Présentation d'actions intelligentes des agriculteurs en matière de climat lors de la COP26

Présentation d'actions intelligentes des agriculteurs en matière de climat lors de la COP26

Mateusz Ciasnocha*

En rentrant de Glasgow dans la ferme de ma famille en Pologne, j'ai réfléchi au privilège et à la formidable opportunité que j'ai vécus à la COP26 en y partageant mon histoire et en soutenant les voix d'autres agriculteurs pour présenter ce que les agriculteurs du monde entier font dans leurs exploitations pour atténuer le changement climatique et s'y adapter.

Étant donné que les agriculteurs dépendent directement des écosystèmes qu'ils gèrent, nous sommes les principales parties prenantes des efforts d'atténuation et d'adaptation au changement climatique. Il est donc impératif que les agriculteurs participent à ces événements et présentent ce qu'ils font dans ce domaine afin que d'autres puissent les entendre raconter leurs histoires – exactement comme ils l'ont fait à Glasgow.

Nous aurons bientôt d'autres occasions : il y aura une COP27 en Égypte l'année prochaine, une COP28 aux Émirats Arabes Unis en 2023, et une COP29 en Ukraine en 2024, si rien ne change.

L'agriculture doit être au cœur de chacun de ces événements. Si ce n'est pas le cas, il y a un risque que les responsables et les militants nous traitent comme des sujets plutôt que comme des partenaires dans le travail d'identification et d'engagement des solutions à l'urgence climatique.

Peu de gens comprennent la menace du changement climatique aussi bien que les agriculteurs. Nous passons une grande partie de notre vie à l'extérieur, et le climat affecte notre secteur peut-être plus que tout autre.

Ici, dans notre ferme, où nous produisons du foin de la meilleure qualité dans le delta de la Vistule, nous avons vu comment le climat peut changer au fil du temps. Mon grand-père a commencé à cultiver dans la région en 1973, après avoir quitté le sud-est de la Pologne pour venir s'installer ici. À l'époque, l'un de ses plus grands défis était l'excès d'eau. Aujourd'hui, avec les deuxième et troisième générations aux commandes, nous sommes confrontés au problème inverse : des périodes de sécheresse prolongées et un niveau d'eau qui a baissé d'au moins un mètre. Nous avons également assisté à une perte de biodiversité ainsi qu'à une augmentation des événements météorologiques inattendus.

Nous avons pris des mesures pour réduire les effets néfastes de ces évolutions négatives. À partir de 2004, nous avons transformé l'ensemble de notre exploitation en abandonnant le système de culture annuel basé sur la charrue. Dans un premier temps, nous avons adopté les façons culturales réduites, qui nous ont amenés à travailler le sol superficiellement juste après la récolte pour établir une culture de couverture. Depuis, nous sommes allés encore plus loin, en passant aux prairies permanentes, retournant ainsi à l'habitat naturel de l'écosystème du paysage que nous gérons, tout en gagnant de l'argent. C'est ainsi que nous comprenons et vivons l'« agriculture régénératrice » dans nos circonstances spécifiques : environnementales, financières, politiques, réglementaires et ainsi de suite.

Cette approche respectueuse du climat s'avère excellente pour notre exploitation, parfaitement adaptée au système naturel dans lequel nous sommes intégrés et plus résistante aux variations météorologiques. Dans le même temps, nous éliminons le dioxyde de carbone de l'atmosphère et le stockons dans notre sol. C'est la clé pour atténuer le changement climatique tout en augmentant la résilience de notre activité agricole grâce à une meilleure santé des sols et en nous adaptant aux effets du changement climatique que nous ressentons et voyons déjà sur notre exploitation.

Mais il ne s'agit pas seulement de durabilité environnementale. Il s'agit également de durabilité économique : en faisant passer notre ferme d'une exploitation exposée au climat à une exploitation intelligente sur le plan climatique, notre rentabilité a augmenté grâce à des flux de trésorerie positifs et à une réduction significative des risques.

Il s'avère que nous n'avons pas à choisir entre un environnement sain et des fermes saines. Si nous adoptons des approches judicieuses, nous pouvons avoir les deux.

Cette expérience de première main me permet de raconter une histoire importante lors de rassemblements comme la COP26 : bien que les agriculteurs soient souvent perçus comme faisant partie du problème du changement climatique, nous sommes en fait une partie essentielle de la solution. La solution se trouve littéralement sous nos pieds, dans le sol, comme le savent tous les agriculteurs du monde.

Tel était mon principal message lors de la COP26, à laquelle j'ai participé en tant que responsable de l'agriculture régénérative au sein de l'Équipe des Champions du Climat. Dans ce rôle, j'ai aidé des agriculteurs du monde entier à présenter leurs actions aux négociateurs et autres parties prenantes, et j'ai eu l'occasion de présenter ce que nous faisons exactement dans notre ferme en Pologne.

Comme ce n'était pas la première fois que j'avais l'occasion de rencontrer diverses parties prenantes, y compris des décideurs politiques et des négociateurs du climat, je n'ai pas été surpris de constater que de nombreux participants à la conférence étaient disposés à écouter le travail des agriculteurs et à en tirer des enseignements. Ils sont prêts à parler aux agriculteurs et à nous comprendre. Une fois qu'ils nous comprennent, ils nous apprécient.

Voici trois choses utiles que les agriculteurs de presque tous les pays peuvent faire dès maintenant :

• Premièrement, éviter les émissions lorsque c'est possible. S'attaquer au gaspillage alimentaire, afin de ne pas émettre de gaz à effet de serre pour les aliments qui ne sont pas consommés, est un domaine d'action clé.

• Deuxièmement, réduire les émissions autant que possible. Une mesure possible consiste à utiliser des applications d'engrais à taux variable pour réduire le ruissellement des engrais.

• Troisièmement, augmenter la séquestration du carbone. L'amélioration de la santé des sols grâce au semis direct et à d'autres pratiques, comme le développement de puits de carbone (tourbières, biomasse ligneuse), nous aidera à retirer le carbone du ciel au-dessus de nos têtes pour le stocker dans le sol sous nos pieds.

Le changement climatique est réel. Si nous pouvons prendre – et prenons – des mesures pour l'atténuer, l'adaptation est tout aussi importante. Les agriculteurs ont fait, font et feront les deux.

En tant qu'agriculteurs, nous sommes nos meilleurs défenseurs. Nous devons raconter nos histoires à chaque occasion, y compris dans les forums de l'ONU. Ce n'est qu'ainsi que nous pourrons faire prévaloir des solutions ancrées dans la réalité de la ferme et la science.

S'il est important de défendre et de faire entendre sa voix dans les principaux forums mondiaux, ce sont nos actions au niveau des exploitations qui continueront à avoir un impact.

Le moment est venu. Nous devons passer de la délibération à la réalisation. Le changement climatique ne nous attendra pas. Nous devons agir. Agissons maintenant.

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* Mateusz est un agriculteur pratiquant l'agriculture régénératrice de Pologne dont la mission est de placer les agriculteurs au centre des efforts d'atténuation et d'adaptation au changement climatique de manière rentable. Dans le cadre de la transition de son exploitation familiale vers une agriculture avec les cycles de la nature plutôt que contre eux, la ferme de 700 hectares est en prairie permanente depuis 2008. Elle produit du foin de la plus haute qualité pour l'exportation et le marché intérieur. Avec son frère Paweł, Mateusz a créé les European Carbon Farmers, une entreprise qui promeut la carboculture, développe des véhicules de financement climatique et travaille à la transformation de la politique agricole – en particulier la PAC (politique agricole commune) de l'Union Européenne – en passant de paiements fondés sur l'action à des paiements fondés sur les résultats, centrés sur le maintien et l'amélioration du carbone dans le sol. Mateusz est activement impliqué dans le travail de la COP26 de la CCNUCC – Climate Champions, où il est Regenerative Agriculture Fellow. Il gère également le programme d'agriculture régénératrice en Pologne par le biais d'EIT Food.

Source : Showcasing Farmers’ Climate-Smart Actions at COP26 – Global Farmer Network