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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Du glyphosate mortel dans vos aliments ? Il n'y a aucune raison de paniquer, selon une nouvelle étude

24 Septembre 2021 Publié dans #Alimentation, #Glyphosate (Roundup)

Du glyphosate mortel dans vos aliments ? Il n'y a aucune raison de paniquer, selon une nouvelle étude

 

Cameron English*

 

 

Image : Aline Ponce, Pixabay

 

Ce n'est un secret pour personne que le glyphosate, un herbicide, se retrouve dans nos aliments. Mais quel est le risque pour la santé des consommateurs  ? Un nouveau document de synthèse examinant les preuves offre une conclusion rassurante.

 

 

Si vous cherchez « glyphosate dans les aliments », vous tomberez sur une liste interminable d'articles copiés les uns sur les autres, qui mettent tous en garde contre les dangers des céréales, du pain, des biscuits, des aliments pour bébés, des chips, des œufs, de la viande et de tous les autres aliments auxquels vous pouvez penser, contaminés par du désherbant. Le modèle est le suivant : le glyphosate est partout ; il provoque tout, du cancer aux maladies rénales ; vous devez acheter des produits vérifiés par le Non-GMO Project pour éviter l'herbicide.

 

Voici le premier résultat de ma recherche : « Glyphosate in Food: Complete List of Products and Brands Filled With Dangerous Weed-Killer » (glyphosate dans les aliments : liste complète des produits et des marques remplis de ce dangereux désherbant).

 

Nous avons déjà examiné les allégations selon lesquelles « le glyphosate provoque [insérer une maladie grave ici] », ainsi que les avantages nébuleux d'acheter tout ce qui est commercialisé avec un autocollant « non-OGM » de quelque sorte que ce soit. Aujourd'hui, je veux me concentrer sur une nouvelle étude qui examine l'allégation selon laquelle des quantités dangereuses de glyphosate se retrouvent dans les aliments populaires.

 

Une équipe de scientifiques a évalué les recherches effectuées à ce jour sur le risque que représente l'exposition au glyphosate par l'alimentation. Dans la revue Comprehensive Reviews in Food Science and Food Safety [voir ici sur ce blog], ils sont parvenus à une conclusion qui pourrait surprendre le lecteur moyen de LiveLoveFruit :

 

« Les conclusions des évaluations des risques, fondées sur des modèles alimentaires ou des données sur l'urine, sont que les expositions au glyphosate par les aliments sont bien inférieures à la quantité qui peut être ingérée quotidiennement pendant toute une vie avec une certitude raisonnable d'absence de danger. ».

 

Tous les auteurs sont des employés de Bayer, un important fabricant d'herbicides à base de glyphosate. En gardant à l'esprit que l'entreprise a tout intérêt à défendre son produit, examinons les résultats de l'article, en veillant à vérifier s'ils s'écartent ou non des conclusions d'autres analyses documentaires de même ampleur.

 

 

 

 

Mesure des pesticides dans les aliments

 

Tout d'abord, comment les scientifiques mesurent-ils les résidus de pesticides dans les aliments et comment déterminent-ils si les consommateurs sont exposés à un risque pour leur santé  ? Chaque pesticide utilisé par les agriculteurs américains est soumis à un examen rigoureux avant d'être approuvé par l'Agence de Protection de l'Environnement (EPA). Ce processus comporte deux aspects essentiels en ce qui concerne la sécurité alimentaire.

 

À partir de données issues d'études toxicologiques sur des animaux, l'EPA détermine l'exposition maximale à laquelle un produit chimique n'a pas d'impact négatif sur la santé, la dose sans effet nocif observé, DSENO ou NOAEL (no observed adverse effect level). L'agence divise ensuite ce chiffre par un facteur de sécurité de 100 à 1.000 pour obtenir une dose de référence (rfD – reference dose) très prudente. L'EPA fixe ensuite une tolérance pour chaque pesticide qu'elle approuve, qui, comme l'explique l'agence, « est le niveau maximal admissible pour les résidus de pesticides autorisés dans ou sur l'alimentation humaine et animale ».

 

La tolérance est utilisée pour garantir que les utilisateurs de pesticides suivent les instructions d'application. Le Département Américain de l'Agriculture (USDA) et la Food and Drug Administration (FDA) testent périodiquement des échantillons d'aliments pour s'assurer que les niveaux de résidus sont inférieurs à la tolérance. Les deux agences peuvent confisquer les produits alimentaires qui violent cette norme.

 

Les organismes de réglementation du monde entier suivent une version ou une autre de ce processus d'examen approfondi, et leurs résultats sont souvent validés ultérieurement par des études menées par des groupes de recherche indépendants. Le nouvel article résume les résultats de la manière suivante :

 

« Les enquêtes réglementaires sont un outil important pour assurer la vigilance phytosanitaire après la commercialisation et jouent un rôle important dans l'évaluation réglementaire des risques [...] Les enquêtes en cours sur les résidus de glyphosate, en commençant par les échantillons collectés en 2010 (EFSA, 2013) et plus récemment avec les échantillons de 2018 (EFSA, 2020), suggèrent un degré élevé de conformité et ne fournissent aucune indication que les résidus ont dépassé les niveaux réglementaires. Les études sur les résidus réalisées par des enquêteurs d'organismes non réglementaires constituent des données supplémentaires utiles au-delà des conclusions des organismes de réglementation. »

 

Des organisations militantes, notamment l'Environmental Working Group (EWG), financé par l'industrie biologique, protesteront et affirmeront que ce régime réglementaire conservateur est inadéquat. Sachant que son public cible, les consommateurs inquiets, n'est pas familier avec les subtilités de la réglementation fédérale sur les pesticides, l'EWG fixe des normes artificiellement basses pour les résidus de pesticides dans les aliments. Il déclare ensuite au public que les scientifiques de l'EWG détectent des niveaux de résidus de pesticides dans les aliments qui ne sont pas « protecteurs de la santé des enfants... ».

 

Comparez les normes employées par les agences de sécurité alimentaire du monde entier à la métrique approximative d'EWG. La première est conçue pour établir des estimations raisonnables de l'exposition sans danger aux pesticides ; la seconde est destinée à susciter l'incertitude et la peur chez les parents qui veulent protéger leurs enfants.

 

 

Des reportages bâclés

 

La nouvelle étude s'est également penchée sur la manière dont la presse relaie les informations relatives à la sécurité des pesticides auprès des consommateurs. Il s'avère que ce que les journalistes omettent dans leurs articles est tout aussi important que ce qu'ils y mettent. Ou, comme le disent les auteurs, ces articles « manquent de détails qui handicapent l'interprétation précise des résultats... ».

 

Par exemple, les reportages des médias populaires sur la présence de glyphosate dans les aliments ne comportent généralement aucune analyse de la méthode de test utilisée et de la fiabilité de ses résultats. Cela prive les lecteurs de la possibilité de vérifier les conclusions qu'ils voient dans les reportages, ce qui est nécessaire compte tenu des antécédents douteux des médias en matière de sécurité alimentaire. L'auteur principal de l'étude, le Dr John Vicini, a expliqué le problème dans un courriel :

 

« Si vous avez subi un test de glycémie ou de Covid-19 dans un hôpital, vous aimeriez savoir que l'échantillon a été prélevé correctement, que les antécédents médicaux et les objectifs associés au patient ont été respectés, que l'échantillon a été correctement stocké, que le dosage [test] utilisé a été correctement effectué par un analyste qualifié, que l'instrumentation a été correctement entretenue et étalonnée et que le résultat a été correctement interprété.

 

Si l'on vous dit que votre glycémie est de 300 ou que votre test de covid est négatif, vous devriez avoir l'assurance que les résultats sont exacts et recevoir une conclusion appropriée sur la signification de ces chiffres. Cette attente devrait être la même pour les études de détection de résidus réalisées sur des pesticides, comme le glyphosate. »

 

Pour compliquer encore l'affaire, les journalistes utilisent souvent un langage ambigu qui laisse entendre qu'il existe un risque important alors qu'il est en réalité très faible. Malheureusement, de nombreux articles de la presse populaire sont truffés de mots exprimant un jugement de valeur comme « élevé » ou « contaminé »« , écrivent les auteurs de l'étude. En bref, ce manque d'informations sur les tests signifie que les journalistes décrivent souvent des quantités insignifiantes de résidus de pesticides dans les aliments comme étant trop élevées et omettent de dire comment les chiffres ont été obtenus.

 

 

Réflexions finales : contrer la propagande

 

Si les activistes et les journalistes méritent notre scepticisme pour avoir induit tout le monde en erreur au sujet des pesticides, il y a un groupe qui pourrait faire beaucoup pour contrer l'alarmisme : les prestataires de soins de santé. « Les personnes vers lesquelles les consommateurs se tournent pour obtenir des conseils en matière de sécurité alimentaire (par exemple, les professionnels de la santé, les nutritionnistes et les diététiciens) devraient disposer des informations scientifiquement équilibrées nécessaires pour aborder le sujet des résidus [de pesticides] », affirment les auteurs. « Cependant, les programmes de formation actuels de ces professions comportent peu, voire pas du tout, de cours sur les sujets pertinents. » Comme l'a dit un médecin sur Twitter :

 

 

Hep #medtwitter-

Si vous vous demandez pourquoi #AgTwitter doute de vos allégations sur le vaccin contre la Covid – peut-être devrions-nous évaluer les allégation que font les médecins sur les #pesticides & les #OGM...

Si vous êtes intéressé par la promotion de la vérité et de la santé – alors dialoguons.

 

 

Ce n'est pas une attaque contre les prestataires de soins de santé ; leur travail est inestimable. Mais s'ils ne savent pas comment les régulateurs évaluent la sécurité des pesticides, ils ne peuvent pas transmettre d'informations fiables à leurs patients. Cette situation est révélatrice d'un problème beaucoup plus vaste. Si les blogueurs de LiveLoveFruit et de nombreux médecins hautement qualifiés sont mal informés, alors la plupart des gens en lien avec eux ont probablement la même compréhension limitée. Et cela signifie que la propagande sur les pesticides de l'EWG et d'autres groupes ne cessera pas tant que la société ne développera pas une plus grande culture scientifique.

 

___________

 

* Cameron English, directeur de Bioscience

 

Cameron English est auteur, éditeur et co-animateur du podcast Science Facts and Fallacies. Avant de rejoindre l'ACSH, il était rédacteur en chef du Genetic Literacy Project.

 

Source : Deadly Glyphosate In Your Food? There's No Reason To Panic, New Review Shows | American Council on Science and Health (acsh.org)

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