Ligue des Droits de l'Homme et cellule Déméter : vous êtes sérieux, là ?
Le 14 février 2020, la Ligue des Droits de l'Homme a publié un communiqu, « Des défenseurs de l’environnement sous surveillance » contestant la cellule Déméter mise en place par le gouvernement.
La communication gouvernementale n'a certes pas été au top. Il était fort maladroit de mettre dans le même « paquet »
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« des actes crapuleux, qu’il s’agisse d’une délinquance de proximité et d’opportunité ou bien d’une criminalité organisée voire internationale » et
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« des actions de nature idéologique, qu’il s’agisse de simples actions symboliques de dénigrement ou d’actions dures ayant des répercussions matérielles ou physiques ». Et pour les « simples actions symboliques »...
Rappelons que la cellule Déméter a pour objectif :
« [d']apporter une réponse globale et coordonnée à l’ensemble des problématiques qui touchent le monde agricole en menant collégialement les actions dans les domaines :
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de la prévention et de l’accompagnement des professionnels du milieu agricole par des actions de sensibilisation et de conseils destinées à prévenir la commission d’actes délictueux ;
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de la recherche et de l’analyse du renseignement en vue de réaliser une cartographie évolutive de la menace et détecter l’émergence de nouveaux phénomènes et/ou groupuscules ;
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du traitement judiciaire des atteintes par une exploitation centralisée du renseignement judiciaire, un partage ciblé de l’information et une coordination des investigations le nécessitant ;
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de la communication, en valorisant toutes les actions menées dans ces différents domaines par la Gendarmerie et par des actions ciblées destinées à rassurer le monde agricole. »
Nul doute que personne – ou presque – ne contesterait la mise en place d'un mécanisme similaire pour la protection des personnes et des biens en milieu tant rural qu'urbain.
(Source)
Mais pour la Ligue des Droits de l'Homme, des « défenseurs de l'environnement » seraient « sous surveillance »... Ne poussez-vous pas, LDH, le bouchon un peu loin ?
Ce qui inquiète aussi, c'est la rhétorique hors-sol. Ainsi,
« La lutte contre "l’agribashing" [accrédite] la thèse sans fondement qu’on assisterait en France à une entreprise concertée de dénigrement du monde agricole. »
C'est (globalement) exact grâce à « concertée », mais ce mot introduit un homme de paille.
La représentativité de la FNSEA et des JA est aussi contestée et, au-delà, le principe même des élections démocratiques :
« La réduction du monde agricole à deux syndicats patronaux, qui, même majoritaires professionnellement, ne représentent nullement la totalité des syndicats agricoles, ni celle des paysans dans leur ensemble. »
N'auriez-vous pas lu que la Coordination Rurale n'a pas souhaité se joindre au dispositif – dont bénéficient aussi ses membres – et que la Confédération Paysanne – dont les membres bénéficient aussi du dispositif – conteste vivement la chose, se livrant elle-même au dénigrement de l'agriculture qui nous nourrit ?
C'est du reste assez plaisant : la représentativité des syndicats majoritaires – qui sont majoritaires parce que les agriculteurs votent majoritairement pour eux – est contestée, alors que, du côté où penche la LDH et même au-delà, des entités ultra-minoritaires s'auto-proclament ou sont élevées au rang de « représentants de la société civile »...
Et, au fait, qu'est que « deux syndicats patronaux » ? Vous fallait-il vraiment vous abaisser à l'insulte de cour de récréation ?
En citant la déclaration grandiloquente du ministère sur les effets attendus du dispositif, plutôt que le détail des actions envisagées, la LDH a aussi pu faire une comparaison avec la situation épouvantable (ironie) qui règne pour le nucléaire :
« Cette présentation des plus floues pourrait laisser interrogatif si on ne voyait à l’œuvre le schéma répressif qui a fait ses preuves par exemple dans la filière nucléaire : paralyser la mobilisation politique et la volonté d’informer en les mêlant le plus souvent à des infractions mineures, dans le cadre "d’associations de malfaiteurs" attrape-tout. »
La LDH a toutefois juste quand elle identifie une cible :
« En l’occurrence, pourraient être visées des associations telles que L214 qui ont permis de révéler des pratiques choquantes dans certains abattoirs. »
Cependant, elle est bien naïve : ces associations, ce sont aussi ces entités qui s'introduisent clandestinement et nuitamment dans les élevages et lancent à coup d'images gore de graves accusations qui se révèlent souvent, par la suite, dénuées de fondement. Il s'agit là, sans nul doute, avec d'autres actes de délinquance, d'« actions citoyennes » selon le discours de la LDH.
D''actions sur lesquelles la cellule Déméter aurait pour ambition de « moissonner les renseignements [...], en faisant des agriculteurs les supplétifs de la police [...] ».
Cette référence nauséabonde aux pages sombres de notre histoire ne vous grandit pas, LDH.
Du reste, vous n'y avez rien compris : ici, les prétendus « supplétifs », ce sont les victimes.
Mais passons à une conclusion qui résume à elle seule la nature gesticulatoire de ce tigre de papier :
«[...] la Ligue des droits de l’Homme (LDH) émet des doutes sur la légalité de la convention conclue entre le ministère de l’Intérieur et la FNSEA et se réserve la possibilité de se saisir de toute voie de droit [...] »
Allez-y ! Seuls ou, de préférence, « avec d’autres organisations intéressées » car on saura alors avec qui vous frayez. Notre certitude sur la légalité de la démarche sera alors confortée par une décision de justice.