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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

« e = m6 Spécial agriculture » : une critique somme toute plaisante sur Arrêt sur Images, un éreintement malodorant chez UFC-Que Choisir

23 Mars 2021 , Rédigé par Seppi Publié dans #critique de l'information, #Activisme

« e = m6 Spécial agriculture » : une critique somme toute plaisante sur Arrêt sur Images, un éreintement malodorant chez UFC-Que Choisir

 

 

(Source)

 

 

L'émission « e = m6 Spécial agriculture : le secret de nos aliments » de M. Olivier Lesgourgues, alias Mac Lesggy, et de son compère Serge Zaka diffusée le 1er mars 2021 par M6 aura été un révélateur de bien des turpitudes.

 

Non, pas dans l'émission ni dans son contenu, mais dans les réactions outrées et outrancières.

 

L'émission se proposait de nous débarrasser de quelques idées reçues – enfin assénées à longueur d'année par des chaînes de télévision qui ont fait de l'agribashing leur spécialité – en allant sur le terrain et en sollicitant des avis d'experts. Et, sacrilège, les comparaisons n'ont pas porté l'agriculture dite « biologique » aux nues, ni voué l'agriculture dite « conventionnelle » (quand ce n'est pas « chimique », « productiviste » ou « industrielle », des insultes dans ce contexte) aux gémonies.

 

Nous avons vu dans « Mais qu'as-tu fait, Mac ? » que des gens « bien intentionnés » – en tout cas « bien-pensants » – se sont précipités pour dire tout le mal qu'ils pensaient de cet exercice : la Fédération Nationale de l'Agriculture Biologique (FNAB) avant même le début de l'émission, et surtout un titulaire de carte de presse de l'ADN dans un « Mac Lesggy pris en flagrant délit de "fabrique d’ignorance" » largement relayé par des titulaires de carte de presse de même obédience.

 

 

Un billet d'humeur sur Arrêt sur Images

 

Il y a eu ensuite un billet d'humeur – parfois mauvaise – sur Arrêt sur Images, « Mac Lesggy : blé, cochons, couvées, et mise en scène ».

 

Ben oui ! Il y a eu des mises en scène puisqu'il s'agissait d'une émission alliant sérieux et divertissement, de quoi attirer 1,8 million de téléspectateur malgré une vive concurrence.

 

Ben non, nous n'avons pas trouvé la même critique à propos de l'infâme Envoyé Spécial sur le glyphosate du 17 janvier 2019. Arrêt sur Images avait plutôt volé au secours des manipulateurs d'opinion, par exemple avec « Glyphosate : combat militant entre envoyé spécial et des journalistes ».

 

Mais nous n'avons aucun problème avec le journalisme militant, à condition bien sûr qu'il soit assumé et – disons – pas trop malhonnête.

 

Dit-on dans e = m6 qu'un élevage de porcs sur trois ne castre pas les mâles ? Arrêt sur Images rétorque :

 

« C’est vrai. Mais on pourrait le dire autrement : dans deux tiers des cas, on castre les cochons à vif. Question de point de vue. »

 

Oui, bien sûr ! Mais aussi à condition de préciser que l'interdiction de la castration à vif a été actée pour la fin de l'année... Les choses ne sont pas simples.

 

Le propos ci-dessus illustre l'aversion d'Arrêt sur Images pour le point de vue et le positionnement (général) de « Mac Lesggy, le savant flou », titre d'un billet assassin d'octobre 2020 qui patauge dans l'ad hominem.

 

Et on le fait savoir dans un article qui aurait pu s'abstenir de verser dans l'ad hominem (les sempiternels « conflits d'intérêts » par exemple). La critique reste cependant, dans l'ensemble, bon enfant avec des pointes d'humour qui ne sont pas pour déplaire.

 

 

 

 

Une tentative d'éreintement malodorant chez UFC-Que Choisir

 

UFC-Que Choisir, une association infiltrée par un lobby du bio qui ne répugne pas à l'ostracisation professionnelle de journalistes « mal-écrivants », a produit une attaque vacharde, à la limite de la malveillance.

 

 

(Source et source)

 

 

Le ressort de « E=M6 spécial agriculture – D'erreurs en oublis » est essentiellement le sophisme de la confusion entre le tout et la partie. Trois erreurs alléguées... ergo le tout ne vaut rien !

 

Et, pour ce faire, rien ne vaut, en plus, le sophisme de l'homme de paille !

 

 

Le cas des pesticides dans (ou pas dans) le blé

 

Dans l'émission, à propos des résidus de pesticides, M. Serge Zaka dit que le consommateur français ne risque rien et Mac Lesggy, que seuls 25 % des échantillons de blé présentent des résidus de pesticides dans l'Union européenne. L'auteure embraye :

 

« Ce que l'on comprend

 

Les produits de l'agriculture conventionnelle sont rarement contaminés par des résidus de pesticides, et leur consommation ne présente pas de risque pour la santé. »

 

Puis vient un pompeux :

 

« Ce que dit la science »

 

Du gros gloubi-boulga nous retiendrons :

 

« Concernant les effets sur la santé, les toxicologues et épidémiologistes experts du sujet ne sont pas du tout aussi catégoriques que l'expert en météo agricole interrogé dans l'émission... »

 

 

(Source)

 

 

 

Pourquoi donc (c'est nous qui graissons) ?

 

« car plusieurs études suggèrent que l'exposition aux résidus de pesticides pourrait présenter un risque pour la santé. »

 

Il y a débat sur le pourcentage d'échantillons présentant des résidus. Ce débat est monté en épingle par l'auteure d'UFC-Qu Choisir... le sophisme du tout et de la partie...

 

Mais ce qu'aura dit M. Serge Zaka est juste, n'est pas démenti par la phrase sur les « ...toxicologues et épidémiologistes... », mais au contraire confirmé par les analyses de l'Autorité Européenne de Sécurité des Aliments (EFSA), fort opportunément ignorée par Mme Elsa Abdoun.

 

 

(Source)

 

 

Le cas des mycotoxines dans le bio

 

On peut être bref. L'auteure d'UFC-Que Choisir comprend :

 

« Consommer des produits bio pourrait présenter un risque pour la santé. »

 

C'est évidemment pour, prétendument, le réfuter.

 

Mais ce que dit la science, selon elle, c'est essentiellement du « on-dit » auquel nous sommes quasiment invité à croire : une chercheuse de l'INRAE, la DGCCRF et... tiens donc... l'EFSA.

 

Et c'est fort opportunément limité aux mycotoxines et, pour la chercheuse de l'INRAE aux produits issus de plantes annuelles. En réalité, les problèmes sont plus divers. La patuline semble plus fréquente dans les dérivés de pommes bio, notamment les jus et les cidres. Et il y a, peut-être de plus en plus, les contaminations des produits bio par des alcaloïdes tropaniques – par le datura qui fait régulièrement parler de lui dans les médias...

 

La DGCCRF communique à moitié sur ses analyses et ne précise pas la répartition entre bio et conventionnel des échantillons analysés. Selon ce document, on a trouvé 3 échantillons bio sur 16 au total non conformes. Sur les 368 échantillons analysés, y avait-il 69 bio, ce qui aurait produit une égalité face au risque ? On peut en douter.

 

Nous ajouterons que les denrées alimentaires étant surveillées, ce qu'on détecte dans les analyses d'échantillons de produits alimentaires, c'est ce qui a traversé les mailles du filet.

 

 

Le cas des produits laitiers

 

Les produits laitiers sont-ils des pourvoyeurs d'oméga 3 ? Voici comment l'objection – fort capillotractée – est amenée :

 

« Mac Lesggy note que l'on consomme de moins en moins de lait, puis fait remarquer que ce lait contient des oméga 3 "très importants pour la santé", en particulier le lait de pâturages et de montagne. Or, justement, "90 % des Français manquent d'oméga 3". L'émission rappelle ensuite que ces oméga 3 se retrouvent aussi dans la crème, le beurre et les fromages.

 

Ce que l'on comprend

 

Manger plus de produits laitiers serait une bonne solution pour augmenter les apports des Français en oméga 3, surtout si le lait provient de vaches qui ont mangé de l'herbe. »

 

Si les divers éléments des affirmations s'enchaînent chronologiquement, nous n'avons pas le souvenir d'une intention d'en faire une démonstration de l'intérêt de manger plus de produits laitiers.

 

Quoi qu'il en soit, l'auteure s'empresse de démolir l'homme de paille qui serait, au mieux, un détail de l'émission. Et là, on peut rire. Message principal, noyé dans des considérations annexes :

 

« De toute façon, les produits laitiers sont, quel que soit leur mode de production, de très faibles contributeurs aux apports en oméga 3 (à savoir les acides gras ALA, EPA et DHA). […] Augmenter sa consommation de produits laitiers en privilégiant le lait de vaches ayant pâturé n'aurait donc qu'une influence marginale sur les apports en ces bons acides gras. »

 

Mais c'est introduit par :

 

« Passons sur le fait qu'il est scientifiquement démontré que le lait bio est plus riche en oméga 3 (ce que l'émission ne mentionne pas). »

 

Voilà le blasphème : Mac Lesggy n'a pas assez louangé le bio... dont la supériorité serait avérée. Mais, quand on fait une recherche, on obtient en priorité des articles scientifiques d'auteurs affligés d'énormes conflits d'intérêt comme Charles Benbrook et Carlo Leifert (voir par exemple ici, ici et ici), qui rapportent des résultats prédéfinis.

 

En réalité, les différences ne sont pas dues au mode de conduite du troupeau – conventionnel ou bio – mais à l'alimentation... Et c'est précisément ce que Mac Lesggy a montré dans son émission.

 

 

Une réponse en bref (source)

 

 

Et voici l'ad hominem...

 

L'ad hominem est aussi de la partie. M. Serge Zaka est présenté comme « spécialiste de météo agricole » – ce qu'il est assurément, mais il est aussi ingénieur agronome –, puis, pour bien enfoncer le clou, comme « expert en météo agricole »... et une deuxième fois comme « expert en météo agricole ».

 

Une sorte de comique de répétition, si ce n'était indigent.

 

 

...et les incontournables « conflits d'intérêts »

 

Et voici l'encadré final censé tuer :

 

« La faute aux conflits d'intérêts ?

 

Parmi les annonceurs ayant payé pour voir leurs produits vantés durant les coupures publicitaires de cette soirée spéciale, on pouvait compter McDonalds, Charal, ou encore "les viandes de bœuf Label Rouge". Parmi les clients de la société qui a produit l'émission, on peut citer notamment Casino, Picard, Interbev (l'Association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes) ou encore Coca-Cola. Enfin, parmi les clients de Mac Lesggy, qui propose ses services d'animateur pour des événements privés, se trouve l'Aemic, qui se présente comme le réseau des professionnels des industries céréalières. Des liens qui ne facilitent probablement pas la critique vis-à-vis des intérêts agro-industriels. »

 

 

(Source)

 

 

Ce procédé peu glorieux est peut-être indispensable pour la défense du « bio » – qui n'a nullement été mis en cause par e =m6 » ; il n'est certainement pas à la hauteur de la mission que s'est donné UFC-Que Choisir : la défense des intérêts des consommateurs, de tous les consommateurs.

 

 

(Source du premier)

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H
Aux Etats Unis, je ne sais pas, mais en France, élevage laitier bio ne rime pas forcément avec bêtes à l'herbage. En fait, c'est compliqué car il y a une forêt de labels bio, mais il me semble qu'aucun des labels bio courants en France ne soit très clair sur le pâturage. Il est en général usé de formules vagues telles "les bêtes doivent être en pâture autant que possible", ou les "bêtes doivent avoir accès à une pâture les semestres d'été, ou à un parcours de détente". Par ailleurs, pour que des élevages de bétail bio soient en mesure de vendre du fumier bio et parfois en quantité impressionnante, il faut que les bêtes passent le plus de temps possible en stabulation. Ce qui semble réglementé, c'est le fait que les pâturages et toute la nourriture apportée doivent être cultivés bio. De même la quantité d'herbage consommé doit être environ 60% de la ration, mais cet herbage peut être en frais, en foin, et même en ensilage, donc il peut très bien être fourni en stabulation. Ensuite les éleveurs bio ne sont pas fous, il reste 40% d'apport alimentaire autre qu'en herbage pourvu que ce soit bio !<br /> Pourquoi je me suis intéressée à l'élevage laitier bio, parce que j'ai cru à une époque pouvoir y trouver du lait frais ayant bon goût, je suis en effet une dégustatrice de lait cru (avec toutes les précautions possibles). Et malheureusement, je rarement trouvé un bon lait chez des éleveurs bio. Comme les éleveurs conventionnels, la plupart des éleveurs bio utilisent largement l'ensilage, qui est effectivement très nutritif et dope la production laitière, mais donne un goût infect de pourri au lait cru. Il lui faut un traitement industriel pour lui donner un goût neutre, ou selon moi, une absence de goût. A noter qu'un pâturage de mauvaise qualité influe également négativement sur le goût du lait cru. Et tout cela indépendamment des races de vaches, ce qui est encore une autre question.
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C
A propos de pesticides qui peut me dire pourquoi il n'y a aucune information dans les médias sur les retraits en série de produits contenant de l'oxyde d’éthylène, après les gaines de sésame, c'est le curry, le curcuma et les thés, même bios. A quand une enquête dans envoyé spécial?
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A
Un Leclerc Express du Centre-Alsace<br /> https://pbs.twimg.com/media/ErTKBGfXcAA3u9u?format=jpg&name=4096x4096
J
c'est bien pire que juste du sésame il y a quelques jours j'ai regardé les rappels produits sur l'application Leclerc une trentaine de produits 80 % du bio rappeler pour des problèmes sanitaires
M
Il y a eu aussi un éreintement du même tonneau par Télérama dans un édito intitulé, je cite de mémoire "M6 étale sa science"
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