Le Président Joe Biden se prononce sur les agriculteurs en tant que partenaires de la solution au changement climatique
Nancy Kavazanjian*
Lorsque le Président Biden s'est adressé au Congrès et au pays la semaine dernière, il a fait quelque chose que je n'avais jamais entendu un président faire auparavant : dans un discours sur l'état de l'Union, il a soutenu une pratique agricole spécifique.
Les « cultures de couverture » dont il a parlé sont judicieuses sur le plan agronomique pour les agriculteurs des États-Unis et du monde entier. Elles ont également un sens écologique pour tous ceux qui se préoccupent du climat et de notre environnement.
Dans ma vie d'agricultrice, j'ai entendu de nombreux présidents prononcer des discours. Ils ont fait l'éloge de notre patriotisme et de notre travail acharné. Ils ont souligné nos innovations et nos problèmes sociaux. Bien que ces choses soient bonnes à entendre, elles ressemblent trop souvent à de la propagande politique.
Dans le passé, lorsqu'il arrivait aux présidents d'évoquer les politiques agricoles, ils pouvaient mentionner la politique étrangère ou les exportations agricoles, des questions importantes pour les agriculteurs. Mais généralement, ils s'arrêtaient là.
Ce que les présidents ne font pas – du moins pas selon mon expérience d'auditrice – c'est citer une technique de gestion agricole.
C'est pourtant ce qu'a fait M. Biden en énumérant les moyens qu'il espère mettre en œuvre pour s'attaquer au problème du changement climatique : « Les agriculteurs sèment des cultures de couverture afin de réduire le dioxyde de carbone dans l'air et d'être payés pour le faire. »
Je peux imaginer les questions que se sont posés les Américains ordinaires qui ont regardé le discours à la télévision : que diable sont les cultures de couverture ? Ont-elles bon goût ?
Je répondrai d'abord à la deuxième question : elles ne sont pas récoltées pour être mangées, même si certaines d'entre elles, comme les radis et les navets, ont bon goût !
Alors, que sont-elles ?
Leur objectif principal est de couvrir nos champs de plantes vertes lorsque nous ne cultivons pas nos principales cultures fourragères, alimentaires, énergétiques ou à fibres. Pensez-y comme à des couvertures protégeant nos champs des éléments. Elles protègent contre l'érosion du sol, récupèrent et stockent les nutriments, et permettent aux vers de terre, aux bactéries du sol et aux bons microbes que nous ne pouvons pas voir mais dont nous savons qu'ils sont là, de se développer.
De plus, elles peuvent contribuer à la lutte contre le changement climatique en séquestrant le carbone, comme l'a dit le Président Biden. Et elles font tout cela en protégeant l'environnement et notre précieux sol !
Ici, dans le Wisconsin, mon mari et moi avons commencé à intégrer des cultures de couverture dans notre rotation il y a environ 20 ans. Nous avons d'abord expérimenté différents trèfles, sur les conseils de notre agronome, car nous sommes toujours désireux d'essayer des idées nouvelles et innovantes qui peuvent profiter à notre système agricole. L'établissement de cultures de couverture dans notre région n'est pas la chose la plus facile que nous ayons faite, mais c'est certainement l'une des plus intelligentes pour la santé de notre sol.
L'idée générale est de semer une céréale comme le seigle, ou mieux encore, un mélange de céréales, de légumineuses et de crucifères comme les navets et les radis, après la récolte de la culture principale, afin que les champs ne restent pas nus. Cela est particulièrement important lorsque vous avez des paysages vallonnés, des sols légers ou des champs adjacents à des ruisseaux, des lacs ou d'autres cours d'eau. Mais cela peut être difficile à faire dans les climats nordiques où la saison de végétation se termine avant que nous ayons fini de récolter nos cultures.
Faites une visite virtuelle de ma ferme : vous verrez le paysage vallonné de « drumlins », sculpté il y a des lustres par les glaciers. Avec une relief aussi tourmenté, l'érosion du sol peut être une menace. Les fortes pluies et la fonte des neiges peuvent emporter notre sol, c'est pourquoi nous utilisons des cultures de couverture et des plantations de plantes vivaces pour aider à le maintenir en place. En combinaison avec notre culture sans travail du sol (no till), nous faisons ce que nous savons pour protéger notre sol et les nutriments qu'il contient contre l'érosion.
Les cultures de couverture embellissent même nos champs. Nous incluons souvent des tournesols dans notre mélange de culture de couverture, afin que nos champs soient beaux et visibles pour le public. Certains des plus grands fans de nos cultures de couverture sont nos voisins non-agriculteurs qui organisent des photos de famille dans nos champs !
Les cultures de couverture ne sont pas gratuites : elles peuvent être coûteuses et difficiles à gérer, ce qui peut expliquer pourquoi certains agriculteurs hésitent à les utiliser. Pourtant, nous pensons qu'au fil du temps, notre investissement a été rentabilisé en enrichissant nos sols, en protégeant nos cours d'eau et en produisant de meilleures récoltes. Et les nouvelles technologies et les méthodes d'agriculture de précision contribuent à rendre le processus plus facile.
Tous les agriculteurs s'efforcent de limiter la menace du changement climatique, qu'il s'agisse de réduire le travail du sol, de planter des arbres ou d'utiliser des sources d'énergie alternatives, telles que les carburants renouvelables et les énergies éolienne et solaire. Les cultures de couverture sont une autre excellente stratégie pour séquestrer le carbone dans le sol et construire un système de culture plus résilient, surtout si nous obtenons une aide technique et financière pour compenser une partie des coûts d'adoption et d'établissement de ces cultures.
Ce qui me plaît le plus dans l'approche de M. Biden en matière de changement climatique, c'est que, plutôt que de considérer les agriculteurs comme une partie du problème, il nous voit comme une partie de la solution.
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* Mme Nancy Kavazanjian, Agricultrice, Wisconsin, États-Unis d'Amérique
Mme Nancy Kavazanjian est une agricultrice du Wisconsin qui participe à la gestion des affaires courantes d'une exploitation familiale de 2.000 acres (800 hectares) de cultures en rangs et d'un silo de campagne où l'accent est mis sur la préservation des sols et la gestion des ressources de manière durable. Mme Kavazanjian a grandi dans la banlieue de New York. Aujourd'hui, elle exploite une ferme à Beaver Dam, dans le Wisconsin, avec son mari Charles Hammer. Ensemble, ils ont deux enfants adultes et quatre petits-enfants et participent à des initiatives locales de planification des bassins versants et de l'aménagement du territoire dans leur région.
Source : Presidential Notice of Farmers as Climate Change Solution Partners – Global Farmer Network