alpes bavaroises, sous la présidence allemande.

 

 

Réponses aux crises à court terme

 

La sécurité alimentaire mondiale ou, pour reprendre les termes du Secrétaire Général des Nations Unies Antonio Guterres, la menace d'un « ouragan de famines » a fait partie des sujets abordés. La déclaration relative à ce sujet indique en guise d'introduction :

 

« Nous, les Dirigeants du G7, n'épargnerons aucun effort pour accroître la sécurité alimentaire et nutritionnelle mondiale et pour protéger les plus vulnérables, que la crise alimentaire menace de frapper le plus durement. »

 

A notre grande consternation, il n'y a aucun engagement au-delà du court terme, sauf :

 

« Nous veillerons à ce que notre réponse aux défis actuels renforce également la résilience et la durabilité à long terme des systèmes agricoles et alimentaires. »

 

et l'expression d'un soutien aux travaux entrepris par un certain nombre d'organisations internationales.

 

Mais bravo aux États-Unis et à Joe Biden : le G7 s'est engagé à débloquer 4,5 milliards de dollars supplémentaires pour protéger les plus vulnérables de la faim et de la malnutrition, ce qui porte le total pour cette année à plus de 14 milliards de dollars, plus de la moitié du complément (2,76 milliards de dollars) devant provenir de Washington.

 

 

Une étrange conférence ministérielle

 

Le 24 juin 2022, une « conférence ministérielle » s'est tenue à Berlin sur le thème : « S'unir pour la sécurité alimentaire mondiale ».

 

 

Le début du programme

 

 

Que peut-on faire dans un jamboree de trois heures avec, si nous avons bien compté, quelque 70 intervenants, plus les présidents de séance qui devaient tirer les conclusions de l'événement ? Pourtant, il existe un document (voir ci-dessous).

 

Les participants ont parlé :

 

  1. Des efforts diplomatiques et de l’action humanitaire immédiate (en d’autres temps et lieux, j’aurais traduit l’anglais action par un actions français au pluriel) ;

     

  2. De la coordination des actions dans une alliance globale pour la sécurité alimentaire ;

 

  1. De l’action pour des systèmes alimentaires et une agriculture durables (sustainable).

 

Les orateurs sont très majoritairement des very important persons : ministres, chefs d’agences internationales, etc.

 

Pour le thème 2, il y avait également deux personnes de la Fondation Rockefeller et de la Fondation Bill et Melinda Gates à la fin de la liste des orateurs. Cela est compréhensible au vu des contributions majeures des philanthropes à la sécurité alimentaire mondiale.

 

Mais avant eux se trouvaient les présidents des conseils d'administration de VENRO, Bundesverband entwicklungspolitischer und humanitärer Nichtregierungsorganisationen – l'organisation faîtière des organisations non gouvernementales de développement et d'aide humanitaire en Allemagne – et du Food First Information and Action Network (FIAN) International (basé à Heidelberg).

 

 

 

 

On peut se faire une idée de la contribution possible du FIAN à partir de la photo ci-dessous : le « réseau » s'est associé à un réseau qui a fait pression – sans succès – pour que le Conseil de la FAO annule l'accord de coopération entre la FAO et CropLife International et plus généralement les partenariats avec le secteur privé.

 

 

Notez incidemment que, dans le dessin, la FAO est représentée par le bâtiment de l'ONU à New York... Ci-dessous, le dessin complet (source).

 

 

 

 

Et qu'en est-il du thème 3 ?

 

Trois associations caritatives allemandes – Brot für die Welt, Misereor, INKOTA – et... WWF International.

 

 

 

 

Clairement, il n'y avait pas de place pour les acteurs de l'agriculture et de l'alimentation, ceux qui assurent la mission essentielle de produire, conserver, transformer et distribuer la nourriture pour les huit milliards d'habitants de cette Planète.

 

Le message que le gouvernement allemand leur a implicitement envoyé est tout simplement désastreux.

 

La sécurité alimentaire mondiale est entre de bonnes mains (ironie...).

 

 

Développer la production agricole et alimentaire ?

 

Comme évoqué plus haut, il existe un relevé de conclusions des présidents, établi par le gouvernement allemand (très probablement à l'avance, en accord avec les sherpas). Les conclusions sont présentées sous deux titres (au lieu de trois), « Faire le point sur les progrès accomplis » et « Aller de l'avant ».

 

Sans surprise, les ONG ont eu leur heure de gloire :

 

« Ils [les participants] ont souligné l'importance de la réalisation progressive du droit de l'homme à une alimentation adéquate ainsi que de l'Objectif de Développement Uurable 2 (Faim zéro d'ici 2030). Toutes les personnes doivent avoir la possibilité de réaliser ce droit. Les organisations de la société civile ont exprimé leur volonté [expressed their willingness] d'apporter leur expérience pour développer des solutions adéquates à long terme pour cet objectif. »

 

« ...leur volonté d'apporter leur expérience » ? Hilarant !

 

 

(Source)

 

 

Vous ne trouverez rien de spécifique aux fondations, mais cela ne devrait pas être une surprise : elles font le job, plutôt que le discours.

 

Et les agriculteurs ?

 

« Les participants ont partagé le point de vue selon lequel les agriculteurs doivent s'adapter au changement climatique pour préserver la sécurité alimentaire. En outre, la production agricole durable devrait même contribuer à la protection globale du climat, favoriser la biodiversité, éviter les impacts négatifs sur l'environnement et renforcer la mise en œuvre de pratiques agro-écologiques et régénératives. Ils ont souligné la nécessité de disposer de semences adaptées aux conditions locales et de meilleure qualité, d'une utilisation plus efficace des engrais, y compris des engrais à base non fossile, ainsi que d'un accès aux options numériques pour les agriculteurs. »

 

En gros, ce rassemblement prestigieux leur dit quoi faire, plutôt que de leur dire – et de nous dire – ce qu'ils feront pour permettre aux agriculteurs de répondre à ce grand ordre de mission.

 

Nous pouvons également interpréter ce texte comme un rejet implicite des technologies modernes autres que le numérique.

 

La sécurité alimentaire mondiale est-elle entre de bonnes mains ?

 

Pas vraiment ! Ces conclusions peuvent ressembler à un tigre de papier, mais elles seront reprises, répétées et éventuellement développées à chaque nouvelle occasion.

 

« Régénératives » – un terme qui a été détourné par le lobby de l'agriculture biologique – et « engrais à base non fossile » entrent en scène. Il n'y a bien sûr rien de mal à ces concepts, sauf qu'ils sont utilisés pour mettre de côté les technologies modernes, tout comme le fait les « semences adaptées aux conditions locales ».

 

La communauté agricole et alimentaire devrait s'exprimer.

 

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