Sars-CoV-2 et particules fines : une mise au point en provenance du CNRS
Glané sur la toile 544
(Source)
Nous avons évoqué une « étude scientifique » dans deux billets : « Covid-19 et les "coquelicots" : crétinerie ou faux-culerie ? » et « Covid-19, particules fines, agriculture... et manipulation ».
En fait d'étude, « Evaluation of the potential relationship between Particulate Matter (PM) pollution and COVID-19 infection spread in Italy » (évaluation de la relation potentielle entre la pollution par les particules fines (PM) et la propagation de l'infection par le COVID-19 en Italie) est certes rédigé par des gens se prévalant d'universités et sous la forme d'un article scientifique, mais c'est un « document de position » de la Société Italienne de Médecine Environnementale.
Cum hoc, propter hoc ? Le graphique ci-dessous, représentant la corrélation (selon son intitulé) entre le nombre d'excès de particules fines par station de mesure et le nombre de personnes infectées (sur une échelle logarithmique) nous paraît trop beau...
La conclusion des auteurs est du reste prudente :
« En conclusion, la propagation rapide de l'infection au COVID-19 observée dans certaines régions du nord de l'Italie est supposée être liée à la pollution par les PM10 due à des particules en suspension dans l'air pouvant servir de vecteur d'agents pathogènes. Comme déjà souligné dans des études précédentes, il est recommandé de prendre en compte la contribution des PM10 et de sensibiliser les décideurs politiques à la nécessité de prendre des mesures directes pour lutter contre la pollution. »
Mais il n'en fallait pas plus pour que les médias s'emparent du sujet – et que le militantisme anti-pesticides* (*de synthèse) se déchaîne : les particules fines, dont une partie a une origine agricole liée notamment à des engrais azotés et aux épandages de lisier et autres matières organiques, propagent le coronavirus...
Foutaise !
C'est ce qu'explique de manière polie un article signé par M. Philippe Testard-Vaillant dans le Journal du CNRS du 26 mai 2020 sous un titre neutre, « Ce que l'on sait (ou non) de la circulation du virus dans l'air ».
En chapô :
« Mi-mars, une étude italienne affirmant que les particules de pollution pourraient propager le SARS-CoV-2 a semé le trouble. Le physicien et chimiste Jean-François Doussin nous explique pourquoi cette thèse ne tient pas et nous livre un état des lieux des connaissances sur la propagation du virus dans l’air. »
C'est remarquable de limpidité et de pédagogie.
Voici par exemple ce que dit M. Jean-François Doussin à propos de la corrélation évoquée ci-dessus :
« Pourquoi les affirmations des chercheurs italiens ont-elles été accueillies avec le plus grand scepticisme par la communauté savante ?
J.-F. D : Pour plusieurs raisons. D’abord, la corrélation qu’ils établissent entre les niveaux de pollution aux particules fines et les occurrences de contamination, autrement dit entre les pics de pollution et les pics d’infection, reposent sur des séries de données (relatives au nombre de cas d’infection et à la pollution particulaire), un intervalle de temps (du 10 au 29 février), une zone géographique et des variables météorologiques beaucoup trop limités pour espérer parvenir à des conclusions scientifiques solides.
Et il embraye sur :
« Par ailleurs, cette étude fait fi d’éléments solidement établis de la physique des particules fines. [...] »
On peut interpréter « fait fi » comme étant plus qu'un reproche.
Bien évidemment, les médias et les réseaux sociaux ne s'empareront pas du sujet. Admettre que l'on a induit les lecteurs, etc. et les militants en erreur, vous n'y pensez pas... Le principe « une information erronée est un objet de publication, un démenti est un nouvel objet de publication » ne trouve pas grâce ici.
Mais cela nous amène aussi à nous interroger – et ce, d'une manière plus générale – sur le civisme dans nos institutions d'enseignement supérieur et de recherche. Il aura fallu près de deux mois pour que paraissent ce démenti solidement étayé. Et dans le Journal du CNRS dont l'audience est à notre sens fort limitée.
Moyennant quoi la désinformation peut continuer à se propager sans entraves.