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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

« Rejeter les progrès de la science engagera nos activités agricoles dans la voie de la régression » (republié)

13 Avril 2022 Publié dans #Divers

« Rejeter les progrès de la science engagera nos activités agricoles dans la voie de la régression » (republié)

 

 

(Source)

 

 

Une conversation sur Twitter a fait réémerger une tribune publiée dans le Monde du 27 février 2022.

 

Quelque 80 personnalités de tous bords avaient signé un vibrant appel... au bon sens et à la raison.

 

En voici le texte et les signataires, auxquels je serais heureux de m'associer. En ces temps de campagne électorale, sur fond de guerre en Ukraine et de menace de crises alimentaires majeures, il est tout à fait pertinent de le republier.

 

 

« L’avenir de notre agriculture est devenu un sujet de débat passionnel. Qui n’a pas un avis sur les transformations nécessaires à notre agriculture pour répondre aux nouvelles aspirations de la société ? Mais ce qui divise peut-être le plus nos concitoyens c’est la perception du rôle de la science dans ces transformations. Comme pour l'être humain, les plantes cultivées et les animaux d'élevage sont inéluctablement la cible de nouvelles maladies, de nouvelles interactions avec le milieu qu'il est difficile d'anticiper. Bien souvent les remèdes d'antan ne sont pas suffisants pour résoudre ces problèmes nouveaux. Le statu quo est impuissant et l'innovation incontournable. Ce besoin d’évolution de notre agriculture est exacerbé dans le contexte d’un changement climatique qui bouleverse l’écosystème (par exemple : sécheresses et inondations plus fréquentes et plus intenses) et l’écologie des ravageurs des cultures (par exemple : expansion des insectes stimulée par des températures plus élevées).

 

Des peurs qui favorisent les renoncements au progrès

 

Or, les progrès technologiques dont notre agriculture a besoin pour se transformer alimentent de nouvelles peurs. Il en est ainsi par exemple du rejet de produits chimiques pourtant nécessaires pour protéger les cultures en l’absence d’autres alternatives . Autre exemple, l’aversion d’une partie de la société à l'encontre d'une agriculture productive bloque les recherches sur les biotechnologies alors qu’il s’agit d’améliorer les plantes pour qu’elles deviennent plus « vertes », c’est-à-dire résistantes aux ravageurs ou aux maladies, afin de limiter l’utilisation des produits phytosanitaires. Ce rejet est notamment lié à l'hostilité envers ce qui est perçu comme une collusion de la science avec l'industrie. Devant les difficultés d’appréhender une complexité scientifique croissante, les décisions de nos gouvernants se prennent trop souvent en fonction de l’état de l‘opinion selon des critères essentiellement subjectifs qui, sous le couvert du principe de précaution, conduisent à renoncer à des technologies efficaces et sûres. Rejeter les nouvelles technologies et les progrès de la science engagera inéluctablement nos activités agricoles dans la voie de la régression.

 

 

(Source)

 

 

La science est indispensable pour développer des innovations durables

 

Les progrès scientifiques et technologiques ont indéniablement permis de réduire la faim dans le monde. Depuis 50 ans, pour nourrir la population qui a été multipliée par 2,3, les progrès de l'agriculture et de l’élevage fondés sur les avancées scientifiques (dont la révolution verte des années 50-60) ont multiplié la production des céréales majeures par 3,6 au niveau mondial et, par exemple, la production de lait des vaches par lactation par 4,6. Grâce aux innovations technologiques, le rendement du blé, qui a crû lentement de 1 t/ha à 1,5 t/ha de 1800 à 1900, atteint désormais plus de 7 t/ha en France grâce successivement au développement de l’agronomie, des engrais, à l'amélioration génétique, au désherbage, à l’emploi de fongicides, d’insecticides, voire des régulateurs de croissance.

 

De manière semblable, chez les bovins en particulier, une meilleure maîtrise des maladies grâce à des mesures prophylactiques, la sélection génétique et l’apport des biotechnologies de la reproduction ont permis des progrès remarquables pour améliorer la croissance des animaux à viande ou la production laitière (moyenne dépassant les 9 000 kg de lait par lactation en race Holstein). Néanmoins, la sous-nutrition de plus d'un être humain sur 10 est responsable de 9 millions de morts chaque année. Une étude récente de la FAO montre même que l’insécurité alimentaire repart à la hausse sous l’effet des changements climatiques qui pénalisent les rendements des cultures.

 

 

(Source)

 

 

Peut-on alors se permettre de renoncer à l’augmentation de la productivité des terres agricoles cultivées alors que nous avons le défi d’alimenter plus de 9 milliards d’habitants en 2050, ce qui implique d’augmenter la production agricole de 70% sans guère augmenter les surfaces, avec moins d’eau, moins d’engrais et moins de produits phytosanitaires. Ne confondons pas productivité avec productivisme. Si on se doit d’augmenter les rendements, il faut aussi le faire en préservant l’environnement. C’est ce que Michel Griffon appelle une agriculture écologiquement intensive.

 

Vers une nouvelle révolution agricole plus respectueuse de l’environnement

 

Produire plus et mieux avec moins d’intrants et de nuisances tout en améliorant le revenu des producteurs, tels sont les grands enjeux de notre agriculture. Pour cela, le progrès scientifique ne doit pas être arrêté. Il constitue au contraire le meilleur levier pour développer notre économie agricole et aussi, de loin, le meilleur allié de l’agroécologie. Il est inquiétant que nombre de nos concitoyens ne le comprennent plus. De nouveaux efforts de recherche sont nécessaires pour améliorer la sécurité alimentaire tout en préservant notre planète. Aucun moyen de progrès, aucune technologie ne peuvent être écartés, par principe, pour relever ces défis cruciaux pour l’avenir de l’humanité. Renoncer à ces progrès de la science, c’est comme si on abandonnait la partie parce qu’on s'estimerait incapable de la gagner. Ce serait un signe de décadence grave pour notre pays. Cette nouvelle révolution agricole plus respectueuse de l’environnement implique des efforts de recherche dans tous les domaines concernés, de la physiologie à l'écologie en passant par la génétique. Ces efforts doivent porter sur l'ensemble des facteurs impliqués (espèces d'intérêt, leurs pathogènes, ravageurs et compétiteurs) et sur leurs interactions complexes, notamment pour mettre en place des méthodes de biocontrôle. L’agriculture de demain devra nécessairement utiliser des technologies nouvelles, non seulement fondées sur les récents acquis de la biologie moléculaire mais aussi de l'agronomie, des NTIC (Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication), de la robotique, de l'intelligence artificielle, du spatial, etc.

 

Loin d’arrêter le progrès dans notre agriculture, il faut au contraire y favoriser l'émergence rapide des avancées technologiques qui nous permettront de ne pas nous mettre sous la dépendance de pays qui investissent massivement dans la recherche, tels que la Chine et les États-Unis. C’est aussi le meilleur moyen de redonner à nos agriculteurs confiance dans leur métier pour qu’ils retrouvent l’esprit de conquête.

 

 

(Source)

 

 

Collectif « Sciences et agriculture » au 5 Février 2019

 

Bernard Accoyer : ancien président de l’Assemblée nationale

Christian Amatore : directeur de recherche émérite CNRS, membre de l’académie des sciences

Jean Audouze : astrophysicien

Hugues Auffray : artiste auteur-compositeur-interprète

Pierre Arditi : acteur

Jean-Louis Bernard : agronome, président de l’Académie d’agriculture de France

Michel Bettane : journaliste-critique de vins, membre de l’Académie du Vin de France

Jean Bizet : sénateur

Damien Bonduelle : agriculteur et président d’agriDées

Jean-Paul Bordes : directeur général de l’ACTA

Gerald Bronner : sociologue, membre de l’Académie de médecine et de l’Académie des technologies

Philippe Busquin : ancien commissaire européen à la Recherche

Philippe Chalmin : économiste et enseignant à Paris-Dauphine

Jean-François Colomer : journaliste, membre de l’Académie d’agriculture

Bernard Le Buanec : ancien directeur de recherche de Limagrain, membre de l’Académie des technologies.

Michel Candau : ingénieur agronome, directeur honoraire de l’ENSA de Toulouse

Mathilde Causse : directrice de recherche INRA, membre de l’Académie d’agriculture

Eric Chapelle : directeur de la Fédération nationale bovine (FNB)

Claude Cochonneau : président des Chambres d’agriculture

Marc Delos : ingénieur agronome, membre de l’Académie d’agriculture

Yvette Dattée : ancienne directrice du GEVES et membre de l’Académie d’agriculture

Jean-Pierre Decor : viticulteur, membre de l’Académie d’agriculture

Henri Delbard : président d’honneur de la Société nationale d'horticulture de France

Michel Delseny : directeur de recherche émérite au CNRS et membre de l’Académie des sciences

Patrice Desmarest : directeur honoraire du centre de recherche Pernod-Ricard, membre de l’Académie des technologies

Jérome Despey : viticulteur et président de la Commission viticole de la FNSEA

Jean-Pierre Digard : directeur de recherche émérite au CNRS, membre de l'Académie d'agriculture

Christian Dumas : professeur émérite ENS Lyon

Marc Fellous : docteur en médecine et professeur émérite de génétique à la Faculté de médecine de Cochin

Genviève Fioraso : ancienne ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche

André Fougeroux : ingénieur ENITA, membre de l’Académie d’agriculture

André Gallais : professeur émérite AgroParistech, membre de l’Académie d’agriculture

Anne-Marie Hattenberger : directrice de recherche honoraire, membre honoraire de l’Académie d’agriculture

Daniel Gremillet : sénateur.

Jeanne Grosclaude : directeur de recherche honoraire INRA, membre de l’Académie d’agriculture

Nicolas Guichard : œnologue, conseiller viti vinicole

François Guillaume : ancien ministre de l’Agriculture

David Habib : député

Pascale Hebel : directrice du pôle consommation et entreprises du CREDOC, membre de l’Académie d’agriculture

Bruno Jarry : président de l’Académie des technologies

Gil Kressmann : économiste et membre de l’Académie d’agriculture de France

Jean-Paul Krivine : rédacteur en chef de Sciences et pseudo sciences AFIS

François Lafitte : arboriculteur, membre de l’Académie d’agriculture de France

Christiane Lambert : éleveuse de porcs et présidente de la FNSEA

Jacques Lebrima : scénariste

Jean-Marie Lehn : prix Nobel de chimie

Constant Lecoeur : secrétaire perpétuel de l’Académie d’agriculture de France

Anne-Yvonne Le Dain : ingénieur agronome et ancienne députée

Jean-Yves Le Déaut : ancien président de l’OPECST

Loïc Lepiniec : biologiste et directeur de Recherche INRA.

René Lésel : directeur de recherche honoraire INRA, membre de l'Académie agriculture de France

Gérard Longuet : sénateur, Président de l’OPECST.

Gérard Maisse : ingénieur agronome, membre de l'Académie d'agriculture de France

Jacques Mathieu : directeur général d’Aurea Agrosciences et membre de l’Académie d’agriculture de France

Gérard Menuel : député

Jean-Paul Mialot : ancien directeur de l'École nationale vétérinaire d'Alfort

François Mitjaville : viticulteur

Pierre Monsan : professeur émérite INSA et membre de l’Académie d’agriculture

Henri Nallet : ancien ministre de l’Agriculture, membre de l’Académie d’agriculture

Dominique Parent-Massin : professeur honoraire des Universités en toxicologie alimentaire, membre de l’Académie d’agriculture.

Gérard Pascal : directeur scientifique honoraire de l’INRA, membre de l’Académie des technologies

Georges Pelletier : directeur honoraire de recherches INRA, membre de l’Académie des technologies

Jean-Claude Pernollet : directeur de recherche honoraire INRA, membre de l’Académie d’agriculture

Daniel Peyraube : maïsiculteur et président de l’Association générale des producteurs de maïs (AGPM)

Jean-Marie Pierre-Guy : consultant et membre de l’Académie d’agriculture de France

Hervé Pillaud : éleveur, membre du Conseil national du numérique

Lissa Pillu : productrice

Philippe Pinta : agriculteur et président de l’Association générale des producteurs de blé (AGPB)

Jean-Robert Pitte : secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences morales et politiques

Alain Pompidou : professeur émérite à la Faculté de médecine de Cochin

Cathrerine Peocaccia :sénatrice

Jean-Pierre Raffarin, ancien Premier Ministre.

Catherine Regnault-Roger : professeur émérite des Universités, membre de l’Académie d’agriculture

Nicole Roskam Brunot : viticultrice, membre de l’Académie d’agriculture de France

Guillaume Roué : éleveur et président d’INAPORC

Emmanuel Rossier : ancien directeur général adjoint des Haras nationaux

Franck Sander : président de la Confédération générale des planteurs de betteraves (CGB)

Jean-Marie Seronie : économiste et membre de l’Académie d’agriculture

Bruno Sido : sénateur, ancien président de l’OPECST

Philippe Stoop : docteur ingénieur en économie, directeur R&D de ITK, membre de l'Académie d’agriculture

Gérard Tendron : ancien secrétaire perpétuel de l’Académie d’agriculture

Michel Thibier : ancien directeur de l’Enseignement et de la Recherche, membre de l’Académie d’agriculture

Bruno Tisseyre : enseignant à Montpellier SupAgro

Louis Touraine : député

Guy Vallancien : chirurgien, membre de l’Académie de médecine

Philippe Vasseur : ancien ministre de l’Agriculture

Guy Waksman : ancien directeur informatique de l’ACTA, membre de l'Académie d'agriculture de France

 

° o 0 o °

 

Un petit commentaire : « ...les progrès technologiques dont notre agriculture a besoin pour se transformer alimentent de nouvelles peurs » ? En fait, ces progrès technologiques alimentent dans un premier temps le fond de commerce des marchands de peur. Il importe que ce commerce soit combattu par l'explication et une contre-argumentation. De ce point de vue, la tribune est une contribution remarquable.

 

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