L'Allemagne exportera aussi ses lubies « agricoles » dans les pays en développement
Mme Svenja Schulze
Début février 2022, j'avais publié un bref article fort pertinent – comme d'habitude – de Willi l'agriculteur, « L'Allemagne championne du monde de l'exportation... des problèmes ».
Nous en prenons la mesure à l'heure où j'écris et où le monde tente de définir une politique de fermeté envers une Russie qui a envahi l'Ukraine : l'Allemagne a sacrifié son nucléaire et mis en place un système de production d'électricité Janus (en Belgique, on songe à faire pareil...).
Le côté pile, ce sont les renouvelables tant vantés – remarque incidente : le programme commun de gouvernement de la coalition « feux tricolores » prévoit de consacrer... 2 % du territoire aux éoliennes.
(Source)
Le côté face, ce sont les centrales à combustibles fossiles devant servir de backup les jours sans vent ou à vent insuffisant. Donc le gaz russe, mais aussi – on vient de le découvrir grâce au Vice-chancelier (vert) Robert Habeck – le charbon russe, lequel compte pour moitié dans les importations allemandes :
« L’Allemagne dépend à 50% des importations de charbon russe […] Si nous n’avons pas ce charbon, les centrales électriques au charbon en Allemagne ne pourront pas fonctionner. »
(Source)
Ne jetons pas la pierre à notre voisin. Nous sommes tous interdépendants, et dépendants de la Russie (comme elle dépend aussi de nous). Et Mme Analena Baerbock, Ministre (verte) des Affaires Étrangères, a raison de préconiser la prudence :
« "Nous ferons tout ce que nous pourrons pour arrêter cette folie, a-t-elle dit à la télévision publique ARD, évoquant l’attaque russe en Ukraine. Mais nous devons également nous assurer que nous ne choisissons pas des instruments dont Poutine finirait par se moquer parce qu’ils nous frapperaient beaucoup plus fort." »
Si certains politiciens allemands commencent à mesurer l'ampleur du problème, y compris pour la Bundeswehr, d'autres poursuivent, tranquilles comme Baptiste, dans l'exportation de problèmes.
C'est la cas en particulier de Mme Svenja Schulze (SPD), ancienne Ministre fédérale de l'Environnement, de la Protection de la Nature et de la Sécurité Nucléaire (2018-2021) et maintenant Ministre fédérale de la Coopération Économique et du Développement.
Dans « Entwicklungsministerin Schulze stellt Gates-Projekt infrage » (la ministre du développement Schulze remet en question le projet Gates), le Spiegel nous apprend qu'elle envisage de couper la contribution allemande de 25 millions d'euros à l'AGRA, l'Alliance pour une Révolution Verte en Afrique.
Bill Gates, voilà l'ennemi ? Peut-être. Rappelons toutefois que l'organisation a été fondée en 2006 par son premier président, M. Kofi Annan, ancien Secrétaire Général des Nations Unies, que la Fondation Bill et Melinda Gates n'est pas la seule à la financer .
Le partenariat pour une transformation agricole inclusive en Afrique – PIATA (Source). La France n'est évidemment pas de la partie. Grâce notamment à la mandature Hollande et à M. Pascal Canfin – qui s'en est vanté auprès de ses potes d'alors, EÉLV – la France ne finance pas de projets impliquant des OGM.
Les partenaires financiers (Source)
Elle a également annoncé qu'elle préparait, en collaboration avec le Ministère de l'Alimentation et de l'Agriculture, une interdiction d'exportation des pesticides interdits dans l'UE. Rien de bien neuf, sauf peut-être que l'Allemagne a aussi des ambitions d'être le premier de la classe : cela fait quelque temps que cette superbe idée germe aussi à Bruxelles.
Les Chinois, Indiens, etc. seront contents : quand, par exemple, les Africains auront besoin d'un insecticide efficace contre les criquets, nous, Européens qui n'avons pas d'usage pour cet insecticide et n'avons donc pas eu à prendre une décision d'homologation, nous leur répondrons d'aller (se faire) voir ailleurs...
Le Spiegel écrit aussi :
« L'objectif, selon Schulze, doit être une transformation sociale et écologique de l'agriculture. »
Tant pis si les – déjà maigres – récoltes sont anéanties par des parasites ou des maladies et que les gens souffrent de la faim ou de la famine : la société doit être « sociale et écologique »... Du néocolonialisme pur jus...
Publikum (et d'autres) nous livre la philosophie générale dans « Entwicklungsministerin plant Exportverbot für bestimmte Pestizide » (la ministre du développement prépare une interdiction d'exporter certains pesticides) :
« "En Allemagne, nous devrions montrer un exemple bon et crédible en matière de protection de la nature et de la santé", a déclaré Schulze au quotidien "Rheinische Post". »
Pour notre part, nous aimerions avoir une démonstration a priori, et non pas a posteriori sous la forme d'un constat de désastre comme celui de l'énergie, de la crédibilité de l'exemple.
Mais Mme Lembke a aussi envie d'exporter sa conception de l'agriculture... Prenez une grande inspiration !
« D'une manière générale, je ne considère pas comme un modèle commercial acceptable le fait de plonger les petits agriculteurs des pays en développement dans la dépendance en leur fournissant à crédit des semences résistantes et le pesticide qui va avec. »
C'est le discours le plus outrancier des « ONG » qui œuvrent pour le développement... de leur fond de commerce, quoi qu'il en coûte pour le développement et l'amélioration des conditions de vie des populations qu'elles prétendent aider à se développer.
Il s'agit là, bien sûr, des OGM tolérants à certains herbicides (au premier chef le glyphosate). Mais ce sont tous les OGM qui sont visés. Il est sans doute trop compliqué de comprendre que, dans le cas des OGM résistants à des insectes, on diminue la « dépendance » des agriculteurs à l'égard des fournisseurs d'insecticides.
Et pour parfaire le tout :
« Je mettrai également l'accent sur l'agriculture biologique en tant que forme d'agriculture particulièrement durable dans le cadre de la coopération avec les pays partenaires. »
Quel désastre!