Covid-19, la désinformation de Laurent Mucchielli et Mediapart... et le CNRS
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Il y a un aphorisme à propos du mensonge et de la vérité que l'on prête généralement à Mark Twain ou Winston Churchill. La première apparition, en plus détaillé – du prédicateur londonien Charles Haddon Spurgeon, qui cite un vieux proverbe, en 1855 – semble être la suivante :
« Si vous voulez que la vérité fasse le tour du monde, vous devez louer un train express pour la tirer. Mais si vous voulez qu'un mensonge fasse le tour du monde, il volera ; il est léger comme une plume et un souffle le portera. L’ancien proverbe dit bien : "Un mensonge fera le tour du monde pendant que la vérité chausse ses bottes." »
Jonathan Swift avait écrit en 1710, dans « L'Art du mensonge politique » :
« De plus, comme l'écrivain le plus vil a ses lecteurs, le plus grand menteur a ses croyants ; et il arrive souvent que si un mensonge n'est cru que pendant une heure, il a fait son œuvre, et il n'y a plus d'autre occasion de le faire. Le mensonge s'envole et la vérité le suit en boitant, de sorte que lorsque les hommes viennent à ne plus être trompés, il est trop tard ; la plaisanterie est terminée et le conte a eu son effet. »
Quoi de plus vrai en cette période d'épidémie de Covid-19, de controverses sur la vaccination – qui, pourtant, a fait brillamment ses preuves – et sur le « passe sanitaire » – une sorte de compromis entre la liberté totale de mouvement – et de contamination – et le confinement ? Étant entendu qu'on peut légitimement s'interroger sur la politique du Gouvernement et les dispositions adoptées par le Parlement (à l'heure où j'écris le verdict du Conseil Constitutionnel est encore attendu).
Quoi de plus vrai en ces temps modernes de médias irresponsables, râclant les caniveaux à la recherche de merdes malodorantes susceptibles de faire de l'audience ou poursuivant insidieusement des objectifs sociopolitiques, et de réseaux sociaux dont on rappellera ce mot cruel, mais si juste, d'Umberto Eco :
« Les réseaux sociaux ont donné le droit de parole à des légions d'imbéciles qui, auparavant, ne faisaient que discuter au bar après un verre de vin, sans causer de tort à la collectivité. On les faisait taire tout de suite, alors qu'aujourd'hui ils ont le même droit de parole qu'un prix Nobel. C'est l'invasion des imbéciles. »
Certes, les réseaux sociaux sont plus complexes et offrent aussi de somptueuses perles d'information. Umberto Eco avait ajouté :
« La télévision a promu l'idiot du village, auquel le spectateur se sentait supérieur. Le drame d'Internet, c'est qu'il est en train de faire de l'idiot du village un porteur de vérité. »
Mediapart a créé sur son site un « club » qui héberge des blogs de lecteurs. Les miens de lecteurs se sont sans doute rendu compte que je cite bien souvent celui de M. Yann Kindo en raison de la convergence de nos vues sur les sujets qui alimentent nos deux blogs.
Il y a aussi celui de M. – Oups ! du Dr, Oups ! du docteur en sociologie – Laurent Mucchielli.
Depuis le 29 mars 2020 et « Derrière la polémique Raoult, médiocrité médiatique et intérêts pharmaceutiques », ce blog se consacre exclusivement à des thèmes liés à la Covid sous des angles que l'on peut qualifier de particulièrement problématiques. C'est illustré par le titre précité, ou encore par « Covid-19, vaccins expérimentaux, stratégie vaccinale : entretien avec Christian Vélot ». Un Christian Vélot aux thèses – pour rester poli – très controversées (voir sur ce site ici et ici).
Une livraison récente, « La vaccination Covid à l’épreuve des faits. 2ème partie : une mortalité inédite » a fait sortir bien des rationalistes de leurs gonds. En chapô :
« La pharmacovigilance des vaccins anti-covid est déniée car elle menace l’idéologie de la vaccination intégrale portée par les industries pharmaceutiques, les gouvernements et les principaux médias. Cette vaccination de masse conduit pourtant à une mortalité inédite dans l’histoire de la médecine moderne. Il y a urgence à la suspendre pour évaluer la balance bénéfice/risque au cas par cas. »
C'est une œuvre collective qui illustre le fait que la possession de beaux parchemins académiques ne fait pas obstacle, toujours pour rester poli, aux dérives :
« Laurent MUCCHIELLI (sociologue, directeur de recherche au CNRS), Hélène BANOUN (pharmacien biologiste, PhD, ancienne chargée de recherches à l’INSERM), Emmanuelle DARLES (maîtresse de conférences en informatique à Aix-Marseille Université), Éric MENAT (docteur en médecine, médecin généraliste), Vincent PAVAN (maître de conférences en mathématique à Aix-Marseille Université) & Amine UMLIL (pharmacien des hôpitaux, praticien hospitalier, unité de « pharmacovigilance/CTIAP (centre territorial d’information indépendante et d’avis pharmaceutiques)/Coordination des vigilances sanitaires » du Centre hospitalier de Cholet). »
Car lisez bien ce résumé : qu'exploitent – mal, volontairement ou à l'insu de leur plein gré – Laurent Mucchielli et ses co-auteurs pour leur article ? Les données de la pharmacovigilance !
Les Vaxxeuses ont publié le 31 juillet 2021 (le lendemain de la mise en ligne de l'article incriminé) « un débunk collectif, réalisé par Les Vaxxeuses, Stop à la Propagande Anti Vaccins, et Vaccins France-Informations et Discussions ». En conclusion de l'analyse d'un premier article :
« En conclusion, en usant d’un argument d’autorité en tant que chercheur CNRS, Laurent Mucchielli se positionne du côté des "pro-virus", et participe activement à sa diffusion, et augmente le risque de voir émerger des variants à risque y compris pour les vaccinés. »
AFPFactuel a aussi produit un « Une démonstration d'un sociologue sur la mortalité des vaccins ? Attention à l'interprétation des chiffres » le 4 août 2021. En résumé :
« Dans un billet de blog hébergé un temps sur le site de Mediapart, et dépublié le 4 août, le sociologue Laurent Mucchielli affirme que la vaccination contre le Covid-19 est à l'origine d'une "mortalité inédite" en France, et responsable de "près de 1.000 morts potentiellement". Son billet repose sur des données de pharmacovigilance qui sont des signalements de décès postérieurs à une vaccination contre le Covid. Pour une large majorité ces décès n'ont pas été à ce jour imputés à la vaccination. Pourtant, le billet est repris à tort comme une preuve du décès "d'un millier de personnes" à cause des vaccins. »
Un autre démontage a été proposé sur un fil Twitter. Voici deux gazouillis qui démontrent par l'ironie l'ampleur du désastre (notez les références au CNRS et à l'INSERM qui apparaissent comme des cautions pour l'article de M. Laurent Mucchielli et co-auteurs).
D'aucuns se sont insurgés et ont interpellé Mediapart pour qu'il retire l'article. Voici un exemple, où c'est le taulier de Mediapart qui est interrogé :
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Bon nombre de demandes ont été faites en application de la charte de participation au blog :
« Fausses nouvelles
Toutes les opinions peuvent être représentées sur Mediapart, dans le cadre de la loi et de la présente Charte de participation.
Les fausses nouvelles, utilisant la désinformation et la propagande mensongère, vantant et faisant la promotion de théories conspirationnistes, de sites complotistes, de montages mensongers, les liens vers des sites diffusant les propos ci-dessus n’ont pas leur place sur Mediapart. »
Exemple d'interpellation – source)
Un autre argument invoqué à plusieurs reprises est l'ambiguïté visuelle entre le Mediapart « officiel » et le blog de Mediapart. Illustration par un gazouillis de M. Gilbert Collard :
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La direction de Mediapart s'est rebiffée dans un premier temps, le 2 août 2021, avec des arguments qui, selon l'humeur, font hurler de rire ou de rage :
« Un billet de blog fait polémique depuis quelques jours, nous tenons donc à rappeler que ces billets de blog sont écrits par des abonné·es de Mediapart, dans un espace qui leur est dédié afin de faire vivre le débat, y compris le débat scientifique.
Votre journal @Mediapart s’accompagne d’un espace participatif, le Club, qui permet d’élargir les sujets de discussions et de faire vivre le débat démocratique. L’expression y est libre, dans les limites de notre Charte de participation. »
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Il va sans dire que les réactions ont été vives. En voici les premières :
Et la mienne :
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Mais la nuit – ou plus prosaïquement le poids du nombre de protestataires, certains menaçant de résilier leur abonnement – a porté conseil. Voici donc « Notre santé face au Covid : vrais débats et fausses sciences »
En résumé :
« Unique dans la presse, le Club participatif de Mediapart fait vivre le débat sur la politique sanitaire durant la pandémie du Covid-19, d’autant plus légitime face à une impéritie gouvernementale largement documentée par nos enquêtes. Mais il exclut, dans le respect de notre Charte, la diffusion de fausses nouvelles, y compris sous l’alibi de démonstrations prétendument scientifiques, dont l’impact peut être dommageable pour la santé de tout un chacun. Ce qui nous a amené à dépublier un billet du sociologue Laurent Mucchielli. Nos explications. »
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Bien laborieuses les explications, avec une grosse louche de fatuité et d'autosatisfaction...
La « diffusion de fausses nouvelles, y compris sous l’alibi de démonstrations prétendument scientifiques » est un formidable désaveu de la réaction précédente. Mais ne gâchons pas le plaisir du constat que l'obscurantisme peut faire place à la rationalité. Voici l'alouette au milieu du gros pavé de cheval :
« Après avoir pris le temps de la réflexion, nourri d’échanges collectifs de notre équipe où les avis étaient partagés, nous sommes arrivés à la conclusion que ce dernier billet de Laurent Mucchielli contrevenait à notre Charte de participation qui prohibe la diffusion de fausses nouvelles. Nous l’avons donc dépublié en même temps que nous mettions en ligne cette explication. »
Le Centre National de la Recherche Scientifique – de même que Mme Frédérique Vidal, ministre de tutelle – a aussi été interpellé.
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On peut concevoir que le CNRS est un paquebot peu manœuvrable, ou encore que selon l'aphorisme d'Henri Queuille, il n'est pas de problème dont une absence de solution ne finisse par venir à bout.
Le CNRS a aussi été relancé :
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Mais le CNRS a fini par répondre le 4 août 2021 au soir, une célérité qui semble relever de l'exploit. Malheureusement, la réponse – service minimum – est loin d'être à la hauteur des forfaits et des enjeux.
Un simple gazouillis alors que, par exemple, un communiqué de presse aurait été plus approprié.
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Une simple prise de distance, alors que l'on aurait pu recourir à bien d'autres griefs tirés de la Charte de Déontologie du CNRS... Mais il est vrai que le CNRS « abrite » aussi d'autres personnages qui se livrent à des croisades personnelles en se prévalant de leur appartenance à l'institution. Ou de la Charte Française de Déontologie des Métiers de la Recherche :
« La liberté d'expression et d'opinion s'applique dans le cadre légal de la fonction publique, avec une obligation de réserve, de confidentialité, de neutralité et de transparence des liens d’intérêt. Le chercheur exprimera à chaque occasion à quel titre, personnel ou institutionnel, il intervient et distinguera ce qui appartient au domaine de son expertise scientifique et ce qui est fondé sur des convictions personnelles.
La communication sur les réseaux sociaux doit obéir aux mêmes règles. »
En l'occurrence, écrire que « Laurent Mucchielli est sociologue au CNRS mais s'exprime à titre personnel sur la vaccination anti-Covid » n'était pas suffisant : depuis plus d'un an, il s'exprime en faisant valoir sa position de directeur de recherches au CNRS, sur des sujets qui ne relèvent pas de son domaine d'expertise – à preuve... – sur la base de convictions personnelles.
Et, en quelque sorte cerise sur le gâteau, il diffuse des « informations » qui sont fausses... en se prévalant, répétons-le, de son appartenance à un organisme de recherche scientifique.
Comme le montre ce fil Twitter, en particulier ces gazouillis, l'article au centre de la polémique n'est que la cerise sur un gâteau bien frelaté. Incidemment : c'est de quelqu'un du CNRS qui s'exprime à titre personnel, sans faire état de son appartenance à la maison dans sa biographie :
Mediapart – média classé à la gauche bien à gauche – a donc dépublié l'article contesté – soit dit en passant tout en laissant sur son site d'autres articles tout aussi contestables.
M. Laurent Mucchielli s'est donc adressé à une autre entité, classée sur le plan politique à la droite bien à droite, dont l'intitulé laisse entendre qu'il s'agit d'un journal et qui n'est en réalité qu'un site web. Nous avons nommé France Soir. En fait, il l'avait déjà fait précédemment.
Et France Soir a republié l'article dépublié, après en avoir publié un autre le 30 juillet 2021, mis à jour le 4 août...
Ainsi s'illustre la pas si étrange proximité d'entités censées être de bords politiques opposés, l'une laissant faire dans le cadre d'un « club » et l'autre se posant sans vergogne en disciple des grands désinformateurs de l'histoire...
Ainsi s'illustre aussi l'absence de scrupules d'auteurs et d'une entité propriétaire d'un site Internet dans la diffusion de fausses informations.
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Le Conseil Constitutionnel a rendu sa décision. La loi n'est retoquée que marginalement.
Publiée sur le Blog de Mediapart, une lettre adressée au comité de déontologie du CNRS – il se trouvera peut-être une personne compétente pour la transmettre au Comité d'éthique du CNRS (COMETS) :
« [...]
Comme vous pourrez le constater, Laurent Mucchielli manipule des données statistiques de façon flagrante, laissant croire que les décès recensés seraient directement liés à la vaccination contre le covid-19 alors que ce n'est ABSOLUMENT pas ce que montre l'étude, qui ne fait que référencer des évènements survenus suite à des vaccinations sans jamais établir de liens de cause à effets et pour cause : il n'y a en pas. Mr Mucchielli en arrive ainsi à laisser penser, entre autres fausses informations, que 761 décès seraient liés au vaccin Pfizer ce qui est une contre-vérité scandaleuse. Je vous laisse découvrir les autres mensonges et manipulations dans ce billet de blog par vous-même.
Mr Mucchielli se présente sur son blog comme membre du CNRS et met en avant son statut pour valider son propos et se donner un crédit, des compétences, une autorité et évidemment une déontologie qu'il bafoue et contredit à chaque paragraphe, et tout cela dans un domaine - l'épidémiologie - qui lui est totalement étranger.
Ce faisant il salit l'image même de votre institution, sa neutralité, son intégrité scientifique et sa réputation, dans une période particulièrement troublée et à des fins d'agitation politique et de manipulation d'une opinion déjà largement désorientée par des rumeurs, fausses informations et récupérations en tous genres.
Cela nécessite - au bas mot - un rappel à l'ordre de la part de ses pairs. »
Pour sourire ou rire: « Vaccin et météo : la science selon Laurent Mucchielli ».