Quand Paris Match fait son ode à la biodynamie...
Nous ne serons que partiellement d'accord avec Mme Géraldine Woessner sur son évaluation de la « puissance d'un lobby », à propos de la bouse produite par Paris Match sous le titre : « La biodynamie : une ode à la vie ».
« [C]es titres dans la presse grand public » sont le fruit d'une politique éditoriale qui vend du rêve dans les rubriques gastronomiques ainsi que de la fascination des pisseurs de copies et remplisseurs d'espace pour l'excellence (réelle ou alléguée) et l'excentricité. Et probablement aussi de copinages et autres liens d'intérêts : mieux vaut dire du bien du taulier d'une maison de prestige après s'être tapé la cloche ou tapissé le palais chez lui...
Quelque grand nom de la viticulture – ou du capitalisme qui s'est payé un domaine viticole – produit-il des vins de grande réputation en biodynamie ? Vive la biodynamie !
Et tant pis pour la démarche rationnelle !
Tout, ou presque, est faux dans cet articulet de Paris Match.
Le titre... la viticulture ne serait-elle pas une « ode à la vie » quel que soit son mode de production ? Et l'articulet est définitivement une ode à la charlatanerie.
La légende de la photo : « intensifier la vie organique de la vigne et relier celle-ci à la roche-mère (par les racines) et à la lumière (par les feuilles) » ne serait-il pas le principe de toutes les formes d'agriculture ? Enfin, pour le lien à la roche-mère, cela dépend de la profondeur du sol et du système racinaire de la plante cultivée.
« ...les terres se redessinent grâce aux vignerons... » ? Selon l'article – et il n'y a pas de raison d'en douter – ils sont quelque 560 vignerons à se réclamer de la biodynamie. Big deal...
En biodynamie, les vins seraient plus durables. Mouais ! « ...élaborés dans le respect de la nature » ? Ah, l'ode à la Nature...
Cela devient plus raide ensuite : l'homéopathie aurait permis de guérir une cécité faisant suite – selon ses dires – à une intoxication par un insecticide.
Réalisé avec le soutien financier du FEADER et de la Région Alsace...
Rudolf Steiner, le baratineur cinglé père de l'anthroposophie et de la biodynamie serait un « scientifique »...
Il aurait « dénoncé l’épuisement des sols et la destruction du milieu naturel à cause de l’agriculture intensive utilisant les stocks d’armes chimiques de la Première Guerre mondiale ». Lisez bien ! Rudolf Steiner, auteur d'une série de huit conférences connues sous le nom de « Cours aux agriculteurs » en juin 1924 et mort en 1925, aurait « dénoncé […] l'agriculture intensive [...] »... Et les armes chimiques comme l'ypérite (gaz moutarde) seraient devenus des intrants agricoles...
N'écoutant que son interlocuteur – et pas son bon sens – l'auteur gobe l'affirmation que « la jeune génération a pris acte des échecs agronomiques de ses parents ». Quelque 50.000 viticulteurs – ou tout au moins ceux qui ne sont pas de la jeune génération – se seraient à ce point fourvoyés ?
La pression sociétale serait devenue « immense » – enfin il y a des gens qui se laissent séduire par le label biodynamie –, entraînant 40 % de conversions en plus. Mais ces 40 %, c'est par rapport à quel nombre ?
Cela se termine en apothéose :
« [...] son système [de Rudolf Steiner] a permis à nos vignerons de renouer un lien personnel avec leur terroir et de retrouver le bon sens de leurs ancêtres paysans, qui sentaient et savaient, depuis des milliers d’années, l’impact des cycles lunaires sur les plantes et l’importance vitale du repos pour les terres, du compost organique, des haies et des murets. [...] »
Le glas sonne pour la rationalité...
Sur Paris Match et du même auteur, c'est au moins pour la troisième fois (voir ici et ici).
(Source)