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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Quatre leçons que l'Occident peut tirer de la réponse africaine à la Covid

28 Mai 2021 , Rédigé par Seppi Publié dans #Covid-19

Quatre leçons que l'Occident peut tirer de la réponse africaine à la Covid

 

Joseph Opoku Gakpo*

 

 

 

 

Alors que les médias rapportaient que le nombre de décès dus à la Covid-19 dans le monde avait atteint la barre des 3 millions, cette question m'a frappé : comment l'Afrique a-t-elle défié (du moins, jusqu'à présent) les prédictions « apocalyptiques » selon lesquelles des millions de personnes allaient mourir sur le continent de la maladie à coronavirus ?

 

La modélisation réalisée par l'Imperial College de Londres pour la Commission Économique des Nations Unies pour l'Afrique prévoyait en avril 2020 que l'Afrique enregistrerait au moins 300.000 décès dus à la Covid-19 de cette date à la fin de l'année, les scénarios les plus pessimistes prévoyant que quelque 3,3 millions d'Africains succomberaient au virus avant la fin de 2020. Cette prévision n'était pas exagérée, car le continent possède certains des systèmes de santé les plus faibles et des infrastructures de soins les plus délabrées au monde. En outre, le nombre de médecins par habitant est l'un des plus faibles au monde.

 

Pourtant, l'Afrique a réussi à défier toutes les règles de l'analyse des données et à prouver que les projections scientifiques logiques étaient fausses – du moins, pour l'instant. Certes, le continent n'est pas encore sorti de l'auberge. La bataille n'est pas terminée, et il y a des chances que la « prophétie » ne fasse que défier les délais qui lui sont impartis et ne soit pas nécessairement fausse. Mais quand on sait que l'Afrique a enregistré 117.411 décès dus à la Covid-19, soit environ 3,9 % du total mondial, alors qu'elle abrite environ 17 % de la population mondiale, il est clair que le continent s'est bien comporté.

 

Des affirmations non étayées l'attribuent au climat tropical chaud de l'Afrique, à un taux élevé de vaccination contre les maladies infantiles ou même à la grâce de Dieu. D'autres affirment que les chiffres officiels des décès ne sont probablement pas exacts. Mais pour être juste, je pense que le peuple africain mérite au moins un certain crédit pour ses succès relatifs dans la lutte contre la Covid-19. J'ai identifié quatre facteurs qui, selon moi, ont contribué à maintenir le taux de mortalité à un faible niveau et qui offrent des leçons à tirer pour l'Occident.

 

 

1. Une réponse rapide des gouvernements.

 

Avant même que la majorité des pays du continent n'enregistrent leurs premiers cas de Covid-19, tout le monde s'est mis en état d'alerte. Des mesures de contrôle strictes ont été imposées, notamment des restrictions sur les voyages internationaux, la fermeture des écoles, l'annulation d'événements publics et la limitation des rassemblements. Une étude publiée dans le Lancet montre qu'environ 72 % des pays africains ont mis en place leur première série d'au moins cinq mesures de contrôle strictes de la Covid-19 environ 15 jours avant le signalement des premiers cas. Les conséquences négatives sur leurs économies ont été terribles et certains gouvernements ont essuyé des critiques de plus en plus vives, car on a pu estimer qu'ils avaient réagi de manière excessive. Je ne suis pas d'accord. Ils n'ont réagi que de manière tactique. Dans une bataille, face à un ennemi inconnu que vous ne pouvez pas prévoir, vous vous taisez pour élaborer une stratégie, puis vous ripostez en position de force. Ce n'était pas le cas sur d'autres continents comme l'Europe et l'Amérique du Sud.

 

2. La Covid-19 a été traitée comme une crise nationale, pas comme un enjeu politique.

 

En Afrique, nous aimons la politique. Mais nous aimons encore plus notre nourriture et nos familles. Ainsi, lorsque la Covid-19 a conduit la mort à notre porte, nous avons mis de côté ce que nos tendances politiques nous incitaient à croire et l'avons affrontée comme un tueur potentiel. On ne peut pas en dire autant de la façon dont les choses se sont passées aux États-Unis, par exemple. Une enquête réalisée par le Pew Research Center en juillet 2020 a révélé le grand écart entre la façon dont les Républicains et les Démocrates considéraient la menace de la Covid pour le système de santé. Il faut savoir que la mesure dans laquelle les gens considèrent la Covid comme une menace détermine la probabilité qu'ils adhèrent aux protocoles de sécurité, y compris le port de masques, la distanciation sociale et les mesures de confinement, entre autres.

 

L'enquête a révélé que si 85 % des personnes de tendance démocrate considéraient le coronavirus comme une menace majeure pour la santé de la population américaine, seuls 46 % des personnes de tendance républicaine étaient du même avis. Les 45 % restants ne la considéraient que comme une menace mineure. Certaines analyses ont attribué le fait que les sympathisants républicains ne considéraient pas la Covid-19 comme une menace majeure pour la santé à leur réticence à mettre l'économie en veilleuse, ce qui pouvait entraîner un faible taux d'approbation du GOP et du Président. Comme l'a déclaré le Dr Sandro Galea, doyen de l'École de Santé Publique de l'Université de Boston, dans une interview accordée à fivethirtyeight.com, « la conversation nationale sur notre comportement pendant cette pandémie a été tellement empreinte par le clivage partisan qu'il devnait impossible de parler rationnellement des risques que nous sommes ou ne sommes pas prêts à tolérer. »

 

La Covid-19 a également été un enjeu politique en Afrique. Les opposants politiques se sont servis de la pandémie pour se démolir mutuellement et marquer des points politiques. Mais lorsqu'il s'est agi de choisir entre marquer des points politiques et sauver des vies, ils ont choisi la seconde solution. Dans mon pays, le Ghana, une nouvelle loi donnant au président de la République des pouvoirs accrus pour appliquer des restrictions a été farouchement contestée par l'opposition politique qui a employé toutes les stratégies imaginables. Mais en fin de compte, elle a laissé passer la loi pour que le gouvernement puisse garder le contrôle. Jusqu'à présent, moins de 800 personnes sont mortes de la Covid-19 dans un pays d'environ 30 millions d'habitants, selon les chiffres officiels.

 

 

3. En Afrique, les dirigeants ont mené, ou du moins essayé de mener, une campagne de sensibilisation.

 

À l'exception de la Tanzanie, les dirigeants du continent africain ont mené leurs Nations dans la lutte contre la pandémie, comme on l'attend d'eux. Ils n'ont pas mené en restant en retrait. Les dirigeants ont soutenu publiquement les mesures prises par les responsables de la santé pour ralentir la propagation du virus, même s'ils n'étaient pas d'accord avec les tactiques employées, car ils étaient axés sur le bien public. Ainsi, les citoyens ne recevaient pas de messages contradictoires ou d'encouragement à défier les conseils de santé publique. Cela a évidemment fait une grande différence. Comparez cela aux États-Unis, par exemple, où ce n'est que le 11 juillet 2020, soit trois mois après que les organismes de santé publique ont recommandé l'utilisation de masques, que le Président a commencé à porter des masques en public.

 

 

4. La réponse de l'Afrique à la Covid-19 a été mieux coordonnée.

 

Aux États-Unis, des centaines d'escarmouches ont eu lieu dans tout le pays, les entités locales, étatiques et fédérales n'étant pas d'accord sur les plans de réponse à la Covid-19. Pour ne citer qu'un exemple, le maire démocrate d'Atlanta, en Géorgie, a été poursuivi par le gouverneur républicain après avoir imposé des restrictions aux entreprises et rendu obligatoire le port du masque. En temps de paix et de tranquillité, c'est la preuve qu'une grande démocratie fonctionne. Mais en temps de guerre et de pandémie, ces combats sont des distractions. En Afrique, lorsque le président dirige, tout le monde s'aligne. Cela peut être négatif car les présidents se trompent parfois. Mais il semble que cela ait été la clé pour aider l'Afrique à rester concentrée sur les efforts de confinement, réussissant à ralentir la propagation du coronavirus.

 

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* Source : Four lessons the West can learn from Africa's COVID response - Alliance for Science (cornell.edu)

 

 

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A
bizarrement dans cette article n'est pas mentionné qu'en Afrique le Plaquenil est d'un commun comme nul part ailleurs! et pourtant la différence vient de là
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